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L’écrivain espagnol Jorge Semprun est mort

Publie le mercredi 8 juin 2011 par Open-Publishing
4 commentaires

L’écrivain et homme politique espagnol Jorge Semprun est mort à Paris à l’âge de 87 ans, a-t-on appris auprès de son petit-fils Thomas Landman.

Résistant, déporté, dirigeant clandestin du Parti communiste espagnol (PCE), écrivain, ministre, Jorge Semprun a été le témoin des grandes déchirures politiques du XXe siècle, dont il a tiré une œuvre marquante en littérature et au cinéma.

Jorge Semprun naît le 10 décembre 1923 à Madrid dans une famille de la haute bourgeoisie castillane aux valeurs républicaines profondément ancrées. De sa mère, morte quand il avait neuf ans, il évoquait l’image d’une femme brandissant le drapeau républicain à sa fenêtre en 1931, à l’abdication du roi.

Son père, avocat et diplomate républicain, restera pour lui un "exemple moral", qui "a choisi l’exil pour être fidèle à ses idées". Il quitte précipitamment l’Espagne avec ses sept enfants en 1936, quand éclate la guerre civile. D’abord pour les Pays-Bas, puis pour la France en 1939.

"ROUGE ESPAGNOL"

A Paris, Jorge Semprun, brillant étudiant, plonge dans "l’histoire, un continent confus où s’engager corps et âme, quitte à s’y fondre". Le communisme d’abord. En mars 1939, la chute de Madrid tombée aux mains des franquistes lui insuffle la conviction d’être à tout jamais "rouge espagnol".

Avec la seconde guerre mondiale, il s’engage dans un réseau de résistance dépendant de Londres. Mais, en septembre 1943, il est arrêté par la Gestapo, à l’âge de 19 ans, et déporté à Buchenwald. Les communistes se sont infiltrés dans l’administration interne du camp et Semprun s’y voit confier la répartition des détenus dans les différents commandos de travail.

A la libération du camp, en avril 1945, il choisit "l’amnésie délibérée pour survivre". Il rompra ce silence en 1963 avec son premier récit, Le Grand Voyage, et reviendra notamment sur cette expérience douloureuse en 1994, dans L’Ecriture ou la vie.

Après quelques années comme traducteur à l’Unesco, il repart pour l’Espagne, où il coordonne l’action clandestine du Parti communiste espagnol sous le pseudonyme de Federico Sanchez. En 1964, le chef du PCE Santiago Carillo l’exclut du parti pour "déviationnisme".

"ENTRER EN LITTÉRATURE"

Contraint une nouvelle fois à l’exil, coupé de l’activisme politique qu’il considère comme "la création la plus pure", Jorge Semprun choisit alors d’"entrer en littérature", compagne de ses années de jeunesse parisienne et de Buchenwald, où il fuyait la promiscuité en se plongeant dans la poésie.

En 1985, invité de l’émission "Apostrophes" de Bernard Pivot, il expliquait pourquoi, lui, espagnol, avait fait le choix d’écrire en français.

Ses œuvres sont une réflexion sur sa vie "remplie par le bruit et la fureur du siècle", comme La Deuxième Mort de Ramon Mercader, prix Femina en 1969.

Semprun se fait aussi connaître comme scénariste et dialoguiste de films comme La Guerre est finie (1966) ou Stavisky (1974) d’Alain Resnais. Il est surtout le complice d’Yves Montand et du réalisateur Costa Gavras, qui donne un nouveau souffle au cinéma politique avec Z (1968), sur la dictature des colonels grecs, ou L’Aveu (1970), sur les procès staliniens.

Membre du jury Goncourt à partir de 1996, Jorge Semprun est l’auteur d’Autobiographie de Federico Sanchez (1978), sur son parcours de militant déçu, Netchaiev est de retour (1987) ou Vingt ans et un jour (2004). En 1988, le chef du gouvernement espagnol Felipe Gonzalez lui offre le ministère de la culture, mais l’ancien militant joue les trouble-fêtes, critique certains membres du gouvernement et quitte ses fonctions en 1991.

http://www.lemonde.fr/culture/article/2011/06/07/l-ecrivain-espagnol-jorge-semprun-est-mort_1533274_3246.html

Messages

  • Je salue la mémoire du résistant , du militant anti-fasciste et de l ’intellectuel qui s ’est élevé contre toute les formes de barbarie .

    Certes son itinéraire politique est critiquable mais doit être replacé dans son contexte, SEMPRUN adhérent du PCE depuis 1942 a sacrifié sa jeunesse pour ce qu’il croyait être son idéal : le communisme : résistant , déporté à BUCHENWALD, torturé , puis membre de la direction clandestine du PCE pendant 25 ANS , il dénonce le stalinisme et la direction autoritaire de SANTIAGO CARRILLO , ainsi en 1959 CARRILLO contre l avis de LA PASSIONARIA et de SEMPRUN lance un mot d ’ordre de grève générale qui non seulement s’avère être un echec mais permet à la police espagnole d ’ arrêter de nombreux militants et dirigeants du PCE clandestin .

    Au fil des ans l’opposition avec CARRILLO qui demeure stalinien devient plus forte et finalement SEMPRUN est exclu pour dissidence en 1964 avec d’autres militants comme FERNANDO CLAUDIN .

    Par la suite , dès l’avènement de la démocratie CARRILLO effectue un virage à 190 degré , l’ex-stalinien participe à l adoubement du roi , devient un chantre de l’eurocommunisme participe à la liquidation du PCE et à son intégration dans la nébuleuse IZQUIERDA UNIDA .

    SEMPRUN se consacre essentiellement à l écriture , de romans et de scénarios( la guerre est finie , Z , L aveu ...) ou il se sert des fragments de sa mémoire pour témoigner sur l’ignominie nazie et pour dénoncer les dictatures .

    Tout comme son adversaire CARRILLO il devient pro-européen et se laisse tenter par la politique politicienne en acceptant le poste de ministre de la culture de FELIPE GONZALEZ , poste qu’il occupera un peu plus de deux ans et qu’il quitte écoeuré par la corruption et les magouilles qui règnent avec l assentiment du PSOE , il s’ en prend notamment à GUERRA le vice -président " une sorte de DSK avant l’heure " ...

    SEMPRUN savait également se montrer critique avec lui-même , ainsi il se reconnaissait une seule trahison celle de l idéal de sa jeunesse , il disait également que sa vie est comme un fleuve et qu’ un fleuve est toujours différent , jamais le même ...

    Comme d’autres qui ont été acteurs des évènements politiques de cette période , SEMPRUN s’est parfois trompé , mais son intégrité , son courage et ses combats contre le fascisme , les atteintes aux droits de l’homme et contre tout ce qui lui semblait porter atteinte à la dignité humaine mérite le respect .

    • Oui c’est sûrement vrai — le social démocrate — mais enfin l’abolition du franquisme telle qu’elle s’est produite n’était-elle-pas aussi un acte social-démocrate et qui pourrait le regretter ? Je pense que c’est aussi une question de génération. Mais il est sûr qu’il n’était pas resté un révolutionnaire contrairement à son fils fondateur de L’encyclopédie des nuisances, le dernier des endroits éditoriaux où Debord allait s’intéresser encore à quelque chose, et lui-même mort l’an passé alors qu’il n’avait pas plus de 53 ans. Salut à Jorge Semprun grand romancier et scénariste engagé, et père de Jaime Semprun. lui-même essayiste, traducteur et éditeur remarquable. Une sacrée dynastie d’intellos. Il convient mieux de les juger moralement, ainsi que leur engagements respectifs, à leurs actes de création.

  • Richard Paolo ne m’en voudra pas : je ne pleure pas le militant espagnol qui vient de mourir.

    Certes pas en raison de son itinéraire à la Fiterman:chacun peut avoir été stal, puis victime du stalinisme, puis social démocrate

    Après tout, il ne sera pas le dernier à aller à la soupe.

    Je connais la vie et l’oeuvre de celui qui fait l’objet de cet hommage.

    Je connais hélas aussi ce que sa couardise, sa complicité d’avec un gouvernement en recherche de boucs émissaires dans la lutte contre l’ETA, sa fidélité à un F.Gonzalez donnant à sa police et ses barbouzes eu G.A.L tous les moyens de coopération avec les flics et barbouzes de Mitterrand, a eu comme conséquence sur la vie d’un jeune étudiant palois de l’université bordelaise.

    La lecture du PV de l’Assemblée Nationale du 8 décembre 89 (ref 6180) rappelera les faits :

    http://archives.assemblee-nationale.fr/9/cri/1989-1990-ordinaire1/114.pdf

    Jean Philippe était INNNOCENT, totalement étranger à toute complicité avec les assassins etarras.

    J’ai organisé l’essentiel de la campagne de mobilisation autour de son cas

    De l’occupation du Consulat d ’Espagne à Bordeaux, à l’accompagnement de sa famille au procès, reporté une première fois avec une parodie deustice, àfaire croire que Franco n’était pas mort..

    Heureusement un homme courageux , le Consul de France à Madrid à toujours été avec nous, , avec la famille, notamment la soeur de JPC très impliquée.

    Une résistante ex déportée s’est adressée directement à SEMPRUM alors Ministre de la Culture

    J’ai aussi multiplié les courriers sans réponses..

    Nous rappelions à SEMPRUM ce qu’est l’arbitraire.

    SEMPRUM n’a pas bronché un sourcil, c’est à gerber !

    .

    JP Casabonne a tiré ses SIX ans dans des conditions de détention effroyables !

    Il est sorti brisé

    SEMPRUN fut coupable de NON assistance à jeune innocent en danger.

    Lui, Mtterand, Gonzalez et toute la camarilla rose ’européenne porte une terrible responsabilité.

    Car il fallait "soutenir" Gonzalez qui , avec une presse espagnole déchainée..., avait inventé le mythe de l"intervention étrangère"..

    Suivez le regard ...vers les Pyrénées atlantiques !
    Certes j’ai souffert du comportement de la Fédération du PCF des P.A, craignant, contrairement à ce qui fut fait en Gironde, de se méler d’un e affaire ou le présumé innocent..était déjà lynché en Espagne .. présenté comme un terroriste !!

    Pour avoir échangé ses coordonnées avec deux jeunes espagnols..qui s’avérèrent membres du fameux Commando Madrid..

    Que dire de cette pauvre Edwige Avice, répondant à Lefort

    .

    En tout état de cause, je tiens à préciser, comme l’a encore
    rappelé Roland Dumas la semaine dernière devant le Sénat.
    qu’il n’appartient pas aux autorités françaises de porter une
    appréciation sur le bien-fondé d’une condamnation, dès lors
    que celle-ci émane de l’ordre judiciaire d’un pays démocratique
    et qu’elle a été prononcée dans le strict respect des lois
    et des règlements judiciaires de ce pays.

    Strict respect des lois démocratiques ?

    Beurkkk !!

    Alors , figurez vous, camarades, que cet ancien Résistant, ce déporté aie pu jusqu’à sa mort, symboliser pour beaucoup un exemple de vertu, je comprends et je respecte ce sentiment.

    .
    Quand j’ai appris que SEMPRUM était mort ,moi, j’ai pensé à la jeunesse de Jean Philippe qui a été foudroyée , avec sa complicité !

    Je ne pleure pas l’écrivain et le résistant antifasciste.

    Hier j’ai appris la mort d’un complice d’une saloperie sans nom.

    In memoriam.

    A.C

    • ALAIN , je ne t ’en veux évidemment pas d’autant plus que je ne "pleure" pas la mort de JORGE SEMPRUN, j ai seulement salué l’écrivain témoin important de son époque , le résistant et le militant communiste victime comme d ’autres du stalinisme et de la duplicité de CARRILLO , celà ne dédouanne évidemment pas SEMPRUN de ses erreurs , de sa dérive social démocrate ( être victime du stalinisme ne donne pas droit à toutes les excuses ), de plus je ne connaissais pas cette histoire tragique que tu racontes et qui vient ternir l’image du défenseur des droits de l homme .

      FRATERNELLEMENT