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Les attitudes vis-à-vis des médias qui maintiennent ou renforcent la domination néolibérale (III)

Publie le lundi 16 août 2010 par Open-Publishing
3 commentaires

(Suite du texte du 13-08-2010, 8 h 45)

Avant de trouver une alternative à la domination idéologique néolibérale qui transite par les médias, mais aussi par l’appareil politique, par l’école ou par l’entreprise, il faut faire un état des lieux de quelques attitudes qui transforment ou non cette domination dans le domaine des médias.

Les organisations critiques, qu’elles cherchent à renforcer leur appareil et leur identité ou qu’elles agissent de manière à valoriser les idées de transformation sociale qu’elles estiment justes, sans négliger le militantisme quotidien traditionnel qui demeure essentiel, conceptualisent logiquement l’importance des médias pour animer la vie politique et pour toucher le public des citoyens. Non seulement elles analysent de manière critique les discours et pratiques médiatiques, mais elles essayent d’intervenir dans ces discours et pratiques pour les transformer.

Nous avons vu que les moyens à la disposition des organisations critiques sont très limités, puisque le dispositif de médias de masse déficitaires permet aux seuls gros actionnaires d’intervenir directement, par la possession de ces médias.

Certaines des organisations critiques attribuent une importance essentiellement aux émissions d’information des médias de masse, et elles essayent donc de faire que leurs actions et propositions apparaissent suffisamment dans les journaux d’information.

Ce qui constitue une participation au renforcement de l’appareil de domination idéologique, c’est quand des organisations critiques ont la chance d’avoir accès aux médias, et que, pour être à nouveau invitées ou pour d’autres raisons, elles ont tendance à ne pas critiquer le discours médiatique, y compris à ne pas critiquer la façon dont elles sont présentées et animées, ce qui revient à légitimer implicitement auprès des téléspectateurs les discours et pratiques médiatiques, et le contenu dont ils sont porteurs.

En particulier, pour profiter de l’avantage en termes d’audience sur les organisations concurrentes, les organisations invitées ont tendance à ne pas protester contre la non-invitation de ces organisations concurrentes, faisant croire aux téléspectateurs qu’il y a du pluralisme et des véritables discussions politiques publiques dans les médias. Insistons : il n’est pas acceptable de jouer de son introduction dans les médias pour prendre sur les partenaires des avantages qui ne doivent rien à l’argumentation et tout à la possession d’un pouvoir ou d’un privilège extérieur à la logique de la délibération démocratique, ce qui revient aussi à tromper les citoyens qui ne disposent pas des informations suffisantes sur les différentes positions en débat.

Remarquons que le privilège accordé à une organisation et pas à une autre d’intervenir dans un média est octroyé, selon la logique plus ou moins opaque du consensus des actionnaires, par le souci de favoriser les propositions les moins transformatrices ou par le souci de diviser et de jeter le trouble dans l’opposition.

Quand elles n’ont pas accès aux médias, les organisations critiques essaient de faire des conférences de presse, de créer des manifestations si possible spectaculaires, de telle façon qu’on en parle dans les médias, pour briser le mur du silence. Remarquons que, pour ces organisations exclues des médias, les comptes-rendus des conférences de presse et des manifestations, quand ils existent, sont souvent déformés et noyés dans le flux néolibéral des images, si bien que cela ne perturbe pas trop le fonctionnement néolibéral des médias. Il y a même le risque, qui doit être maîtrisé, de donner un certificat de neutralité aux médias dans lesquels l’information passe, des médias dont on sait la façon dont ils sont contrôlés et qui pourtant vont apparaître comme objectifs, ces moments fugaces de pluralisme constituant une espèce de caution libertaire à l’instillation répétitive et dominante de l’idéologie néolibérale.

Quand les organisations critiques engagent une action collective, elles en décident avec responsabilité, en particulier avec la conscience que l’action risque d’être moins efficace et même d’échouer si le problème des médias n’est pas pris en compte de manière frontale. Il est donc préférable que les organisations critiques décident aussi d’une attitude unitaire dans les rapports avec les médias, cette attitude unitaire étant une composante qui devrait aller de soi de l’unité des organisations critiques en question.

Mais, étant donné tout ce qui vient d’être dit sur la façon dont les médias de masse actuels rythment la vie quotidienne, il ne s’agit pas seulement d’un problème d’efficacité des actions collectives des organisations critiques, il s’agit de la vie même des citoyens, du détournement de leurs attentes d’émancipation par ces médias au service du néolibéralisme. Il est extrêmement important que les citoyens se rendent compte de l’orientation politique globale de ces communautés conviviales de vie que les médias essayent de constituer avec les téléspectateurs.

Il faut que les citoyens s’appuient sur le fait que les organisations critiques décrédibilisent le fonctionnement actuel des médias, de telle façon que ces citoyens puissent donner du sens à leur sentiment de malaise quant au contenu et au fonctionnement des médias, et ce processus sera facilité si ce sont toutes les organisations critiques qui mettent en question l’orientation globale des médias de masse.

Il faut que les citoyens prennent à temps un peu de distance à l’égard des médias. Les organisations critiques ont pour rôle de les aider dans ce sens par un engagement collectif concret et visible qu’elles doivent définir à la suite d’un débat.

Quelques engagements simples paraissent logiques, en fonction ce qui vient d’être dit.


La suite :
 Pour une attitude unitaire à l’égard des médias (IV)

Messages

  • C’est intéressant ce que tu écris. A la réflexion, c’est le flux lui-même qu’il faut démolir je crois. Déborder les mass media, faire une opération "media libres", comme il y eut les "radios libres" - même si récup - pour faire des outils et non pas des fourches caudines. Ca passe par le fait que la gauche, véritable, doit mettre la question médiatique au sens de question fondamentale et ça c’est pas gagné. Ne serait-ce qu’au PCF où on pense tjs infrastructures, ce qui est légitime. Mais innoportun vu qu’on en est au stade où sont inaudibles les messages et projets politiques même, par le tube, la restriction/sanction médiatique.

  • la realité de la crise seule capable d’inverser la tendance ? :

    Mauvais présage en Bourse, l’indicateur d’Hindenburg s’est activé

    vendredi 13 août 2010 23h25

    CHICAGO, 13 août (Reuters) - Les noms de certains indicateurs techniques financiers semblent avoir été choisis seulement pour tester la peur qu’ils sont en mesure de susciter.

    Ainsi, le "présage d’Hindenburg" ("Hindenburg Omen") désigne une conjonction rarissime de facteurs techniques censée être annonciatrice d’un krach boursier. Il s’est déclenché jeudi sur les marchés boursiers, laissant présager une forte correction dans les prochains mois......

    http://fr.reuters.com/article/frEuroRpt/idFRLDE67C1T120100813

    L’actualité de la crise : elle tourne et elle rode, par François Leclerc

    http://www.pauljorion.com/blog/?p=14817#more-14817

  • "Il faut que les citoyens s’appuient sur le fait que les organisations critiques décrédibilisent le fonctionnement actuel des médias, de telle façon que ces citoyens puissent donner du sens à leur sentiment de malaise"

    La guerre entre les mass-medias et les orgas critiques qui jugent l’action des medias néfaste et, d’une part, asymétrique. La puissance est du côté mass-media. D’autre part, toutes les orgas n’accordent pas autant d’importance que toi au combat contre les medias du capital. La plupart, syndicales ou politiques tentent de s’en servir, font avec.

    Enfin, si certains ont pris conscience que pour proposer une autre vision du monde, et un autre monde, il faut dénoncer les médias, ils n’ont pas réalisé qu’au-delà de la dénonciation il faut construire d’autres medias pour lutter à armes égales et agir réellement en pouvant populariser "nous on veut ça" et non pas seulement dire "les medais sont pourris". L’alternative c’est donc, d’abord, de nous donner des voix, des medias. Internet, le web citoyen est un commencement. La gauche de gauche devrait y réflechier sérieusement, construire au niveau des partis, des syndicats, penser des médias communautaire dotés de moyens plus puissants qu’un simple site.