Accueil > France : La Terreur Bleu Marine

France : La Terreur Bleu Marine

par Himalove

Publie le jeudi 3 mai 2012 par Himalove - Open-Publishing

Voter Marine Le Pen ne nécessite aucune souffrance mais procure un certain plaisir.

Comme le rédacteur d’une lettre anonyme, l’électeur frontiste savoure, dans l’intime, la joie de l’immonde...

C’est le principe de souffrance appliquée à l’Autre.

Dans un geste sans gloire, sous la burka de l’isoloir, le militant cogne régulièrement, avec un bulletin de vote, le « sans papier », le maghrébin ou le voisin communiste.

La haine individuelle veut se faire ici foule grâce au suffrage universel.

Le vote Le Pen, c’est l’électrode fixé (de manière imaginaire) sur les couilles du délinquant, la communion autour de la guillotine et le mouchoir trempé dans le sang de Mohammed.

Le ploutocrate, banquier de profession ou patron voyou, est certes vilipendé par les pourfendeurs de « l’axe libéral, laxiste et libertaire », mais notre électeur auto-radicalisé ne prendra jamais le risque de lui tordre le cou.

On ne sait jamais ça pourrait nuire à la carrière de contremaître, de maître d’hôtel ou de vigile dont beaucoup de jeunes frontistes rêvent d’endosser l’uniforme ou la livrée.

Contrairement à ce que pensent les journalistes, les électeurs du Front national ne figurent pas « un peuple souffrant », un « anti-système », pas même un lumpen proletariat, mais une petite bourgeoisie, rancie, profondément légaliste, qui a besoin de l’Etat, dans ses fonctions les plus ignobles...

Enfermement, peine de mort et délation.

« Le parti des invisibles » fait un score presque criminel chez les matons, policiers et militaires.

Le président des riches a raison de déclarer que « le Front national est compatible avec la république ».

Les idées du chrétien Jean-Marie inspirent son gouvernement depuis plusieurs années :

 préférence nationale (voir la liste des métiers interdits aux étrangers même européens sur le sol national),
 mariage avec l’étranger soumis à l’autorisation de l’état (certificat de capacité à mariage obligatoire),
 multiplication de lois liberticides votées par le parlement - bien souvent avec la complicité de l’opposition -, lois LOPSI, anti-nomades, contre l’habitat précaire, etc.
 test ADN élargi à tous les contrevenants,
 abaissement de la majorité pénale à 13 ans,
 autorisation de la télésurveillance des espaces privés et publiques,
 extension des pouvoirs de police accordés aux maires,
 internements psychiatrique et administratif légalisés,
 interdiction de porter voile, turban ou cagoule sauf pour la police,
 armement des vigiles,
 construction de 30 000 places de prison,
 criminalisation des dissidents (affaires Tarnac et Adlène Hicheur),
 stigmatisation des chômeurs, etc.

Non, seulement le Front national est compatible avec les lois et les institutions de notre belle république mais il peut, demain, mobiliser autour du drapeau moisi de la civilisation.

Car, sous le crâne bleu, fraîchement rasé, voguent les souvenirs de Saïgon, Alger la blanche, Madagascar où l’on pouvait massacrer, détrousser et exploiter l’indigène...

Ce n’est pas pour rien si la Corse qui a fourni, autrefois, les bataillons d’aventuriers pour coloniser l’outre-mer vote à plus de 20 % Front national !

En fait, la question de l’Immigration, pour ces nostalgiques de la France forte, c’est l’impossibilité de retrouver le bon temps des colonies ; et de transformer, aujourd’hui, le prolétaire chinois, indien ou africain en domestique...

Comment combattre le souvenir impérial et cette formidable régression des libertés publiques ?

Certainement pas à la manière du jacobin Mélenchon qui gonfle le jabot en haut d’une tribune.

Ce faux nez rouge mais vrai tribun préfère « la révolution citoyenne » plutôt que celle promise par le slogan « tout le pouvoir aux soviets ! »

Pour lui, hors de l’Etat et de sa protection, point de salut !

L’accent de sa campagne électorale – comme l’extrême-droite – est porté contre l’oligarchie qui ferme les usines au nom du profit, les multinationales, mais aucune critique marxiste de l’appareil d’état comme « instrument d’oppression d’une classe sur une autre » n’est formulée...

Pire, le Front de gauche encense le concept de nation ; et reprend à son compte la formule vénéneuse de Jaurès, sans doute, apocryphe, que le Front national avait utilisé il y a quelques années : « la nation est le dernier refuge du prolétaire ».

La théâtralité de Jean-Luc Robespierre, les aboiements et les oriflammes qui font croire qu’un morceau de papier peut changer la vie font à la finale le jeu des partis autoritaires.

Car dans l’art de l’esbroufe, l’imposture et la démagogie, les publicistes fascistes ont toujours été les plus forts...

En 1967, lors du « Summer of love », aux Etats-Unis, Jerry Rubin* démystifiait l’art de la rhétorique : il prononçait un discours violemment anticapitaliste, devant un parterre de hippies ; et se faisait applaudir.

Puis, froidement, le « Digger » décontenançait les gauchistes en déclarant que le texte qu’il avait déclamé avait été lu brillamment par Adolf Hitler, en 1933 !

*

La compassion envers les petits, la radicalité du discours, la hauteur morale de l’estrade ou le nombre d’électeurs ne sont pas des gages certains de démocratie réelle ; et n’augurent pas nécessairement de lendemains heureux...

Les bulletins de vote restent, en France, la claque bruyante et malodorante autour d’un chef qui, une fois, élu peut faire ce qu’il veut.

80 pour cent de Français ont voté, dans un bel élan moutonnier, le 22 avril, ce n’est pas forcément un signe de printemps.

HIMALOVE

Dieulefit, le 27 avril 2012