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CHIK Y ES TU ?

Publie le vendredi 21 juillet 2006 par Open-Publishing
2 commentaires

ÉPIDÉMIE DE CHIKUNGUNYA

Langues de bois et incohérence

Jeudi à 17 heures 30, en préfecture de Saint-Denis, Didier Houssin, Directeur Général de la Santé, en déplacement dans notre île, a rencontré la presse pour faire un point sur l’épidémie de chikungunya ou plus exactement une synthèse de la journée consacrée, avec les représentant de la DRASS, de l’ARH, du CIR et de la DASS de Mayotte à un "retour d’expérience" (Retex).

LE Professeur Didier Houssin accompagné de la nouvelle directrice de la DRASS et du secrétaire général de la Préfecture, nous a tout d’abord exposé les avancées dans la compréhension de l’épidémie qui a frappé notre département. Le but a été tout d’abord de faire des comparaisons avec d’autres épidémies qui ont sévi sur la planète, et d’après les autorités, le chikungunya n’a pas causé autant de morts que des maladies telles que la fièvre ebola ou le paludisme, bien que 266 mille personnes aient été touchées à La Réunion.

Au chapitre de la connaissance, le Professeur nous a révélé qu’il semblerait, avec une quasi-certitude, que le virus soit issu du centre de l’Afrique. Les patients qui souffrent dans leurs chairs vont certainement être soulagés de l’apprendre ! Car s’il est une information qui parait de la plus haute importance pour les Réunionnais, ce sont les mesures que les autorités comptent prendre avant l’arrivée de l’été austral.

En ce qui concerne ce point, il faut bien avouer que si l’exposé fut long et consistant, les réponses semblent, elles, bien moins innovantes ni pertinentes qu’elles devraient l’être dans une situation où un grand risque de réactivation du virus pourrait voir le jour avec l’arrivée de notre été. Mais toujours d’après le professeur Houssin, rien ne dit que s’il y a une nouvelle épidémie, celle-ci sera aussi violente que la précédente et cela lui paraît même fort peu probable (N’oublions pas que ce même professeur Houssin nous avait assuré que le chik n’était pas mortel).

L’irresponsabilité de l’État

Ça y est le syndrome de l’hiver austral a encore frappé ! Les moyens qui vont être mis en œuvre sont dans les jours prochains de grandes campagnes d’éducation sur le nettoyage des abords des habitations réunionnaises par la population qui, soit dit en passant, est comme dans tous les grands maux qui frappent notre pays, systématiquement montrée du doigt. Les élus seront mis à contribution également et ils devront comprendre qu’il faudra mettre de l’argent sur la table pour le grand nettoyage qui s’annonce.
Ce qui paraît incroyable c’est que jamais les responsables de l’État ne remettent en cause leur responsabilité quant au retard pris pour la mise en alerte sanitaire de notre département.
Pour la suite immédiate, il est prévu le 27 juillet une journée d’information dans les centres aérés pour sensibiliser les marmailles ainsi qu’une campagne dans les écoles pour la rentrée scolaire. Lorsque que l’on aborde les solutions auxquelles tout bon citoyen est en droit de s’attendre, il semblerait que ces messieurs soient plus circonspects.
Pour commencer, le service de prophylaxie doit se mettre en place très vite précise Monsieur Lachaud et puis d’abord, pourquoi un service de prophylaxie ? "Appelez-le comme vous voulez", nous dit le secrétaire général de la Préfecture, il semblerait que "service de lutte anti-vectorielle" soit plus approprié. On se demande en quoi le mot "prophylaxie" dérange.
Monsieur Lachaud poursuit en nous précisant que ce service ne pourra être mis en place, tout comme un plan de lutte anti-chikungunya que lorsque que l’on aura trouvé la forme juridique pour les réaliser.

Refus d’employer les moyens adéquats dans la lutte contre le chikungunya

En ce qui concerne le Bti, là, les questions sont balayées d’un revers de manche. Distribuer ce produit aux personnes qui ont des revenus modestes, il n’en est pas question, car ce produit ne pourrait pas être employé par n’importe qui et n’importe quand (Non Sans Blague !).
Mais là où le paradoxe pourrait sembler amusant, c’est quant à la question de savoir s’il ne serait pas judicieux d’installer une unité de fabrication de Bti dans notre île, c’est le sourire qui l’emporte. "Pourquoi ?", nous dit monsieur Lachaud, "puisque le Bti est en vente libre à La Réunion, la preuve, les agriculteurs s’en servent régulièrement". Il faut bien reconnaître que pour un produit qui n’est pas à mettre entre toutes les mains, il est tout de même assez facile de s’en procurer, mais seulement si cela est payant.
À ceux qui peuvent payer le Bti, aux autres ?... Silence des autorités.
En réalité ce qui s’est passé pendant cette journée n’aura pas donné de grandes réponses aux Réunionnais. Seule une progression dans la recherche sur la maladie semble faire de grands pas.
Le réveil du moustique, avec de telles mesures, va nous paraître bien amer d’ici quelque mois si l’on ne prend pas la vraie mesure de l’épidémie qui ne manque pas de s’annoncer à nouveau. Il ne suffit pas de stigmatiser les Réunionnais en leur promettant des amendes s’ils ne font pas plus attention à leur environnement, il faut dès maintenant prévoir qu’avec l’été austral, même s’il ne faut pas le souhaiter, ce sera dur.
Alors il sera grand temps de mettre en marche un service de "prophylaxie" toujours pas finalisé. Un dicton dit : "si tu veux la paix, prépare la guerre", il ne semble pas que cela soit de toute urgence pour nos responsables. Il ne reste plus aux médias qu’à informer inlassablement comme cela a déjà été bien fait avant que la DRASS ne se réveille.

Philippe Tesseron
http://www.espaceblog.fr/teletesseron/

Langues de bois et incohérence
Article paru dans Témoignages le vendredi 21 juillet 2006

Messages

  • Bravo au Pr Houssin, car faire la comparaison entre le Chikungunya et le virus Ebola, voilà qui est fait pour nous rassurer et rassurer surtout les Réunionnais.

    Donc il n’y a pas lieu de s’inquiéter puisque le Ebola est plus mortel que le Chikungunya, et que donc nous devrons attendre que le dernier dépasse le premier en terme de souffrance, de sequelles et de morts, QUEL CYNISME !

    Esteban

    • DIDIER Houssin n’est pas n’importe qui. C’est le Directeur Général de la Santé au Ministère du même nom. Il a donc un poste de responsabilité très élevé dans les services de l’État.
      Il est également Professeur de médecine. C’est donc un expert très compétent en matière de santé publique.
      Du fait de ses compétences, sa signature et ses orientations sont essentielles dans la prise des décisions politiques au niveau du gouvernement.

      Or il s’est trompé dans l’analyse de l’épidémie de chikungunya, de son évolution et dans les mesures à prendre pour l’endiguer. Lourdement trompé.
      Il a mal évalué les risques d’extension de l’épidémie. Il a minimisé ses dangers et ses conséquences. Il n’a pas fait prendre les mesures de prévention nécessaires pour éviter la catastrophe sanitaire, économique, sociale et environnementale que l’on connaît.

      Un an après, le résultat est là. Et Didier Houssin revient sur le lieu du drame, où il n’a pas brillé par sa clairvoyance.
      Mais il n’a pas un mot de compassion ou d’excuse pour les victimes et pour leurs proches. Pas un geste de solidarité envers toutes celles et tous ceux qui ont souffert d’une manière ou d’une autre de l’épidémie. Même pas un signe d’amitié et d’écoute.
      Et puis il repart avec les mêmes certitudes et la même arrogance, alors que tout laisse à craindre une nouvelle flambée de l’épidémie.
      Après avoir perdu la tête, Didier Houssin a-t-il perdu son cœur ?

      L. B.