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Rapport sur la formation des enseignants stagiaires : la bonne blague

Publie le mercredi 19 janvier 2011 par Open-Publishing

(le rapport en question)

A la lecture du rapport, on peut se poser la question : à quel niveau ment-on ?

Sont-ce les IA qui font remonter des données erronées par zèle ? Des IA comme celui du 93, persuadés que « c’est en courant qu’on apprend à courir » et que tout va bien madame la marquise, arrangeraient-ils les données pour qu’elles correspondent à leur vision idyllique de la nouvelle formation des stagiaires du premier degré ?

Sont-ce des recteurs, alléchés par leur toute nouvelle et juteuse prime au mérite, qui sélectionneraient les infos qu’ils transmettent ?

Les rédacteurs du rapport, agents zélés du ministère, défendant la contre-réforme de leur patron, auraient-ils pioché ça et là les données qui les intéresseraient en ignorant les autres, avouant un peu pour camoufler beaucoup, le tout parsemé de graphiques à l’heureuse apparence scientifique ?

Quoi qu’il en soit, vu du 93, ce rapport a fait s’étouffer plus d’un PES. Morceaux choisis.


p. 5 : selon le rapport, il n’y a pas eu de stagiaires affectés en CP et CM2, excepté 74 (!) qui couvrent un cycle complet dans les écoles rurales, et 1 en Martinique. C’est un mensonge flagrant, puisque dans l’académie de Créteil, des cas de stagiaires dans cette situation nous sont parvenus. Et il en existe certainement d’autres, sans parler des autres académies.

« 30% des stagiaires ont une expérience de l’enseignement, majoritairement à la suite de stages en responsabilité pendant leurs études. » : cela est assez révélateur de la philosophie de cette formation : pour apprendre à enseigner, il faut enseigner. Evidemment, c’est économique. Ainsi, avoir fait un stage en responsabilité sans formation devient une « expérience de l’enseignement ». Les PES sont bien placés pour savoir qu’en fait d’expérience de l’enseignement, il s’agit surtout d’une expérience de survie en milieu hostile (et la hiérarchie n’est pas dupe, qui avait offert un « kit de survie » à la rentrée...).

2 stagiaires par tuteur en moyenne nationale : Créteil est ici comme ailleurs bien servie : 4 stagiaires par tuteur, dont un nombre important - le rapport oublie de le préciser - sont eux-même en formation, voire MAT. Sans parler des tuteurs déchargés de cours (pour l’observation de classe, c’est moyen), des tuteurs absents pendant la période de formation et qui sont remplacés par... les PES qui sont censés observer leur classe, etc.

p. 6 : le rapport évoque des problèmes d’adéquation entre le cycle du tuteur et celui du PES... dans certains départements ruraux. Il faut croire que la Seine-Saint-Denis est un département rural, où de nombreux PES (la plupart ?) ont un tuteur d’un autre cycle qu’eux-mêmes.

p. 7 : les PES seront heureux d’apprendre que « les conseillers pédagogiques participent au suivi des PES » : dans le 93, on a annoncé dès la prérentrée aux stagaires que les conseillers péda n’étaient pas des intervenants dans le cadre de la formation. Qui en a vu un depuis lors ?

p. 8 : selon le rapport, les PES ont rencontré leur tuteur avant la rentrée... Dans la vraie vie du 93, pas avant 2 voire 3 semaines après la rentrée !

On touche à l’humour noir à propos des journées de prérentrée, où on a expédié, en dehors des heures de travail, quelques formules choc aux PES hébétés, telle « vous avez choisi un métier merveilleux et le 93 est un territoire difficile mais attachant ». Le rapport note : « Ces journées d’accueil ont été appréciées par les stagiaires qui se sont sentis pris en considération et informés. » Curieusement, les PES atterrés semblaient alors plutôt penser qu’on se payait leur tête. « On ne vous laisse pas tomber, affirmait l’IA aux PES du 93 qui allaient commencer en responsabilité sans formation quelques jours plus tard, regardez, on va vous distribuer un DVD. » Et le plus « comique » c’est que le DVD, la plupart des PES l’attendent toujours.

p. 9 : Nous sommes heureux d’apprendre qu’existe un « suivi personnalisé des stagiaires » et qu’une « analyse personnalisée en besoins de formation a été réalisée ». Il faut supposer qu’il s’agit de ce formulaire qu’on a demandé aux PES de remplir un mois après la rentrée, où ils devaient indiquer, après 5 minutes de réflexion dans le couloir, quels étaient leurs besoins prioritaires en formation. Demander à celui qui veut apprendre un métier ce qu’il a besoin d’apprendre ne manque pas de sel...

« Aucune difficulté notoire n’est signalée concernant le remplacement puisque les stagiaires sont souvent en surnuméraires. » Ca, c’est amusant... Justement, une soixantaine de PES viennent de voir une période de 2 semaines de formation repoussée parce que l’institution a besoin de remplaçants (étant donné les nombreuses suppressions de postes), et à l’intersyndicale SUD-CGT qui l’interpellait, l’IA a répondu laconiquement que les besoins du service primaient sur les besoins en formation...