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Musique en ligne, attention à la déconnexion

Publie le jeudi 29 juillet 2004 par Open-Publishing
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Aux termes de la charte signée mercredi entre l’industrie du disque et les fournisseurs d’accès, tout abonné qui contreviendra aux droits des auteurs pourra être débranché.

Par FLORENT LATRIVE

Les millions de Français usagers des services peer-to-peer (P2P) d’échanges gratuits de fichiers comme Kazaa sont désormais dans le collimateur. Pour officialiser le top départ de la chasse à ces « pirates », il a fallu mercredi trois ministres, des producteurs, des représentants des auteurs, dont la Sacem, et des fournisseurs d’accès à l’Internet. Du beau monde pour signer une « charte » pour le « développement de l’offre légale en ligne » et la « lutte contre la piraterie numérique ». Le tout à l’Olympia, un « symbole », comme l’a souligné le ministre de la Culture Renaud Donnedieu de Vabres, présent avec ses camarades Nicolas Sarkozy (Economie) et Patrick Devedjian (Industrie).

Déconnexion
Symbole, le mot est juste : la salle de spectacle appartient à Vivendi, tout comme la première major du monde, Universal Music. Un témoignage de l’influence sur ce texte des producteurs de disques, qui ont obtenu satisfaction sur la plupart de leurs revendications. Après plusieurs mois d’hésitations et sous pression des trois ministres, les fournisseurs d’accès à l’Internet (FAI) ont ainsi accepté de coopérer avec les maisons de disques dans leur lutte contre le P2P. Une batterie de mesures sont au programme, de l’envoi d’emails d’avertissement par les FAI à leurs abonnés aux poursuites pénales.
Et une nouvelle thérapie de choc : la déconnexion des « pirates ». Les FAI inséreront systématiquement des clauses de résiliation des abonnements à l’Internet en cas d’atteinte au droit d’auteur et devront couper l’accès des contrevenants.

Seul bémol à la baraka des producteurs : c’est un juge qui devra ordonner la déconnexion, alors qu’ils espéraient pouvoir s’arranger en direct avec les FAI. « Aucune ambiguïté, c’est le juge qui tranchera », assure-t-on dans l’entourage du ministre de la Culture. Un impératif excessif, selon Hubert Tilliet, le directeur juridique de la Sacem, qui compare les adeptes du P2P à des proxénètes : « Si vous signez un bail et que vous ouvrez une maison close, la résiliation du bail ne me semble pas exorbitante ». Dans la pratique, la déconnexion des internautes pourrait survenir en quelques heures, grâce à la procédure non contradictoire d’ordonnance sur requête.

« Festival des offres légales »
En regard du volet répressif de la charte, la partie sur la promotion des offres payantes apparaît maigrelette. Les producteurs s’engagent à porter de 300.000 à 600.000 le nombre de titres disponibles sur les services commerciaux, ces derniers doivent proposer une « tarification claire et compétitive ». Et tout le monde s’engage à faire de la pub pour iTunes Music Store, OD2, la Fnac.com et les autres. Jusqu’à Renaud Donnedieu de Vabres qui envisage un « festival ou une nuit des offres légales, pourquoi pas dans un collège ».

Négociée sans les consommateurs ni les artistes-interprètes, cette charte est déjà critiquée. « Le peer-to-peer est indéniablement un progrès pour l’accès à la culture et au lieu se creuser la tête pour assurer la rémunération de la création, on ne pense qu’à punir », dit le député PS Didier Mathus. Même doute pour l’Adami, la société civile d’artistes-interprètes qui plaide plutôt pour une taxe sur les abonnements à l’Internet afin de mettre un terme à la gratuité. « On n’arrêtera pas les échanges entre des millions de particuliers », estime Bruno Ory-Lavollée, son directeur général. Selon lui, mieux vaut « légaliser et rémunérer » le P2P que tenter de l’interdire.

http://www.liberation.fr/page.php?Article=226906

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