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L’avenir passe par la gauche européenne

Publie le mardi 31 mai 2005 par Open-Publishing
23 commentaires

de Renaud B.

Depuis des semaines, les tenants du non de gauche le disaient : la victoire du non pourrait ouvrir la voie à une nouvelle construction européenne, une Europe à dimension plus sociale et politique que ce qu’elle n’a été jusqu’à aujourd’hui. En réalité, il nous faudra attendre que quatre autres pays refusent ce traité pour pouvoir envisager l’avenir européen (si plus de quatre pays refusent le traité, ce dernier est abandonné).

Pour cette raison, on a entendu au cours de cette campagne que le non ne pourra pas négocier un nouveau traité à moins de s’entendre avec l’extrême droite, les libéraux britanniques, les conservateurs polonais, etc. Il n’en est rien. En effet, l’extrême droite était opposée à cette constitution, mais elle est surtout opposée à l’idée d’une union supranationale. Ce qui n’est pas le cas de tous les tenants du oui socialiste en France, en Espagne, en Allemagne.

Si ce traité venait à être définitivement rejeté, la seule possibilité serait de relancer une nouvelle phase de construction européenne, par un vote démocratique pour une assemblée constituante. Et sur ce projet, la gauche n’aurait aucun intérêt à être désunie. C’est pourquoi ceux qui seraient tentés de quitter le chantier européen font une énorme erreur (je pense en particulier à Delors) : le projet européen doit aboutir, et une Europe unie n’aboutira pas si les européens convaincus se boudent. En clair, l’avenir de l’Europe passe autant par les partisans du oui que par les partisans du non (de gauche).

Le véritable problème qui vient se poser aujourd’hui, c’était la réaction (prévisible) de la plupart des partisans du oui : si le non l’emporte, ce serait en raison de la grogne sociale, ce serait un vote contestataire, un nouveau 21 avril, ce serait aussi à cause du discrédit du gouvernement (certains osent même le terme « ce fut un raffarindum »...). Certes quelques populistes, à gauche comme à droite, ont décidé d’utiliser ce référendum pour attaquer la chiraquie. Même François Hollande aura déclaré « qu’il aurait appelé à voter non si Chirac avait fait de son mandat un enjeu du référendum » (intervention sur France Culture) ! Certes, sous l’impulsion de quelques cégétistes, la manifestation contre le lundi de pentecôte travaillé s’est transformée en démonstration pour le non. Mais il ne faut pas oublier l’essentiel : ce non est un non à la constitution européenne, on ne peut se borner à chercher des explications dans la politique française. Il s’agit avant tout d’un refus de l’Europe telle qu’elle se bâtie depuis vingt ans, le refus de valider les politiques impulsées par les néo-libéraux, par l’ancien commissaire Lamy (nouveau président de l’OMC) en particulier).

Bien sur, pendant cette campagne, on aura entendu que ce traité permettait enfin une démocratie européenne, enfin des droits sociaux reconnus au niveau continental. Passons sur le contre argumentaire, la campagne est finie, mais n’oublions pas que les mêmes partisans du oui répliquaient aux tenants du non que « les politiques [qu’ils] critiquaient existaient depuis vingt ans dans l’union européenne ». Il y a donc un refus clair de ces politiques, mais il y a aussi un point intéressant : le texte se contredisait seul, introduisait des ambiguïtés énormes (la question du droit à l’avortement en est l’exemple le plus démonstratif), il était donc juridiquement inattaquable pour un spécialiste du droit.

Un élément notable au niveau national, par contre, c’est « la crise de la représentation » dont l’on entend parler depuis hier soir. En effet, le PS s’est prononcé par référendum interne pour le oui, ses sympathisants sont majoritairement pour le non, de même pour les Verts qui connaissent un non massif (60% de ses sympathisants). Si le traité était passé au Parlement, on aurait assisté à une victoire écrasante du oui (probablement plus de 70%). C’est probablement pour cette raison que l’on vit Strauss-Kahn déclarer que « ce référendum est une connerie, nous avons fait la connerie de le demander et Chirac a fait la connerie de le convoquer ». Alors, face à cette crise, que à quoi va-t-on assister ? L’avènement d’une VI république avec une véritable « démocratie participative et directe » ? C’est très vague comme projet. L’idéal serait une démocratie locale de type Christiania (la ville libre http://www.christiania.org/main/lan.php?lan=gb ), mais je doute que l’on soit capable de faire cela actuellement.

Quoiqu’il en soit, le véritable enjeu de ce référendum était européen. Il y a déjà quelques mois (ça doit même faire deux ou trois ans), quelqu’un disait : « il y a deux types d’Europe. L’une est celle des lobbys à Bruxelles, et celle de la Convention présidée par Giscard. L’autre est celle du Forum Social Européen de Florence. ». Même si Negri appelait à voter oui, était-ce le cas de la majorité des forces constitutives de l’altermondialisme ? Non. Et au-delà, au sein des forces progressistes ? Il n’y a de cela que quelques jours encore, j’ai même vu Mgr Gaillot appeler à voter non (ce qui est loin d’être la position majoritaire dans sa profession).

Pour revenir à ces idées du Forum Social Européen de Florence (bien qu’il y ait eut le calamiteux forum de Londres depuis), j’ai aussi vu la semaine dernière un débat entre Strauss-Kahn et Besancenot. Les deux tombaient en accord sur la plupart des objectifs européens : aller vers une fédération, mieux intégrer les nouveaux entrants, un SMIC européen, des services publics continentaux, etc. La divergence portait sur des questions de moyens.

Depuis hier soir, la priorité n’est pas à aller faire la fête d’un côté ou refuser de poursuivre la construction européenne d’un autre côté. La priorité, c’est que la gauche se réunisse largement pour une nouvelle politique européenne, une politique sociale, comme celle que l’on est en droit d’attendre en 2007. Car si Chirac et Sarkozy voulaient nous diviser, ils ne s’y seraient pas pris autrement. Ne leur donnons pas raison ! Il y a peut être eut un séisme hier des suites de vingt ans de politiques européennes libérales, les édifices politiques ont tremblés, il est maintenant temps de se réunir pour reconstruire : pourquoi pas un vaste rassemblement de la gauche, comme le propose Emmanuelli, qui pourrait aboutir sur une primaire dans la perspective des présidentielles...

r3516876@hotmail.com

Messages

  • Seul peut prétendre le parti communiste et ligue...

  • Les socialistes ne sont plus de gauche depuis 1980.

  • "la gauche européenne", c’est pas seuleument le PC et la LCR. Heureusement, parce que sinon je ne sais pas où serait l’Europe serait actuellement, mais elle ne serait probablement pas construite. ça même buffet et besancenot pourrait être d’accord : ils n’ont jamais eut le poids suffisant.

    Deuxièmement, si le PS n’est plus de gauche depuis 1980 : je ne veux pas défendre inconditionnellement ses dirigeants, mais je crois qu’il y a des courants de gauche légèrement minoritaires (Emmanuelli/Mélenchon/Montebourg) qui peuvent prendre un jour la majorité, et qui peuvent influer fortement sur ceux qui sont aujourd’hui majoritaires

    sinon, ce sont 52% des SYMPATHISANTS socialistes, et pas des militants qui ont voté non, comme 60% des sympathisants verts.

    quoiqu’il en soit, il faut que tous ceux qui se considèrent de gauche et qui veulent du "progrès social" et de "l’Europe" se rassemblent, qu’ils aient été partisans du non ou du oui ! On n’avancera pas sans cela.

    • Si la gauche française avait vraimment été de gauche ça se saurait hors depuis 83 elle s’est rangé et disons les choses clairement couchée du coté des " marchés " et des oligarques libéraux

      Elle ne peut donc s’en prendre qu’a elle même

      Et comme ces messieurs dames ne sont même pas capable de se remettre en question et sont aussi autoritaires et sectaire que les nervis libéraux de l’ump

      On est hélas pas prés de voir une vrai gauche avant longtemps en france

      On en as marre

      Gréve générale

  • Bravo, voilà le chemin de la construction. Et certainement pas celle des chapelles aveugles aux autres, on en a assez soupé des détenteurs de la Vérité Unilatérale. Il faut prendre les richesses partout dans les échanges d’idées.

  • L’Union européenne, c’est la précarisation de la jeunesse, la loi Borloo destructrice du Code du travail, le chômage, les délocalisations, les attaques contre la fonction publique...

    Quelle issue, si c en’est la rupture avec Maastricht/Amsterdam et les directives européennes ?

    Répondez-moi et dites-moi si vous êtes d’accord avec cela....

    • Oui, bien entendu, il faut une autre orientation politique à l’Europe. Mais pour les autres messages : nous venons de remporter une immense victoire. Nous avons tout fait à la main contre le rouleau compresseur de la machine médiatico-politique lancée à fond les manettes. Nous, le peuple. 1000 collectifs locaux regroupant des partis, des militants en rupture de leurs élites, des associations, des citoyens. Nous allons continuer dans la diversité et la solidarité. Nous allons nous fédérer par département et nationalement. Et là, sur ce forum, on retombe dans la politique politicarde et les petits-grands calculs qui n’ont jamais mené bien loin.

      Syndiquez-vous, adhérez aux partis résolument anti-libéraux, aux associations comme ATTAC, rejoigner le collectif de votre coin, il y en a un. Venez réflechir avec nous et pousser fort dans le bon sens, celui de nos intérêts communs. Ne reprosuisez pas les vieux shémas qui ont fait faillite.

      Helge

  • OK pour le fond, mais faites relire votre texte par quelqu’un qui corrigera les fautes d’orthographe. Elles portent essentiellement sur les verbes, et je trouve que ça ne fait pas bonne impression. Ce n’est pas pour critiquer gratuitement, que je dis cela, mais pour que le contenu de l’article ne soit pas dévalorisé par la forme.
    Mireille Howson

  • d’accord avec la majorité des commentaires, emmanuelli
    est un godillot et fabius un opportuniste...

    inventons les moyens, les existants sont obsolétes

    le ratmort

    • Il va falloir d’une part que les partisans du oui à gauche et surtout les dirigeants socialistes fassent un vrai bilan en profondeur de leur orientation politique et economique depuis 1983. Et qu’ils clarifient une fois pour toute leurs choix. Et aussi de concert avec leurs homologues européens.
      Il serait bon aussi, que la gauche qui s’est prononcé pour le non puisse mieux faire entendre ce qu’elle a à dire sur, non pas la défense des acquis sociaux ou services public, mais sur une redéfinition de ceux-là, dans l’intérêt du plus grand nombre.
      Il y un chantier énorme de reconstruction qui aurait du avoir lieu depuis 2002 entre la gauche dite de gouvernement, et celle dite protestataire (je n’aime pas ce qualificatif), mais malheureusement les premiers dénis aux seconds leur légitimité parce qu’elle ne viendrait pas des urnes.
      Un dialogue entre ces deux ensembles ne saura possible que si les premiers ont assez d’humilité pour se remettre en cause, et si les seconds ne s’imposent pas par arrogance dû à leur victoire, bien méritée et justifiée.
      Est-ce que ce sera possible ? Après les invectives de campagne.
      Une partie de la question est là ?
      En toute état de cause, il faudra alors que le PS (voir même touite la gauche) se scinde en deux nouvelles orientations partisanes ; l’une résolument vouée à l’unique correction des dérives libre échangiste (avec un possible ralliement à l’UDF), l’autre ouvrant la perspective d’une définition d’un nouvel humanisme mettant l’homme (et la femme) au coeur du projet.
      C’est un tournant historique qui s’annonce dans les prochaines années, et la perspective de 2007 est vraiment dérisoire face à ces enjeux.
      Mais il ne faudra pas se leurrer, tout ceci va devoir supposer d’être prêt à supporter des périodes difficiles de luttes sociales car entre-temps, il n’est pas impossible que la droite provisoirement en tire les bénéfices et gouverne un certain temps encore.
      Stéphane.

    • " mais malheureusement les premiers dénis aux seconds leur légitimité parce qu’elle ne viendrait pas des urnes.
      Un dialogue entre ces deux ensembles ne saura possible que si les premiers ont assez d’humilité pour se remettre en cause"
      . Ce n’est pas un problème d’humilité, mais de rapports de force ! "Les premiers" sont des gens mis en place pour défendre les intérêts patronaux, ou au mieux soutenir une ligne sociale-démocrate. Ils ne s’intéressent au peuple qu’au moment où leur carrière est menacée.

  • la gauche du oui n’est pas la gauche, approuver un tel traité c’est pas possible, qu’ils laissent la place, ou ils mettront toujours des bâtons dans les roues

    • La "gauche du oui" doit représenter entre 40% et moins de 50% de la gauche globale.
      Il est donc impossible d’avancer vers un grand projet novateur sans cette partie de la gauche. pendant la campagné référendaire, on a vu des tenants du non de gauche qui ont acceptés de rencontrer fabius. alors que chacun savait que l’objectif de fabius était (et reste) la préparation pour 2007 : la preuve, on ne l’a pas tellement vu dans la campagne avant que le non n’atteigne les 55% dans les sondages...

      Deux choses : d’abord la prise de position a été extrêmement difficile pour un certain nombre de sympathisants de gauche en raison de la pression médiatique, mais aussi en raison des interprétations divergentes de ce traité.
      Il est vrai que certains articles se contredisent, d’autres laissent planer des ambiguités inacceptables ("le droit à la vie", etc), qui rendaient cette constitution non-opérationelle juridiquement... Mais certains ont pu être dérouté par ces éléments, et ont probablement été poussés vers le vote "oui".

      Concernant les tenants du oui socialiste et verts, en particulier, le désaveu populaire est clairement exprimé.
      De là peuvent s’esquisser deux orientations. Soit ces dirigeants ignorent le caractère européen de ce vote, en reportant tous les maux sur des questions de politique nationale, soit ils choisissent "le changement", et ils se remettent en cause.

      Le PS a longtemps été la machine électorale de Mitterand, et rien n’a véritablement changé dans ce parti depuis la mort de leur patron. C’est pour cela que les propositions d’Emmanuelli sur "un nouveau congrès d’Epinay" ou même sur la création d’un programme commun rassemblant une large parti de la gauche doivent sérieusement être envisagées...

      Cependant pour qu’un tel mouvement se crée, il ne faut pas qu’untel ou untel déclare : "l’union se fera par moi et derrière moi" comme l’ont plus ou moins déjà fait fabius et lang...

      Dernier élément : les 55% du non ne sont pas véritablement "une victoire" (pour le non de gauche) mais un moyen, dans le sens ou l’objectif de notre vote non était l’ouverture d’une brèche vers une europe sociale et politique...

  • "la seule possibilité serait de relancer une nouvelle phase de construction européenne".
    faisons mentir le rat Farrin ! Ne soyons pas frigides ! Etudions les millions de possibilité pour relancer une nouvelle phase de destruction "européenne" ! On commence par abolir Nice, puis Amsterdam, Maastricht. Au bout, nous savons tous que tous les chemins mènent à Rome !

    • notre objectif c’est pas la destruction de l’europe, mais la construction d’une europe qui aille au delà de l’économie.
      c’est faire autre chose que nice/amsterdam/maastricht/etc, c’ets faire du social en arretant tous les ordres européens de libéralisation, etc.

    • Et c’est quoi une Europe qui va au-delà de l’économie ? Quand cela fait 50 ans que ton Europe, qui n’est que l’Union européenne, est programmée non pas pour "l’économie", encore moins pour "faire du social" (sic), mais pour pérenniser les profits du Capital ? Relis le Traité de Rome, tu verras mieux pourquoi notre objectif est la destruction de l’UE. Quant au continent, ne t’en fais pas pour lui !

    • “Les prolétaires n’ont pas de patrie”.

    • ...et c’est bien parce que les prolétaires n’ont pas de patrie qu’il faut reconstruire l’Europe sur de nouvelles bases (qui ne sont pas celles du traité de Rome), le travail européen appelant ensuite un travail plus large, et un travail mondial un jour. si des services publics, des droits sociaux sont mis en place au niveau européen, ça ne peut qu’encourager chacun à lutter pour des services publics mondiaux...

    • et c’est bien pour ça que pour construire pas à pas le projet que vous décrivez, vous ne pouvez pas compter que sur l’extrême-gauche et les communistes, loin d’être assez représentatifs de l’ensemble des citoyens, et loin d’avoir le poids suffisant pour permettre une réelle construction. Et c’est bien pourquoi nous avons besoin de dialoguer et faire dialoguer des gens bien différents, et c’est bien pourquoi je suis d’accord avec le message d’origine...