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10 juin 2008, des travailleurs avec ou sans papiers dans la rue

Publie le mercredi 11 juin 2008 par Open-Publishing
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10 juin 2008 : Public, privé, sans papier : le capital sans frontière serre la vis partout !

Les travailleurs des Finances, celles et ceux de l’enseignement et celles et ceux qui sont sans-papiers, et d’autres encore ont manifesté hier 10 juin 2008 pour la défense et l’amélioration du statut de la fonction publique et des services publics, pour les conditions de travail et de vie s’agissant des sans papiers. A défaut d’unité dans les mobilisations - ce qui n’est pas une fatalité - continuons de montrer l’intérêt commun à agir .

La situation en France est marqué par la montée en puissance de luttes diverses qui ont pour point commun les attaques du MEDEF et du gouvernement contre les salariés, ceux du public, du privé mais aussi des travailleurs sans papiers maintenus dans cette situation afin de constituer un sous prolétariat pleinement mobilisable dans les secteurs dit "sous tension" . Dans ces attaques il y a des éléments immédiatement communs – la baisse des salaires combinée à l’intensification du travail par exemple – et d’autres qui prennent des formes spécifiques aux statuts considérés. De ce fait, mais aussi en vertu d’autres contraintes de la mobilisation collective, les travailleurs réagissent en ordre dispersé. Dés lors il importe de mettre en avant tout l’arc des secteurs en action y compris donc les sans papiers".

Christian DELARUE

syndicaliste CGT Finances et membre de la direction du MRAP et d’ATTAC France

Sur afrik.com :

Immigration clandestine : l’Europe serre la vis

Les associations de défense des droits de l’homme se mobilisent contre la " Directive de la Honte "
 http://www.afrik.com/article14477.html

Les ministres européens ont rendu jeudi un projet de loi harmonisant les dispositions des pays membres de l’Union Européenne sur la politique d’immigration clandestine. Faisant converger leurs politiques nationales, ils ont rendu un texte commun portant sur les règles d’exclusion des sans-papiers à appliquer au sein de l’Union, le " Projet de Directive Retour ". Ce document tend à accroitre la répression à l’endroit des clandestins. Il est vivement critiqué par des associations de défense des droits de l’homme.

Mesures d’ " éloignement ", c’est l’euphémisme choisi par les 27
ministres de l’Intérieur Européens pour qualifier les dispositions
qu’ils préconisent contre l’immigration clandestine. Après trois années
de débat http://www.afrik.com/article14354.html, ils sont parvenus jeudi à un accord au cours d’une réunion à Luxembourg (Luxembourg). Ce projet de loi reprend les grandes lignes du rapport Weber (du nom du rapporteur allemand, auteur d’une étude préliminaire sur la question de l’Immigration pour le Parlement Européen). Un durcissement manifeste de la politique jusqu’ici appliquée en Europe.

Cette nouvelle législation prévoit cinq points principaux. Un choix
contraint entre régularisation et expulsion, sans alternative possible.
Les départs devront être effectués sur la base du volontarisme, mais en cas de refus, le retour sera forcé. Une durée de détention (utilisée en ultime recours) de 6 mois maximum, pouvant être étendue à 18 mois en cas de complication dans la procédure d’expulsion. Une assistance judiciaire gratuite à disposition des personnes expulsables. Et enfin, une période de bannissement du territoire européen d’une période de 5 ans en cas de résistance.

Pour Solène Guérinot, chargée de lobbying à la Cimade (Comité
Inter-Mouvements Auprès Des Evacués), " il s’agit d’une véritable "
double-peine " qui allie à l’expulsion l’interdiction de revenir, ne
tient pas compte des changements qui peuvent survenir dans le pays
d’origine et qui pourraient justifier une demande d’asile de l’expulsé
plus tard. C’est une violation de la Convention de Genève ". Sur la
question de la rétention dans des centres de détention pendant une
période de 6 mois minimum, les associations crient au scandale : Mouloud Aounit, le président du MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’Amitié entre les Peuples) souligne qu’il s’agit " d’emprisonnement arbitraire sans jugement. L’immigré, dont les droits individuels sont ici bafoués, n’est plus un sujet de droit. Il devient un objet jetable.

Sans compter les problèmes que cela pose pour les femmes enceintes, les personnes malades ou les enfants ". Solène Guérinot s’insurge : " L’obligation de fournir un titre de séjour aux malades n’est même pas évoquée dans ce projet, alors qu’elle figurait dans le rapport préliminaire de Weber. Cette mesure a tout simplement sauté. Quant aux mineurs isolés, ils pourront désormais être enfermés dans les centres au même titre que ceux qui sont accompagnés. C’est un non-respect des droits de l’enfance ". Pour les associations de défense des Droits de l’Homme, il s’agit là d’un tournant vers le tout-répressif. Selon elles, l’objectif non-avoué est de dissuader les nouvelles arrivées. Dans le milieu associatif, le projet de loi a été qualifié de " Directive de la Honte ".

D’après elles, il est purement et simplement une atteinte flagrante aux droits et aux libertés de l’individu. " Il y a incontestablement une
criminalisation de l’immigration ", clame Mouloud Aounit. " Ce projet
met en place une xénophobie européenne, il participe au renforcement d’une Europe-forteresse. Ce qui est inquiétant, c’est de voir qu’on ne tire pas les leçons de ce qu’il se passe dans les pays-mouroirs : les émeutes de la faim devraient activer la solidarité des pays européens.

C’est toute la politique d’immigration qui est à revoir, car
l’enfermement ne règlera pas le problème. "

En attente du verdict du Parlement

Actuellement, le nombre de clandestins résidant sur le territoire de
l’Union Européenne serait estimé à 12 millions. En 2000, un rapport de
l’ONU prévoyait pour le continent européen un " besoin " en immigrés
chiffré à 159 millions d’ici à 2025. Cet accueil de populations
étrangères serait indispensable pour pallier la baisse de la natalité et
garantir l’activité économique. Dans son rapport pour une relance de la croissance en France, Jacques Attali allait dans le même sens. Pourtant, l’un des objectifs prioritaire du chef d’Etat français lors de la
Présidence de l’UE (à partir du 1er juillet 2008) est bien la création
d’un " Pacte sur l’Immigration ". Il défend toujours son cheval de
bataille favori, une immigration choisie et non subie.

Ce sera au parlement Européen de trancher, du 16 au 19 juin en séance plénière à Strasbourg (France). Ce vote en première lecture sera pour lui une sorte de baptême http://www.mediapart.fr/club/blog/v... puisque que cet organe au rôle jusqu’ici consultatif est désormais
co-décisionnaire des lois européennes avec le Conseil des Ministres.

Si le Président du Conseil des Ministres, Dragutin Mate semble confiant - " Je présuppose que le Parlement européen votera favorablement " a-t-il déclaré-, les députés socialistes, communistes et écologistes y sont opposés. Ils pourraient proposer des amendements, qui retarderaient le vote définitif.

Mobilisation citoyenne

De leur côté, les associations ne croient pas vraiment à une opposition du Parlement et, même si elles l’ont appelé à voter contre, elles comptent davantage, comme Mouloud Aounit, sur un " sursaut de conscience". Dans ce but, un Collectif regroupant 12 associations a lancé une campagne, " Non à la directive de la honte "
(http://www.directivedelahonte.org).

Il a rédigé une pétition et organisera le samedi 14 juin une grande
manifestation à Paris. La Cimade, qui fait partie du collectif, lance de
son côté une campagne de lettres adressées aux officiels, ainsi qu’une action symbolique : un " cercle de silence " qui aura lieu le 17 juin devant le Parlement à Strasbourg. Des actions seront programmées partout en Europe. Pour Mouloud Aounit, " Rien ne peut se substituer à la mobilisation citoyenne, c’est pourquoi nous continuerons, à notre échelle, à agir, en accueillant et en protégeant ceux que visent cette loi. "

Lire aussi :
L’Europe harmonise les conditions d’expulsion des sans-papiers
 http://www.afrik.com/article14354.html

vendredi 6 juin 2008,
par Lauranne Provenzano
http://www.afrik.com/reaction14477.html

Messages

  • les sans papiers du CSP59 et les soutiens manifesteront de Lille au centre de rétention de Lesquin (un peu plus de 10 km à pied, mais ambiance militante, festive, unitaire assurée)

    départ : 14 h place de la République, parvis des "droits de l’homme", face à la préfecture du Nord

    LE SAMEDI 14 JUIN A 14H : MARCHE REGIONALE de la PLACE de la REPUBLIQUE AU CENTRE DE RETENTION de LESQUIN

    CONTRE L’EUROPE PRISON POUR ETRANGERS

    Le projet de directive qui sera soumis le 18 juin, jour historique de l’appel du Général De Gaulle contre la collaboration pétainiste et l’occupation Nazie en 1940, prévoit l’emprisonnement pendant 18 mois d’un étranger pour simple présence sur le territoire d’un pays de l’UE.

    L’Europe forteresse qui a déjà tué à Ceuta et Melilla prévoit la prison et l’expulsion des mineurs étrangers, des femmes enceintes, des personnes âgées, des victimes de torture, des persécutés qui demandent asile.

    L’Europe prison barricadée prévoit aussi l’interdiction du territoire de l’UE pendant cinq ans pour les expulsés et cette expulsion pourra se faire dans n’importe quel pays que l’étranger ne connaît pas, notamment le pays de transit.

    L’UCIJ et le Resf appellent à manifester contre cette directive de la honte qui transforme l’UE en une union des pays anti-démocratiques qui bafouent les droits humains dont les valeurs ont été proclamées en Europe il y a plus de 2 siècles.

    La CNSP appelle tous les sans papiers, tous les collectifs de lutte des sans papiers à s’associer à cette protestation pour le vivre ensemble dans l’égalité entre tous les humains et tous les peuples.

    • FONCTIONNAIRES, SANS PAPIERS, FIN DU SOLIDARISME

      D’une certaine manière revendiquer des papiers c’est aussi lutter contre la désaffiliation des fonctionnaires. Une pareille assertion présuppose un certain regard sur le passé . Mais au-delà ce qui est en cause c’est le modèle solidariste ou néosolidariste. Si l’hypothèse du "capitalisme pur" de Michel HUSSON se confirme alors la société salariale n’aura vécue que quelques dizaines d’années.

       La longue casse des statuts et codes du travail

      La tendance historique des vingt dernières années est à ramener le statut des fonctionnaires (de l’Etat) à la copie d’un bon code du travail. Lequel bon code du travail n’a jamais existé puisqu’il serait un statut des fonctionnaires à la meilleure période de ses garantis. Qu’il n’y ait jamais eu de bons codes du travail n’empêche pas de voir la destruction progressive de ce code. La tendance du capital est de faire de la force de travail une pure marchandise. Cela n’est pas possible, même du point de vue patronal.Mais la tendance lourde est au rapprochement avec les conditions de travail des sans-papiers.

       De la société salariale à la désaffiliation généralisée.

      Contre la division rigide entre inclus et exclus - souvent utilisée à des fins idéologiques pour signifier aux fonctionnaires leur "privilèges" de travailleurs sous statut garanti par le droit - Robert Castel (1) a mis en avant une vision plus dynamique : la désaffiliation. A la place du regard fixe - image de la photographie- il a favorisé une pensée en terme de processus . Le processus intégrateur a largement laissé place à la désaffiliation . R Castel a repéré la formation du salariat stabilisé et intégrateur dans les années 60 . Ce modèle s’est constitué contre le salariat précaire grâce au plein-emploi et aux droits sociaux garantis aux travailleurs salariés et à leurs familles . La crise des années 70 a renversé la tendance qui va vers la désafiliation sous forme de précarisation ou de chômage qui génère à nouveau des surnuméraires. Avec le néolibéralisme - comme forme du nouveau capitalisme à dominante d’accumulation financière - les sans papiers tendent à représenter chez certains patrons le modèle du salariat désiré : corvéable à merci sans code du travail ni inspecteur du travail.

       La République sociale et le solidarisme comme période révolue.

      Dans la ligne de Durkheim les républicains défendirent le statut stable et garanti comme symbole de la solidarité, c’est-à-dire du lien qui assure la complémentarité et l’interdépendance des composantes d’une société en dépit de la complexité croissante de son organisation. La solidarité sous le capitalisme se nomme solidarisme et non socialisme. Mais le PS du XXème siècle est un parti solidariste et non pas socialiste. Depuis qu’il a participé à la dénaturation et à l’affaiblissement de la sécurité sociale on ne saurait le qualifier de néosolidariste. Il suffit de comparer avec ce que dit Léon Bourgeois : « L’organisation de l’assurance solidaire de tous les citoyens contre l’ensemble des risques de la vie commune – maladies, accidents, chômages involontaires, vieillesse – apparaît au début du XXe siècle comme la condition nécessaire du développement pacifique de toute société, comme l’objet nécessaire du devoir social. » Cette citation, qui date de 1904, couvre tout le programme de la Sécurité sociale (créée en 1945 !).

       Pur capitalisme ou socialisme ?

      La République sociale et le solidarisme est-elle une période définitivement révolue ? Peut-il y avoir un altercapitalisme social et solidaire ? Ne s’agit-il pas d’une situation exceptionnelle incompatible avec le capitalisme ? Le pur capitalisme, (2) nouvel ouvrage de Michel Husson, est ordonné autour d’une thèse : le capitalisme contemporain tend vers un fonctionnement pur, en se débarrassant progressivement de toutes les « rigidités » qui pouvaient le réguler. Le capitalisme néolibéral jette donc par-dessus bord les régulations indispensables à sa survie dans la phase antérieure ou bien qui lui avaient été imposées par les luttes sociales.

      Une tendance essentielle marque la période : la baisse de la part des salaires dans la valeur ajoutée (c’est-à-dire la hausse du taux d’exploitation), ceci dans un contexte de mondialisation où le capital met en concurrence les forces de travail au niveau mondial. Par ailleurs, s’approfondissent le déséquilibre des Etats-Unis et leur besoin d’un afflux soutenu de capitaux extérieurs, notamment asiatiques (Chine, Japon). Le paradoxe de cette situation est que plus le capitalisme réussit à remodeler le monde à sa convenance, plus ses contradictions se durcissent.

      Christian D

      (1) R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Fayard, Paris, 1995.

      (2) Un pur capitalisme publié par les Editions Page deux (Lausanne, Suisse)
      commentaire d’H Wilno

      http://www.alencontre.org/livres/LivreHussonWilno.html