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Amnesty presse l’UE de se montrer ferme sur la Tchétchénie

Publie le lundi 8 novembre 2004 par Open-Publishing

Un des preneurs d’otages de Beslan appartenait à la "police des polices" russe, selon l’enquête.

de Marie Jégo

Au moment où la Russie a demandé le report du sommet qu’elle devait tenir avec l’Union européenne, jeudi 11 novembre, dans l’attente de la prise de fonctions de la nouvelle Commission, Amnesty International et quelques ONG (le Secours catholique, Médecins du monde, la Fédération internationale des droits de l’homme et d’autres) ont appelé à une manifestation en faveur de la Tchétchénie, samedi 6 novembre, à 14 heures, dans les jardins du Trocadéro, à Paris.

Dans le même temps, Amnesty publie un rapport sur les exactions dont sont victimes les Tchétchènes militants des droits de l’homme et ceux qui ont récemment porté plainte devant la Cour européenne de Strasbourg. Le rapport évoque le cas de Tchétchènes dont le sort s’est aggravé au lendemain du dépôt de leurs plaintes devant la Cour des droits de l’homme. Un homme, dont le fils a disparu après avoir été arrêté par les militaires russes, a, une fois sa plainte jugée recevable, vu disparaître son autre fils. Un autre, qui questionnait sur la disparition de son frère, a lui-même disparu.

"En s’abstenant d’aborder la question des droits humains avec la Fédération de Russie, l’Union européenne hypothéquerait non seulement sa propre crédibilité, mais également celle d’une institution qui est la pièce maîtresse de l’édifice de protection des droits humains en Europe", prévient Dick Oosting, directeur d’Amnesty pour l’UE. A la veille de chaque sommet UE-Russie, l’entourage de Vladimir Poutine met les dirigeants européens au pied du mur, les enjoignant d’éviter les sujets qui irritent le chef de l’Etat russe : la Tchétchénie et l’affaire Ioukos.

Venu à Paris pour prendre part à la manifestation de samedi, le journaliste russe Andreï Babitski, qui, pour Radio-Svoboda a couvert la guerre depuis le début du premier conflit, en 1994, jusqu’à sa détention par les forces russes, en janvier 2000, dénonce la politique de Moscou : "Vladimir Poutine mise sur la force. Marqué par son passé au KGB, il pense qu’il est possible de gagner en réprimant durement et longuement. A l’heure actuelle, les spécialistes du Caucase qui ont l’oreille du Kremlin étudient de très près les méthodes employées au XIXe siècle par le général Ermolov", dit-il. Le général Ermolov, qui a commandé l’armée russe au Caucase entre 1816 et 1827, était d’une cruauté légendaire.

Selon Andreï Babitski, le chaos qui prévaut dans la région n’est pas prêt de finir. La nomination, par le Kremlin, de Ramzan Kadyrov, qui contrôle la sécurité pour l’administration prorusse de Tchétchénie, au poste de responsable de la sécurité pour toute la région du nord du Caucase, ne va rien arranger.

Des actes de terreur comme la prise d’otages de Beslan (344 morts, dont 172 enfants, le 3 septembre), ne seraient pas à exclure. Si des zones d’ombre subsistent autour de ce drame, l’enquête a tout de même révélé que les armes et les explosifs utilisées par le commando provenaient des stocks du ministère de l’intérieur et que l’un des 32 terroristes (20 ont pu être identifiés), un certain Bachir Pliev, 27 ans, travaillait pour la "police des polices". "Son laissez-passer lui permettait de se rendre n’importe où" et "sa voiture ne pouvait être fouillée par la police", a expliqué, jeudi, le quotidien russe Gazeta.

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3210,36-386040,0.html