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Iran/centrifugeuses : Faut-il de l’uranium fortement enrichi pour faire des bombes ?

Publie le jeudi 1er novembre 2007 par Open-Publishing
5 commentaires

Les centrifugeuses de l’Iran ont envahi les médias : un danger, si l’Iran enrichit l’uranium il va pouvoir faire des bombes à uranium.

C’est un raisonnement aberrant. La France, quand elle a testé sa première bombe n’avait pas d’usine d’enrichissement. Sa bombe était une bombe au plutonium. Plus tard quand l’Inde a fait péter ses bombes elle n’avait pas d’usine d’enrichissement. Quant à l’Irak lorsque Saddam Hussein à la fin des années 70 a voulu sa bombe (la « bombe républicaine » par opposition à la « bombe islamique » voulue par Ali Bhutto au Pakistan) il n’a pas cherché à développer l’enrichissement.

Il est évident scientifiquement que le plus facile pour faire des bombes nucléaires c’est de recourir au plutonium. Et pour en avoir, l’usine d’enrichissement n’est pas nécessaire, le nucléaire civil suffit comme l’a montré l’Inde. Mais il y a une autre possibilité, celle de produire le plutonium à partir de « réacteurs de recherche* ». Ils produisent des neutrons. Si on les met en présence d’uranium (voire d’uranium appauvri qu’on trouve facilement) ils le transformeront en plutonium. L’extraction sera assez facile car il n’y aura pas beaucoup de produits de fission à l’origine d’un rayonnement important. (C’était le but caché d’Osirak, vendu par la France à l’Irak).

Ce qui est curieux c’est qu’on nous abreuve avec les centrifugeuses iraniennes alors que ce n’est certainement pas la voie que les dirigeants iraniens ont choisie (à moins qu’ils ne soient complètement incompétents ce dont je doute fort). Ce qui est dangereux en Iran ce ne sont pas ces centrifugeuses mais les réacteurs de recherche fournis sans conditions et dont on ne parle guère. Bloquer les centrifugeuses en Iran ne changera rien à la menace de prolifération.

Bien sûr il est difficile aux nucléocrates qui veulent se justifier de ne pas être des vecteurs de prolifération, de condamner les réacteurs civils ou les réacteurs de recherche (la recherche scientifique c’est sacré !).

Roger Belbéoch, physiciens,
extrait de la lettre Stop Nogent n°115, octobre/novembre 2007.

*Dans le monde près de 600 réacteurs de recherche et assemblages critiques ont été construits, il en reste 255 en service dans 57 pays et environ 70 % de ces réacteurs ont plus de 25 ans d’âge. (Contrôle n°128, avril 1999)

Pour l’Iran :
- En 1967 les USA ont fourni un petit réacteur de recherche (TRR) de 5 MW près de Téhéran, pouvant produire 600 milligrammes de plutonium par an).
- En 1970 l’Allemagne a démarré un réacteur à Bushehr, arrêté au début de la « révolution islamique », remis en route avec coopération russe en 1995.
- En 2004 construction à Arak d’un réacteur de recherche (IR-40) de 40 MW thermiques qui sera achevé en 2009. (Il pourra fournir 9 kg de plutonium par an).

Les lettres d’information du Comité Stop Nogent-sur-Seine sont presque toutes disponibles sur le site : http://www.dissident-media.org/stop_nogent

http://www.dissident-media.org/infonucleaire

Messages

  • J’adore les neutrons qui produisent facilement du plutonium en présence d’uranium, même pas enrichi !
    Encore faut-il au moins une petite usine du type La Hague pour y arriver !

    Les centrifugeuses, c’est encore plus simple

    • Boujour,

      L’uranium 238 est fertile. Les atomes fertiles créent de nouvelles matières fissiles par absorption de neutrons. Un atome d’uranium 238 qui absorbe un neutron devient, par des étapes intermédiaires, un atome de plutonium 239, matière fissile.

      La transformation de l’uranium 238 en plutonium 239 a lieu normalement par exemple dans les réacteurs REP français où l’uranium 238 est le constituant très majoritaire (environ 96,5 %) du combustible...

      Mais aussi dans des couvertures en uranium naturel (99,3 % de 238) ou encore mieux en uranium appauvri (près de 100% de 238) placées près du coeur d’un petit réacteur de recherche pour genérer ce plutonium.

      Allez voir sur http://fr.wikipedia.org/wiki/Plutonium

      vous comblerez quelques lacunes...

      Cordialement,

      http://www.dissident-media.org/infonucleaire

  • Le travail d’un journaleux consiste à retransmettre toutes les conneries pondues par des chargés de com appartenant à des politiciens verreux. Pour cela pas besoin de diplôme, ni d’intelligence, juste savoir pomper sur son voisin comme à l’école.

  • mais... au dela des considerations technique parfaitement reelles soulevees par cet article

    quel droit a t’on de vouloir regenter l’acces a la technologie nucleaire militaire d’un pays...

    cela dans un monde ou la coree du nord l’inde et la pakistan possedent deja l’arme nucleaire...cela dans un monde ou israel possede cette arme sans avoir souscrit aucune des garanties que l’on reclame a l’iran...

    les iraniens serait donc par essence inaptes a posseder cette puissance voila un credo pour le moins raciste et insoutenable...

    il y a d’autres pistes...

    economique ,les occidentaux veulent vendre le combustible et ainsi avoir la main mise sur l’independance energetique iranienne...

    tactique , un pays arme ainsi et difficilement attaquable...
    l’on a pu voir combien la coree du nord depuis son essai nucleaire est moins attaquée politiquement et donc moins menacee militairement ,elle a pour ainsi dire disparue de" l’axe du mal"

    mieux les pays possedant l’arme nucleaire n’ont connu aucun conflit majeur depuis qu’il la possedent elle est donc de toute evidence un facteur de stabilité de la paix...(cela bien que je reprouve totalement le procedé semble efficace,l’homme a besoin de barrieres puissante tant sa connerie est sans limite)

    toute cette campagne anti iranienne n’est qu’une propagande de l’imperialisme americain ,et le fait que nos medias y prennent une part active est bien plus inquietant pour la liberte et la paix dans le monde que l’acces de l’iran au nucleaire militaire ou civil

    temoin le pretendu antisemitisme affiché d’almagenidad n’est qu’un artifice grossier de propagande ,en effet le discour d’ou est cité la pretendue phrase "il faut rayer israel de la carte " n’est qu’un montage de fragments de discour isolé de leurs contexte...cela dans la grande tradition de la desinformation et de la propagande ... ce qui est inquitant c’est de voir ce genre de these propagandiste relayees par de grands medias pretendument porteurs d’equite journalistique comme "le monde" et relaye ensuite par l’ensemble des medias...
    le meme traitement est egalement reserve au venezuela ...

    diantre il faut bien que les braves gens pense que les prochaine cibles de nos armes soient des monstres pour faire passer la pilule

    de toute facon si vous ne cherchez pas a avoir l’arme nucleaire il faut bien que vous cachiez des armes chimique de destruction massive ...on a pu voir que l’irak dernier enemi en date les avait fort bien caché :)

    et au vu des idees atlantiste de notre nouveau president cela ne va pas s’arranger coupez la tv brulez les journaux rien ne va plus

    • "brulez les journaux..." Non pas toujours, et même dans "Le Monde on peut trouver des articles intéressants qui expliquent pourquoi il faut arrêter la prolifération, et il n’y a la rien de raciste...

      Le Monde, (Point de vue), 3/4/06.

      Le club nucléaire doit rester fermé

      par François Heisbourg

      Actuellement, moins de dix pays possèdent l’arme nucléaire : aux cinq puissances dont le statut nucléaire est reconnu par le traité de non-prolifération (TNP), et qui sont par ailleurs membres permanents du Conseil de sécurité, s’ajoutent Israël, l’Inde et le Pakistan. La Corée du Nord a très vraisemblablement franchi le seuil nucléaire, cependant que l’Iran paraît tenté par un processus de type nord-coréen.

      La brièveté de ce tableau relève d’une sorte de miracle. En effet, une cinquantaine d’Etats disposent aujourd’hui de réacteurs de recherche ou de centrales de puissance qui leur permettraient de franchir le seuil nucléaire à plus ou moins brève échéance. Or force est de constater que le nombre d’Etats candidats à l’arme nucléaire a progressivement décru au fil des décennies.

      Des pays aussi différents que le Canada, la Suisse, l’Allemagne, l’Italie, la Suède, le Brésil, Taïwan, la Corée du Sud, l’Argentine, l’Afrique du Sud, la Libye, l’Irak, ont été tentés par l’aventure nucléaire à des moments divers et dans des circonstances aussi variées que la participation du Canada au projet Manhattan, l’éphémère traité franco-germano-italien de novembre 1957, ou le programme illégal de l’Irak d’avant la guerre du Golfe. Certains pays, ayant déjà acquis l’arme (l’Afrique du Sud) ou en étant devenus les dépositaires par inadvertance après la chute de l’URSS (Ukraine, Kazakhstan, Biélorussie), y ont même renoncé. Ainsi s’est trouvée démentie la prévision faite par le président Kennedy en mars 1962 : "Personnellement, je suis hanté par le sentiment que, dès 1970, il pourrait y avoir dix puissances nucléaires... et quinze ou vingt dès 1975."

      Trois facteurs principaux étroitement corrélés ont permis d’écarter jusqu’à présent la perspective d’un monde où rivaliseraient plusieurs dizaines de puissances nucléaires. Or ces facteurs sont aujourd’hui fragilisés, séparément et conjointement.

      D’abord, au centre du dispositif figure naturellement le traité de non-prolifération ouvert à la signature en 1968, et auquel ont souscrit depuis lors tous les Etats, à l’exception d’Israël, de l’Inde, du Pakistan et de la Corée du Nord. Le TNP est sous-tendu par le système de contrôles et d’inspections de l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AEIA). Grâce à l’extension quasi universelle du TNP, tout Etat peut partir du principe que ses rivaux ne vont pas inévitablement acquérir l’arme nucléaire. De fait, la plupart des Etats naguère engagés dans des recherches nucléaires militaires le faisaient à une époque et dans un environnement régional dont le TNP était encore absent.

      L’autorité du TNP est cependant menacée au coeur par le cas iranien. Si la sortie de la Corée du Nord du TNP en 2003 pouvait être considérée comme une aberration, l’évolution des ambitions nucléaires de l’Iran aura valeur de précédent, incontestablement. L’Iran est une vieille et grande nation située au coeur d’une région stratégiquement aussi vitale que volatile : sa sortie du système international de non-prolifération aurait toutes les chances de briser la logique de confiance et d’abstention réciproques sur laquelle est bâti le TNP. Un Iran nucléaire déclencherait entre autres une course régionale à l’égalisation par l’atome de la part des principaux Etats arabes.

      Ensuite, l’existence d’un consensus dans les conditions de la guerre froide entre les chefs de file américain et soviétique garantissait la sécurité de chacun des camps, quitte à rappeler à l’ordre ceux qui se seraient égarés par rapport au système de non-prolifération. La guerre du Golfe de 1991 et ses prolongements avaient certes imposé cette logique bilatérale à la communauté internationale puisque c’est au nom du Conseil de sécurité que fut démantelé par les inspecteurs internationaux le programme nucléaire irakien.

      Mais le système de cogestion de la sécurité de pays non nucléaires a disparu avec l’ordre bipolaire, cependant que la guerre américaine d’Irak en 2003 a détruit le consensus au sein du Conseil de sécurité. S’y est ajouté le discrédit jeté sur le renseignement comme instrument de justification d’une intervention. Avec la crise iranienne, nous assistons de la part des Européens à une tentative de re-création d’un consensus international, mais dans des conditions obérées par le désastre irakien et les objectifs divergents entre une Amérique militant pour les changements démocratiques dans le monde et une Chine et une Russie refusant un tel activisme.

      Enfin, il y avait l’accord entre les pays signataires du TNP pour marquer clairement la différence de traitement entre ceux qui sont dans le traité et les Etats se plaçant "en dehors". Certes, ce consensus était, et continue d’être empoisonné par les divergences entre les pays nucléaires (les cinq "officiels") et non nucléaires du TNP, ces derniers considérant que les puissances atomiques tardent à remplir leurs obligations en matière de désarmement nucléaire tout en étant insuffisamment généreuses en matière de transferts de technologies nucléaires civiles vers les pays signataires. Il n’en restait pas moins que les pays "hors TNP" étaient quant à eux clairement défavorisés. Depuis leur entrée dans le club nucléaire militaire, ceux-ci n’ont pas eu un accès aux technologies leur permettant de développer pleinement les applications nucléaires énergétiques. De ce fait, l’Inde, aux immenses besoins en énergie, a spécialement souffert de son sous-équipement en réacteurs électronucléaires. Lors de sa récente visite en Inde, le président George Bush a conclu un accord qui fait sortir l’Inde de son ghetto nucléaire. Certes, il y a à cette démarche des raisons géopolitiques respectables : l’Inde est une grande puissance qu’il convient de ménager, une démocratie exemplaire et un acteur incontournable de la mondialisation. Par ailleurs, si l’Inde a acquis la bombe, ses responsables se sont soigneusement abstenus de la partager avec d’autres - contrairement aux réseaux proliférants du docteur Abdul Qadeer Khan, père de la bombe atomique pakistanaise.

      Malheureusement, l’accord indo-américain pose plus de problèmes qu’il n’en résout. Ainsi, l’Inde pourra poursuivre la production de matières nucléaires sans engagement d’arrêt à un horizon donné, alors que les cinq puissances nucléaires "officielles" ont interrompu la production de matières fissiles. New Delhi refuse tout accord international d’encadrement dans ce domaine. Cela augure mal la possibilité de limiter le moment venu les programmes nucléaires pakistanais et israélien. Surtout, l’Inde bénéficiera des mêmes accès aux technologies nucléaires civiles que les Etats signataires du TNP, effaçant la distinction cruciale entre ceux qui acceptent et ceux qui refusent les disciplines. Tant mieux pour les industriels de ce secteur, où la France est leader, mais tant pis pour la logique sur laquelle est bâti le TNP.

      L’accord américano-indien confirme le peu de cas que fait l’administration Bush des quelques éléments d’ordre multilatéral encadrant le système international. Avec sa doctrine unilatérale de frappes préventives, l’exécutif américain avait déjà fourni aux Etats visés une justification commode à l’acquisition d’armes nucléaires. L’administration Bush fait dorénavant ce qu’il faut pour décourager ceux qui tentent de préserver le système international de non-prolifération. Il reste à espérer que le Congrès américain refusera de ratifier un accord qui renvoie aux règles diplomatiques et stratégiques du monde d’avant 1914 : le retour au chacun pour soi est d’autant plus chargé de menaces qu’il se déroule à l’ombre d’armes ayant une capacité de destruction illimitée. Et le risque qu’elles soient employées s’accroît avec le nombre d’États qui en disposent.

      François Heisbourg,
      conseiller spécial à la Fondation pour la recherche stratégique.