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Mort d’un journaliste sans importance

Publie le vendredi 6 août 2010 par Open-Publishing
3 commentaires

Liban des accusés / vendredi 6 août par Jacques-Marie Bourget


Tous les journalistes sont égaux… Mais certains moins que d’autres. La mort du reporter libanais Assaf Abou Rahhal ne compte pas puisqu’il était « proche du Hezbollah ».

Assaf Abou Rahhal, quel drôle de nom pour un journaliste. Ce type est sûrement un imposteur. Un journaliste, un vrai, son nom est un patronyme du genre Mougeotte, Pujadas, Ferrari, Drucker ou Duhamel. En aucun cas Assaf Abou Rahhal. Ce plumitif libanais n’a donc eu que ce qu’il mérite : la mort. Il a été pulvérisé par un tir israélien lors d’un accrochage de frontière, à propos d’un arbre, hors de la ligne de démarcation, dont les branches empêchaient les soldats hébreux de bien voir venir le danger du nord et qu’ils entendaient élaguer. Relatant la meurtrière querelle les gentils médias, toujours à la recherche du bonus en matière de rigueur, ont précisé que ce rastaquouère, cet Assaf Abou Rahhal, travaillait pour le journal Al-Akhbar « proche du Hezbollah ». Tout est dans ce « proche du Hezbollah ». Une façon de dire que cet Assaf est un pas bien joli type et que sa mort compte pour pas grand-chose. Ouf, j’ai eu peur que les israéliens aient tué un vrai reporter.

Avec de semblables principes ont pourrait rire beaucoup dans les cimetières de presse. Je ne veux que du bien à ce cher Etienne (Mougeotte) qui dirige un grand journal, Le Figaro. Mais imaginez (à Dieu ne plaise) qu’un obus tiré par un soldat de Voïvodine orientale lui érafle la tong, lirait-on chez nos confrères : « Etienne Mougeotte, collaborateur d’un journal proche de l’UMP » ? Bien sûr que non. Imaginez aussi que des imbéciles présentent nos deux confrères prisonniers en Afghanistan comme « travaillant pour une chaîne d’Etat en France », ce qui les ravalerait au rang d’un Assaf, celui de journalistes chair à canons.

Au palmarès de RSF tous les journalistes sont égaux mais un Assaf est moins égal que d’autres. Et il faut se méfier de ces degrés que nos protecteurs professionnels mettent en accordant la qualité de journaliste. En 1937, observateur de la Guerre d’Espagne, Georges Bernanos n’aurait donc été qu’un « reporter proche des Républicains ». Quelle horreur !

http://www.bakchich.info/Mort-d-un-...

Messages

  • Exellent article ;..

    La dérision sert admirablement à démontrer la fabrication du consentement, formatage obtenu, non pas en mentant ouvertement, mais par des sortes d’oublis discriminatoires. Ce silence volontaire, ce troncage de la pluralité de l’info, c’est probablement la force principale de l’hégémonie mondiale du capitalisme... Donc, par internet, par d’autres voies écoutées aussi, nous devons nous relayer pour porter l’info la plus pluraliste possible !

  • Les neuf journalistes honduriens assassinés depuis début 2010 (par la dictature mise au pouvoir sous simulacre de "démocratie" par les USA) n’étaient sans doute pas non plus, pour RSF des vrais journalistes : aucune protestation.

    RSF sont les initiales de "Reporter Sans Frontières". Il y en a encore qui y croient à "sans frontières" ? Ce ne sont mêmes plus des "frontières", ce sont des BORNES !

    • merci pour cet article et une précision :

      Assaf Abou Rahhal travaillait pour un journal d’opposition pas spécifiquement proche du hezb

      Assaf Abou Rahhal, malgré ou en dépit de son drôle de nom, était chrétien orthodoxe

      Toutes mes pensées vont à sa famille et aux journalistes honduriens , français en Afghanistan etc... ceux qui essaient encore de faire du journalisme au péril de leur vie.