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Hommage : Jean Ferrat chante « À la une »
Publié le 21 mars 2010 par Acrimed
Quand on sait que Jean Ferrat ne s’est jamais vautré dans le consensus, il ne faut pas laisser les hommages unanimes effacer ce qu’il a été et ce qu’il a chanté.
Après avoir connu la censure à plusieurs reprises dans les années soixante, Jean Ferrat s’est éloigné des projecteurs et de Paris, ne participant qu’exceptionnellement à des émissions de variété. Ainsi, sa dernière grande apparition publique remonte à janvier 2003 dans « Vivement Dimanche » sur France 2.
Pourtant son succès auprès des Français reste intact. Pour preuve, la forte audience télé de la rediffusion de « Vivement Dimanche » le 14 mars 2010 (lendemain de son décès) qui a rassemblé 3 700 000 téléspectateurs et atteint 20,7% d’audience (L’Humanité Dimanche, 18 mars 2010). L’absence de médiatisation n’a pas entravé la diffusion de ses disques : sa dernière compilation sortie en octobre 2009 s’est vendue à 115 000 exemplaires en quelques semaines [1]. Enfin, ses obsèques diffusées le 16 mars à 14h30 sur France 3 ont même été suivies par un téléspectateur sur trois…
Si Jean Ferrat a chanté la montagne, l’amour, les petites gens et s’il « chante à jamais [la France] des travailleurs », il ne s’est pas gêné non plus pour critiquer la télévision dans une chanson intitulée « A la une ». C’est le moindre hommage que nous lui devions de reprendre ici cette chanson.
À la uneC’est une émission formidable sur les problèmes de sociétéOù des héros et des minables vous parlent en toute libertéSont-ils victimes sont-ils coupables, ce soir voici pour commencerQuelques racketteurs redoutables qui font la sortie des lycéesIls vont pour vous se mettre à table, à condition d’être masquésUn témoignage inoubliable, un grand moment de véritéCe soir, ce soir, après « La Roue De La Fortune »Les racketteurs, les racketteurs sont à la uneC’est une émission fantastique où vous avez un rôle à jouerUn rôle moral, un rôle civique pour nous aider à retrouverTous ceux dont on est sans nouvelles, disparus, volatilisésCe soir je vous lance un appel, vous seuls pouvez nous renseignerDans quels bas-fonds la malheureuse a-t-elle un jour pu s’égarerÀ quelles manœuvres très douteuses a-t-elle fini par se livrer ?Ce soir, ce soir, après « La Roue De La Fortune »La main d’ma sœur, la main d’ma sœur est à la uneC’est une émission fracassante sur les tréfonds d’la sociétéUne tranche de vie saignante que vous ne pouvez pas manquerUn homme qui a payé sa dette, vingt ans de prison méritésReconstituera en direct le crime qu’il a perpétréTout ce qui s’passait dans sa tête, combien de fric il a touchéEn appuyant sur la gâchette pour refroidir un députéCe soir, ce soir, après « La Roue De La Fortune »Les assassins, les assassins sont à la uneC’est une série faramineuse de grands débats télévisésDe controverses fabuleuses, de face-à-face sans pitiéEntre qui saigne et qui charcute, entre bourreaux et torturésEntre un ripou et une pute, un délateur, un dénoncéEntre un para et un fellouze, entre un violeur et des violéesEt puis comme une apothéose, entre SS et déportésCe soir, ce soir, après « La Roue De La Fortune »Un PAF obscène, un PAF obscène est à la une.
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En mai 2004, Jean Ferrat dénonçait, dans un article paru dans Le Monde Diplomatique - « Chanson française et diversité culturelle » sur le site du Monde Diplomatique - les phénomènes d’ententes dans l’industrie du disque ainsi que l’absence de diversité musicale dans les radios. « La « libre entreprise » des marchés dans le domaine de la chanson, écrivait-il, conduit à un appauvrissement dramatique de la diversité culturelle : elle met en cause l’existence même de la liberté d’expression pour la très grande majorité des artistes français. » Dans ce même article, il apportait son soutien complet au intermittents du spectacle : « De cette situation il résulte que la nouvelle réglementation visant les intermittents est particulièrement injuste, car elle touche en premier les plus défavorisés d’entre eux. »
Critique des médias et passionné de justice : merci Jean Ferrat !
Notes
[1] Challenges, 21 janvier 2010.
Messages
1. "A la Une" Jean Ferrat, 31 mars 2010, 17:25, par Mengneau Michel
Ce qui est toujours le plus symptomatique c’est la récupération, la récup pour faire de l’audience. C’est d’autant plus dégeulasse que lorsque Ferrat disait qu’on le prenait pour un cammenbert beaucoup se sont tus. Ils se sont toujours tus lorsque l’on parlait des vrais problème de société. Il continuent d’ailleurs à se taire sur l’engagement anti-capitaliste de Ferrat. Leur discours ne fut et ne sera que de la récup.
Laissons Jean Ferrat à ses chères Montagnes, et même lorsque il n’était plus présent sur le devant de la scène médiatique il a toujours été celui qui de temps en temps par ces chansons nous ramenait à la réalité.
D’ailleurs, il n’y a pas si longtemps, ici, sur ce site nous fûmes quelques uns à avoir fait passer le Bruit des bottes.
Il était encore là...il sera d’ailleurs toujours là, même si l’on oublie trop : En groupe, en ligue, en procession, ou bien tout seul à l’occasion...