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QU’AVONS-NOUS FAIT ?

Publie le dimanche 14 août 2005 par Open-Publishing
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Les vétérans de la guerre d’Irak, parlent.

De DAHR JAMAIL

Traduit par Esteban Garcia

Pendant que le sang des soldats des E.U. continue d’inonder les sables torrides d’Irak : 27 soldats américains ont été tués dernièrement et le taux d’adhésion pour la poursuite de la catastrophe en Irak est descendu à 38%, de son confortable ranch à Crawford au Texas, Mr.Bush commentait : "Nous maintiendrons le cap et continuerons notre tâche en Irak".

À deux heures seulement de voiture de Dallas à la "Convention des Vétérans pour la Paix", je suis assis dans la salle remplie de vétérans concernés par ce bourbier Irakien.

Quand il fut interrogé sur ce qu’il dirait à Mr.Bush s’il avait l’opportunité de lui parler, Abdul Henderson, caporal des Marines en service en Irak du mois de mars au mois de mai 2003, inspire profondément et dit : « ce seraient deux coups- un pour lui et l’autre qu’il prendrait en cognant par terre. Je vois ce type au poste le plus prestigieux au monde, qui dit : « Continuons. » Un type qui n’a jamais été au feu, et qui n’a jamais vu quelqu’un souffrir, dire : « Continuons » ? se conduisant comme un cowboy dans un film de western...cela me répugne ».

Les autres vétérans qui l’accompagnent confirment pendant qu’il parle, sombre...accablé de colère.

L’un d’eux, Alex Ryabov caporal dans une unité d’artillerie, présent en Irak pendant les trois premiers mois de l’invasion, réclama un léger instant pour formuler sa réponse à la même question.
« Je ne crois pas que Bush se rendra compte un jour du nombre de millions de vies que lui et ses laquais ont ruinées dans leur quête de l’argent, de l’avidité et du pouvoir », il dit, « admettre par principe le patriotisme du peuple américain...le fait qu’il y ait des gens (son administration) prêtes à tuer et mutiler la jeunesse américaine et ruiner d’innombrables familles...et continuer à le faire avec le sourire au visage ».
Après un temps d’inspiration pour se calmer, il poursuit comme s’il s’adressait directement à Bush : « Vous devez démissionner, prendre les milliers de millions de dollars que vous avez gagné avec le sang et la sueur des soldats des États-Unis ...toutes les souffrances que vous nous avez causées, et placer ces milliers de millions de dollars dans le V.A. (Département des Affaires des Vétérans, NdT) pour qu’ils s’occupent des hommes et des femmes que vous avez envoyés au massacre. Mais tous ces milliers de millions seront insuffisants même pour essayer de compenser les dégâts de tous ceux qui ont été affectés par tout cela ».

Ces nouvelles contributions aux Vétérans Pour la Paix, ils les vivent tous les jours dans la déclaration d’intention de l’organisation, à s’engager à travailler envers les autres afin d’élever la conscience publique sur les coûts de la guerre, à œuvrer pour empêcher leur gouvernement d’intervenir, ni ouvertement ni dans l’ombre dans les affaires intérieures des autres nations, et pour que justice soit rendue aux vétérans et aux victimes de la guerre.

J’écris d’arrache pieds pendant trois heures, j’essaie de transcrire les histoires que partagent chacun de ces hommes...les atrocités qu’ils ont vues, qu’ils ont commises lorsqu’ils étaient en Irak.

Camilo Mejia, sergent de l’armée fut condamné à un an d’emprisonnement dans la prison militaire en mai 2004 pour avoir refusé de retourner en Irak à la suite d’une permission, il parle ouvertement sur ce qu’il a fait :

« Tout se résume à un purgatoire pour ce que j’ai fait là bas. J’obligeais les ambulances à faire demi-tour alors qu’elles se dirigeaient vers les hôpitaux. J’ai tué des civils, j’ai torturé des garçons...et j’ai honte. Une fois là bas, il n’y a plus rien à faire avec la politique...nous aurions du voir que nous y étions comme individu et nous tuions des gens sans motif. Nous n’avions aucun sentiment, j’ai maintenant honte de moi pour avoir fait cela. Je me disais tout le temps que j’y étais pour mes compagnons. Je raisonnais débilement...parce que je me taisais et j’exécutais mon travail. »

Mejia parla sincèrement du motif pour lequel il a refusé d’y retourner :

« Récemment je l’ai senti au retour chez moi- le mensonge de toute l’affaire et ma lâcheté à laisser de côté mes principes. J’essaie de reprendre le chemin du ciel...ce n’est pas tant ce que j’ai fait, mais surtout de ce que je n’ai pas fait pour l’empêcher lorsque j’étais là-bas. Aussi c’est pour moi le moment d’essayer de redresser le mal et je me refuse d’y retourner. C’est un douloureux procès mais nous devons nous y soumettre. »

Camilio Mejia souligna le succès rapide de son organisation et de ses compagnons. « Quand je suis retourné en Irak en octobre 2003, le pentagone annonçait 22 déserteurs, cinq mois plus tard ils étaient 500, et à ma sortie de prison le chiffre s’élevait à 5000. Ce sont les chiffres du Pentagone sur les forces armées. Deux choses sont importantes dans ce cas- le chiffre augmenta de 500 à 5000 en 11 mois, et se sont les chiffres du Pentagone. »

Tandis que les forces armées ne peuvent atteindre leurs objectifs de recrutement, le désastre en Irak s’enfonce encore plus chaque jour dans le chaos, cela constitue une maigre consolation pour ces hommes qui ont payé le prix qu’ils avaient à payer pour se trouver dans cette convention. Ils continuent à le payer, mais en même temps ils restent fermes dans leur décision de lutter pour la fin de l’occupation de l’Irak et pour aider leurs compagnons.

Ryabov commence alors à dire que son unité ayant tiré des obus, déviés, avaient dû tomber entre 5 et 10 km de leur objectif.

« Nous n’avons aucune idée à quelle endroit sont tombés ces obus, ni ce qu’ils ont atteint », dit-il tranquillement, pendant que ces deux voisins ont la tête entre leurs mains, « nous sommes arrivés maintenant à comprendre et nous essayons d’informer les gens pour empêcher que cela ne se reproduise ».

Après avoir parlé de l’utilisation de munitions à l’uranium, Ryabov indiqua que 300 tonnes furent tirées lors de la guerre du golfe en 1991, et plus de 2200 tonnes ont été utilisées jusqu’à maintenant dans cette guerre, et il ajouta : « Ils nous ont mis dans un pays étranger pour tirer et tuer des gens...et nous n’aurions jamais du commencer les premiers. C’est difficile avec des mots de dire toute la tragédie de l’affaire- la mort et la souffrance des deux côtés. Je sens qu’il a été commis une grave injustice et j’essaie de la corriger. Chacun fait toutes ces choses et en retour il pense : « Qu’avons-nous fait ? ». Nous sommes passés tout naturellement près d’un Irakien gravement blessé à la cuisse par la mitraille et près de lui deux individus agitant le drapeau blanc...il a du probablement mourir vidé de son sang ».

Harvey Tharp qui était assis entre nous a servi à Kirkuk. Son activité étant la responsabilité de quelques projets de construction au nord de l’Irak, elle lui permit de lier d’étroites amitiés avec de nombreux Irakiens...et cela l’amena à me demander d’informer beaucoup de gens sur la culture généreuse du peuple Irakien. Ses amitiés, firent évidemment, que la guerre le toucha de plus près.

« Ce que j’ai conclu l’été passé pendant que j’espérais que l’on me transfère à la NSA (Agence Nationale de Sécurité) n’était pas seulement que nos raisons d’être là-bas étaient mensongères, mais que simplement nous n’étions pas là pour aider les Irakiens. C’est ainsi qu’en novembre 2004 j’ai dit à mon commandant que je ne pourrais participer à cela. Ils m’auraient envoyé à Fallujah, et m’auraient ordonné de faire mon travail. En outre j’ai décidé de ne pas retourner parce que le bombardement dans les zones urbaines comme Fallujah constituait une violation des lois de guerre par la certitude des dommages collatéraux. Pour moi, j’ai compris que je ne pouvais participer à ces opérations ».

Tharp poursuit, il croit que des vétérans du Vietnam pensent que cette guerre était nécessaire et il ajoute : « Je pense qu’en se persuadant que c’était nécessaire ils prétendent chasser les mauvais esprits...ils reproduisent leur mécanisme antérieur pour faire face. Nous autres, en tant qu’Américains nous devons affronter cette vérité si évidente que tout cela découle d’un mensonge. Nous la dénonçons car nous devons le faire. Nous voulons aider des vétérans à raconter leur histoire à d’autres vétérans...pour que ces gens ne sombrent pas dans l’alcoolisme jusqu’à la mort ».

Quand on le questionne sur ce qu’il dirait à Mr.Bush s’il serait un instant avec lui, il prend lui aussi un temps de réflexion et dit : « C’est évident que la classe moyenne américaine commence à se retourner contre cette guerre et contre vous...avec excellente raison. La seule chose que vous méritez et que j’imagine pour arrêter cette inévitable descente, est un autre 9/11 ou une autre guerre, disons, contre l’Iran. Il y a quelques indications crédibles dans les médias qui montrent que nous sommes déjà en pré guerre contre l’Iran. Ce que j’essaie de faire c’est trouver une position que les américains pourraient confronter à la votre, mais je pense que les gens sont prêts à dire « Ne tentez pas de faire cela une nouvelle fois ». Mon message au peuple américain est le suivant- Voulez-vous encore tourner avec ces gens-là ? Si ce n’est pas le cas- c’est maintenant qu’il faut le dire ».

Les hommes profitent de cette opportunité pour détailler le motif pour lequel ils s’opposent à l’occupation illégale et il est difficile de formuler de nouvelles questions car l’un après l’autre ils s’expriment.

« Je ne voulais tuer plus personne sans motif. C’est cela. » ajoute Henderson, « nous combattions contre des petites localités...on voit des gens qui simplement s’enfuient, des voitures qui partent, des individus qui tombent de leur bicyclette...s’était triste. On est là, assis, en regardant au travers des jumelles, on voit des maisons exploser, et l’on pense : Mon dieu, ils n’ont pas d’eau, ils vivent dans le tiers monde, et nous, nous les envoyons en enfer avec nos bombes. Nous soufflons leurs bâtiments, la mitraille les déchiquettent ».

Tharp se lève d’un coup et ajoute : « Presque tout ce que nous mentionnons représente des crimes de guerre...des crimes de guerre parce qu’ils sont dirigés par notre gouvernement pour protéger son pouvoir. Ma réponse la plus facile pour ne pas y retourner est PTSD (Trouble du Stress Post-traumatique, NdT)...mais la raison morale plus profonde est que je ne voulais pas être enrôlé dans un crime contre l’humanité ».

Ryabov répète alors : « Ils nous ont mis dans un pays étranger à tirer et à tuer des gens...et cela n’aurait jamais du commencer en premier. Il est difficile de définir avec des mots toute la tragédie de la mort et de la souffrance des deux côtés. Je sens que j’ai commis une grande injustice et j’essaie de la corriger. On fait toutes ces choses, on retourne et on pense : « Qu’avons-nous fait ? ».

Michael Hoffman à servi comme caporal dans le corps des Marines qui combattit à Tikrit et à Bagdad, et depuis il s’est investi en cofondateur de « Iraq Vétérans Against the War » (Vétérans contre la guerre en Irak).
« Personne ne veut tuer une autre personne et je crois que se fut pour un mensonge. Personne ne veut penser que son service a été vain » dit Hoffman.

La réponse qu’il adresserait à Mr.Bush est simple : « Je le fixerais dans les yeux et lui demanderais « pourquoi ? » et je ne le laisserais pas partir, je l’obligerais à me répondre. Il n’a jamais traité avec nous face à face. Je le défis de parler avec l’un de nous, comme çà, d’homme à homme et qu’il nous réponde ».

Hoffman continue : « Et qu’adviendra-t-il de la petite fille Irakienne de 3 ans qui est maintenant orpheline, elle sera malade et fera des cauchemars pour le restant de sa vie, à cause de ce que nous avons fait ? Et les gens qui ont organisé cela ne doivent-ils rien payer ? Combien de fois mes enfants devront-ils encore assister à cela ? Notre seule alternative est d’empêcher que cela ne se renouvelle ».

Avant, ce même jour, Mr.Bush avait dit : « Nous ne pouvons laisser ce travail à moitié, nous devons le terminer ».

Cependant, Charlie Anderson, un autre vétéran d’Irak, utilise des paroles dures envers Bush. Après la discussion sur la radiation ambiante à Bagdad qui est maintenant 5 fois supérieure au niveau toléré- l’équivalent des rayonnements X de 3 radiographies pulmonaires par heure, il dit : « Ce ne sont pas des accidents- le D.U. (Uranium Appauvri, NdT)- c’est important que le peuple le comprenne- l’utilisation de D.U. et ses effets sont intentionnels. Ces incidents sont soigneusement préparés et orchestrés ».

Pendant que le groupe confirme et que deux soldats se lèvent pour lui serrer la main, Anderson dit avec fermeté : « Vous nous avez bouleversé, vous avez détruit nos vies, vous avez une dette envers nous. Je veux votre démission dans mes mains dans les cinq minutes. Et allez au diable Georgie ».

Article de Dahr Jamail : http://dahrjamailiraq.com/weblog/archives/dispatches/000271.php#more

Traduction espagnole
de German Leyens : http://www.rebelion.org/noticia.php?id=18714

Messages

  • Où sont passés les Romain GOUPIL, GLUKSMANNN et autres pseudo-ex-soixantuitard rangés dans le camp des libéraux, donneurs de leçons, militants de l’intervention armée en Irak, hardiment relayés par les médias à ce moment là ?

    Curieux ! que font nos médias elles qui aiment rien moins tant que les rétrospectives estivales.

    Ah ! et j’oubliais le fâmeux "french doctor" Kouchner, tout près de militer pour l’intervention armée à cette période... il s’est retenu de justesse "quelle posture dois-je adopter, ma chère Christine ?"

    C’est pas beau, c’est pas beau. Nous vivons une époque épique.

    • GOUPIL : un abruti du show-bizz qui se prend soudainement pour une lumière de la pensée humaine à classer entre Alain Delon et Philippe Val.

      GLUCKSMAN : un psychopathe haineux toujours prêt à appeller aux pires déchainements de violence.

      KOUCHNER : un TAPIE qui a réussi.

      Où sont-ils ? Toujours là, à la même place, et ils vous affirmeront jusqu’à leur dernier souffle, comme leur idole Tony BLAIR, que quelques soient les faits ils avaient de toute façon raison.

    • La preuve qu’ils avaient raison selon les critères de la syphilisation capitaliste : ils ont réussi à se faire un nom et du fric...