Accueil > Sarkozy invente un nouveau jeu mortel : l’asphyxie médiatique

Sarkozy invente un nouveau jeu mortel : l’asphyxie médiatique

Publie le vendredi 28 septembre 2007 par Open-Publishing
7 commentaires

de Jean-Luc Mélenchon sénateur PS de l’ Essonne

C’est l’asphyxie. Au rythme d’un discours fondateur tous les deux ou trois jours, le président de la République réalise une figure tactique inconnue jusqu’à ce jour, celle qui consiste à submerger amis et ennemis sous un flot d’annonces de toutes sortes qu’il leur est impossible d’analyser sérieusement et de discuter de façon argumentée avant qu’arrive la vague suivante. Dans de telles conditions le système médiatique est pris au piège : une information succède à l’autre, toute l’énergie dont il dispose est consacrée à ne pas manquer l’évènement que serait telle ou telle annonce. Alors le premier objectif de Sarkozy est atteint : tout ce qu’il dit prend l’allure de l’évidence puisque personne n’a le temps de le décrypter. Au mieux a-t-on ici ou là un débat « contradictoire » sur le mode : un pour, un contre dont les conditions mêmes de déroulement ne peuvent permettre de faire mieux qu’un bruit de fond du type « il ya un peu de vrai, un peu de faux » et ainsi de suite. Ce simulacre ne peut permettre un gramme de doute raisonné sur l’annonce faite ni même sa formulation.

Le système du CSA pour le décompte des temps de parole a lui aussi volé en éclat puisque la parole du président n’est pas prise en compte. L’équilibre de ses pointages était déjà bizarre : un tiers pour le gouvernement, un tiers pour la majorité, un tiers pour l’opposition.... Il est devenu surréaliste. Passons évidemment sur les fameux plateaux média où sont présents en même temps jusqu’à huit personnes supposées commenter de leur point de vue particulier (écrivain, syndicaliste, élu des deux bords, économiste etc.) des questions aussi complexes que les régimes spéciaux de retraite, les dépenses de santé, le droit international sur le nucléaire, que sais je encore, en quelques minutes de pugilat sonore entre les pages de pub. Chez les responsables politiques, plus personne ne touche terre. Il y a des spécialistes de telle où telle question ? Ils sont inconnus du système médiatique. Le temps de les trouver le sujet du jour a changé. Mais quand ils arrivent jusque sur un plateau média ils se montrent totalement désemparés par le niveau de simplification et la vitesse à laquelle se déroule le temps médiatique. Ils sont inaudibles, au sens littéral du terme, du fait même de leur talent et de leurs connaissances qui leur fait refuser les formules à l’emporte pièce et les demi vérités tant ils connaissent la complexité de leur sujet. Comme ils ne se sont jamais entrainés à la présence médiatique, ils sont aussi démunis que des oiseaux de nuit jetés en l’air en plein jour. De leur côté les journalistes paniquent.

Comment pourraient-ils maitriser tous les sujets et tirer la substantifique moelle d’un discours en quelques minutes ou même en vingt quatre heures alors même que celui-ci a mobilisé pendant des semaines des bataillons de spécialistes pour parvenir jusqu’à sa mise en page ! Et comment ignorer que ces rédacteurs ont eu aussi, entre autre objectif, le but de rendre l’énoncé aussi « furtif » que possible au radar de la critique. Du coup l’effet « miroir » des commentaires d’un média à l’autre n’a jamais été aussi élevé. Il ne peut en être autrement. Car dans de telles conditions de travail, la borne de sécurité absolue c’est de ne pas se décaler par rapport à « l’angle » moyen sous lequel les confrères examinent une question. Ainsi, rendu au point où nous en sommes la question n’est plus celle de la critique des médias. La question posée est celle de la volonté délibérée qui est à l’œuvre visant à les asphyxier pour obtenir d’eux une forme nouvelle d’instrumentalisation. Si nous en doutions il suffit de voir à quoi nous en sommes réduits dans l’opposition.

Au PS, parti des nuances infinies, le système des communiqués balancés susceptibles d’être lus dans tous les sens est tout simplement explosé. La modération alambiquée de la critique « en gants blancs » est dépecée vive par le tourbillon médiatique qu’a déclenché Sarkozy : vous n’êtes pas vraiment contre, donc vous êtes pour. Quand arrive le bombardement des sondages, il ne reste souvent déjà plus personne au créneau. Le seul commentaire qui vaudrait alors serait celui qui crierait au miracle : quand 68 % des français qui ont tout compris aux 128 systèmes des régimes spéciaux de retraite (comme le prouve l’opinion de 825 sondés) disent qu’ils approuvent leur suppression, il faut s’ébahir de voir qu’il en reste 23 % qui sont contre en dépit de l’invraisemblable déluge de propagande qui leur est tombé dessus.

De mon côté je suis tout aussi submergé que les autres. Nous avons monté un système de veille avec mes collaborateurs et quelques camarades pour pallier le fait qu’aucune structure du parti ne m’aide d’aucune façon puisqu’il est entendu que je suis un partisan de « l’opposition frontale » qui n’est la position du Parti sur aucun sujet. Amer constat : nous n’arrivons plus à suivre la cadence. Trop de discours, trop d’annonces, trop de sujets différents. Les camarades qui aident n’ont pas tous fait les écoles qui apprennent à faire des notes brèves. Mais est-ce possible ? Je reçois des commentaires parfois plus longs que le texte initial. Peut-il en être autrement ? En tous cas c’est inutilisable à la cadence imposée. On passe donc la grosse écumoire sur les discours et on passe aux lignes arrière l’analyse détaillée. Quand elle sera prête, évidemment, l’actualité sera ailleurs. Nos analyses seront donc alors inaudibles.

Jusqu’ici j’ai évoqué la situation des « producteurs d’informations » (pour utiliser le vocabulaire marchand de notre époque). Celle des citoyens appelés à en prendre connaissance est bien pire. Par quel miracle pourraient-ils ingurgiter tout cela, écouter, prendre connaissance, construire leur propre avis ? C’est tout bonnement impossible. Par conséquent la méthode de la saturation sarkozienne, d’un bout à l’autre est une méthode d’asphyxie de la démocratie. Je ne sais pas combien de temps il faudra aux professionnels de l’information pour réagir et comprendre la finalité du régime de cavalcade qui leur est imposé. Peut-être n’y aura-t-il aucune réaction. Je suis stupéfait du retournement de situation auquel nous assistons. Il y a peu encore la politique (une expression simplificatrice certes) se plaignait de ne pouvoir vivre au rythme des médias. J’ai écrit moi aussi toute sortes de choses sur les conséquences sur la démocratie de cette discordance des temps politiques et médiatiques. A présent Sarkozy a renversé la table. C’est le temps médiatique qui est à la traine, domestiqué par le tempo politique construit par le président, émetteur suprême et quasi unique de messages. Je vais revenir sur ce sujet aussitôt que possible.

www.jean-luc-melenchon.fr

Messages

  • Le problème c’est que le nabot réussi son coup en ce sens que les politiciens, dont Mélenchon fait partie, ne parlent que de lui, ne serait ce que pour le critiquer. En effet la classe politique ne parle que de lui ne serait que pour pour contater que l’on ne parle que de lui.

    Et si l’on parlait d’autre chose... encore faut-il avoir autre chose, de sérieux, à dire et surtout à faire.

    Mais regardez le nombre d’articles , ne serait ce que sur ce site, qui ne "parlent que de lui".

    "Dites du bien, dites du mal, mais parlez de moi"

    Rémi la Garonne

  • mélanchon n’est pas un politicien a la peche aux voix PUIQUE IL EST SENATEUR ET DONC ELU PAR PERSONNE
    si mélénchon voulait mettre en pratique ses analyses il commencerait par se casser du ps

    louis coconuts

  • "De mon côté je suis tout aussi submergé que les autres. Nous avons monté un système de veille avec mes collaborateurs et quelques camarades pour pallier le fait qu’aucune structure du parti ne m’aide d’aucune façon puisqu’il est entendu que je suis un partisan de « l’opposition frontale » qui n’est la position du Parti sur aucun sujet. Amer constat : nous n’arrivons plus à suivre la cadence."

    Pauvre Jean Luc, c’est dur la vie hein ?

    Difficile de faire bouger le PS à gauche, voire quasi impossible. Non ?!

    6 ans de militantisme au PS :

     la première année pour "voir " et essayer de comprendre , le PS comment ça marche, les chapelles, les courants, les uns les autres ....pas facile déjà ;
     1 ou 2 ans ensuite pour lire, se documenter sur le socialisme, Mitterrand etc essayer de comprendre, et justement, commencer à comprendre qu’il y a comme un pb entre le contenu supposé et le contenant réel - mais pendant lesquels on te "forme" en t’expliquant que, "si si, cette fois ci ça va changer, ça va changer !" - ,
     1 an de bataille anti TCE, où là , j’ai recommencé à y croire un peu
     puis 1 an et demi de flottement et de déliquescence jalonné de NPS/Rénover/Gauche sociale etc...jusqu’à la mascarade - on s’en est rendu compte a posteriori - de la désignation de Ségolène - très fort le coup de l’épouvantail libéral Strauss et du Fafa grillé pour faire désigner la Ségo, qui une fois désignée comme candidate "socialiste représentante de tous les camarades du PS" a viré illico soc dém de + en + libérale ! Très très fort....

    Bref 6 ans de militantisme en dents de scie au PS m’ont suffi pour comprendre, à moi qui ne venais pas vraiment d’une culture "de gauche" et qui n’ai pas ton expérience ni ton intelligence, que le PS ne pouvait rien faire pour la lutte des classes, le dépassement du capitalisme etc etc. parce que tel n’était pas ou plus son objet.

    Bah voilà. Mais j’ai compris, j’ai commencé à comprendre quand Ségolène est entrée en pré-campagne comme les "socialo" du PS s’étaient fait BAISER dans les grandes largeurs par Hollande & co.

    A ce moment là, Jean Luc, je me souviens très bien, j’étais, comme d’autres à une époque, dans ma salle de bains mais pas en me rasant, et j’y pensais au PS - j’écoutais les absurdités et les mensonges débités par Hollande à la radio ("je hais les riches" !!!!!!! en parlant des couples à 3000 ou 4000 euros - ) et là, après les tirades de Ségo sur les impôts, ce gauchisme m’a crucifiée sur place, connaissant ce que je connaissais du PS !!!!

    C’est là que je me suis dit : "Elodie, ma fille, barre toi de là. Tu cautionnes un système pourri jusqu’à la moelle en restant dans ce parti , même si t u es anonyme, même si t u es vraiment pas grand chose, tu es une voix et une costiz’ , alors reste pas là, c’est pas honnête".

    J’avais été un peu longue à la comprenotte sur l’histoire de la lutte des classes et tout ça. Normal j’avais pas compris, parcqu’au PS, on ne me l’a jamais expliqué, que j’étais une prolétaire certes bien payée mais prolétaire quand même, et à dire vrai j’avais pas bien compris que je n’étais que la partie d’un tout .

    Ou plutôt je n’avais pas mis bout à bout mes différentes petites révoltes "morcelées" (Palestine, SMIC, éducation, Europe, exploitation de l’homme par l’homme, étrangers, etc...) dans un ensemble cohérent et construit, systémique.

    Et d’un coup d’un seul , tout ces éléments de révoltes disparates ce sont mis ensemble dans un système et j’ai capté la source de tous ces maux contre lesquels je me battais déjà, mais mal.

    En gros j’essayais de soigner un cancer des poumons avec de l’homéopatie pour la gorge.

    C’est vrai que la fréquentation de plus en plus intensive de "kamarades communixtes" m’a pas mal aidéeà attérir ( je me suis fait "endoctriner" comme on dit aujourd’hui dans ma famille de droite).

    D’abord j’ai vu que ce qu’on me disait au PS sur les cocos "antisémites, fachos, mangeurs d’enfants, collabos...." c’était pas mal du pipo et puis après j’ai compris que si je voulais vraiment que mon énergie militante serve à quelque chose, il fallait un minimum de cohérence et de pensée construite vers un projet de société.

    Donc après avoir dans un premier temps rendu ma carte du PS (c’est pas dur à faire hein je te jure, très facile - un mail et hop 4 jours plus tard , confirmation : vous êtes radiée de nos listes), j’ai sauté le pas et pris ma carte au PCF.

    Alors Jean Luc je te le dis, plutôt que d’être là depuis 30 ans au PS et de geindre que "t’as pas les moyens de ta politique"...

    VAS Y , LACHE TOI, FAIS COMME MOI ET PRENDS TA CARTE AU PCF !

    Là tu auras des forces militantes qui comprendront ton discours, tes motivations, tu auras un peu plus de moyens que ceux que tu as là pour participer à un projet de changement de société ,et tu verras , à part quelques irréductibles (qui d’ailleurs en général ne sont plus au PCF mais dans un autre parti crypto coco) bonne ambiance, c’est sympa, les camarades sont des gens biens.

    Et puis ,tu imagines la gueule de tes super bon copains du PS ? Ahlalala la tronche de ’L’Autre Pays du Fromage" quand tu vas lui rendre ta carte !!!!!! La panique que tu vas mettre en faisant ça.... Ca aurait une de ces allures mon vieux...J’en rigole d’avance.

    Alors que bon, là, franchement, tu es de plus en plus décevant.

    Tu joues le rôle de caution contestataire du PS et tu contribues à asseoir dans la tête des électeurs que le PS est encore un parti de gauche et que peut être...un jour ... ça va changer....(mais si si, on vous le jure...cette fois-ci c’est la bonne !!!!!)

    Et puis de toute manière, tu es prêt à rejoindre les coco dans un nouveau parti non ? Alors , autant venir au PCF tout de suite,non ?

    Bon, bien sûr, on ne peut pas te promettre que tu auras un poste de député ou de sénateur, encore moins que tu seras secrétaire national, hein, ça marche pas comme ça chez nous, mais , vu que tu joues les seconds couteaux depuis 30 ans pour des socio dém, et que ce qui compte pour toi, c’est de te battre contre le capitalisme, j’imagine que ça n’a pas d’importance ?!

    Allez, Jean Luc, fais toi plaisir - après 30 ans de PS , tu y as droit ! "Soigne ta gauche" , "Décomplexe toi". Etre communiste, ce n’est pas sale. Rejoins un vrai parti de gauche ....Tu verras, c’est comme une première bouffée de cigarette ou un saut en parachute ou ...

    Bon, j’arrête là , tu as compris.....

    Allez, comme on disait au Péhèsse, "amitiés socialistes"

    La Louve

    • Créons une Radio-télé libre de toute propagande bourgeoise et sociale-démocrate...Ainsi nous ne subirons plus les annonces de notre ennemi de classe à travers ses valets médiatiques .La clandestinité permet d’être mieux écouté.On écoute toujours plus ce qui est interdit ?????Mais la logique de ce postulat révolutionnaire empêche nos "légalistes" de gauche de le promouvoir.Dommage que le PCF dont je suis membre ne se risque pas dans ce choix résistant pour préserver 3 à 4 minutes par ci-par là sur les antennes du pouvoir capitaliste .

      Bernard Sarton,section d’Aubagne