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Une excursion en car

Publie le mardi 4 mai 2010 par Open-Publishing

Cela faisait bien trente ans que je n’avais pas accompli une excursion en car de tourisme. Les véhicules ont gagné en sécurité et en confort. Mais là n’est pas la question.

Le chauffeur (appelons-le Bachir) de cette grosse compagnie de Midi-Pyrénées se fit un plaisir de m’informer des dernières évolutions dans la profession. Depuis une vingtaine d’années, les petites compagnies se font progressivement manger par les plus grosses, la mère de toutes les avaleuses étant Véolia. Chaque fois qu’un salarié passe d’une compagnie plus petite à une plus grosse (s’il n’est pas licencié, bien sûr), il perd quelques acquis sociaux au passage. Dans cette profession, les luttes ne sont pas rares, mais elles débouchent rarement sur du concret pour une raison fort simple : les sociétés de taille moyenne ou importante comptent toutes en leur sein des retraités de la police et de l’armée pour qui la culture de la grève n’est pas le fort.

À Bachir qui m’explique les raisons techniques pour lesquelles il y a, tout de même, globalement, moins d’accidents qu’autrefois, je fais observer que, dans notre région, sévit une société de taille moyenne (je la nomme) dont les chauffeurs sont particulièrement imprudents. « Élémentaire », me dit Bachir : « De très nombreux jeunes veulent devenir chauffeurs de car. Ce type de société leur paye le permis : environ 5000 euros. Puis, pour se rembourser, elle leur impose des contrats à temps partiel (24 heures par semaine sans heures supplémentaires) à 7000 euros par mois. Sachant qu’ils ne feront pas de vieux os dans le métier, ces jeunes se contrefichent de la sécurité, des accidents éventuels, de l’honorabilité de leur employeur. »

Je demande à Bachir si, pour les patrons comme pour les chauffeurs, il est toujours facile de trafiquer les fameux disques que la police ou la gendarmerie réclament lors de contrôles inopinés. « Oui », me dit-il, « mais, désormais, nos véhicules doivent être pourvus d’un lecteur et d’une carte à puce infalsifiable qui nous suit au centimètre près. »

— Savez-vous qui a le monopole de ces cartes qui nous coûtent 60 euros par an, me demande-t-il ?

— Bien sûr que non, dis-je.

— Le frère de Sarkozy, me dit Bachir.

À vérifier, naturellement...