Accueil > LES POLITIQUES REUNIONNAIS ET LE CPE !

LES POLITIQUES REUNIONNAIS ET LE CPE !

Publie le jeudi 6 avril 2006 par Open-Publishing

L’intensification ces derniers jours de l’affrontement entre les partisans du Contrat première embauche et leurs opposants oblige aujourd’hui les élus réunionnais et les décideurs à sortir de leur silence forcé ou involontaire. Ce n’est pas une surprise : la question du CPE divise localement la classe politique de la même façon qu’elle attise les tensions dans l’hexagone. Mais les partisans de Dominique de Villepin sont peu nombreux. À l’exception de Michel Fontaine qui affiche mollement sa solidarité à l’égard du gouvernement, les autres leaders se montrent beaucoup plus sévères. Alain Bénard n’hésite pas à fustiger les agissements du duo de l’exécutif, tandis que Didier Robert juge l’attitude du Premier ministre “exécrable”. À un an des prochaines échéances électorales, la gauche ne rate évidemment pas l’occasion de dresser un tableau apocalyptique de la politique sociale menée par la majorité. Patrick Lebreton parle d’un “cadeau fait aux patrons alors qu’ils n’avaient rien demandé”, alors qu’Éric Fruteau estime que le CPE “n’est bon ni pour la Réunion, ni pour la France”. Les acteurs économiques sont beaucoup plus nuancés. Seul Giraud Payet, le président de la chambre de métiers, réclame un retrait pur et simple du texte. Les autres considèrent, au contraire, que le CPE est un excellent dispositif d’insertion, et que la France doit entamer une réforme de son modèle social.

Michel Fontaine (maire de Saint-Pierre, UMP)

“Le CPE est bien mort. Quoi que le gouvernement aurait fait, cela aurait été non. C’est maintenant une opposition systématique. Malheureusement on ne voit qu’une facette, le point de vue de ceux qui en bénéficieraient. Mais il ne faut pas oublier les entreprises, le CPE avait pour but de leur donner la possibilité d’embaucher afin de lutter efficacement contre la mondialisation et la concurrence déloyale des pays émergents. À mon avis, on oppose inutilement travailleurs et employeurs. Je comprends le souci des jeunes, mais je reste favorable au CPE même si je n’étais pas d’accord avec certains points. Un an, c’est suffisant pour jauger un employé et il faut bien sûr motiver le licenciement si on s’en sépare. Mais, enfin, un CPE c’est tout de même mieux qu’un CDD d’un an et je ne vous parle pas des emplois jeunes qui avec leur CDD de 5 ans de droit privé sont aujourd’hui sur le carreau”.

Didier Robert (maire du Tampon, UMP)

“Sur la forme, l’attitude du gouvernement a été un peu exécrable. Une telle réforme demandait une large concertation préalable. Malheureusement la question de fond ne se pose plus au final alors que l’idée était plutôt bonne au départ. C’était tout de même de donner, aux jeunes qui débutent dans la vie, la chance d’acquérir une première expérience professionnelle. Maintenant, il faut remettre les choses à plat et repartir de zéro en trouvant une solution pour les jeunes et avec les jeunes. Il faut beaucoup plus de dialogue. On doit tout de même réussir à innover en trouvant des solutions qui répondent plus aux contraintes du marché de l’emploi actuel. Il ne faut pas oublier que le monde d’aujourd’hui n’est plus le même qu’il y a vingt ans”.

Patrick Lebreton (maire de Saint-Joseph, PS)

“Je reste défavorable même si en tant que maire d’une commune où il y a 52 % de chômeurs, je regarde à deux fois avant de dire que je suis contre le CPE. Mais là, ce contrat ne sera pas créateur d’emplois. C’est un cadeau qu’on fait aux patrons alors que le Medef n’avait rien demandé. C’est quand même étonnant de viser ainsi la jeunesse. C’est cette classe d’âge qui est contrainte d’étudier de plus en plus longtemps pour trouver un boulot et qui sait pertinemment qu’elle va devoir travailler plus longtemps pour payer les retraites. Sur le principe, il n’est pas question de briser les fondements du contrat de travail. Mais, avant de critiquer, les politiques ont aussi une obligation d’analyse même si je pense qu’une seule mesure ne permettra pas aux jeunes de sortir de l’ornière. Il y a un gros travail de réflexion à mener, mais je ne vois pas de solutions miracles. On pourrait déjà par exemple reprendre l’idée du congé solidarité, une mesure qui a été enterrée trop tôt”. Dans l’EST

Éric Fruteau (conseiller général, l’Alliance)

“Pas question d’accepter la précarité de l’emploi et la remise en cause du droit du travail. Compte tenu de la situation sociale à la Réunion (35% de chômage dont 50% uniquement chez les jeunes), il faut des mesures spécifiques. Il faut mettre en place une politique de création d’emplois durables, notamment dans la fonction publique. Il y a des retards à rattraper dans les hôpitaux, dans l’éducation nationale... Mais pour cela, encore faut-il une réelle volonté politique. Le CPE n’est pas bon ni pour la Réunion, ni pour la France”.

Bertho Audifax, député-maire (UMP)

“Il faut sortir de la crise. Il y a des lycéens qui vont passer le bac bientôt, des étudiants qui sont examens. Il y a aussi des jeunes qui cherchent mais qui ne trouvent pas du travail. Il faut inventer de nouvelles solutions. Raison pour laquelle, il faut se mettre le plus rapidement possible autour d’une table afin de démarrer les négociations. On ne peut pas rester dans une telle situation”.

Jean-Paul Virapoullé (sénateur-maire, La Relève)

“Il faudrait que le gouvernement et le Parlement écrivent avec la jeunesse en France et les partenaires sociaux un plan d’intégration des jeunes dans le monde du travail sans hypocrisie et sans faux-fuyant de part et d’autre. Si les jeunes sont soumis à une précarité de plus en plus grande, ce n’est pas la faute au CPE, puisqu’il n’existe pas, c’est comme ça depuis 20 ans, depuis qu’on a mis, dans le cadre de la mondialisation, en compétition frontale une économie organisée offrant un niveau de vie décent à la population avec une économie truquée de certains pays comme la Chine... Ce qu’il faut faire aujourd’hui, c’est mettre en œuvre une mondialisation loyale basée sur le rétablissement de la préférence européenne. N’oublions jamais que c’est la conquête des marchés qui crée la croissance et l’emploi. On n’est pas dans ce processus”.

Alain Bénard (maire de Saint-Paul, UMP)

“On ne peut plus aujourd’hui dire aux gens taisez-vous. Ceux-ci ont une opinion qu’il faut respecter”. C’est le sentiment d’Alain Bénard au lendemain de la grande manifestation anti-CPE. Ce n’est plus un secret pour personne, le maire UMP de Saint-Paul n’a pas sa langue de sa poche. Il est en tout cas, le seul maire de droite de l’Ouest à avoir ainsi le courage de ses opinions. Aussi, il dit comprendre la colère de la rue face au Contrat nouvelle embauche. Même si le projet n’existe plus vraiment. “On ne peut plus gouverner la France comme il y a cent ans”, estime M. Bénard, exprimant son étonnement de “voir des gens aussi bien entourés agir aussi maladroitement”. C’est bien évidemment l’attitude du gouvernement qu’il pointe du doigt. “La population considère qu’une décision est légitime lorsqu’elle a été prise avec elle, en concertation. Les gens ont raison d’exprimer leur préoccupation”. Selon le maire de Saint-Paul, “il serait temps de commencer à s’atteler à démocratiser la France”, car dit-il, “les gens ont besoin d’exister”.

Roland Robert Mairie de la Possession (PCR)

Pas de surprise du côté de la mairie de la Possession, “la majorité municipale est entièrement solidaire du mouvement des lycéens, des étudiants et des professionnels contre le CPE”. Roland Ample-Mounyama adjoint au maire en charge des écoles dénonce “un passage en force du gouvernement qui tente de refaire ce qu’il a fait en 2003 avec la réforme des retraites” des pratiques qui selon lui sont “plus proches de la dictature que de la démocratie”. “Où est l’avenir des jeunes dans cette lutte des chefs qui semblent se dessiner entre les présidentiables de l’UMP” renchérit la majorité municipale Possessionnaise. Une mairie communiste qui “s’étonne du silence des ténors de la droite locale sur le sujet alors que d’habitude ils sont prompts à prendre la parole comme dernièrement sur la route du littoral.”

CLICANOO jeudi 6 avril 2006 .