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Italie : premier Mai, Fête du Travail ? Traditions, Festivités, Coutumes

Publie le lundi 25 avril 2005 par Open-Publishing

de Ida Sconzo traduit de l’italien par karl&rosa

Des données statistiques et des estimations par défaut disent qu’en Italie, entre les chômeurs, les précaires et les travailleurs atypiques, on dénombre plus de dix millions d’individus. En calculant qu’au moins un membre par famille est au chômage ou en conditions de précarité, nous pouvons dire qu’au moins 20 millions d’Italiens souffrent à cause du manque total ou partiel de travail.

On se demande : mais qui célèbre le Premier Mai Fête du Travail ? Les chômeurs ? Les précaires ? Les atypiques ? Non. Eux font la fête tous les jours, avec femmes et enfants, parents et grands-parents. Ils trinquent heureux tous les soirs... Quand le nouveau jour est fini... et un nouveau jour est en train de commencer...

Qui sont-ils ces millions d’Italiens hérétiques qui s’en fichent du Premier Mai ?

Ils appartiennent à toutes les catégories. Cela est certain. Des jeunes qui n’ont pas achevé leurs études et trouvent du travail au noir dans le bâtiment, de temps à autre certains tombent d’un échafaudage et meurent, dans la poubelle où on les a jetés. Des jeunes qui sont en train d’achever leurs études et distribuent des tracts publicitaires dans la rue (4,50 euros brut de l’heure). Des jeunes diplômés, même ,tenez, en Sciences de la Communication, qui vendent des pizzas le soir, à Piazza di Spagna. Et les moins jeunes ? Des médecins, et peut-être même des chirurgiens. Des enseignants, pourquoi non ? Des suppléants.

Des journalistes qui ne sont pas pistonnés, des ouvriers ultra cinquantenaires, les familles sur le dos. Zut, il y en a tellement ! Et que pensent-ils ces malchanceux qui resteront chez eux le Premier Mai ? Comment vivent-ils ? Que leur passe-t-il par leur tête ?

Après avoir frappé à toutes les portes, en poursuivant des personnages de petite taille, comme les tout petits chiens... après avoir écrit, téléphoné, demandé, supplié, imploré les amis, les collègues, les syndicalistes, les maires, et le Président de la République... Après avoir soupesé toutes les opportunités de bricoler, de se mettre à leur compte, d’inventer un nouveau métier et avoir découvert que pour faire n’importe quoi il faut de l’ARGENT... Après avoir consulté des annonces bidon et reçu des propositions de travail non payé, de plusieurs côtés, y compris d’hommes politiques défenseurs des droits de l’homme... Après avoir découvert qu’en occupant les emplois les plus humbles, on n’arrive même pas à payer son loyer... ils commencent à espérer dans les miracles, s’adressent aux prêtres, aux institutions bénéfiques qui encaissent bien mais ne te lâchent pas... ils prient jour et nuit, ils se confient au Seigneur, mais il ne se passe rien...

Leur cerveau commence à vaciller. Ils pensent à des grèves de la faim, à des tentatives de suicide qui parfois réussissent et parfois ne réussissent pas... certains se font flamber devant une mairie, ils ne meurent pas tout de suite mais après un mois de souffrances atroces... des gueules à la con donnent la nouvelle en parlant à une caméra et c’est tout... Comment passe la journée ? Après une nuit d’insomnie, sortir pour chercher du travail - des sous pour le ticket de bus - (d’habitude ils sont honnêtes), entre un bureau et un autre, un endroit où on se moque d’eux et un autre, une promesse ou une cruelle vérité - des sous pour le petit déjeuner ou le déjeuner - (normalement on jeûne). Retour à la maison la queue entre les jambes, après avoir vu pas mal d’imbéciles occuper des bureaux importants et très bien payés...frigo quasiment vide. Enfants affamés.

Facture du téléphone à payer, échéance du loyer dans quelques jours, quelques traites pour quelque chose qu’ils ont déjà oublié, mais on doit payer. Des vêtements, des chaussures, des médicaments... des choix optionnels. Les hallucinations arrivent : invisibles, l’émission sur les clochards sans abri, ils dormaient dans les cartons avant la TV et tu les retrouves dans les cartons après la TV... Vie sociale - zéro - tout est payant : pas de bouquins, pas de cinéma, de théâtre, de musique, de restaurants, de pizzerias, de gymnases... Rien de rien. Et les amis ? Si jamais ils existaient on ne pourrait pas les inviter, un dîner décent coûte, on ne peut pas offrir l’omelette habituelle : des œufs et des pommes de terre. Les pâtisseries n’existent pas. La viande de temps à autre. Poisson jamais.

On pense à hurler à pleine voix : CONNARDS JE SUIS ICI MOI AUSSI ET J’AI LE DROIT DE VIVRE. On pense à aller avec une arme quelconque frapper derrière ces bureaux. On pense que si tous les dix millions au moment de voter écrivaient sur le bulletin de vote : JE VOTERAI QUAND J’AURAI UN BOULOT - même si voter est un devoir et un droit... peut-être nos représentants, les élus, ceux qui parlent, parlent, se disputent et encaissent, pourraient peut-être penser aussi dans l’intérêt des autres. On pense à la masse uniforme, médiocre, peu sûre, mesquine qui travaille pour ÊTRE PISTONNEE.

On pense à l’armée de porteurs de serviettes et de ruffians qui espèrent une situation... aux foules de dames et de demoiselles qui s’offrent, parce que personne ne te demande, c’est toi qui dois donner... On pense aux belles paroles d’une Constitution de papier et on se demande...on se demande jour et nuit, matin et soir, au déjeuner et au dîner, à la maison et dehors... on se demande...

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