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Trois questions à Antonio Di Pietro
de Salvatore Aloïse
Député européen et fondateur d’"Italie des valeurs", qui se bat pour plus de moralité en politique, vous avez, en tant que magistrat, donné le coup d’envoi des enquêtes contre Silvio Berlusconi. Que pensez-vous du verdict qui l’a relaxé ?
L’opération "Mains propres" s’est formellement conclue, mais moi je dis qu’elle a été interrompue. Les magistrats, comme des chirurgiens, sont intervenus sur une tumeur visible qui risquait de compromettre aussi bien l’économie que la démocratie représentative. Les magistrats-chirurgiens ont fait leur travail, mais la politique n’a pas rempli son rôle. Au contraire, on a fait croire qu’il s’agissait d’une guerre entre bandes, entre les politiques et les magistrats. Or il s’agissait bien d’une guerre entre gendarmes et voleurs, avec d’ailleurs des gendarmes qui ont été aussi des voleurs. Tout ceci a pu se produire à cause du conflit d’intérêts au Parlement italien. Pas celui de Silvio Berlusconi, mais celui plus subtil des cent parlementaires qui ont eu des ennuis avec la justice, soit 10 % du total. Il suffirait pourtant d’une loi avec un seul article comme je l’ai proposé et qui dit : "Toute personne condamnée ou sous enquête ne peut être candidate", pour en finir avec cette anomalie italienne. Avec cette loi, nous n’aurions pas le gouvernement actuel...
La condamnation de M. Dell’Utri est lourde. Pourtant tout continue comme si de rien n’était. Pourquoi ?
Nous avons Berlusconi, avec, à sa droite, son associé, son avocat, son compère Previti, qui a été condamné pour corruption de juges. A sa gauche Dell’Utri, condamné pour collusion avec la Mafia. Silvio Berlusconi, lui, a été relaxé mais parce qu’il a obtenu les circonstances atténuantes sur la base d’une loi faite pour lui il y a deux ans. Nous avons affaire à une "bande des trois" aidée de beaucoup d’autres encore. Ce qui manque à ce pays, c’est la crédibilité.
Depuis douze ans, le débat politique tourne autour de la justice...
Il y a deux choses qui ne vont pas dans notre justice. Les temps judiciaires, trop longs, et surtout la non-correspondance entre la vérité et celle qui ressort des procès. Trop souvent on arrive à condamner un innocent ou à relaxer un coupable. Ceci a été déterminé par les nouvelles règles judiciaires : le procès n’est plus en mesure de déterminer la vérité. En fait, on permet aux puissants d’arriver à retarder l’établissement de la vérité, à trouver un artifice. Résultat, on a renforcé la garantie de l’impunité.
Propos recueillis par Salvatore Aloïse
Messages
1. > L’ANOMALIE ITALIENNE, peut-être, mais que dire de l’anomalie française... , 13 décembre 2004, 18:01
Au lieu de rire sur le compte d’une justice italienne qui a acquité Berlusconi (mais condamné ses deux fidèles bras droit), les petits français feraient mieux de faire un constat terrible pour leur belle démocratie : en Italie, au moins, on peut traduire un gars comme Berlusconi devant la justice. En France, par contre, Chirac pleure de rire devant les juges...
1. > L’ANOMALIE ITALIENNE, peut-être, mais que dire de l’anomalie française... , 13 décembre 2004, 22:54
Tant que la magistrature et le peuple italien résisteront à la Banda Bassotti,il y aura espoir.