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Italie : 6.869 "trous fiscaux" découverts pour 8,9 milliards d’euros...

Publie le samedi 25 décembre 2004 par Open-Publishing


6.869 "trous fiscaux" découverts pour 8,9 milliards d’euros, correspondant à 10% des contrôles réalisés
Grands fraudeurs, taxes non payées correspondant à 10 modifications de la loi de finances

de Gemma Contin

Deux cent milliards par an, tous déchargés sur le dos des salariés, les seuls percepteurs de revenu qui ne peuvent pas se soustraire au prélèvement à la source. L’évasion fiscale frappe encore et frappe tellement qu’elle met à genoux pas une mais dix modifications de la loi de finances.

A vrai dire sur les données globales concernant l’évasion totale, l’évasion, le produit submergé, le travail au noir et les activités aux marges de la légalité pratiquées dans notre Pays il y a de très vastes zones d"ombre et même d’épaisse obscurité, non seulement parce que toute la philosophie sous-jacente à la pensée de Berlusconi est centrée sur la pratique des régularisations et des remises, si possibles définitives, mais aussi parce que depuis que le centre-droit est au gouvernement, avec Tremonti et Siniscalco au Ministère de l’Economie, les rapports qui chaque année étaient rédigés par le Secit (Service des super inspecteurs du Trésor, dilués dans l’Agence des Entrées actuelle), envoyés régulièrement aux autorités compétentes de la Via Venti Settembre (siège du Ministère des Finances, NdT), se sont perdus dans les tiroirs et n’ont plus été rendus publics depuis les temps où le titulaire des Finances était Vincenzo Visco. En effet, le dernier rapport publié a été celui de 2000.

Dès lors, sur les données officielles et globales des activités de vigilance et d’inspection mises en œuvre sur les grands fraudeurs et sur les flux disparus dans les paradis fiscaux et les sociétés off shore, sur les budgets falsifiés et les facturations inexistantes, s’est fait un silence de mort.

Aussi parce que, fait remarquer une source qui ne veut pas être citée, "avec la remise définitive on a bâillonné les forces d’inspection et la Police des Finances qui, face à une législation permissive, se sont heurtées d’un côté à la soustraction de leurs pouvoirs de sanction et de l’autre au fait que les grands fraudeurs ont fait recours à toutes les régularisations possibles, si bien que les entreprises qui ont adhéré à la remise définitive ont clos toutes les parties concernant le présent et le passé simple et composé, sans qu’il soit plus possible de mener à bien les inspections et aller jusqu’au but avec les contrôles".

Hier a donc été faite une révélation inattendue et surprenante, celle de la Police des Finances, dans laquelle le commandant, général Roberto Speciale, au cours d’une conférence de presse de fin d’année, a déclaré que "dans les 11 premiers mois de 2004 la police des finances a découvert plus de 7 500 fraudeurs fiscaux : 6 869 fraudeurs totaux (des sujets complètement inconnus par le fisc) et 715 fraudeurs partiels, en découvrant en outre 26.342 travailleurs irréguliers, 17.437 complètement au noir" avec une évasion de revenu imposable de 8,9 milliards d’euros entre revenus non déclarés, tickets de caisse omis, fausses factures et coûts gonflés, plus de 2,1 milliards récupérés sur le front de la TVA.

Des données importantes et significatives, mais qui ne sont qu’une goutte dans la mer, si on pense que les contrôles réalisés ont été 65.160 et que les fraudeurs découverts sont 10,5% des réalités mises sous observation. Des données qui peuvent faire sauter en l’air le budget de l’Etat, si ce pourcentage était appliqué aux trois millions d’entreprises : les grandes, les moyennes, les petites et les micro entreprises qui dans toute l’Italie ont été mises en condition de suivre le "sentiment" personnel du premier ministre, exprimé dans un discours paradoxal le 11 novembre dernier, justement à la fête de la Police des Finances, quand Berlusconi a inopinément affirmé que "si l’Etat te demande plus d’un tiers de ce que tu gagnes, il y a là une supercherie à ton égard et alors tu te débrouilles pour trouver des systèmes pour éviter ou même pour évader mais en syntonie avec ton intime sentiment de moralité".

Malgré de tels exemples de moralité, quelques données viennent de toute façon au grand jour, quelques unes de centres d’études "privés", d’autres d’institutions officielles telles que l’Agence des entrées et d’autres encore de quelques sources autorisées comme le Censis, le centre d’études de Giuseppe De Rita, qui précisément la semaine dernière, à propos d’économie submergée, a "sorti" ce numéro : 200 milliards d’euros en 2003, c’est-à-dire 46 euros au noir tous les 100 produits au grand jour", si on se tient à ce qui, d’une façon efficace, était reporté par Francesco Bonazzi dans "L’Espresso".

"On peut se contenter d’un calcul grossier - écrit l’Espresso - et appliquer l’impôt minimal de 23% (celui que dans sa "réforme" fiscale Berlusconi prévoit pour les revenus jusqu’à 26 mille euros par an, ndr). Cela fait 46 milliards par ans, TVA non comprise : presque deux fois la dernière loi de finances".

Et ce n’est pas assez : la "Repubblica" d’il y a un peu de temps confirmait les 200 milliards par an d’évasion et reportait les répartitions géographiques et par secteur du phénomène, rendues publiques par le Bureau d’Etudes de l’Agence des Entrées, mais elle faisait surtout remarquer que, vis-à-vis de 16 mille contribuables qui déclarent plus de 300 000 euros par an, "dans les quatre premiers mois de 2004 ont été vendues 1 700 Porsche, 190 Maserati, 186 Ferrari, 4 371 Mercedes et 4 749 Bmw à au moins 50 000 euros", pour ne pas parler des deuxièmes et troisièmes résidences dans des localités telles que Portofino, Capri, Cortina et Courmayeur, "dont l’achat et la vente ont augmenté en 2003 au rythme de 17,6%", ou des bateaux de plaisance haut de gamme (à partir de 24 mètres) qui "vont très bien, avec 154% d’augmentation dans les cinq dernières années, tandis que tout le secteur des chantiers navals de plaisance augmente à un rythme de 35% par an".

Les données d’une enquête réalisée par SwG sur l’émission de tickets fiscaux et surtout sur la livraison "spontanée" de factures par les différentes typologies d’artisans et des professions libérales sont elles aussi intéressantes. A la question : "Chez quelles catégories professionnelles vous arrive-t-il le plus souvent qu’on ne vous donne pas de reçu ? Les interviewés ont répondu : "45% les médecins et les dentistes ; 17% les commerçants ; 14% les plombiers ; 10% les coiffeurs ; 8% les mécaniciens, les garagistes (pneus), les électriciens auto et les carrossiers ; 7% les bars et les restaurants ; 26% d’autres artisans (électriciens, menuisiers, peintres en bâtiment, techniciens) ; 11% les avocats".

Traduit de l’italien par Karl & Rosa de Bellaciao

http://www.liberazione.it/giornale/041223/LB12D6D8.asp