Accueil > Propositions de Terra Nova pour l’université : le "think tank" de la (...)

Propositions de Terra Nova pour l’université : le "think tank" de la gauche est de droite !

par Diké

Publie le mardi 30 août 2011 par Diké - Open-Publishing
5 commentaires

Que se passe-t-il au sein de la gauche française ? Se "droitise"-t-elle, désespérée de voir que les
Français sont d’indécrottables droitiers, en cherchant son salut dans un libéralisme déchaîné ? Ne risque-t-elle pas de disparaître tout
simplement ?

Les propositions du "think tank" Terra Nova - classé à gauche (et l’on se demande bien pourquoi) - pour
une réforme de l’enseignement supérieur laissent songeur. Et inquiet. Car si certains membres de la gauche française sont connus pour leur ancrage politique plus au centre que véritablement à
gauche (Dominique Strauss-Kahn et soutiens, Manuel Valls), il y a du souci à se faire si l’ensemble des élus de gauche se convertissent à la religion Terra Nova, d’autant que l’auteur du
détestable rapport, Yves Lichtenberger, fait partie de l’équipe de campagne de Martine
Aubry
.

Jugez plutôt.

500 € par mois pour tous les étudiants (l’allocation d’autonomie)

Séduisant. Mais cette formulation est trompeuse, voire mensongère. Car cette somme est en réalité la somme de ce que
perçoivent en moyenne les étudiants et leurs parents au cours des études de leurs enfants (demi-part fiscale sur la feuille d’impôt, APL versée par la CAF, bourses, etc.). Au total, 250 000 € sur
cinquante mois. Avec une telle réforme, un fils d’actionnaire de L’Oréal toucherait autant qu’un fils de salarié moyen ; une belle confusion entre l’égalité et l’équité. Le pactole pour la classe
moyenne aisée, mais surtout la fin des APL qui sont absolument vitales pour la plupart des étudiants.

Quant aux étudiants boursiers, si ces mesures s’étendaient à eux, ceux-ci verraient leurs ressources diminuer
puisqu’un étudiant boursier échelon 6 perçevant des APL touche au total environ 660 € par mois.

Pour compléter le tableau, Terra Nova propose qu’aux étudiants soit accordé un prêt à taux 0, garanti par l’Etat. Une
preuve, s’il en fallait une, que l’allocation d’études les mettrait sur la paille, et les forçerait à recourir aux banques, entamant la spirale infernale de l’endettement dès l’âge de 18 ans,
comme c’est déjà le cas au Royaume-Uni (de belles émeutes étudiantes ont d’ailleurs eu lieu l’année dernière dans ce pays habituellement dont les habitants sont d’ordinaire si
dociles)

La licence à 500 € par an

Elle est actuellement autour de 160 à 200 € pour les étudiants non-boursiers. A ces tarifs s’ajoutent d’autres frais à
payer à l’inscription à l’université, notamment 200 € de sécurité sociale. La facture monterait donc vite à 700 € par an grâce à Terra Nova. Une somme que les boursiers - qui ne le seraient plus,
puisqu’ils perçevraient l’allocation d’études - devraient désormais payer, soit déjà un mois et demi d’allocation. Comment se loger et manger, cela, Terra Nova ne le dit pas. Car le groupe de
réflexion considère qu’il faut que les étudiants "prennent conscience du coût de leur formation". Une formation qui n’a, rappelons-le, plus aucune valeur (que faire d’une licence de nos jours
 ?).

Pour les étudiants les plus avancés dans leur parcours, Terra Nova prévoit des frais d’inscription de 1 000 € en master, et
1 500 € en doctorat. Pourtant, on note qu’avoir fait quatre ans d’études ne donne pas davantage de ressources qu’au début du cursus. Alors pourquoi en augmenter le coût ?

Le pire est peut-être que les raisons invoquées pour augmenter les frais d’inscription sont tout bonnement scandaleuses :
"limiter l’absentéisme, lutter contre, voire de faire disparaître les étudiants fantômes désirant uniquement bénéficier de la Sécurité sociale". Une vision populiste de l’étudiant pauvre (car
c’est bien d’eux qu’il s’agit, ceux qui ne paient pas de frais d’inscriptions) qui ne s’inscrit à l’université que pour toucher des bourses sans assister aux cours. C’est bien connu, les enfants
de riches, eux, sont studieux, et n’ont pas besoin d’être rappelés à l’ordre. Quant à l’argument de la sécurité sociale, il convient pour y répondre de rappeler qu’un Français pauvre n’allant pas
à l’université peut bénéficier de la CMU. Personne ne s’inscrit à l’université pour avoir la sécu !

Au détour d’une phrase on apprend la vraie raison de ces propositions : "ces droits apporteraient en vitesse de croisière
un milliard d’euros supplémentaires aux universités."
Une conséquence de la loi sur l’autonomie des université de M. Sarkozy et Mme Pécresse est en effet que les établissements
vont devoir ramer pour leurs budgets.


Baisser le nombre de places en prépa

La démocratisation (toute relative !) de ces classes n’est pas au goût de l’élitiste Terra Nova qui souhaite, pour
restaurer le prestige des prépas, en exclure... les riches ? Cherchez encore. Les pauvres. Car en élevant le niveau d’exigence à l’accès à ces classes, on exclut bien entendu les jeunes issus des
familles les plus modestes, qui - pardonnez-leur - n’ont pas pu obtenir 17/20 de moyenne générale à Henri IV à Paris !

"A partir de la rentrée 2012, diminuer de 33 % en cinq ans le nombre de places en classes préparatoires et réduire de 50 %
en cinq ans les places aux concours des grandes écoles" : Terra Nova prépare la France de demain, une France dirigée - comme dans le bon temps, car c’est bien connu, c’était mieux avant - par des
enfants des couches supérieures de la population.

Revaloriser les salaires des personnels

Pour amadouer les universitaires afin qu’ils soutiennent les mesures proposées ?

Un professeur d’université finit sa carrière avec - au très bas mot, car ce chiffre exclut primes diverses et nombreuses -
6 000 € net par mois. De quoi joindre les deux bouts.

Les problèmes de salaires des enseignants se situent plus bas : un enseignant de collège/lycée débute sa carrière à 1 300 €
net par mois. Et ce après cinq ans d’études (au minimum) après le baccalauréat.

Même Nicolas Sarkozy n’aurait pas osé avancer de telles propositions, qui se targuent d’être caractérisées par un grand
progressisme, mais qui sont profondément injustes et pour le moins inspirées d’un modèle anglo-saxon qui fait la part belle à la domination - héréditaire - des plus aisés.

Source : lemonde-educ.blog.lemonde.fr, "Enseignement supérieur : Terra Nova brise plusieurs tabous", 23 août
2011.

http://zoonpolitikon.over-blog.com/article-propositions-de-terra-nova-pour-l-universite-le-think-tank-de-la-gauche-est-de-droite-82248038.html

Messages