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SNCF | la 3e Classe est de retour

par yul akors

Publie le jeudi 7 juin 2012 par yul akors - Open-Publishing
12 commentaires

C’est en 1956 que la SNCF décide d’abolir la 3e classe, jugée peu républicaine ; en 1982, le gouvernement socialiste décide de rendre accessible la première classe du métro parisien pendant certaines heures, puis en 1991 elle disparût. En 1992, la nouvelle Charte des Transports Publics affirmait en ces termes, le droit au transport :

"Chaque usager doit être à même de bénéficier des prestations du service public sans se trouver en position d’infériorité en raison de sa condition sociale, de son handicap, de sa résidence ou de tout autre motif tenant à sa situation personnelle ou à celle du groupe social dont il fait partie".

Aujourd’hui, la tarification des billets SNCF est à ce point exagérée, en décalage flagrand avec les nouvelles formes de pauvreté et de précarité - salariés pauvres, intérimaires, travail temps partiel, etc. -, qu’elle proscrit le droit au transport que chaque usager est susceptible d’attendre de ce service -encore à ce jour - public. Mais plutôt que d’envisager une refonte globale de la tarification et notamment "sociale" - c’est-à-dire une aide (gratuité, réduction, abonnement) - aujourd’hui obsolète, les élites de la SNCF - après avoir inventé la 1ere Classe Pro - ont élaboré un projet réintroduisant, sous une autre forme, une nouvelle classe spéciale : pudiquement nommée TGV low cost : en fait un TGV 3e classe.

Un projet qui porte atteinte, au plus haut niveau, aux notions d’égalité et de mixité sociale. Car il s’agit bien d’un projet parfaitement ségrégatif, une sorte de ghettorisation de l’espace public mobile, dont la nature est de séparer : à chaque classe sociale, son TGV. Evidemment, le futur usager low cost, privé de nombreux services, sera soumis à une série de contraintes, faisant du voyage un parcours difficile voire laborieux et, malgré le label TGV, beaucoup beaucoup plus long. Le slogan "Prenez le temps d’aller vite" est, pour ce TGV 3e classe, caduque.

A moins que le gouvernement socialiste - qui hérite de ce dossier - ne mette un terme aux visions ségrégatives - mieux encore à la carrière - des dirigeants de ce grand service public... Et par la même occasion de ses filiales - dont A2C / Gares & Connexions / Arep - architectes des gares rénovées ou neuves, véritables condensateurs des dérives de l’urbanisme : marchandisation des espaces, ségrégation et exclusion...

Ce projet baptisé "Aspartam" reprend dans ses grandes lignes les caractéristiques du transport aérien low cost, adaptées pour une nouvelle offre de TGV low cost. Dans un document de travail confidentiel - mais présenté par de nombreux quotidiens - la SNCF précise se montrer "bienveillante et populaire, en proposant un niveau de qualité satisfaisant, et une gamme de prix transparente et accessible au plus grand nombre". Pour cela, la SNCF va transformer, dans un premier temps, quatre de ses TGV Duplex, en en supprimant la 1ère classe, pour augmenter le nombre de passagers transportés à 630 places (+20%) ; de même que la voiture bar.

Les destinations choisies sont ciblées "loisirs" (pour éviter, selon le document, "de capter la clientèle professionnelle" qui, elle, continuera à voyager en TGV classique) : ainsi, les trains Aspartam relieront Marseille et Montpellier à Lyon et Marne-la-Vallée. Le plan est basé sur 62 circulations hebdomadaires. Par exemple, Aspartam desservira, depuis Marne-la-Vallée, Marseille deux fois par jour, et Montpellier une fois par jour.Les changements pour le futur voyageur, en principe pauvre, sont importants :

 Pour éviter de saturer un peu plus la gare de Lyon à Paris et celle de La Part-Dieu à Lyon mais aussi pour éviter d’attirer la clientèle d’affaires, deux des quatre gares desservies seront situées en périphérie : Marne-la-Vallée qui permet d’accéder à Disneyland Paris et qui est reliée à la Paris par la ligne A du RER ainsi que Lyon Saint-Exupéry, la gare du premier aéroport de Rhône-Alpes reliée à sa capitale par tramway.
 La vente (et le service après-vente) se fera exclusivement sur internet.
 Le prix sera fixe quelle que soit la période. Aucune indication de prix, si ce n’est qu’il est précisé que "le panier moyen sera inférieur à 25% à celui de TGV loisir".
 Notre voyageur aura une place assise garantie, aucune surréservation ne sera autorisée.
 mais il devra se présenter 45 minutes avant le départ, pour le contrôle des billets et de son unique bagage.
 Le quai sera fermé 5 minutes avant le départ (il s’agit autant de ne jamais retarder les trains que de pouvoir ensuite promouvoir le TGV classique dans lequel le passager peut monter jusqu’à 2 minutes avant le départ du train).
 Il n’y aura pas de restauration à bord.
 Le remboursement du billet sera impossible, les éventuels échanges seront payants.
 En cas de pépin, la prise en charge et le dédommagement seront "tels que définis par la réglementation européenne" (beaucoup moins généreuse que ne l’est aujourd’hui la SNCF).

Les cheminots seront également soumis à un régime fort différent :

 Leur rythme de travail sera retravaillé – et donc renégocié – "le modèle Aspartam étant porteur d’éléments pouvant favoriser la qualité de vie au travail" : les trains roulant toujours à la même heure, les mêmes jours, les emplois du temps seront fixes. Et les roulements seront organisés de façon à éviter les "découchés" qui coûtent très chers à la SNCF : les cheminots rentreront tous les soirs chez eux.
 Les cheminots travailleront, en alternance, des journées "longues" et des journées "courtes" : pendant les journées longues, quatre à huit d’entre eux contrôleront les billets, à l’entrée du quai, puis embarqueront dans le train. Pendant les journées courtes, ils n’effectueront que l’accueil en gare.
 Dans le train, la suppression de la voiture-bar permettra de transformer cet espace en salle de repos, qui permettra aux cheminots de faire des "coupures" et de poursuivre ensuite leur journée de travail.
 Il sera "ponctuellement" demandé aux cheminots d’aider les sociétés de nettoyage des rames, malgré la présence systématique à bord d’un "nettoyeur en circulation".
 Leur rémunération sera située entre celle d’un cheminot travaillant dans un TER et celle d’un cheminot conduisant un TGV. C’est sur ces trois derniers points que les syndicats pourraient être particulièrement difficiles à convaincre.

Dans un entretien aux Echos en avril 2012, la directrice générale de SNCF Voyages Barbara Dalibard avait indiqué que la SNCF travaillait à l’élaboration d’un TGV low cost dans le cadre d’une "meilleure segmentation de (l’)offre, en examinant attentivement les besoins exprimés par les différents clients". "Certaines personnes souhaitent encore plus de confort et de services, ce à quoi nous répondons entre autres avec l’offre Pro 1ère. D’autres demandent qu’on leur propose une activité durant le trajet, c’est le cas par exemple avec IDzap sur IDTGV", avait-t-elle souligné.

Messages

  • 3èmes classes de tous les pays, unissez-vous !

  • Rien d’étonnant de la part d’une boîte qui a effectué des transports vers les camps de concentration et qui a eu l’ignominie d’en réclamer le paiement aux survivants.

    • et qui a eu l’ignominie d’en réclamer le paiement aux survivants.

      Es-tu sûr de cette info ? As-tu une source ? J’ai comme un doute...

      Par ailleurs il me semble que la SNCF, avec sa "troisième classe", ne fait que s’aligner sur l’évolution de la société, où la paupérisation et la précarisation avancent à grands pas sous les coups du capitalisme.

      Bon, ça ne va pas changer grand chose, mais je vais voter pour les candidats anticapitalistes et écologistes (transports collectifs gratuits !) présentés conjointement chez moi par le NPA, les Alternatifs et le MOC (en attendant que le FdG fasse sa révolution par les urnes :-)

      Voter juste pour dire qu’il y a encore une flamme (et des gens pour la porter) qui brûle pour un système totalement différent et totalement incompatible avec le capitalisme, pour un mode de vie alternatif, bref, pour une révolution.

      Chico

    • Les cheminots ont été la corporation qui a eu le plus de résistants et le plus de morts par les Nazis. Pour les faits de résistance des cheminots, la SNCF a été la seule entreprise à recevoir la Croix de Guerre.

    • Il est question de la direction de la boîte pas des employés "de base".

    • Merci pour la publication de ce lien. Beaucoup de personnes ignorent en effet les agissements de la direction de la SNCF pendant la seconde guerre mondiale et aussi après.

    • Le lien ne répond en aucun cas à ma question. Au contraire il semble plutôt confirmer que cette affirmation est totalement erronée :

      et qui a eu l’ignominie d’en réclamer le paiement aux survivants.

      Il me semble qu’on n’a pas le droit d’affirmer de telles choses gratuitement.

      Quant à la responsabilité de la sncf dans la déportation, c’est bien évidemment connu de tous. Là n’était pas la question.

      Chico

    • "et qu’elle a continué à réclamer le paiement de telles factures après la libération" c’est pourtant pas écrit en martien.

      "Le tribunal, se basant sur un rapport fait à la demande de la SNCF, a constaté qu "alors que la SNCF facturait systématiquement les prestations de transport a l’état comme transport du ministère de l’intérieur au tarif 3ème classe, et qu’elle a continué à réclamer le paiement de telles factures après la Libération, la SNCF utilisait des wagons destinées au transport des marchandises ou d’animaux, dont ses agents avaient eux-mêmes obstrue les ouvertures, sans fournir aux personnes transportées ni eau, ni nourriture, ni conditions minimales d’hygiène."

    • En martien tu aurais peut-être compris, mais là tu ne piges visiblement rien, apprends à comprendre ce que tu lis avant de m’agresser.

      Le paiement n’a pas été demandé aux survivants (comme le prétend l’intervenant à qui j’ai répondu), pas aux déportés, pas aux Juifs, mais au donneur d’ordre, c’est à dire à l’état français.

      C’est bon, cette fois ?

      Pour être sûr, je récapitule. Celui qui affirme...

      et qui a eu l’ignominie d’en réclamer le paiement aux survivants.

      raconte n’importe quoi. Et je trouve que ce n’est pas bien de raconter n’importe quoi.

      Chico

  • Qui ose encore prétendre que TGV est un service public ?
    Rappelons que le statut juridique de la SNCF est un Epic et qu’elle a donc vocations à faire des bénéfices...
    TGV Aspartam répondrait à une demande spécifique de la clientèle qui veut toujours voyager moins cher...

    Gares et Connexions (qui n’est d’ailleurs pas une filiale, mais une branche) existe par la nécessité imposée par l’Europe de l’ouverture à la concurrence...

    • En fait, TGV n’est plus un service public. Dans la Charte de Service Public signée entre la SNCF et l’Etat, sont considérés comme service public les TER, Transilien, Intercités et les CFC (Chemins de Fer Corses). Les autres transports, TGV, Intercités de nuit et Fret, sont considérés comme activité commerciale de la SNCF. Malheureusement...