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CUBA : TEMOIGNAGE

par Joannès

Publie le samedi 16 juin 2012 par Joannès - Open-Publishing
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COMPTE-RENDU DE VOYAGE A CUBA

CUBA, mai 2012 : Hors des sentiers battus
Visite des Provinces de l’Est de l’Ile : SANTIAGO DE CUBA, HOLGUIN, LAS TUNAS

Alors, changements à Cuba ? De nouvelles lois votées au Parlement. Cuba n’est plus seul : d’autres pays l’aident à « perforer » le blocus selon leurs possibilités. Ce blocus états-unien auquel la plupart des pays dits riches emboîtent le pas pour l’essentiel ! Ce blocus est une raison majeure pour apporter prioritairement une aide internationale à Cuba. La voie unique des échanges, du type URSS, c’est terminé. Je pense que l’élément fondamental d’une Révolution, c’est justement d’agir en fonction des nouvelles données d’évolution du monde. Par exemple, deux lois viennent d’entrer en application : sur les transactions de véhicules et sur les transactions immobilières. Les échanges sont rendus plus faciles surtout dans les changements de domicile au niveau interprovincial. Ces lois légalisent un état de fait qui existait déjà sous forme de "permutations".
D’autres lois devraient prochainement améliorer les conditions de vie de la population, en particulier sur le plan alimentaire.

A ce sujet, au hasard de mes rencontres, je fais quelques découvertes :

- du côté rural et contrairement à ce que prétend la propagande capitaliste, l’agriculture n’est pas toute collectivisée. Un exploitant familial me raconte d’ailleurs que ce fut une condition majeure du soutien de ses semblables à la Révolution. Le choix est laissé à l’agriculteur d’opter pour une exploitation individuelle ou une coopérative. Quoi qu’il en soit, il m’apparaît que l’on vit mieux en milieu rural qu’en ville, mais il en était ainsi chez nous en 1945. Pour un pays du Tiers-Monde, c’est remarquable, et il n’est pas étonnant que Cuba ait fourni des idées à d’autres, notamment sur le continent sud-américain. La qualité de nombre de demeures paysannes ne me le dément pas ;

- en ville, j’aperçois des magasins et des petits marchés gérés par l’Etat mais aussi des marchands des quatre-saisons, maraîchers ou revendeurs. Ils existent depuis longtemps mais toujours en nombre insuffisant. Des colporteurs livrent à domicile mais à des prix élevés. Dans les marchés agricoles gérés par l’Etat, les prix sont plus raisonnables et les particuliers y peuvent acheter avec leur livret alimentaire (la libreta). Les foires hebdomadaires voient les coopératives déverser leurs productions à des prix écrasés. Comme partout, des petits malins s’approvisionnent amplement à l’arrivée des convois et feront le colportage de leurs surplus ! Certains sont patentés, d’autres pas, m’assure-t-on ! J’accuse un hoquet de surprise : pas d’oranges en mai, mais un approvisionnement de mangues à volonté. Je m’interroge : comment les pays du sud de la Méditerranée peuvent-ils alimenter toute l’Europe, toute l’année ? Plusieurs récoltes ou un arrosage copieux de conservateurs ? Je ne vois pas comment Cuba pourra échapper à davantage de cultures vivrières, autrement que ce qui se passe chez nous. Le quintal de blé bien moins payé qu’autrefois à nos agriculteurs, mais compensé par des primes !Sur la réalité de la vie quotidienne cubaine les "on-dit" de la propagande anti-socialiste ne tiennent pas un instant pour l’observateur, sauf à en comparer avec la société de « gaspi » de chez nous. ! On ne meurt pas de faim à Cuba même s’il existe comme partout des disparités familiales.

Mes contacts de solidarité avec des organisations militantes de l’Ile me permettent d’échanger des points de vue avec l’encadrement cubain. Lorsqu’ils sortent de Cuba, les cadres ne disposent pas de moyens financiers pour voyager selon un standard de type « tourisme international ». Nos invités peuvent faire face avec l’aide que nous leur procurons et c’est le plus souvent pour participer avec nous à notre travail d’explications publiques sur les conditions de vie à Cuba. C’est ce que la propagande « anti » interprète comme un non-droit de voyager …. en passant sous silence le fait que, chez nous, dans notre Société idéale à deux vitesses, des millions de travailleurs vivent ce non-droit. Comme l’a dit Fidel, la plupart des Cubains qui se rendent à l’étranger le font pour sauver des vies humaines et pas pour tuer. Cela n’a pas de prix et si nous pouvions faire davantage, nous le ferions !

J’apprends de mes accompagnateurs qu’une famille cubaine scindée en deux vient de partir pour l’Espagne. Je me demande s’ils ne vont pas connaître la situation sociale explosive qui sévit là-bas. Si, me rétorque-t-on, mais eux arrivent là-bas avec un travail et un logement assurés ! Des recommandations assurées ? Motus de mes interlocuteurs ! Aux Etats-Unis la loi Elms/Burton sur le blocus prévoit ce genre de privilèges aux exilés cubains !

J’aborde enfin les relations entre Cuba et les organisations internationales de solidarité avec ce pays. Ces relations sont rendues quelque peu compliquées du fait de la loi migratoire qui s’applique à l’industrie touristique dans le pays. Dans les aéroports, nos militants subissent les mêmes contrôles que les touristes. Les porteurs de donations à des ONG cubaines se trouvent particulièrement épinglés car munis souvent de commandes de leurs partenaires cubains, syndicalistes par exemple, en médicaments ou pièces de matériel de communication. Parce qu’il y a la loi et son application intransigeante ou non ! De ce point de vue, il existe des disparités entre les services de l’Immigration cubaine des différentes Provinces. Certaines Provinces acceptent la coopération avec les camarades cubains et d’autres se contentent d’appliquer strictement la loi ! Ceux-ci confisquent les donations ou obligent à payer une taxe dépendant de la valeur du matériel. Insupportable, sans compter les délais d’attente pour les formalités ! Pour en avoir été personnellement victime, je peux en parler savamment et les délégués cubains qui m’accompagnaient n’ont rien pu faire ! J’ai dû payer l’impôt sur des donations que mes amis cubains emportèrent ! Et, tout récemment, cette mésaventure a failli arriver à un donateur de ma connaissance ; j’ai été prévenu à temps et le matériel est resté dans son placard !
Les organisations de solidarité cubaines sont habilitées à accorder aux militants étrangers qui coopèrent avec elles un visa préférentiel qui transite par l’Ambassade de Cuba et qui leur permet d’exercer leur travail dans ce pays. En fait, ce visa peut être sans effet car son porteur peut ne pas être reconnu comme chargé d’une mission par les fonctionnaires cubains de l’Immigration.

Même état d’esprit en ce qui concerne les relations humaines et fraternelles qui se créent immanquablement entre Cubains et militants étrangers de la solidarité. Un camarade cubain qui souhaite vous inviter à résider chez lui pourra y être autorisé … ou non par les services de l’Immigration suivant qu’ils considèreront ou non qu’il s’agit d’une infraction à la loi sur l’industrie touristique. Là aussi le comportement des fonctionnaires de l’Immigration pourra être différent selon la Province !

Il est grand temps que ces diverses attitudes soient revues dans le sens d’une unification. Les responsables d’organisations cubaines démocratiquement élus (tels que les syndicalistes) qui délivrent un visa de solidarité aux ressortissants étrangers le font en toute connaissance de cause et non à la légère ! Je pense que ce visa de solidarité devrait être systématiquement respecté par les autorités de l’Immigration, nous évitant ainsi des tracasseries inutiles et coûteuses ! Les élus locaux des organisations cubaines connaissent bien ces déboires et je ne me suis pas privé auprès d’eux de demander des explications et manifester parfois mon indignation !
Il est clair que ces turbulences nuisent à la « perforation » du blocus et à l’amitié entre nos deux Peuples.

Une loi migratoire serait en cours d’élaboration : puisse-t-elle remettre les pendules à l’heure dans le bon sens !!!

Messages

  • Petit enfant, j’ai appris d’un nommé Jésus qu’il fallait nous aimer les uns les autres, aimer notre prochain comme nous même... Qu’il fallait aussi chasser les marchands du temple...
    Et j’ai remarqué que seuls les Cubains agissaient ainsi et c’est pourquoi j’ai tant d’admiration pour ce Peuple et je cherche à m’en inspirer le plus possible sans jamais avoir la prétention de leur faire la leçon mais au contraire de tout apprendre de leur expérience !
    Jacques