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TOUS A MARSEIILE DEMAIN !

Publie le vendredi 14 octobre 2005 par Open-Publishing
5 commentaires

Marseille résiste.

Marseille est-elle abandonnée, livrée, trahie ? Après être venu faire un
petit tour dans cette ville, les leaders nonistes de la gauche
appuieront-il la stratégie de Thibault ? Ce qui s’est passé à Marseille
cette semaine a un air de déjà vu et l’humanité de hier avec son
trombinoscope de 36 "personnalités" appelant à la résistance sur EDF
laissait craindre le pire. Demain c’est sûr disait cette "une",on se
battra sur ce qu’on a été incapables de défendre aujourd’hui. C’est sûr
puisque même la direction du PS est d’accord, et le fond de l’affaire
n’est-il pas que l’essentiel est de rassembler... pour aller demain au
gouvernement, tous ensemble...

Souvenez-vous du combat des retraites, Thibault avait annoncé au congrès
que le combat était perdu avant même de commencer, que l’on ne pourrait
pas résister sur la diffèrence entre le public et le privé, puis il est
allé se faire introniser au congrès du PS comme pour affirmer que la seule
solution était là ... Dans le retour d’une union de la gauche dont chacun
savait que les projets en matière de retraites étaient pires que ceux de
la droite, comme en témoignait le plan de Fabius. Une union de la gauche
qui, entre les dispositions de Joxe et les mesures prises par Gayssot,
avait intié la privatisation portuaire, comme elle avait intié à Lisbonne
la privatisation d’EDF.

De même aujourd’hui Thibaut a de fait accordé licence à la privatisation
de la SNCM, puisque il a isolé ce cas de celui de l’EDF. Qui peut croire
qu’un abandon soit le prélude au renforcement de la lutte et qu’il faille
diviser pour rassembler. Le fait est qu’alors même que Marseille était
immobilisée par la grêve, non seulement sur le port mais les tramways, que
le gouvernement, la mairie de droite étaient mis en difficulté, les
directions syndicales et politiques l’abandonnent, la traitent comme un
conflit local que l’on opposerait à celui d’intérêt national de l’EDF. la
logique voudrait après un tel exploit que l’on abandonne à son tour le
combat pour EDF au nom de la logique européenne, chère au coeur de
Thibault et le Digou.

Face à une telle situation où la direction de la CGT se conduit seulement
comme le vrp du PS en vue des futures échéances électorales, affirme son
fil à la patte avec la logique de bradage aux multinationales de l’union
européenne, en rupture avec sa base, comme lors du référendum
constitutionnel, elle affaiblit ses militants combatifs. Le constater
n’est pas attaquer la CGT, mais au contraire manifester que ce syndicat
est le principal point d’appui des résistances et , que nous soyons
syndiqués ou non à la CGT, que ses choix sont fondamentaux pour ce qu’il
adviendra à l’avenir.

L’alternative n’était pas entre la proclamation non suivie d’effet d’une
grêve générale et l’abandon de la SNCM, mais bien dans la montée du
rassemblement autour de la défense du service public. Comme l’a noté dans
une lettre ouverte à l’humanité, Gaston Pellet : "on imagine quelle force
aurait pu avoir le conflit de la SNCM, s’il avait été raccordé au cas
d’EDF. Une extraordinaire convergence de dates faisait que le 12 octobre,
date notée sur nos calepins depuis l’été pour la réunion du conseil
d’administration, donnait l’opportunité de déclencher une action de
défense des Services publics, préventive pour ce qui concerne EDF, de
soutien massif pour la SNCM. C’est, semble-t-il, quelque chose de ce genre
qu’était venu proposer J.P. Israël, le dirigeant des marins CGT
marseillais à Montreuil."

Car, là encore, la ressemblance est forte avec le conflit des retraites,
le gouvernement a décidé de passer en force jusqu’à la menace du dépôt de
bilan et si les travailleurs ont voté la reprise du travail la rage au
coeur, c’est parce qu’ils ont pensé qu’ils meneraient mieux le combat sur
le pont de leur bateau plutôt que devant un tribunal de commerce... Tout
n’est pas fini, mais c’est un sacré coup... Et il faut être aussi aguerri
que le sont les travailleurs du port pour savoir que tout continue...
Qu’ils vont devoir encore mieux rassembler, développer l’unité syndicale,
une guerre de position qu’ils connaissent bien et dans laquelle ils ont
besoin de nous.

Le contraire du baroud d’honneur doublé de slogans ultra-gauche qui
permet d’éviter le rassemblement, la montée des luttes. le cas extrême
étant, on s’en souvient l’attitude de Blondel, le dirigeant de FO, qui
lors du meeting de Marseille pendant les retraites avait relayé le slogan
de "grêve générale" de l’extrême gauche à la tribune alors même que ses
troupes reprenaient le travail.

Quand trouverons-nous des dirigeants politiques à la hauteur des
combattants, que sont devenus les communistes ? La contre-révolution
néo-libérale que nous subissons depuis le début des années quatre-vingt a
perdu sa crédibilité, et si le gouvernement passe en force, si aujourd’hui
dans un pays voisin, ils en sont à l’union du SPD et de la droite pour
tenter d’endiguer la montée des mécontentement, c’est le signe de la perte
d’influence de ceux qui entérinent cette politique. La seule chose qui lui
permet de perdurer est le sentiment que certes c’est insupportable mais
que l’on ne peut pas faire autrement, chaque échec, chaque abandon est une
pédagogie du renoncement. Et, en cette matière, l’attitude du PCF de ces
dix dernières années a pesé lourdement parce que tout à été fait par la
direction de ce parti à la fois pour expliquer qu’il n’y avait pas d’autre
alternative que de quémander un strapontin au social-libéralisme et pour
démolir un tissu militant qui aurait pu résister, aider à développer
l’initiative populaire. Les choses bougent mais elles doivent se clarifier
et on peut craindre que le prochain congrès du PCF reste pris dans la
stratégie de la chauve souris, mi-rat, mi-oiseau : j’appuie Thibault et je
met en avant Eyrault, je suis un rat qui attend de participer à un
gouvernement de gauche. Pendant la lutte je viens à un meeting devant les
grilles du port où Besancenot et Laguiller appellent à la grêve générale
et je critique l’action du gouvernement de gauche auquel j’ai participé,
je suis oiseau regardez mes ailes.

Si les directions syndicales et politiques se conduisent ainsi, étonnez-vous si demain Marseille, qui a voté NON à 60% au référendum
constitutionnel, et à un maire de droite élu avec 15 % des inscrits,
retrouve les chemins de l’abstention. Etonnez-vous si sa jeunesse qui
s’était pourtant massivement mobilisé pour les retraites regarde avec
mépris la politique, vous portez une lourde responsabilité.

Les marins, après ceux du port, sont rentrés au travail, la rage au ventre, mais samedi Marseille se mobilise sur le vieux port, il faut y être le seul combat que l’on est sûr de perdre c’est celui que l’on ne
mène pas. C’est comme le référendum, les mêmes manifestaient la même
adhésion aux projets des multinationales, le camp des nonistes tel qu’il
s’exprimait officiellement sur nos écrans de télé était groupusculaire,
coupé des réalités. Il proclamait cet incompréhensible slogan "Dire NON à
la Constitution, pour dire OUI à l’Europe", la direction de la CGT refusait de s’exprimer en violation avec sa base, et pourtant le traité
n’est pas passé. La conscience que nous sommes devant une attaque
d’envergure face au service public et contre les salariés, que démolir les
services publics, les statuts de ses salariés, c’est détruire la base de
la résistance de tous les salariés, leur faire accepter toutes les mesures
de précarisation, de pression salariale possible et imaginable est forte.
C’est là-dessus que s’est gonflé le vote NON et qu’il a balayé la constitution. Aujourd’hui venir encore et toujours défendre la SNCM, c’est
préparer la bataille contre la privatisation de l’EDF, c’est refuser les
délocalisations.
Il est clair qu’un coup a été porté au combat des Marseillais, on aurait
pu et du faire autrement. Ce que traduit le slogan de grêve générale est
cette aspiration à voir converger les luttes, le refus d’être abattu en
ordre dispersé, mais c’est un slogan creux, un baroud d’honneur parfois
suspect quand on ne se donne pas les moyens de faire monter le mouvement.
Le rendez-vous marseillais samedi sur le vieux port ne doit pas être raté,
c’est ce sur quoi comptent Villepin et Gaudin. Mais si nous sommes
nombreux et combatifs, ils sauront que, comme lors du vote NON à la
Constitution, nous faisons le lien sur la manière dont ils prétendent
chasser les Marseillais de leur centre ville, en finir avec le service
public, attaquer l’éducation nationale, en finir avec Netslé et demain
privatiser EDF.

Samedi, sur le vieux port c’est ce Marseille qui sait dire NON qui sera
présent. Il y a des siècles, trois cent jeunes gens sont partis vers Paris
à pied en traînant deux lourds canons. Ils chantaient un chant inconnu
mais qui emportaient les coeurs au passage et chacun le répétait au point
d’en faire l’hymne national. Ils sont arrivés à Paris pour réclamer l’arrestation du roi et, comme ils ne se contentaient pas de parole, ils
ont pris d’assaut les Tuileries. Sitôt le roi arrêté, ils se sont engagés
dans l’armée révolutionnaire qui a battu à Valmy tous les rois d’Europe,
les Marseillais en guenille, mal chaussés, mal nourris ont affirmé que "le
bonheur est une idée neuve" et que cela passait par la Révolution. C’est
une ancienne et belle histoire, mais il y a à Marseille ce ferment de
rébellion qui couve sous la cendre, cette volonté indomptable d’un peuple
qui ne se résigne pas, venez de partout nous rejoindre samedi sur le vieux
port à quinze heures.

Danielle Bleitrach

Messages

  • Dis-mois Camarade, crois-tu vraiment qui tout cela tient à un hypothétique problème Thibault ? N’en fais-tu pas un peu trop ? Thibault serait-il coupable de ne pas avoir décrété la Révolution ? Le gouvernement Villepin n’aurait-il pas quelques miettes de responsabilité ? Belle solidarité avec les marins qui viennent de mener une extraordinaire et courageuse lutte. Bravo camarade donneuse de leçons faciles. Il serait profitable au mouvement social que tu fasses grève de la plume. Une vraie grève révolutionnaire, illimitée et reconductible.

    Helge

    • Les "donneurs de leçons faciles" sont légion, y compris sur ce site ! Pourquoi devrait-elle être la seule à faire la grève de la plume ? Pourquoi pas ne pas copmmencer par donner l’exemple toi-même, que l’on peut lire beaucoup ici et à tout propos.
      Ce que l’opinion publique va retenir de tout cela, c’est une défaite des grévistes et une victoire du gouvernement qui en sort renforcé.Les conséquences sur les luttes à venir et la combativité des salariés sont encore difficiles à mesurer ,mais certainement pas positives.
      Ceux qui organisent et encouragent ce TYPE de grève en l’absence de toute perspective réaliste et solide d’en sortir dignement et en l’absence de toute union syndicale sont des irresponsables qui ne rendent pas service à la cause des travailleurs.

    • Il s’agit de traiter les problèmes à la racine et de revenir à ce qui a permis y compris d’un point de vue historique un tel pourissement "des organisations démocratiques". Effectivement, si ce retour n’est pas effectué "les réactions" ne manqueront pas de s’additionner entraînant l’immobilisme au profit des "pires tahisons" de classe pour le triomphe de l’autre camp.
      Dans la période présente dénoncer tout ce qui est frein dans les luttes qui seules penvent permettre la reprise en main des vieux appareils pour mieux les dépasser est la seule attitude respectable. D.B. doit donc aussi se faire violence à elle même. Quant à Thibault ...

      Tous sur le Vieux Port aujourd’hui 15 heures

    • Que vient faire le SNES dans cette galère remplie de gros bras et de cranes rasées ?

    • Oui, moi aussi j’avoue que là je ne suis plus DB qui se trompe grandement d’ennemie.
      Pas un mot sur la cause du conflit ni la stratégie du gouvernement... tout est la faute de la gauche (non pardon pas de la gauche, du PCF !) et d’un dirigeant syndical... très fort.
      D’habitude je trouve ce qu’écrit DB intéressant par les questions qu’elle pose et les lignes de force qu’elle débusque. mais pas là :(

      Comme le dit Patrice Bardet ailleurs c’est le temps des vautours et les pires d’entre eux sont les donneurs de leçon "révolutionnaires" qui fleurissent. Les pires, parceque je n’attends rien des médias dominants, des politiques de droite ou sociaux-libéraux, que ce qu’ils vomissent à longueur de temps.
      Je serais en droit d’attendre autre chose par contre de gens qui se disent "révolutionnaires". Mais mon droit n’est qu’un droit de se faire des illusions et je ne m’en fais aucune.

      Ces vautours là ne sont pas que charognards, ils voudraient bien aussi participer à la mise à mort, en ricanant. Bien sûr pour faire la révolution le lendemain, puisque la seule chose qui l’empêche c’est la CGT et le PCF.

      Bref, objectivement, comme on disait il y a qq années, ce sont de zélés serviteurs de la nouvelle devise française (celle du pouvoir) : efficacité, rentabilité, flexibilité.

      "les maîtres ont encore une âme de valet" (Beaumarchais)

      GB