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journaliste ou éditorialiste ?

Publie le mercredi 18 novembre 2009 par Open-Publishing

Suite au débat proposé sur europe1 entre le directeur d’une agence de presse et un rédacteur d’agoravox, il m’est apparu soudain que les deux intervenants de ce plateau entretenaient un dialogue de sourds, et ce pour une raison qui peut apparaître évidente mais qui n’a malheureusement été évoquée : les deux participants ne parlaient pas de la même chose.

Pour le premier, il évoquait les journalistes, qui ne sont de mon point de vue ni plus ni moins que les scribes de l’information. ils sont professionnels, et à ce titre ils disposent d’un diplôme, de compétences spécifiques et d’une technicité rédactionnelle. Leur métier est de transmettre l’information, mais pas de la juger. Bien sûr on peut critiquer la formation de ces professionnels, ou remettre en cause leur indépendance suivant le groupe auquel ils appartiennent, et même dénoncer les manquements auxquels ils sont sujets : mais cela ne contredit pas le principe d’objectivité des journalistes, qui n’ont pas à donner leur avis, ou seulement à suivre "discrètement" celui de leur rédaction.

Pour le second, il dénonçait la sélection des informations faites par les journalistes : c’est à mon avis une erreur. car les journalistes ne sont pas responsables de la politique éditoriale ou de la sélection de l’information, c’est la rédaction (et par voie de hiérarchie le propriétaire du média) qui détient cette responsabilité, tandis que les journalistes ne doivent se limiter qu’à rechercher et décrire des faits.
Mais tout ceci ne remet pas en cause l’intervention de ce dernier si l’on considère qu’il parlait des éditorialistes, et non des journalistes. Car ce sont les éditorialistes qui commentent l’information (et qui la propagent en même temps forcément), sans tenir compte de cette objectivité que l’on demande aux journalistes. Ils n’ont pas les devoirs de recoupement, de vérification ou de témoignage qu’on exige d’un journaliste, mais seulement celui de donner leur avis. Pour cela nul besoin d’être un professionnel, car c’est la force de persuasion de l’éditorialiste qui fait sa valeur. Au contraire du journaliste, l’éditorialiste prend des risques en donnant son avis, et ne peut absolument pas rentrer dans les cases du formatage assuré par les écoles.

Ces deux métiers sont donc bien différents, mais ils fonctionnent tout de même ensemble dans un même but : faire participer le citoyen à la connaissance d’abord, pour ensuite le faire réfléchir sur cette connaissance. C’est ce citoyen qui, à intervalles réguliers, se verra invité à voter pour une politique, politique qui aura pris ses racines dans le monde que les journalistes amènent à notre connaissance, et que les éditorialistes nous aident à interpréter.

Cependant, il ne faut pas négliger le fait que les éditorialistes des médias les plus populaires sont souvent sous tutelle de celui qui les emploie, ce qui fait une grande différence avec internet, où les éditorialistes sont à la fois plus libres et plus divers. Mais à partir du moment où l’opinion n’est pas un délit, chacun peut penser à peu près ce qu’il veut d’une information, et en dire à peu près n’importe quoi. La sanction du public est libre elle aussi, et celui dont les idées ne plaisent à personne verra sa popularité décroître, tout simplement. Il ne peut y avoir de contrainte physique exercée sur ce type de votes « par abstention », car la distance qui sépare les internautes est bien plus grande que celle qui sépare le patron de son employé.

Alors évidemment ces éditorialistes du web disent parfois de gros mensonges, mais ils n’ont de valeur que celle qu’on veut bien leur donner. Pour ma part je préfère la liberté de dire des bêtises que l’obligation de répéter ce qu’on me dit de dire. Mais je ne dois pas être le seul, car au train où vont les choses, les éditorialistes des médias « traditionnels » auront bientôt totalement déserté les salles de rédaction pour se précipiter sur le net afin d’y donner véritablement leur avis. Les journalistes n’ont qu’à venir vérifier, les éditorialistes commenteront !

http://calebirri.unblog.fr