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Réunion : Le créole à la trappe

Publie le mercredi 27 septembre 2006 par Open-Publishing

RFO TÉLÉ DOIT FAIRE DES ÉCONOMIES

Pour élaborer sa nouvelle grille d’antenne, RFO a fait des projections financières. "Il se trouve que le journal hebdomadaire créole ne rentrait pas dans le budget", explique Gilbert Ognard, Secrétaire général FO-RUN, personnel d’encadrement technique à RFO. Pas assez d’audience, de demandes sociales ? Si même dans le service public, la langue créole n’a pas sa place !

JEAN-RéGIS Ramsamy reconnaît que le journal en créole était perfectible, mais "il avait le mérite d’exister et en direct (...). C’était le seul espace public en créole qui existait. S’il est battu en brèche, il ne restera pas grand chose".

"Déconsidération de notre langue maternelle"

La volonté de la Direction de maintenir le créole à l’antenne est-elle sincère ou est-ce un affichage de circonstance ? Après la suppression du JT en créole “Komsaminm”, la Direction a proposé de mettre en place un hebdomadaire, une nouvelle expression de la langue créole à la télé. Les syndicats ont bien tenté de négocier une à deux minutes quotidiennes en créole, avant ou après le journal, mais les supérieurs ont apposé l’échec de cette tentative aux Antilles.
Pour Jean-Régis Ramsamy, cette réponse est le reflet d’"une politique globaliste qui va à l’encontre des aspirations même des Réunionnais et des objectifs affichés de la chaîne qui dit vouloir une télé réunionnaise. Quelle place pour le créole alors ?". Le journaliste présentateur, en charge de chapoter le contenu du nouveau produit, accuse la faiblesse des moyens accordés par la chaîne, "deux bouts de ficelles" pour proposer un hebdomadaire enregistré, "une espèce de zambrocal qui ne ressemble à rien", alors que le JT en créole était peut-être "minimaliste", mais "c’était vraiment un espace où l’on pouvait s’exprimer librement en créole dans l’espace public". Ce choix démontre selon lui une volonté de standartisation des programmes et marque surtout "une certaine déconsidération de notre langue maternelle".

"Blocage local et parisien"

La Direction refuse un direct, et après une seule émission, envisage déjà de la raccourcir car là encore, la place accordée au créole ponctionne trop de finances. Pour Gilbert Ognard, il s’agit là d’"un blocage local et parisien. Ce que disent les signataires de la motion (UNSA-CFTC, SNFORT, FO-RUN, CFE/CGC, UNSA, SNRT-CGT, SNJ-CGT ; voir “Témoignages” de lundi 25 septembre), c’est qu’il faut savoir ce qu’on veut comme politique. Si l’antenne veut la présence du créole à l’antenne, elle doit prendre ses responsabilités (...). Pour ma part, en tant que Réunionnais, sa présence est indispensable".
Les rédacteurs de RFO sont-ils tous prêts à défendre le créole à l’antenne ? La Direction va-t-elle aller au bout de ses engagements et mettre les fonds nécessaires pour proposer une émission d’un genre nouveau en créole ? Est-ce le début d’un démantèlement du service public local de télévision vers un Centre d’Actualité Télévisuel, avec une main mise de RFO Paris qui ne laisserait à La Réunion que l’information locale ? Beaucoup de questions restent en suspens, et si la Direction prenait en compte ne serait-ce l’avis des Réunionnais, déconcertés par la disparition de la revue de presse matinale sur RFO Radio, peut-être se rappellerait-elle ce qu’est une télévision de service public. Se remettre en question pour avancer est une bonne chose.

Stéphanie Longeras estefani974@aim.com

Le créole à la trappe
Article paru dans Témoignages le mercredi 27 septembre 2006