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Le monde/Villepin/Sarko. De la "liberté" de la presse et des postures !

Publie le dimanche 7 mai 2006 par Open-Publishing

vu de suisse (le temps)
Victime de l’acharnement de la presse : c’est, pour Dominique de Villepin, la posture de la dernière chance. « Je suis un homme comme les autres, je suis l’objet d’attaques incessantes, calomnieuses, injustes », a-t-il dit mercredi à l’Assemblée nationale. Le lendemain, il a critiqué le manque de « scrupules » des journalistes : « C’est tellement facile d’utiliser un mot à la place d’un autre, c’est tellement facile d’insinuer. »

« Campagne ignoble »

Les flèches du premier ministre visent essentiellement le journal Le Monde*, à l’origine des principales révélations de l’affaire Clearstream. Le 28 avril, le quotidien divulguait des extraits de l’interrogatoire du général Philippe Rondot, chargé d’une enquête secrète sur les listings bancaires de Clearstream - qui se sont révélés être des faux grossiers. L’article publié ce jour-là suggère que Dominique de Villepin espérait s’en servir pour nuire à ses adversaires politiques. Réaction du premier ministre : il s’agit de propos tronqués utilisés dans le cadre d’une « campagne ignoble ».

Très vite, Le Monde riposte. Le 3 mai, il publie sur son site internet la quasi-intégralité de l’interrogatoire du général Rondot. La thèse d’une enquête parallèle visant notamment Nicolas Sarkozy se renforce. L’entourage du premier ministre défend son patron : « On voit bien que c’est une opération politique », basée sur des « jugements hâtifs » et des « approximations ».

En privé, certains conseillers de Dominique de Villepin accusent Nicolas Sarkozy, aimablement qualifié d’« ordure », de téléguider la presse pour torpiller le premier ministre. Mais Gérard Davet, journaliste au Monde et coauteur des principaux articles sur l’affaire, dément cette version des faits : « Les éléments que nous avons publiés ne nous ont pas été communiqués par Sarkozy. Ni lui, ni son avocat n’ont eu accès au dossier. » Nicolas Sarkozy doit être entendu jeudi prochain par les juges qui enquêtent sur l’auteur des faux listings l’accusant de détenir des comptes à l’étranger.

Cela dit, le tandem Sarkozy-Le Monde a joué un rôle moteur dans la genèse de l’affaire. En novembre 2004, Nicolas Sarkozy s’était plaint dans les colonnes du journal qu’on ne lui ait pas communiqué les conclusions d’une enquête des services de renseignement qui montrait l’inanité des accusations portées contre lui. Coupable de ce « manque de loyauté », selon ses proches : Dominique de Villepin, qui était alors ministre de l’Intérieur et savait depuis des mois que les listings de Clearstream étaient faux.

Bien d’autres politiciens, notamment de gauche, figuraient sur ces documents. Mais seul Nicolas Sarkozy a décidé de porter l’affaire sur la place publique pour se poser en victime d’un complot ourdi par ses ennemis.

Depuis, le conflit entre Dominique de Villepin et Le Monde n’a fait que s’aggraver. « Ce sont surtout Jean-Marie Colombani [directeur de la publication] et Alain Minc [président du conseil de surveillance] qui sont contre lui », affirme un proche du premier ministre. L’ancien rédacteur en chef Edwy Plenel, considéré comme un allié de Dominique de Villepin, a démissionné en novembre 2004.

« Le Figaro » : « Il a menti »

Mais pour le journaliste Gérard Davet, le contentieux entre les dirigeants du Monde et Dominique de Villepin est secondaire : « A notre niveau, il n’y a pas de haine, et aucune accointance politique. »

Dans les médias comme ailleurs, les amis du premier ministre se font rares. Le Figaro estime que Villepin a « plusieurs fois - osons le mot - menti » dans l’affaire Clearstream. Le rédacteur en chef du Point, Franz-Olivier Giesbert, naguère très proche de lui, le déteste. Vendredi, un député de son parti, Hervé de Charette, l’a comparé à OSS 117, un James Bond français un peu ridicule.

Acculé, le premier ministre peut encore compter sur la sympathie d’une partie de l’opinion. Mercredi, une femme en pleurs a appelé la radio Europe 1 pour dénoncer les médias qui « jettent les gens en pâture [quand] ils n’ont pas grand-chose à se mettre sous la dent ».

« Le Monde » est actionnaire du « Temps » à hauteur de 2,1%