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Peer to peer : la SABAM veut voir Tiscali agir

Publie le mercredi 10 novembre 2004 par Open-Publishing

La SABAM se base pour cela sur la directive européenne "Société de l’information", qui n’a pas encore été transposée en droit belge.

de Jean-Luc Flemal

La SABAM a demandé jeudi au tribunal de première instance de Bruxelles, siégeant en référé, qu’il ordonne au fournisseur d’accès internet Tiscali de prendre des mesures pour empêcher l’utilisation de tous les systèmes d’échange de fichiers « peer-to-peer » (P2P, d’un ordinateur à un autre). Tiscali s’y oppose farouchement. Le tribunal a mis l’affaire en délibéré.

De nombreux internautes téléchargent massivement des oeuvres protégées par le droit d’auteur sans que leurs auteurs, compositeurs ou auditeurs l’aient autorisé. Pour cela, ils utilisent des logiciels P2P tels que Kazaa, eDonkey, eMule ou Gnutella.

Tiscali ne commet pas d’atteinte aux droits d’auteurs en permettant à ses internautes d’avoir accès à des logiciels P2P, reconnaît la Société belge des auteurs, compositeurs et éditeurs.

Mais la SABAM - et c’est l’objet de son action en cessation civile - n’en demande pas moins au tribunal de constater que des atteintes aux droits d’auteurs sont bien commises et qu’un fournisseur d’accès tel que Tiscali est l’intermédiaire le mieux placé pour empêcher techniquement l’utilisation des P2P, a indiqué Me Benoît Michaux, conseil de la SABAM. 

La SABAM se base pour cela sur la directive européenne « Société de l’information », qui n’a pas encore été transposée en droit belge.

Tiscali, de son côté, dit ne pas comprendre pourquoi elle devrait payer des mesures coûteuses - elle avance le chiffre d’1,3 million d’euros - dont la nature n’est pas précisée, et ce alors qu’elle n’a commis aucune faute. « Il manque ici les vrais contrevenants, c’est-à-dire les particuliers qui téléchargent illégalement ou les producteurs de logiciels P2P », a relevé Me Jean-Luc Schuermans, conseil de Tiscali.

Outre le fait que des mesures techniques seraient inefficaces en raison des contournements possibles, leur résultat serait insuffisant pour enrayer le problème du téléchargement illégal : Tiscali ne représente en effet que 3,8 pc des parts du marché sectoriel, souligne l’avocat. « Au lieu de s’en prendre à Belgacom-Skynet ou à Telenet, qui représentent à deux 87 pc des parts du marché, la SABAM s’attaque à un petit dans l’intention de se voir opposer moins de résistance », ajoute Me Jan Surmont, conseil de Tiscali. « Il faut bien commencer quelque part », rétorque Me Michaux.

Et Me Surmont d’asséner que la SABAM « est utilisée par l’industrie musicale pour cloisonner le marché et empêcher notamment que les artistes mettent leur musique gratuitement à disposition sur leur site ».

Tiscali conteste la compétence du tribunal et le fondement de l’affaire. Elle réclame en outre des dommages et intérêts pour procédure téméraire et vexatoire, ainsi que le remboursement des frais du dossier.

Le fournisseur d’accès internet dit aussi être confronté à un vide juridique en la matière, et appelle avant tout à un débat de société impliquant tous les acteurs du milieu avant de passer aux actions judiciaires.

Mais pour la SABAM, Tiscali cherche surtout à gagner du temps, alors que le vide juridique est une illusion puisqu’une directive européenne existe en la matière, relève Me Michaux.

Le tribunal a mis l’affaire en délibéré.

http://www.lalibre.be/article.phtml?id=10&subid=90&art_id=190544