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UKRAINE : LIBERALISME CONTRE STALINISME

Publie le mercredi 1er décembre 2004 par Open-Publishing
8 commentaires

de Patrick MIGNARD

A écouter les grands médias, les choses seraient simples, il y aurait les anciens contre les modernes, les orientaux contre les occidentaux, les pro européens contre les pro russes, bref ... les bons contre les méchands. Est-ce aussi simple ?

Au premier abord les « oranges » sont plus sympathiques que les « bleus » et ce pour une simple raison : on veut leur voler leur victoire. C’est un fait désormais incontestable que les « bleus » ont bourré les urnes et ont fait usage de toutes les manipulations les plus anti démocratiques pour faire triompher leur candidat. Mais que se joue-t-il derrière ces manœuvres, en un mot derrière cette élection ?

POUR LA RUSSIE UN ENJEU STRATEGIQUE

Enjeu stratégique sur plusieurs points :

 économique : l’Ukraine, ancien grenier à blé de l’URSS, son potentiel industriel (complexe minier),

 stratégique : ouverture sur les mers chaudes (Mer Noire),

 politique : la perte de l’Ukraine est un pas supplémentaire vers ce qu’était l’ancien empire soviétique si cher à la bureaucratie du Kremlin et une marque de son affaiblissement sur le plan diplomatique. C’est d’autre part un renforcement de l’Europe face à la Russie.

L’Etat russe, véritable maffia, mais officielle, issue de l’ancienne nomenklatura soviétique (elle-même maffieuse), n’est pas prêt à avoir un fonctionnement économique au sens libéral-marchand du terme, il suffit pour s’en convaincre de voir comment il traite les « hommes d’affaires » russes qui, quand ils sortent de leurs prérogatives purement économiques, sont politiquement cassés, voire éliminés... sans parler des journalistes qui dénoncent cette situation. Véritablement parasite, cette maffia fonctionne en grande partie sur l’ancien modèle soviétique et a besoin pour exister internationalement de sauvegarder une bonne part de ses possessions. Ayant vu lui échapper, au moment de la « chute du mur de Berlin », une partie de son empire (l’Europe de l’Est et les Républiques Baltes), n’ayant pu retenir la Géorgie, elle s’accroche à ce qui lui reste. Elle écrase, sous prétexte de terrorisme la Tchétchénie ... au risque de perdre tout le Caucase. Elle tient la Biélorussie par une dictature purement stalinienne... reste l’Ukraine qui tente de lui échapper...

L’ENJEU DES ELECTIONS

Dans les médias on nous présente les « oranges » comme des gens comme nous (occidentaux), raffinés, ayant soif de liberté et de « modernité ». Le prototype des « bleus » par contre c’est le mineur de l’Ukraine de l’est du pays, personnage crotté, pour le moins antipathique, prêt à faire le coup de poing et méprisant l’Ouest.

Les « bleus » : manipulés par Poutine, veulent rester dans le giron russe. Leur chef, en liaison avec le « boucher de la Tchétchénie », et partageant ses intérêts avec les siens, freine des quatre fers quant à une ouverture vers l’Europe. Le risque d’une telle ouverture pour eux étant une remise en question du pouvoir central ukrainien au bénéfice des milieux d’affaires ouverts sur la mondialisation marchande. D’ailleurs, les mineurs de l’Est ne s’y sont pas trompés qui craignent, à juste titre, une rentabilisation du bassin minier avec licenciements massifs à la clef en cas de victoire des « oranges ».

Les « oranges » : ils veulent un système marchand à l’occidentale. Le fer de lance de ce mouvement est évidemment la frange « bourgeoisie marchande » qui veut sa part de gâteau à l’échelle internationale. Elle entraîne dans son sillage (phénomène classique), une bonne partie de la population qui croit dans l’aspect « liberté » du « libéralisme »... mais qui évidemment fera à terme les frais de la rentabilisation de l’économie modernisée.... chômage, exclusion,...

L’ « émancipation » au regard du « grand frère » russe dont ont bénéficié les républiques de l’ancien glacis soviétique et dont n’avait pas profité l’Ukraine, c’est maintenant qu’elle veut se réaliser... mais les temps ont changé depuis 1989.

La réaction des USA et de l’Europe est d’ailleurs très intéressante. Ils ont beau jeu de dénoncer les fraudes... qui sont une réalité, mais leur réaction n’est pas seulement motivée par le souci de la démocratie... Arracher l’Ukraine à la Russie c’est affaiblir cette dernière et ouvrir le champs de la mondialisation.

L’enjeu des élections n’est donc pas la victoire pour les « bons » ou les « méchants », l’enjeu, comme dans toute élection est la prise de pouvoir d’un groupe sur un autre. Les intérêts sont différents, les méthodes sont différentes, mais le résultat est toujours le même... c’est le citoyen de base qui paie.

Messages

  • D’accord sur le fond de l’article, qui met bien en évidence la propagande des médias français : le fait que Ioutchenko ait été Premier Ministre de ce régime "stalinien" est pratiquement passé sous silence...

    Pour autant, il est illusoire de croire que nos "hommes d’affaires" occidentaux ne sont pas eux-aussi des mafieux. les exemples se multiplient : Enron , Vivendi, Parmalat, Total, Elf...
    Et pourtant, la violence à laquelle risque de faire face celui qui dénonce cela en Occident est tout de même moindre qu’en Russie et en Ukraine.
    Finalement, les Occidentaux, qui font alterner au pouvoir droite et "gauche" n’ont pas d’excuse valable pour justifier leurs comportements lâches et grégaires.

    • GRRRR
      certes iouchtenko a été ministre, mais ce, pendant quelques semaines, quand le president actuel, Koutchma a pris la mesure du vote contre lui meme. Kravtchouk, l’ex président limogé a lui meme été victime d’un sale coup electorale. Ne pensez pas que dix ans auparavant, les bourrages d’urnes aint étés moindres. Ils ont juste étés plus discrets. tout le monde s’en foutait et se bitturait a la bière de berlin.
      Que ceux qui aiment penser a un candidat stalinien n’oublient pas qu’une fois que iouchtenko, premier ministre stalinien "avec guillemets" a été nommé, il s’est fait limoger manu militari de son bureau pour cause d’internationalisme, insulte supreme pour un apparatchik. Tout contact avec un autre bloc que russe était interdit a cette époque.
      Sur sa tronche, iouchtenko porte les traces des attaques dont il a été l’objet

      A ce jour, c’est la moscovie qui cherche sa voie, au jour ou la russie (kyivska Russ) dit merde a 300 ans d’occupation. l’enjeu réel n’est pas ouest ou est, il est juste ( et c’est un morceau énorme) que de remettre en cause la légitimité de l’empire moscovite. Causons en avec les tehetchenes. Ils ont aussi a causer.

  • oui, mais c’est aussi une lutte du libéralisme contre ce qui peut ressembler de près ou de loin au "socialisme". C’est aussi l’enjeu de la destruction de tout ce qui est "collectif" et protection sociale.

    Prenons garde à prendre parti pour les ennemis du peuple ! La lutte des classes n’est pas un vain mot !

    Patrice Bardet

  • Je crois que la population ukrainienne va beaucoup souffir dans l’avenir de la nouvelle politique
    libérale et qu’il sera trop tard pour changer de route. Ils seront soumis à "l’irreparable" et à cet "inevitable" libéralisme auxquel toutes l’Ukraine "du haut" est d’accord car ils en profiteront au detriment de leur population.

    D’accord avec l’analyse géopolitique : un pays de plus dans l’escarcelle de l’OTAN !

  • Je n’ai pas d’elements assez fiables, dans ce fatras d’informations que nous infligent chaque jours les medias aux ordres des multinationales mais, dans un reflexe peut etre simpliste, je regarde les soutiens les plus violents des "oranges"

     Gerges Busch, Xavier Solana, Lech Walesa,l’Union Européenne ect .....

    La façon de ces individus de faire chez eux, et dans le Monde, le bonheur des pëuples les plus démunis laisse imaginer ce que serait l’avenir des travailleurs Ukrainiens en cas de victoire de leurs protégés.

    Vive la lutte des classes Raymond

  • Qui sont les observateurs présents pour dénoncer les fraudes ? Allez voir un peu sur Réseau Voltaire, il y a un début de réponse. Quand la démocratie ne passe que lorsque le résultat est celui escompté...
    Au Cameroun par exemple il n’y a pas eu d’ "oranges ", les médias auto-proclamés nous auraient bien dit sinon qu’il y avait eu irrégularités ou pratiques proscrites.
    Démocratie quand tu nous tiens , ça fait mal.

  • Ce n’est pas du tout "le libéralisme contre le stalinisme". Le stalinsime, c’est aussi la Baltaiile de Stalingrad, puis de Kursk, la défaite du nazisme, la mobilisation populaire mondiale à l’époque, etc. etc.

    Autre problème : En Ukraine, c’est l’"Occident" qui cherche à mettre la main sur le pays et ses ressources (humaines et matérielles). Le danger principal est l’impérialisme US et le (pour l’instant) sous-impérialisme de l’Union européenne. Ce n’est pas du tout la Russie (malgré ses prouesses en Tchétchénie). Car la Russie ne pourra pas dominer l’Ukraine, comme les "occidentaux" peuvent le faire.

    Parmi les pro-occidentaux en Urkaine figure la très mafieuse multi-millionaire Yulio Tymoshenko, présentée comme la passionaria de le "révolution" orange dans les médias occidentaux. Elle et sa bande sont, d’ailleurs, soutenu par les oligarches de la mafia russe (comme Bérézovsky) en fuite, résidant en Grande Bretagne, entre autres. Ah oui, nous avons failli oublier que bon nombre de ces mafieux russes sont également pro-israelien. Aussi que parmi les "oranges" ukrainiens figurent les très peu reluisants héritiers des nazis et waffen-SS ukrainiens, dont bon nombre était abrité aux USA et au Canada.