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La "CONTRIBUTION" des nains de jardin...

Publie le lundi 25 juin 2007 par Open-Publishing
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CONTRIBUTION POUR UN DEBAT OUVERT ET CONSTRUCTIF

Après les élections présidentielle et législatives du printemps 2007, les interrogations ne manquent pas. Pourquoi la droite l’a-t-elle emporté malgré son lourd bilan des cinq dernières années ? Pourquoi la gauche a-t-elle été si durement battue ? Pourquoi ces nouveaux et graves reculs du Parti Communiste Français ? Quel avenir pour ce parti ? Quel sens peuvent avoir aujourd’hui une « ambition communiste », un « projet communiste » ? Quelle place, quel rôle pour un parti politique s’en réclamant ? Quel « espace » pour le courant de pensée et d’action communiste dans les « recompositions politiques » qui s’annoncent ?

Ces questions, nous voulons les affronter.

Nous sommes des femmes et des hommes communistes de différentes générations. Nous exerçons ou avons exercé des responsabilités à différents niveaux du PCF. A différents moments, nous avons contribué à la réflexion et au débat des communistes sur ce qu’il convenait d’entreprendre pour donner un nouvel élan au communisme français. Dans les années 1960-1970, quand il s’agissait de rompre avec le « modèle soviétique », de rechercher une voie française originale pour la transformation sociale, et de nouvelles conceptions pour l’organisation et le fonctionnement de notre parti. Celles et ceux d’entre nous qui se sont à l’époque engagés dans cette entreprise novatrice, l’ont fait avec espoir et détermination. Et souvent avec enthousiasme. Ils ont connu des satisfactions, mais aussi beaucoup de déceptions, car en dépit de leurs efforts, le déclin du PCF se poursuivait sans qu’ils voient la possibilité de l’enrayer vraiment. Plus récemment, nous avons tous mis beaucoup d’espoir dans ce que l’on a appelé « la mutation » de la fin des années 1990. Nous nous y sommes investis sans réserve. C’est à cette période et pour cette raison que les plus jeunes d’entre nous ont décidé de rejoindre le Parti communiste, ou d’y prendre des responsabilités de direction. Si nous avons tous mesuré et apprécié « l’appel d’air » que constitua la Mutation, nous en avons toutes et tous également constaté les limites, et douloureusement vécu l’échec. Enfin, nous avons ensemble pleinement participé aux débats qui ont traversé le PCF depuis 2002. C’est à partir de ces expériences diversement vécues que nous abordons les questions d’aujourd’hui. Nous avons décidé de faire connaître ensemble nos analyses et nos propositions. Ces analyses et propositions, nous ne les formulons pas en opposition à d’autres analyses et propositions émanant d’autres femmes et hommes communistes aux « sensibilités » différentes. Ce que nous recherchons c’est l’engagement d’un débat exigeant entre tous les communistes. Celles et ceux qui sont membres de notre parti bien sûr ; mais aussi beaucoup d’autres, « communistes de cœur » ou qui s’intéressent à ce parti et à son avenir, qui s’en inquiètent, et qui peuvent souhaiter participer au débat. Toutes les cartes doivent être sur la table. En toute transparence. C’est pourquoi nous voulons indiquer d’emblée les deux principales propositions que nous voulons soumettre au débat :

1. Nous proposons de mettre en discussion le principe de la fondation d’un autre parti politique. Il est clair pour nous que cette éventuelle fondation d’un autre parti doit être avant tout l’œuvre des hommes et des femmes communistes – et d’abord bien sûr à l’initiative de celles et ceux qui sont membres du PCF. A l’exclusion de toute « opération » pilotée « d’ailleurs ». Nous pensons qu’une telle initiative, ouverte largement vers celles et ceux, non membres du PCF qui voudraient y participer, pourrait être un apport significatif aux recompositions nécessaires afin que la gauche française trouve les voies et les moyens pour offrir une alternative claire et mobilisatrice à la poursuite et à l’aggravation de la politique de la droite.

2. Nous proposons dans cet esprit que dans les semaines qui viennent les différentes sensibilités communistes, et toutes celles et tous ceux qui estimeront devoir soumettre leurs idées au débat, exposent clairement leurs analyses et propositions. Toutes les cartes étant ainsi « sur la table », un vrai débat pourrait s’engager entre les communistes qui veulent pouvoir décider eux-mêmes en toute connaissance de cause de l’avenir de leur organisation. Un débat dans le même mouvement ouvert à toutes celles et tous ceux qu’une telle démarche intéresserait.

Un pareil débat ne peut être contenu dans le cadre habituel de la préparation de nos congrès, fussent-ils « extraordinaires ». Il faut organiser la confrontation des idées et des propositions dans toute la richesse de leur diversité, et la mise à disposition de toutes et tous de la totalité des opinions émises et de leurs éventuelles évolutions à la lumière des échanges qui devront jalonner le déroulement de la discussion. Cela exige du temps et des moyens pour réussir. Il faut selon nous y travailler dès maintenant. Dans un premier temps, nous voulons soumettre au débat les analyses et propositions suivantes :

I- Comment analysons-nous la séquence électorale 2007 ?

En donnant à la droite une large majorité à l’Assemblée Nationale les électrices et les électeurs ont confirmé en Juin leur choix du 6 Mai faisant de N.Sarkozy le nouveau Président de la République. Ainsi, pour la première fois depuis 1981, les « sortants » n’auront pas été « sortis ». C’est le fait majeur de cette séquence électorale présidentielle / législatives de 2007. Naturellement, un autre fait interroge les communistes et tous ceux qui s’intéressent au PCF, à sa place et à son rôle dans notre société : 1,93% à l’élection présidentielle ; disparition d’un groupe communiste de 20 députés à l’Assemblée Nationale… Pourquoi ? Gardons nous des explications sommaires. Défions-nous aussi bien du « c’est la faute aux autres, nous n’y sommes pour rien », que du « tout est notre faute, les autres n’y sont pour rien ».

Les institutions poussant à toujours plus de présidentialisme donc de bipolarisation, le matraquage des sondages par les médias, le PS et ses appels au vote « utile » appuyés sur le souvenir de l’élimination de la gauche au premier tour en 2002 …ont évidemment rendu plus difficile la tâche des militantes et militants communistes, de leurs candidates et candidats, malgré les campagnes intenses et déterminées qu’ils ont menées. Mais étaient-ils vraiment en situation de convaincre largement de l’utilité du vote communiste ? Il ne s’agit pas de désigner des « coupables » puis de dresser un réquisitoire, comme on l’a trop souvent fait pour « expliquer » les reculs et les échecs. Il ne peut non plus s’agir de s’abandonner à un « fatalisme historique » qui inscrirait l’échec aujourd’hui et peut-être « la disparition » demain du PCF dans une logique inéluctable résultant des évolutions du monde, de l’Europe et de la société française

Et il faut prendre en compte tous les aspects d’une situation complexe :pour le PCF,le premier tour des élections législatives n’a pas ressemblé au premier tour de la présidentielle .Certes, avec 4,3% au niveau national (contre 4,8% en 2002) le Parti communiste ne peut retrouver le même nombre de députés lui permettant de constituer un groupe. Mais dans beaucoup de circonscriptions, et en liaison avec un intense travail militant mené sur des objectifs politiques clairs, pour les idées, les propositions et les candidates et candidats communistes, les résultats ont été nettement meilleurs le 10 juin que le 22 avril .C’est particulièrement vrai dans les circonscriptions des députés sortants .Les résultats des candidates et candidats témoignent de leur audience populaire personnelle .Ils sont liés à l’implantation et à l’activité des organisations du PCF,et à l’attachement d’une partie importante de l’électorat à ses élus communistes .C’est tout cela qu’il faudra analyser .Pour comprendre ce qui vient de se passer .Et pour envisager l’avenir .Dans ces conditions, La bonne méthode n’est elle pas de s’efforcer de replacer l’analyse des résultats du PCF dans une vision d’ensemble des attentes majoritaires dans notre peuple ; de la façon dont elles s’étaient déjà exprimées lors de scrutins nationaux importants, notamment en 2002 et pour le référendum de 2005 ; et des « offres » des différents candidats et partis politiques face à ces attentes ?

L’exaspération de 2002, amplifiée en 2005.

Depuis le milieu des années 80, les « alternances » se sont succédées. Les grands mouvements sociaux ont pu arracher des avancées ou empêcher des mauvais coups. Des gouvernements de gauche poussés par ces mouvements ont pu prendre des mesures positives. Mais les attentes fortes exprimées dans les élections et les luttes sociales n’ont pas été satisfaites. La majorité de notre peuple a dû subir toujours plus une « insécurité globale » : Insécurité sociale ( chômage, précarité, pauvreté, incertitude de l’avenir… ) ;Insécurité économique (tout est suspendu aux exigences de rentabilité du capitalisme financier) ; Insécurité de la vie ( une société déchirée par la mise en concurrence de tous avec tous ) ; Insécurité planétaire ( un monde malmené par la mondialisation capitaliste, et inquiet pour l’avenir même de la planète) ; Insécurité à la fois personnelle et collective ( chaque être humain se sent concerné, pour lui même, sa famille, ses proches, le groupe social, le courant de pensée ou de croyance auquel il se rattache…ou l’ethnie, le peuple, la nation, le continent d’origine de sa famille ou de celle de ses proches).

Les forces qui ont dominé la vie politique ces dernières décennies – à droite, De Gaulle et ses « héritiers », à gauche Mitterrand et les siens – ont chacune à leur manière justifié la soumission aux dogmes du néolibéralisme et aux contraintes de la mondialisation. Notamment en engageant la France dans une construction européenne enfermée dans le carcan de ces contraintes. La stabilité du système d’alternance qu’elles ont mis en place et maintenu pendant un quart de siècle a permis d’opposer un véritable « verrou » politique et institutionnel au refus de « l’insécurité globale » et à l’attente d’une évolution radicalement différente de la société qui s’exprimaient dans les luttes sociales et dans les urnes. C’est dans ce contexte qu’est intervenu le « séisme » du 21 avril 2002. Excédés de n’être jamais entendus, les électrices et électeurs se sont trouvés une fois encore confrontés à un « verrouillage » politique.

Ils aspiraient majoritairement à une rupture, mais les principales forces politiques proposaient de continuer comme si de rien n’était. Ils les ont durement sanctionnées. Faute d’une offre crédible prenant en compte leur exaspération et leur aspiration à rompre avec un système politique interdisant de vrais changements, beaucoup se sont tournés vers des votes protestataires et populistes, tandis que l’abstention était massive, notamment dans l’électorat de gauche. Mais les conséquences ont été paradoxales : l’élection de J.Chirac avec plus de 80% des voix, puis celle d’une majorité UMP ont permis au Président et à ses gouvernements d’aggraver encore les politiques qui venaient d’être condamnées par le suffrage universel. Tandis que de son côté le Parti socialiste se préparait à une nouvelle « alternance » en 2007, pour lui aussi « continuer ». Considérant que ses succès électoraux en 2004 auguraient d’une victoire facile, sur la seule base du rejet de la droite au pouvoir, il estimait ne pas devoir reconsidérer ses orientations et ses comportements

C’est donc logiquement que de l’exaspération s’est à nouveau exprimée lors du référendum de 2005 sur le TCE. Une exaspération poussant à dire « non » au système politique appelant à voter « oui ». Une exaspération au contenu politique transcendant les frontières traditionnelles séparant les différents électorats. Une majorité d’électrices et électeurs de tous bords ont exprimé la même protestation contre une construction européenne conduite en dehors des peuples, sans entendre leurs exigences et organisant l’aggravation de « l’insécurité globale » sans qu’ils aient les moyens de s’y opposer. Le « non » l’a emporté. Mais encore une fois, rien n’a changé. Le système a continué à étouffer les exigences de changement. Provoquant toujours plus d’exaspération. Mais aussi du découragement, du doute sur la possibilité de changer les choses, aussi bien par la voie de luttes sociales rendues difficiles en raison d’un rapport de forces défavorable, que par celle de « la politique » et des élections.

L’exaspération et l’aspiration à des « ruptures », exprimées en 2002 et amplifiées en 2005 allaient-elles de nouveau marquer les échéances de 2007 ? Ou bien le découragement allait-il inciter à « continuer » comme avant ? Mais sans permettre cependant « d’aller de l’avant », car on ne va pas de l’avant avec un peuple démotivé ! Ces questions étaient posées à tous les partis, aux candidats, de droite comme de gauche.

2007 : des « offres » nouvelles et une « récupération » réussie.

A la différence de 2002, la plupart des candidats à l’élection présidentielle de 2007 se sont efforcés de prendre en compte, à la fois le besoin de « rupture » avec le système politique, et l’exigence de « sécurisation » pour le présent et l’avenir. Les « offres politiques » des candidats du trio de tête du 22 avril ont été appréciées par les électeurs moins en fonction de leurs votes habituels qu’en rapport avec le jugement qu’ils portaient sur la crédibilité de leurs auteurs pour « faire ce qu’ils disaient ».

 Les « offres » de N.Sarkozy et la façon dont elles ont été présentées témoignent d’une redoutable maîtrise des techniques de communication. Une maîtrise appuyée sur une recherche réelle de compréhension des processus par lesquels se construisent les représentations de la réalité vécue, et se forment et évoluent les idées. C’est plutôt à gauche, et notamment dans la gauche se réclamant du marxisme, qu’on avait dans le passé le souci de fonder la démarche politique sur une telle approche…Peut-être convient-il de s’interroger à ce sujet. Loin de nous en dispenser, le fait que N.Sarkozy a pu nourrir de cette approche une dangereuse démagogie manipulatrice devrait au contraire nous y inciter. Le candidat de l’UMP a cultivé pendant cinq ans une image « d’homme nouveau », soucieux de « rupture » et animé d’un « volontarisme » porteur d’efficacité. Les liens affichés avec les milieux d’affaires, les grandes fortunes et le MEDEF lui assuraient quoi qu’il fasse le soutien de son électorat « de classe ».

Il s’est donc d’abord attaché à conquérir les composantes de l’électorat populaire qui ne sont pas structurellement acquises à la gauche : - l’électorat populaire qui vote traditionnellement à droite ; - celui que les déceptions ont conduit à rejeter à la fois la droite et la gauche, et qui pouvait être conduit à se tourner vers un « homme providentiel » affichant la volonté de « remettre de l’ordre », avec un pouvoir fort ; - celui qui, souffrant le plus, a le plus besoin d’être « sécurisé » et désespère d’y parvenir par l’action collective, syndicale ou politique ; - celui qui n’a pas hésité à voter Le Pen en 2002. Il suffit d’énumérer ces différentes « cibles » pour que revienne en mémoire la façon dont N.Sarkozy les a « soignées » durant toute sa campagne. Il n’est pas nécessaire d’y revenir en détail. Deux remarques cependant paraissent utiles :  Reprenant à son compte l’exigence collective de « sécurisation sociale », N.Sarkozy l’a associée à l’exigence individuelle tout aussi forte de ne pas être « assisté » mais « considéré » et « responsable ». Mais alors que l’insécurité est la conséquence des politiques libérales, il a su convaincre que c’est une nouvelle figure du libéralisme – une sorte de « libéralisme d’Etat », qui peut apporter la solution : l’Etat intervenant dans tous les domaines –y compris l’économie- afin de « libérer » la possibilité pour chaque individu de s’en sortir, en travaillant plus, en « méritant » plus, en étant meilleur que les autres…au service des objectifs du capitalisme financier.

Là encore, la démagogie électorale était sous-tendue par une réflexion de fond sur les moyens nouveaux à mettre en œuvre pour résoudre un problème récurent du capitalisme de notre temps : comment intégrer les salariés et les milieux populaires à ses objectifs sans provoquer de « cataclysme » social et politique ? Comment faire face aux défis de la mondialisation capitaliste en mobilisant un peuple derrière des objectifs à l’évidence contraire à ses intérêts ?.. La droite française cherche depuis longtemps à résoudre cette contradiction. « L’offre politique » de N.Sarkozy proposait une réponse. Et là encore, on ne peut esquiver la question : a-t-on suffisamment, à gauche en général et au Parti communiste en particulier, travaillé pour opposer à cette réponse une argumentation convaincante ? .

 Transgressant la « règle » établie par J.Chirac, N.Sarkozy a ostensiblement cherché les voix du Front National. Il a réussi à en capter un grand nombre. Il n’a pas hésité pour cela à recycler à son profit les thèmes lepénistes. Faut-il ne voir là qu’une habileté ? Ne faut-il pas plutôt s’intéresser à une cohérence qui ne dessine nullement le visage d’une « nouvelle droite », mais indique un retour, dans les conditions de 2007, de la vieille droite autoritaire, réactionnaire, et revancharde. La vieille droite de tradition bonapartiste et populiste à laquelle le peuple français s’est quelquefois donné ou a été tenté de céder aux XIX° et XX° siècles.

La vieille droite qui n’en finit pas de vouloir une revanche sur le Front Populaire que la « révolution nationale » pétainiste avait cru effacer mais dont la Libération a repris et amplifié les conquêtes. La vieille droite qui veut sa revanche sur 1968, sa revanche sur les combats qu’elle a depuis perdus - celui de Juppé, battu en 1997, revenant en 2007 ; ceux d’ex ministres contraints par le mouvement populaire d’abandonner tout ou partie de leurs projets et qui reviennent à la charge ; ceux de personnages liés aux milieux obscurantistes et "intégristes" qui se sont jusqu’ici opposés en vain aux progrès de civilisation arrachés ces dernières décennies…(au delà du « cache-sexe » Kouchner la composition du gouvernement Fillon est à cet égard significative ). La vieille droite qui n’a jamais pu imposer l’alignement de la France sur le modèle américain et qui rêve cette fois d’y parvenir. L’existence d’une telle droite, autoritaire et populiste, n’est pas une « spécificité française ». Et sans doute faut-il réfléchir au fait que, dans la tradition des politiciens qui ont incarné cette droite, en France et ailleurs, les références aux valeurs de gauche, aux « mots » de gauche – jusque ceux de « socialisme » ou de « révolution », ont souvent masqué la nature réelle des politiques suivies. Mais quand la droite la plus ultra peut se payer ce luxe , c’est que vraiment ça va bien mal à gauche !.. Le temps de l’indignation passé, de cela aussi il faudra bien se soucier ! Le Parti communiste est concerné au moins autant que les autres à gauche.

>. S.Royal s’est, elle aussi, efforcée de prendre ostensiblement en compte l’exigence de « rupture ». D’abord en valorisant la possibilité qu’une femme devienne pour la première fois Présidente de la République. Mais l’argument était à double tranchant dans un pays qui refuse obstinément de donner leur place aux femmes dans la vie politique, ce qui nourrit le doute sur leur capacité à exercer de hautes fonctions. La candidate socialiste en a subi les conséquences. Dans son propre parti. Puis dans l’électorat, y compris dans l’électorat féminin... Elle s’est présentée comme une femme « libre », ouvertement critique sur les politiques menées hier par les gouvernements socialistes – notamment celui de L.Jospin – et distante du Parti socialiste et de ses « éléphants », qu’elle a affrontés et battus lors de la « primaire » de l’automne 2006.

On peut d’ailleurs penser, au vu du comportement des électeurs et des adhérents du PS lors du référendum de 2005, qu’elle n’aurait pu, sans cette distanciation, ni gagner cette primaire, ni ensuite obtenir les résultats qu’elle a obtenus le 22 avril et le 6 mai. A l’évidence, d’autres candidats socialistes ne les auraient pas obtenus. On en a d’ailleurs confirmation par les jugements sévères portés depuis sur le PS, ses dirigeants et ses « éléphants » par leurs propres électeurs, sympathisants et adhérents. Comme N.Sarkozy, la candidate socialiste a voulu prendre en compte en même temps l’exigence de sécurisation sociale collective et l’attente de reconnaissance des individus, de leurs capacités d’initiative et de responsabilité – notamment dans le travail. Elle l’a fait en avançant un concept – resté au demeurant assez vague - de « donnant - donnant » articulé autour de « contrats » entre la collectivité et l’individu. Mais son autonomie par rapport au PS et à ses « éléphants », qui n’ont pas hésité à la contrer et à la contraindre à changer de pied plusieurs fois au cours de sa campagne, s’est vite révélée très relative.

A la différence de N.Sarkozy « prenant » aux chiraquiens la direction de l’UMP et la rassemblant derrière lui pour soutenir une politique affichée comme « en rupture » avec celle de J.Chirac, S.Royal n’a pas réussi à convaincre de sa capacité à entraîner sa propre formation politique derrière elle pour faire une politique réellement nouvelle, en rupture avec les politiques passées du PS. De la même façon, la tentative de « démocratie participative » ( au demeurant limitée ) qui avait marqué la pré-campagne de S.Royal, soucieuse d’afficher la volonté de « sortir du système politique », s’est vite heurtée à la rigidité de l’appareil socialiste. Elle ne pouvait s’en affranchir, alors même que N.Sarkozy pouvait quant à lui se présenter comme porteur d’idées neuves correspondant aux demandes des Français, et capable de les imposer à son camp. Face aux rappels au respect du programme officiel du PS, élaboré sur des compromis d’appareil, sans véritables réflexions nouvelles sur les vrais défis de notre temps comme sur les raisons de l’échec de 2002 , et refusant de s’engager sur les moyens réels – financiers et démocratiques- d’une autre politique, les idées lancées par la candidate socialiste pour tenter de répondre aux attentes populaires par des propositions nouvelles sont restées à l’état de « slogans » sans véritable consistance, donnant l’impression d’une continuelle improvisation, annonciatrice d’inefficacité. >.

F.Bayrou, quant à lui, s’est surtout concentré sur la dénonciation de l’inefficacité d’un système politique fondé sur l’affrontement de deux camps et leur alternance au pouvoir. Il s’est appuyé pour cela sur les déceptions provoquées par les alternances successives, et sur l’idée assez répandue, et régulièrement reprise par certains médias que droite et gauche seraient aujourd’hui des notions dépassées puisque dans les faits les politiques de l’une et de l’autre conduisent aux mêmes résultats. Et il a tenté de convaincre qu’il était, de par sa position « centriste » et à partir des « distances » qu’il avait prises ces dernières années avec l’UMP, le seul capable de conduire le pays vers un changement politique radical, en « prenant les bonnes idées partout », et en rassemblant toutes les compétences, de quelque bord qu’elles soient, dans un même gouvernement. Il a voulu dans le même temps capter à son profit ce que l’on a appelé le « tout sauf Sarkozy ».

Il a pu s’appuyer sur des sondages complaisamment commentés le présentant comme le seul capable de battre N.Sarkozy dans un second tour. Mais cette posture le réintégrant dans l’affrontement gauche/droite qu’il disait vouloir dépasser a sans doute contribué à amoindrir la crédibilité de sa démarche. Il a évité par ailleurs de s’avancer réellement sur le fond des choix politiques nouveaux à opérer ( ce qui l’aurait ramené vers la droite dont il partage les vues pour l’essentiel ). Mais c’est précisément sur ce terrain du contenu des changements politiques que N.Sarkozy s’est attaché à convaincre que ce qu’il proposait correspondait aux attentes populaires, et qu’il serait capable de le réaliser, à la fois parce qu’il en avait la volonté, et parce qu’il disposerait d’une majorité pour le soutenir. C’était évidemment le plus efficace pour combattre le « tout sauf Sarkozy ». Et c’est parce qu’il y a réussi que le candidat de l’UMP a pu retirer à F.Bayrou l’avantage supposé d’être le seul à pouvoir l’empêcher d’accéder au pouvoir ! Enfin, F.Bayrou devait absolument convaincre qu’il pourrait être au second tour, et qu’en cas de victoire il pourrait rassembler une majorité derrière un gouvernement « d’union nationale ». Il n’y est pas parvenu. Annoncée et amorcée dès avant le premier tour et confirmée ensuite, la défection des députés UDF ralliant N.Sarkozy en prévision des élections législatives au cours desquelles ils allaient avoir besoin des voix des électeurs de l’UMP ne l’a évidemment pas aidé ! >.

Après un premier tour réussi ( succès de l’OPA sur les voix lepénistes, et important vote d’adhésion levant l’obstacle du « tout sauf Sarkozy » ) le candidat de l’UMP a pu franchir une dernière étape : récupérer à son profit l’aspiration à dépasser le système politique d’alternance gauche droite. F.Bayrou en avait fait l’axe principal de sa campagne, mais il n’avait pas passé le cap du premier tour. Il ne serait donc pas en position de « prendre les bonnes idées partout ». Et pas davantage de faire travailler dans un même gouvernement des ministres venus des deux bords. S.Royal s’avançait vers un rapprochement avec le centre, mais évidemment dans le cadre d’une victoire contre la droite. Elle s’avançait d’ailleurs prudemment, en cherchant à ne pas perdre sur sa gauche ce qu’elle n’était pas certaine de gagner sur sa droite. Ses possibilités de trouver une majorité solide après une éventuelle victoire étaient problématiques. Et surtout, elle n’apparaissait plus en mesure de gagner l’élection . Dans ces conditions, N.Sarkozy pouvait annoncer qu’il serait le seul à pouvoir faire ce dont F.Bayrou avait rêvé…Il était ainsi en mesure de « rafler la mise », en récupérant à son profit les attentes exaspérées de rupture politique, à la fois dans les contenus et dans les pratiques. Il avait en tout cas convaincu une majorité d’électeurs qu’il répondrait vraiment à ces attentes. Il s’est attaché à ne rien faire qui puisse leur laisser soupçonner le contraire… au moins jusqu’aux élections législatives gagnées sur cette lancée.

PCF : oser regarder l’échec en face.

Les trois candidats qui ont dominé la campagne présidentielle ont, chacun à leur façon, placé les enjeux des échéances de 2007 sur le terrain des solutions avancées face à l’exigence de sécurisation sociale et des réponses proposées à l’exaspération devant les blocages du système politique. Ils avaient compris que c’était la condition pour ne pas revivre cinq ans après la situation d’avril 2002 – et cette fois avec quelles conséquences ? Et c’est parce qu’ils ont fait ce choix que la campagne a intéressé les Français et s’est achevée par une participation électorale massive. Le battage médiatique orchestré autour des sondages et de la personnalisation de l’élection n’a fait qu’accompagner le mouvement ; il ne l’a pas créé. Le PCF, quant à lui, a voulu mettre en avant un autre enjeu, sur lequel s’est engagée la candidate désignée par les communistes : changer la donne à gauche pour changer les choses en France. Cela signifiait – c’était l’objectif clairement affiché dès sa désignation : solliciter l’électorat pour qu’il donne à une « gauche populaire et antilibérale » la suprématie face aux « gauches du renoncement » (renoncement « réformiste » du PS d’un côté, et renoncement « gauchiste » de la LCR de l’autre ) afin qu’elle soit assez forte pour rassembler toute la gauche sur une politique antilibérale pour « battre la droite » et ensuite « réussir à gauche » au gouvernement . Certes, les attentes populaires n’étaient pas pour autant absentes de la campagne.

Elles étaient bien présentes dans la dénonciation de la politique et des projets de la droite, dans la critique des insuffisances et des ambiguïtés du programme de la candidate socialiste. Et dans les propositions du programme porté par MG. Buffet dans sa campagne, puis par les candidates et candidats aux législatives. Ces propositions ont été écoutées avec intérêt. Elles ont souvent suscité l’adhésion. Mais les conditions posées pour qu’elles puissent être concrétisées – que la « vraie gauche » l’emporte d’abord sur les autres, puis qu’elle les rassemble pour pouvoir enfin gagner et mettre en œuvre sa politique – avaient peu de chance d’être réunies en 2007… Par ailleurs, l’objectif d’inverser, ou à tout le moins de rééquilibrer sensiblement le rapport de forces à gauche s’affichait comme une volonté d’affaiblir le Parti socialiste. Or la présence de sa candidate au second tour était un des enjeux du scrutin. Pour empêcher l’extrême droite de rééditer son « coup » de 2002.

Et pour pouvoir éventuellement battre la droite et son candidat, dont l’élection était redoutée par l’électorat de gauche. Singulièrement l’électorat communiste dont une partie a même été tentée de voter F.Bayrou pour cette raison. Malgré l’intérêt suscité par ses dénonciations et ses propositions, le discours communiste devenait incompréhensible voire carrément inaudible pour de nombreux électeurs et électrices de gauche – y compris, comme l’ont montré des enquêtes, parmi l’électorat communiste de 2002. Il devenait du même coup difficile à développer, au delà des tracts et des meetings, dans les contacts individuels qui sont, on le sait, l’atout essentiel des communistes dans les campagnes électorales. Il faut regarder les réalités en face : le Parti Communiste Français n’a pas réussi à imposer dans la campagne présidentielle l’enjeu d’un changement de la donne à gauche. Les résultats de l’élection présidentielle- même heureusement « atténué » par ceux des législatives -entraînent un nouvel et grave affaiblissement de son audience électorale, et au-delà politique. C’est un échec dont les conséquences pour l’avenir peuvent être considérables. Pour le Parti communiste - Pour les hommes et les femmes communistes de France - Pour les forces qui veulent résister face au capitalisme financier et à sa mondialisation, et ressentent l’urgente nécessité pour la France, l’Europe et le monde de se libérer de leur domination - Pour la gauche française : de quel poids va peser un PCF marginalisé dans la recomposition qui s’engage ? Il serait irresponsable de nier cet échec ou d’en sous-estimer la portée. Il ne s’agit pas seulement de le reconnaître. Ni même de « l’assumer ».

Il faut en rechercher et dire les causes – celles qui tiennent aux choix politiques récents, et celles qui viennent de plus loin et plus profond. Et il faut envisager l’avenir autrement qu’en faisant le gros dos dans l’espoir de jours meilleurs qui ne viendront que si l’on y travaille.

II PCF : Pourquoi ce Waterloo électoral ?

Il peut, après-coup, paraître surprenant que les candidats de la droite et du Parti socialiste aient engagé leurs campagnes à partir des attentes populaires et de leurs propositions pour les satisfaire tandis qu’à l’inverse, la candidate communiste sollicitait de l’électorat un renversement des rapports de forces politiques à gauche comme condition préalable à la satisfaction de ces attentes. Mais il y a deux raisons à cela. L’une tient à l’analyse faite par le PCF des résultats des élections présidentielle et législatives de 2002, puis des évolutions politiques intervenues depuis. L’autre renvoie rien moins qu’à des conceptions fondatrices du Parti Communiste Français ; à des « fondamentaux » vers lesquels il est souvent revenu lorsqu’il se trouvait en difficulté.

Des analyses et des orientations aux conséquences lourdes.

L’analyse de l’élection présidentielle de 2002 s’est tout naturellement focalisée sur le choc provoqué par la rude chute du candidat communiste, de 8,8% en 1995 à 3,3% sept ans plus tard. Mais faute de s’inscrire dans une vision d’ensemble d’un scrutin sanctionnant durement les candidats de la droite et du Parti socialiste – Président et Premier Ministre- pour se terminer par un deuxième tour Chirac-LePen , l’examen des raisons de cette chute fut déconnecté du sens général du « message » délivré par le suffrage universel. Le Parti communiste et sa politique furent seuls mis en cause. Sans lien avec les questions réellement posées à tous les partis politiques après cette élection. Dans ces conditions, ce débat « auto-centré » fut rapidement conclu : le résultat de R.Hue consacrait l’échec (par ailleurs réel) de la majorité de « gauche plurielle » constituée autour du gouvernement Jospin. Mais aussi, par extension, l’échec des stratégies d’union dans un rapport de forces dominé par le Parti socialiste. Celles du passé – de la Libération à 1997, en passant par 1981- mais aussi celles du futur tant que ce rapport de forces ne serait pas inversé ou amplement modifié. Cette analyse surdétermina les orientations stratégiques des années 2002-2007. Elle aurait pu pour le moins être « revisitée » à la lumière des résultats réels des scrutins de 2004.

Il n’en fut rien. On transforma même en « preuve » de leur pertinence les résultats des élections régionales en Ile de France, en vérité loin d’être aussi éclatants qu’on l’a prétendu. Comment ne pas voir qu’il y avait là, en germe, à la fois les bases de la stratégie mise en œuvre pour les échéances de 2007, en même temps que celles de son échec ? Et comment ne pas s’interroger sur l’interprétation faite de la victoire du « non » au référendum sur le TCE en avril 2005 ? Et sur son maintien obstiné, au delà du raisonnable, alors qu’elle était amplement invalidée par les comportements politiques des électeurs de gauche ayant voté « non » et des responsables de partis qui les y avaient appelé ! Cette interprétation donnait à la victoire du « non », majoritaire dans l’électorat de gauche , la signification d’un « basculement » majoritaire dans « l’antilibéralisme » - aussitôt démenti par les votes des mêmes électeurs dans les scrutins qui ont suivi, jusque ceux de 2007 .

On en déduisit pourtant que le moment était venu de construire sur cette base un rassemblement ayant vocation à devenir majoritaire à gauche lors des échéances de 2007 comme il l’avait été, assurait-on en 2005. N’est-il pas nécessaire de regarder aujourd’hui lucidement quelles ont été les conséquences de ces choix ? A commencer par le naufrage (ou le sabordage ?) du mouvement des « collectifs ». Des militants de diverses sensibilités et cultures politiques, parmi lesquels nombre de communistes, s’y sont sincèrement engagés. Ils ont appris les uns des autres. Ils ont noué dans la réflexion et dans l’action communes, des liens qui auraient pu devenir porteurs d’avenir ( on ne peut s’empêcher d’y songer en ces temps de « grandes manœuvres » de recomposition à gauche) . Mais, fondé sur une évaluation erronée du contenu et des possibilités à court terme du mouvement populaire, et s’étant assigné des objectifs électoraux hors de sa portée, il a été conduit à éclater dans l’amertume. Et aussi dans le ressentiment devant ce que beaucoup de participants ont –non sans raison- considéré comme des manipulations politiciennes - dans lesquelles le PCF et sa direction ne sont évidemment pas les seuls à être impliqués.

Mais , par delà les péripéties de la désignation des candidats « antilibéraux » et l’image détestable qu’elles ont pu donner, la légende d’un « non antilibéral » toujours majoritaire à gauche maintenue jusque pendant la campagne présidentielle a encouragé l’idée qu’il fallait oser l’objectif d’inverser le rapport de forces à gauche, et nourri jusqu’au bout pour certains l’illusion que ce serait possible. De quel prix celles et ceux qui y ont cru feront-ils payer leur désillusion et leur désarroi politique ?

Le PCF et la crise du communisme.

Les analyses et les choix stratégiques du PCF dans la période 2002-2007 sont indiscutablement pour quelque chose dans le manque de visibilité et de crédibilité, et dans le résultat de la candidate « gauche populaire et antilibérale ». Puis dans les difficultés des candidates et candidats communistes aux législatives. Mais en rester là ne conduirait-il pas à renouveler l’erreur de 2002 donnant comme principale « explication » au résultat du candidat du PCF la politique d’union à gauche, et la participation au gouvernement Jospin ? A partir d’analyses et de choix stratégiques radicalement différents, le Parti communiste a connu l’échec dans les deux cas.

Et le déclin électoral, symptôme et sanction d’un déclin idéologique et politique posant de plus en plus clairement la question de l’utilité du PCF et de son existence même se poursuit ( au delà de quelques « remontées » ponctuelles sans lendemain) depuis plusieurs décennies. Indépendamment des choix stratégiques effectués. Qu’ils aient ou non conduit à participer à des majorités et des gouvernements de gauche. Ce n’est pas une particularité française. Tous les partis communistes ont dû faire face à ce phénomène, évidemment lié à la faillite du « modèle soviétique », mais qui ne s’y réduit pas. La fin du XX° siècle a été marquée par la crise du communisme. Elle s’est traduite partout par un mouvement historique de déclin allant dans certains pays jusqu’à la disparition pure et simple des partis communistes. Elle a commencé bien avant la chute du mur de Berlin et l’explosion de l’Union Soviétique. Cette « crise » est-elle seulement la conséquence « d’erreurs » ou bien témoigne-t-elle d’un échec historique ? Les erreurs n’ont pas manqué. Elles ont eu et ont encore des conséquences non négligeables. Aucun parti communiste – le PCF pas plus qu’un autre – ne peut s’exonérer de ses erreurs et de ses fautes ( et pour certains, de leurs crimes ) en faisant porter toutes les responsabilités à un « échec historique » anonyme dont la fatalité se serait imposée.

Mais des tentatives pour « redresser la barre » ont eu lieu. Au niveau international – du XX° Congrès du PCUS et de certaines « conférences » internationales des partis communistes qui l’ont suivi, à la Perestroïka de Gorbatchev, en passant par « l’eurocommunisme »… - Et au niveau national – du Comité Central d’Argenteuil sur « les intellectuels et la culture » en 1966 à la « mutation » de la fin des années 1990, en passant par « le Manifeste de Champigny » en 1968 et le XXII° Congrès du PCF en 1976 -. L’analyse des causes de leur échec reste à faire. La capacité des appareils et des certitudes idéologiques à résister aux remises en cause et aux changements y tient sans aucun doute une grande place, sinon la première place. Cela conduit à interroger les bases mêmes sur lesquelles se sont construits ces appareils et se sont fondées ces certitudes. On peut avancer l’hypothèse que par delà les erreurs commises et malgré l’apport incontestable des communistes aux luttes des peuples et aux progrès de l’humanité, c’est d’un échec historique qu’il s’agit. Non pas l’échec d’un « communisme du XX° siècle » organisé autour du « modèle soviétique », qui se serait avec lui éloigné du « vrai » communisme et avec lui aurait sombré ; mais l’échec, au XX° siècle, d’une conception communiste de la transformation sociale sur laquelle avaient été fondés tous les partis communistes.

Le schéma fondateur retenu pour la création des partis communistes, et que les communistes russes se proposaient d’expérimenter, disposait que partout les communistes ( avec éventuellement des alliés en accord avec leurs objectifs) luttaient pour parvenir au pouvoir. Y étant parvenus ils devaient utiliser celui-ci pour construire, à partir d’un projet scientifiquement préétabli, une société nouvelle –une société « socialiste » radicalement différente de la société capitaliste- . Cette société, ils étaient appelés à la diriger au nom de la classe ouvrière, en imposant sa prééminence. Et ils devaient avoir pour perspective la création des conditions matérielles et culturelles pour que dans une phase ultérieure les être humains deviennent capables d’autogérer leur destin Tous les partis communistes ont partagé cette conception faisant du pouvoir d’Etat le levier majeur de la transformation sociale. Mais nulle part elle n’a permis d’atteindre les objectifs annoncés. Il y eut certes des réalisations qu’on ne peut sous-estimer . Il y eut un indéniable apport historique au mouvement des peuples contre le capitalisme, imposant partout des acquis sociaux concédés sous la pression conjuguée des luttes et de la « compétition » entre les différents systèmes sociaux. Mais au bout du compte, l’échec a été dramatique, en URSS , dans l’Est de l’Europe, et ailleurs. Il a contribué de façon déterminante à la perte de crédibilité des partis communistes qui se sont revendiqués pendant des décennies du modèle de ce que l’on appelait le « socialisme réel » qu’ils affirmaient vouloir implanter partout.

Cette conception s’est heurtée, en Union soviétique et ailleurs aux réalités économiques, sociales et culturelles des nations et des peuples. Elle s’y est brisée avec d’énormes dégâts humains et matériels . Et partout ailleurs, elle s’est heurtée aux aspirations croissantes des hommes et des femmes à décider eux-mêmes de leur destin, de la société dans laquelle ils veulent vivre. Même voulu sincèrement et résolument « à la française », le projet du PCF reste « apparenté » à ce qui a partout échoué. Les conceptions fondatrices des partis communistes ont par ailleurs conduit ceux d’entre eux qui n’étaient pas au pouvoir à des stratégies et des comportements politiques qui ont contribué directement à leur déclin. « Si les conditions ne sont pas réunies pour que nous puissions utiliser le pouvoir d’Etat comme levier pour la transformation socialiste de la société, à quoi bon nous y compromettre ? »…

On s’est posé cette question plusieurs fois à la direction de quelques partis communistes, notamment au Parti Communiste Français. Il serait intéressant de conduire une réflexion non seulement historique mais politique sur les réponses qui ont été données dans différentes circonstances. Et sur les effets qu’elles ont eues sur l’audience du parti ainsi que sur la confiance en sa capacité à s’impliquer pour améliorer la situation des gens et avancer vers les changements auxquels ils aspirent.. Ainsi, la participation du Parti socialiste et du Parti communiste à un gouvernement d’union en 1981 – ouvrant le « cycle » politique qui vient probablement de s’achever en 2007 – a été « préparée » par F.Mitterrand dans la décennie précédente par la conquête du PS sur le thème de la rupture avec le capitalisme pour changer la vie, tandis que le PCF affirmait en écho que la mise en œuvre du Programme Commun allait « ouvrir la voie au socialisme ».

Les conditions étaient donc réunies pour permettre la participation communiste au gouvernement… dont le PCF s’est retiré quatre ans plus tard puisque F.Mitterrand avait « renoncé » …Illusions entretenues en 81 ; désillusion et amertume en 84, quand beaucoup reprochaient aux communistes, à la fois de les avoir trompés …et de ne pas être restés pour empêcher la « dérive à droite » des gouvernements socialistes, bientôt ouverts aux centristes, appelés en renfort pour « combler le trou » et préserver l’existence d’une majorité… Toute ressemblance avec les problèmes politiques de la gauche française en ce printemps 2007 ne serait pas fortuite ! Paradoxalement, la conception faisant du pouvoir le levier de la transformation sociale a provoqué une méfiance du pouvoir – longtemps prolongée par une méfiance vis à vis des élus communistes impliqués dans des pouvoirs, même limités. Mais n’a-t-on pas entendu récemment que « ce ne serait pas grave si le parti perdait des élus, pourvu qu’il ne perde pas son âme antilibérale » ? Mesure-t-on la perte de crédibilité liée à ce qui est évidemment perçu comme un refus de prendre ses responsabilités, même dans des conditions difficiles, pour tenter de faire quand même avancer les choses ? Est-il exagéré de penser qu’il y a eu là – entretenue par des arguments et des comportements contradictoires sur cette question au cours des dernières décennies ( y compris l’argument récent selon lequel les gouvernements de gauche n’ayant pas changé la société, en 1981 et en 1997, il ne fallait pas « refaire ce qui avait échoué ») – une contribution, involontaire mais réelle, à l’installation des réflexes de « moindre mal » et de « vote utile » dans les comportements politiques du peuple de gauche ? La question de la participation au(x) pouvoir(s) divisait déjà le mouvement socialiste à la fin du XIX° siècle. Elle était par exemple au cœur de la controverse opposant Jaurès et Guesde, à Lille en novembre 1900. Mais il s’agissait alors de la participation à des gouvernements « bourgeois ». Après la scission du mouvement, avec d’un côté les communistes et de l’autre les socialistes, elle s’est posée autrement. Très vite, du principe de non participation si ce n’est pas pour réaliser la transformation socialiste, on est passé au principe de l’impossibilité de l’union avec des socialistes qui ne voulaient pas réellement transformer la société…à moins que les communistes, après avoir dénoncé leur « trahison » ne gagnent la majorité des travailleurs et des couches populaires à leurs conceptions révolutionnaires, rendant ainsi possible un « front unique » avec les travailleurs socialistes pour conquérir ensemble le pouvoir.

Ce fut la stratégie dite « classe contre classe » qui aboutit à laisser le champ libre au fascisme en Italie puis en Allemagne, et qui aurait pu avoir des effets aussi désastreux en France s’il n’y avait été mis un terme avec les initiatives du PCF pour un Front Populaire dont M.Thorez, indiquait clairement qu’il n’avait pas pour objectif « le socialisme » mais « le pain, la paix et la liberté »…Là encore, on ne peut qu’être frappé par la « ressemblance » entre la stratégie « pure et dure » appelant à « battre » les socialistes « droitiers » pour pouvoir rassembler le peuple de gauche…et la stratégie de la gauche « populaire et antilibérale » faisant de la lutte contre « les gauches du renoncement » - particulièrement le PS « social libéral » refusant de transformer vraiment la société - la condition indispensable pour ouvrir une vraie perspective à gauche. En filigrane de ces quelques remarques, évidemment sommaires, se dessine un double questionnement :  A l’exception de la décennie 1936-1946 où, en accord avec l’Internationale Communiste, il a été décidé, face au danger du fascisme menaçant de gangrener toute l’Europe, de passer outre aux principes fondateurs afin de permettre le rassemblement pour « le pain, la paix et la liberté », le PCF, dans toutes les périodes difficiles de son histoire n’a-t-il pas eu tendance à se « replier » sur ses « fondamentaux identitaires » ? Après l’éviction des ministres communistes du gouvernement en 1946.

Après que des élections eurent montré que la signature du Programme Commun avait d’abord profité électoralement au PS de F.Mitterrand devenant la première force à gauche. Après la rupture de « l’union de la gauche en 1984. Après l’échec de 2002… Et déjà des voix ne s’élèvent elles pas pour prôner un nouveau repli après celui de 2007 ?…Mais si la période 36-46 s’était achevée avec un PCF « premier parti de France » revendiquant un million d’adhérents et voisinant les 30% dans les élections, les périodes de repli ont vu le déclin s’accentuer, pour arriver, en 2007, à 2% à l’élection présidentielle, tandis que de nombreux adhérents continuent de s’éloigner du parti. Peut-on « expliquer » ce déclin uniquement ou même principalement par des « erreurs » circonstancielles ? Ses causes ne sont elles pas plutôt « structurelles » ; inhérentes à l’identité des partis communistes du XX° siècle – dont le PCF. Une identité que l’on a maintenue sans vouloir ou pouvoir poser aux communistes la question de la pertinence de « fondamentaux » qu’au contraire on invoquait rituellement pour « justifier » les inflexions successives et parfois contradictoires données à la stratégie du parti. La crise du communisme, dont participe le déclin du PCF, n’est-elle pas une crise identitaire consécutive à ce qu’il faut bien appeler l’échec du communisme au XX° siècle ? Les réponses à ces questions peuvent éclairer le passé. Mais elles interrogent surtout l’avenir.

III- Notre proposition : fonder un autre parti.

Communisme ? Parti ? Ne pas esquiver les questions.

>. L’échec du communisme au XX° siècle signifie-t-il la « mort » inéluctable, la « fin de l’histoire » pour le communisme ? Il faut selon nous poser franchement cette question, et la traiter autrement que sur le seul mode affectif ou commémoratif. Il n’y a pas de « sens de l’histoire » impliquant l’existence, en tous temps et en tous lieux d’un courant de pensée et d’action communiste, obligatoirement incarné dans un parti communiste. Mais il y a une histoire qui se fait. Elle a du sens. Un sens qui n’est prédéterminé ni par une pensée philosophique, ni par la visée stratégique d’un parti politique. Un sens déterminé par le contenu et la forme des luttes des êtres humains pour vivre mieux et épanouir leur personnalité dans une société qui les respecte et les protège. Ces luttes ne se résument pas aux affrontements de classes. Mais l’affrontement entre les peuples et le capitalisme en est depuis plusieurs siècles un élément essentiel.

Cet affrontement, dans ses contenus et dans ses formes actuelles porte du « sens » qui ne peut être indifférent à qui s’interroge sur la pertinence à notre époque de la pensée et de l’action communistes, de « l’association » de celles et ceux qui s’en revendiquent , et de la perspective d’un communisme dont Marx et Engels avaient tenu à préciser ( nous ne les avons visiblement pas entendus ! ) : il « n’est pour nous ni un état qui doit être créé, ni un idéal sur lequel la réalité devra se régler. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l’ordre actuel ». Dans cet affrontement grandit la contestation concrète de ce qui fait l’essence même du capitalisme d’aujourd’hui, dominé par la « finance » et mondialisé : C’est la contestation du droit des gros actionnaires à massacrer des entreprises et des êtres humains sur l’autel des profits financiers ; C’est la contestation du droit des puissances d’argent à tout transformer en « marchandise ». C’est la contestation des critères de la rentabilité capitaliste. Contestation concrète, elle esquisse dans l’action d’autres critères : priorité à la recherche, à la qualification et aux salaires plutôt qu’aux « gains de productivité » renforçant l’exploitation des salariés ; critères « anti-précarité » imposant la sécurité d’emploi ou de formation et la reconnaissance des qualifications ; nouveaux droits donnant aux travailleurs et aux peuples les moyens de s’affranchir de la dictature « mondialisée » du capitalisme financier sur la gestion des entreprises , les échanges commerciaux, les économies nationales et régionales.

C’est la contestation concrète du dogme ultralibéral de la concurrence sans limite, lui opposant la revendication de coopérations et de mises en commun à tous les niveaux, impliquant des services publics efficaces et démocratiques. C’est la contestation de la mondialisation capitaliste et du pillage des peuples et de leurs ressources naturelles par les « multinationales » et les puissances qui les servent. Contestation concrète par les luttes des peuples pour la paix, la liberté, l’indépendance, le respect de leurs choix sociaux et culturels, la préservation de leur environnement et de l’avenir de la planète. Jamais cette contestation concrète du capitalisme, qui parle de respect humain, de coopérations et de mises en commun n’avait atteint un tel niveau dans l’identification de ce qui n’est plus tolérable comme dans l’approche collective de solutions qui dessinent des « pistes » pour un « après capitalisme ». La victoire de la droite en France au printemps 2007 ne peut occulter la réalité de ce « mouvement » contestant concrètement le capitalisme – en France et partout dans le monde- et qui a manifestement quelque chose à voir avec ce « communisme » que l’on prétend définitivement mort. Mais si c’est de « communisme » qu’il s’agit, il serait faux de prétendre qu’il ne s’agit que de communisme. Le « mouvement réel » porté par les aspirations, les réflexions, les idées, les élaborations au cœur des luttes des êtres humains aujourd’hui ne peut se résumer à la contestation de la « civilisation de la marchandise et de la concurrence de tous contre tous » pour avancer vers une « civilisation de partages et de solidarités de tous avec tous » qui serait tout entière contenue dans les limites de conceptions élaborées il y a plus d’un siècle. Avec les connaissances de l’époque, et en réponse aux problèmes que les hommes et les peuples se posaient alors.

Abandonner la référence au communisme serait « passer à côté » de ce qui grandit dans les consciences individuelles et collectives en ce début de XXI° siècle. Mais ce serait aussi « passer à côté » que de s’y cantonner sans s’ouvrir à d’autres références issues elles aussi du « mouvement réel », dans le « monde réel » d’aujourd’hui confronté à des problèmes nouveaux. Des problèmes liés, par exemple à l’exigence grandissante des êtres humains à maîtriser leur vie – y compris et d’abord dans le travail - , et aux possibilités nouvelles d’y parvenir, ou à l’impérieuse nécessité de préserver la planète laissée demain aux générations futures... >. De même, si la victoire de la droite doit beaucoup à la faiblesse de la gauche, n’est-ce pas parce que ce « mouvement » ne se reconnaît aujourd’hui dans aucune des offres politiques des composantes de cette gauche, parti communiste compris ? Et l’échec des candidatures refusant la référence à un parti (comme J.Bové) ou préférant à cette référence l’invocation d’une gauche « différente » sans existence réelle (comme MG.Buffet ) ne doit-il pas faire réfléchir ? Il y a un rapport direct entre cette grande conquête républicaine qu’est le recours au suffrage universel pour décider des choix concernant la politique du pays et la manière de la conduire, et l’existence de partis politiques pour proposer ces choix. Il y a un rapport direct entre l’existence et l’action de véritables partis politiques et « l’identité nationale républicaine ». C’est une question sur laquelle les communistes français ont selon nous beaucoup à réfléchir et à innover. Ne pas l’avoir fait nous a conduits à être « désarmés » dans le débat sur « l’identité nationale » qui a marqué l’élection présidentielle. Oui, il y a besoin – un besoin urgent- d’un parti dans lequel puisse se reconnaître et s’exprimer le mouvement qui conteste la domination du capitalisme sur la société française et sur le monde, et qui porte l’aspiration à un « bond qualitatif » vers une civilisation de partages et de solidarités. Mais ce parti ne peut reproduire ce qu’ont été dans le passé les partis politiques représentatifs des différentes composantes de la gauche française, PCF compris. Pour correspondre au besoin qui vient d’être évoqué, il doit prendre en compte les bouleversements intervenus dans la société et dans le monde, dans la vie des gens tout simplement, et dans des pratiques sociales nouvelles. Notamment des pratiques de démocratie directe. Celles ci ne peuvent, on l’a vu, se substituer aux pratiques républicaines dans lesquelles les partis politiques ont un rôle essentiel. Mais elles peuvent devenir un élément dynamisant d’une démocratie moderne.

>. Il faut le dire clairement : le PCF ne peut être ce parti dont le besoin se fait si cruellement sentir. Pour les raisons qui découlent des exigences qui viennent d’être évoquées. Car répondre à ces exigences implique une rupture avec les conceptions sur lesquelles il a été fondé et qui ont façonné sa « culture » et sa façon de vivre et d’agir.

Cette rupture n’induit en rien la négation de ce que ce parti a su faire de positif et d’utile à notre peuple, à notre pays, d’utile aux luttes des peuples pour la paix et le progrès. C’est même tout le contraire. Elle permet de clarifier une question jusqu’ici tabou : à quel « communisme » se réfère le PCF ? Il faut sortir d’une dualité de références qui brouille l’image du parti et sème le doute sur des positions et des actions passées dont les communistes d’aujourd’hui sont légitimement fiers. Le communisme auquel se réfère le PCF, c’est celui dont les conceptions en matière de transformation sociale ont présidé à sa fondation. Il renvoie l’image de l’expérience soviétique et de son issue dramatique. Mais c’est aussi le « communisme français » dont les racines remontent loin dans l’histoire du pays. Il l’a explicitement invoqué lorsqu’il est heureusement « sorti des clous » des conceptions fondatrices pour contribuer aux larges rassemblements du Front Populaire et de la Résistance. Il s’y est référé en entreprenant « la mutation » dans les années 1995-2000.

Il n’y a pas d’avenir sans rupture avec ce qui dans le passé a obscurci la vision de ce que des centaines de milliers d’hommes et de femmes communistes ont fait au service des travailleurs, du peuple, et du pays .Il n’y a pas d’avenir sans rupture avec ce qui a trop souvent limité ou coupé leurs élans novateurs et les a ramenés chaque fois vers des stratégies et des pratiques de repli idéologique et politique. Il n’y a pas d’avenir dans un immobilisme qui serait précisément un reniement de l’intelligence et de l’audace dont ils ont su faire preuve en des périodes décisives de l’histoire du pays, et qui ont permis un enracinement populaire du PCF dont les traces sont encore fortes malgré le déclin des dernières décennies.

Les communistes français face aux recompositions en cours.

Partout – et notamment en Europe – des recompositions politiques sont à l’œuvre, à gauche comme à droite.

Le XX° siècle s’est en effet achevé sur un cumul explosif d’échecs :

 Echec du communisme. Il avait commencé le siècle avec une révolution réussie. Il l’avait poursuivi avec l’Union Soviétique deuxième puissance mondiale, essaimant en Europe et au-delà. Il l’a terminé dans l’effondrement des « pays du socialisme réel » et la marginalisation ou la disparition des partis communistes ;  Echec de la social-démocratie. Le « modèle social » qu’elle avait instauré dans plusieurs pays n’a pas résisté à la mondialisation du capitalisme financier avec lequel elle avait espéré pouvoir composer en en limitant les « excès ». Partout, les partis socialistes et socio-démocrates s’interrogent sur les finalités de leurs politiques – notamment de leurs pratiques gouvernementales. Beaucoup connaissent une véritable crise d’identité. Partout ils cherchent comment et avec qui « rebondir ». C’est le cas du Parti socialiste en France ».  Echec de GW Bush aux Etats-Unis et dans sa politique de force sur la scène internationale ; difficultés de la mondialisation capitaliste se heurtant toujours davantage aux peuples qui veulent maîtriser leur destin et refusent la poursuite du pillage de leurs ressources : l’offensive lancée par le capitalisme dans les années 1970 , en anticipant la fin du monde « bipolaire » dominé par l’URSS et les USA, et en tentant d’organiser un monde que les Etats-Unis domineraient sans partage, a « réussi » dans un premier temps. Elle rencontre aujourd’hui des difficultés majeures. Et malgré sa nette victoire, N.Sarkozy n’est pas assuré de gagner son pari visant à réussir ici ce qui est en train d’échouer ailleurs. C’est dans ce contexte que s’engagent en France d’importantes recompositions politiques.  A droite, N.Sarkozy veut que sa majorité présidentielle couvre tout le terrain, du centre à la droite la plus à droite. A gauche, le Parti socialiste cherche à occuper seul tout le terrain allant de « l’aile gauche de la gauche » jusqu’au centre. En absorbant tout ce qui se trouvera sur son passage (Verts, Radicaux de gauche, « Chevènementistes », et éventuellement « électrons libérés » par « l’explosion » attendue du PCF…). Et la LCR veut quant à elle fédérer tout ce qu’elle pourra « prendre » à la gauche du PS. Les uns et les autres s’accordent dans l’espoir de pouvoir s’approprier au passage les « dépouilles » du PCF. Les uns comme les autres s’attachent à empêcher les éventuelles velléités de scission dans leurs rangs. Ceux qui, au PS, laissaient entrevoir la possibilité de construire « autre chose » à gauche, à l’image du rassemblement du « non » sur les tribunes de la campagne référendaire, s’entendent répondre qu’ils pourront le faire dans le cadre du « grand parti » envisagé aussi bien par F.Hollande que par H.Emanuelli. Et le projet de nouveau parti d’extrême gauche lancé par la LCR entend bien intégrer ceux de ses militants qui s’étaient engagés dans les « collectifs unitaires ». Quelles que soient leurs interrogations ou leurs hésitations sur la voie à suivre dans une situation si difficile et compliquée, les militantes et militants communistes voudront réfléchir et décider par eux mêmes des initiatives à prendre. Et entreprendre eux mêmes les constructions nouvelles nécessaires. Ils n’attendent pas qu’on les engage – même avec les meilleures intentions du monde - à leur place, « de l’extérieur », sans qu’ils sachent avec qui ni pour aller où. Ils n’attendent pas non plus que, faisant comme s’ils n’existaient déjà plus en tant que collectif capable de décider de son sort, on leur demande de « contribuer » à un projet qui ne serait pas le leur. Pourquoi décider d’emblée que puisqu’il n’a pas été possible hier de transformer le PCF, les communistes ne seraient pas capables aujourd’hui de faire face à la situation – y compris en s’ouvrant pour cela à la coélaboration avec d’autres, non membres du PCF, qui se retrouveraient avec eux dans une conception neuve du parti nécessaire à notre époque ? C’est aux hommes et aux femmes communistes – adhérents ou non aujourd’hui du parti- qu’il faut selon nous soumettre des idées, des propositions. Avec confiance. Avec respect pour elles et pour eux, pour ce qu’ils représentent , pour ce que, même défait , même affaibli , leur parti, notre parti, représente dans ce pays ! Avec esprit de responsabilité et volonté de construire dans la diversité.

Quelles propositions pour « un autre parti » ?

Il ne s’agit pas de formuler LA proposition devant laquelle tout le monde s’exclamerait : « mais oui, bien sûr, c’est ça qu’il faut faire » ! Il s’agit d’aller au bout d’une réflexion et d’en soumettre le résultat à la discussion, en espérant qu’elle apportera quelque chose à l’élaboration collective. Il ne s’agit pas de formuler une proposition contre d’autres propositions déjà formulées ou qui le seront dans les semaines qui viennent, mais pour un débat constructif en vue duquel chacun doit voir « toutes les cartes » sur la table.

1. Cette proposition, c’est que les l’on crée les conditions – c’est à dire que l’on prenne les initiatives appropriées- pour que les hommes et les femmes communistes de France – membres ou non du PCF – puissent trouver en eux-mêmes les ressources pour fonder ensemble un autre parti politique.

Un autre parti politique pour qui le mouvement doit être le levier majeur de la transformation sociale. Et nous voulons préciser que par « mouvement » nous entendons tout à la fois : le mouvement populaire, les luttes sociales, le mouvement des idées et de la culture, les initiatives et propositions du monde associatif, l’action et les propositions des partis politiques – dont bien sûr celui que nous proposons aux communistes de fonder -. Une action impliquant la participation aux institutions et aux pouvoirs à tous les niveaux, chaque fois que cela peut permettre des avancées et des conquêtes nouvelles ; chaque fois que cela peut permettre au mouvement d’ensemble de progresser, de gagner des positions nouvelles modifiant positivement les rapports de forces idéologiques et politiques.

Un autre parti politique ne se considérant pas lui-même « extérieur » (« au dessus » ou « à côté ») mais « partie prenante » au mouvement. Avec le souci constant d’y être un apport vivifiant par ses propositions et ses initiatives, sa contribution aux débats d’idées, aux recherches, aux innovations, aux luttes sociales et démocratiques. Il s’agit pensons-nous d’être bien sûr « à l’écoute » des revendications et des aspirations telles qu’elles s’expriment vraiment, et aussi « d’entendre » et de comprendre les idées, les solutions qui s’élaborent dans le mouvement.

Et, inséparablement, il faut faire exister par lui-même ce parti, développant et portant dans le débat ses analyses, ses propositions et ses initiatives.

Un autre parti politique actif et entreprenant pour faire progresser son organisation et son audience – y compris bien sûr son audience électorale – au service des progrès du mouvement contestant concrètement le capitalisme et ouvrant des pistes pour en libérer la société française et participer aux luttes pour une autre mondialisation de solidarités et de coopérations.

Un autre parti politique entreprenant et créatif sur le terrain de la conquête de droits et de pouvoirs nouveaux pour les salariés dans les entreprises et dans l’économie, pour les citoyens dans tous les secteurs et à tous les niveaux de la société.

Un autre parti politique entreprenant et créatif dans les luttes pour la conquête de positions électorales et de pouvoirs dans les différentes collectivités et assemblées où se fait quotidiennement « la politique » qui détermine la vie de millions de nos concitoyens. Un parti sachant pour cela proposer à tous les niveaux des programmes d’action concrète audacieux et réalistes, en appui sur le mouvement et le soutenant ; des candidates et candidats s’engageant résolument dans leur mise en œuvre, qu’ils soient dans l’opposition ou dans une majorité , et rendant compte de leur activité devant les populations.

Un autre parti politique sachant prendre les responsabilités que le suffrage universel lui aura confiées, en participant au pouvoir dans les assemblées élues et le cas échéant au gouvernement. Non pas en entretenant l’illusion que cette seule présence suffirait à régler des problèmes que l’intervention des citoyens et les luttes populaires n’auraient pu résoudre, mais en utilisant le pouvoir pour : - généraliser et consolider les conquêtes sociales et démocratiques obtenues par les luttes ; - s’attacher à toutes les avancées qui peuvent permettre aux individus de participer pleinement à la vie démocratique et au développement du mouvement populaire : ce qui couvre un champ immense allant de la réduction du temps de travail ( qui n’est pas seulement une mesure « sociale ») aux secteurs de l’éducation, de la formation, de la culture ( pas seulement « l’accès » à la culture mais les moyens de participer à la « création » qui est aussi un moyen de comprendre le monde pour le transformer ), de la vie associative… ; - fournir au mouvement les informations et les propositions dont il a besoin pour être le plus efficace possible.

Un autre parti politique sachant rechercher et réaliser des rassemblements et des alliances multiformes permettant la rencontre des acteurs du mouvement social et démocratique et des militants et responsables politiques, dans le respect de l’indépendance et des tâches spécifiques des uns et des autres, en évitant la confusion des genres qui a contribué à l’échec des « collectifs unitaires ». La question mérite une réflexion approfondie à partir de l’expérience de celles et ceux qui y ont participé. Un autre parti politique animé d’une vision nouvelle de sa vie et de son activité, faisant de l’ouverture aux autres et de la recherche du travail en commun pour les luttes comme pour l’élaboration des propositions une constante de l’activité des adhérents et des organisations, et pas seulement une pratique ponctuelle à l’occasion des échéances électorales.

2. Comment, à partir de quelles références cet autre parti se définira-t-il ?

Pour les raisons déjà exposées, la référence au communisme nous paraît indispensable – non par nostalgie ou par « dogmatisme », mais parce qu’elle correspond au « mouvement réel » au service duquel doit être ce parti. Mais on ne peut ignorer la difficulté qu’elle comporte : sous quelle forme affirmer cette référence pour qu’elle ne soit pas référence au passé plutôt qu’à l’avenir ? Comment montrer qu’elle correspond à des exigences d’aujourd’hui et pas à des dogmes et à des pratiques du passé ? Et en même temps comment montrer qu’elle est aussi dans la continuité d’un apport réel du communisme – notamment du communisme français - qu’il n’est pas question de renier et auquel beaucoup, parmi ceux-là mêmes qui ne votent plus régulièrement pour le PCF sont profondément attachés ? Mais, on l’a vu d’autres références s’imposent aujourd’hui. Liées à un humanisme transformateur du XXI° siècle qui se construit dans toutes les luttes contre les dominations, exploitations et aliénations auxquelles sont confrontés les être humains et les peuples, elles sont la base sur laquelle des hommes et des femmes sont prêts à s’engager sans problème aux côté de militants et dans un parti se revendiquant d’un communisme de notre temps. Comment trouver la forme pour associer de façon visible et mobilisatrice ces différentes « références » dans la façon dont – au delà de son nom qui ne pourra pas tout dire - cet « autre parti » se définira ? On ne peut visiblement résoudre cette question aujourd’hui. Et pourquoi voudrait-on le faire avant d’en avoir débattu avec tous les intéressés - à commencer bien sûr par celles et ceux qui constituent aujourd’hui le PCF ?

IV- Un débat ouvert ; nourri de la richesse des différences..

C’est un vaste débat qu’il faut ouvrir. Un débat d’abord sur le fond. Le problème n’est pas « quel parti voulons nous ? » mais « de quel parti a-t-on besoin ? ». Il ne peut s’agir d’un débat seulement « théorique ». Il doit « coller » à l’expérience militante – aux expériences militantes, qu’il doit solliciter. Et aux nécessités de la lutte. Elle s’annonce rude dans les mois et les années qui viennent. On ne peut cesser d’y participer, « pour cause de travaux de fondation d’un autre parti » ! Il y a besoin d’un débat dont les participants sachent s’écouter en faisant l’effort d’entendre vraiment ce que les uns et les autre disent, et d’en évaluer l’apport. Un débat dans lequel les communistes sauront s’ouvrir à tous ceux qui veulent y contribuer, avec le souci de les associer pleinement à une construction commune. Ainsi conçu, un tel débat ne peut aboutir en l’espace de trois ou quatre mois. Peut-il être enfermé dans les procédures habituelles de préparation des congrès du PCF, dans des formes et dans un calendrier décidés « d’en haut » ? Cela ne paraît ni possible ni surtout souhaitable. Il est indispensable que toutes les sensibilités qui existent dans le Parti communiste – depuis longtemps maintenant, et à partir de divergences sur le fond – puissent mettre leurs idées et leurs propositions en débat, les confronter entre elles, et travailler réellement ensemble si elles en ont la volonté. Et il faut que les hommes et les femmes qui ne sont pas membres du PCF et qui veulent participer à ce travail, ou simplement donner leur point de vue puissent le faire.

Il s’agit donc de prendre le temps et de se donner les moyens d’un débat constructif, non pour rechercher un « compromis » ambigu et « mou » , mais avec la ferme volonté de rassembler dans le respect des différences, autour d’une volonté commune d’élaboration novatrice ambitieuse.

Le Conseil national du PCF a décidé de la tenue d’un « congrès extraordinaire » à l’automne prochain. Les intentions jusqu’ici exprimées quant aux objectifs et au contenu de ce congrès extraordinaire ne semblent pas correspondre aux nécessités. Et l’on peut sérieusement douter par ailleurs de la possibilité de mener de bonne façon le débat qui s’impose dans une période au cours de laquelle les communistes consacreront beaucoup de temps et d’efforts à la préparation d’élections municipales dont les enjeux auront quelque importance dans la situation créée après les résultats des scrutins présidentiel et législatifs. Ce congrès, qui sera de toute façon utile pour discuter dans la perspective des échéances municipales, pourrait donc avoir pour objectif de procéder à un relevé des différentes analyses et propositions et donner lieu à un premier débat national sur cette base. Et il pourrait s’achever par des décisions concrètes pour la préparation d’un congrès en 2008, qui se prononcerait à partir des choix effectués par les communistes sur la base des propositions dont ils auraient eu le temps et les moyens de débattre.

L’une des décisions que pourrait prendre le congrès extraordinaire de l’automne 2007, pourrait être de mettre en place une direction pluraliste, chargée d’assurer la préparation du congrès de 2008 dans les meilleures conditions. Ce congrès de 2008, quant à lui, mettrait en place une direction en conformité avec les orientations qu’il aurait choisies.

Liste des premiers signataires :

ABGRALL GUY

BEGLES DOMINIQUE

BERRUS MARC

BLOTIN PIERRE

CARASSUS GUY

CARMOUZE MICHELE

CHAILLAN PIERRE

CHAPUT BRUNO

CIRERA DANIEL

COHEN DENIS

DUVOT DENIS

GIUISTI BERNARD

GOMEZ MANUELA

GUEGUEN LAURENT

JUTEL CHRISTIAN

LATERRADE FRANCINE

LESER CHRISTIANE

LESER JACKY

LUNEL WILFRID

MAGNON NADEGE

MAGNON JEAN-PAUL

MAHANE FAROUK

MARTINET JEAN

MASO MICHEL

MEMAIN JEAN-FRANCOIS

PELTIER YANNICK

PONDEMER CLAUDE

POURRE FABIENNE

PY FRANCOISE

SALLE CHRISTINE

SCIPION SYLVIE

STARASELSKI VALERE

TOUMAZET MICHEL

ZOUGHEBI ALAIN

http://www.communisme21.fr/spip.php?article139

CONTRIBUTION POUR UN DEBAT

Messages

  • Pourquoi, pourquoi la droite a gagné ? Pourquoi la roue de rechange du capitalisme Hitler a gagné démocratiqement les élections ?

    Parce que la crise s’approfondit les repéres sont de plus en plus troublés ; On constate pour la première fois un recul sévére de société. Des millons de français sont au désarroi 85% des votants.

    Pour les gens qui n’ont pas de maturité politique et qui subissent de plein fouet la crise du capitalisme, le représentant du capitalisme (Sarko) qui est adossé aux banques et au patronat, a récupéré à son profit la crise et fait figure de messie.

    Il a suffit entre les deux tours des législatives d’expliquer la TVA sociale pour constater une forte absention, plus de 50% des gens se prononcent contre les représentants de l’argent roi.

    Pour vous la messe serait dite, les gens préfereraient subir la crise, un recul de société que de voter communiste à cause de .....

    Le leurre capitaliste (Sarko) combien de temps va t’il durer ?

    Le vote présidentiel utile combien de temps va t’il durer ?

    Les programmes donnant-donnant et plus plus combien vont’ils durer ?

    Prenez vous par la main il est urgent , allez dans les quartiers populaires, allez aux portes des entreprises, allez vers ceux qui souffrent du mal vivre, dites que vous êtes communistes, ils vous écouterons, dites leurs que vous avez des solutions communistes à leurs problèmes, vous arriverez à les convaincre.

    Arrêtez de bassiner les 140000 adhérents du PCF qui ne représentent plus que 1,9% des votants
    .

    Les donneurs de leçon (y qu’à), puisque vous avez l’analyse et la science infuse créez votre parti, ne perdez pas de temps. Faites des adhésions à 1 Euro comme au PS.

    Les élus communistes aux législatives ont amélioré nettement leur score par apport à 2002.

    Les gens de ces circonscriptions, lorsque nous avons la possibilité de l’emporter ont’ils peur du communisme ? Pourtant ça se passe en France ! C’est dans ce contexte que l’on vérifie la portée communiste. Ca a surpri pas mal de médias.

    Le PCF est enraciné au plus profond du peuple français(Guy Moquet), ça ne demande qu’à bourgeonner, et ce n’est pas en refondant de vielles cloches ensembles que l’on obtiendra un meilleur son pour l’écoute.

    FELIX

  • personne ne lira cet article beaucoup trop long.

    la difference entre les nains communistes et le nain sarko.

    le second est beaucoup plus CLAIR et CONCIS dans ses propos.

  • Affligeant renoncement.
    Effectivement, ces copains, comme on doit les appeler au PS, n’ont plus rien à faire au Parti Communiste.
    On se demande même si un jour, à l’image de leurs tristes prédécesseurs Italiens, on ne les retrouvera
    pas avec la droite pour sauver leurs petits mandats. Si le communisme français n’avait connu que
    de tels pleutres, renonçant à tous les combats au nom d’une modernité qu’ils convoitent à la droite,
    le PC ne se serait jamais fait surnommer "le Parti de la Résistance"…