Accueil > Solidarité avec les mineurs espagnols en grève !

Solidarité avec les mineurs espagnols en grève !

par John Cunningham

Publie le vendredi 15 juin 2012 par John Cunningham - Open-Publishing
3 commentaires

Les mineurs de charbon espagnols, principalement localisés dans les Asturies, dans le nord du pays, se sont mis en grève illimitée depuis la fin du mois de mai contre les mesures d’austérité du Premier ministre espagnol Mariano Rajoy.

Alimentée par la spéculation immobilière massive - une bulle spéculative qui a maintenant bel et bien éclatée - les diktats du FMI et par la détérioration de la crise capitaliste, l’économie espagnole a plongé dans la récession au deuxième semestre de 2008 et, depuis lors, des millions d’emplois ont été perdus. Avec 30 milliards d’euros de réductions budgétaires, ainsi que d’énormes augmentations d’impôts, l’Espagne connaît désormais l’un des taux de chômage les plus élevés dans l’UE.

Les mineurs ont réagi avec colère face à la volonté du pouvoir de réduire de 60% les subventions gouvernementales accordées à l’industrie minière. Cette réduction signifie à coup la destruction de cette industrie et fera sombrer les régions qui dépendent du charbon dans la misère noire. Environ 8.000 emplois sont en jeu et les syndicats estiment que 30.000 autres seront indirectement touchés.

Les mineurs des deux plus importantes fédérations syndicales, les Comisiones Obreras (CCOO) et l’Unión General de Trabajadores (UGT), sont unis dans leur opposition aux mesures gouvernementales et la grève est suivie à 100%. Beaucoup d’autres syndicats à travers le pays ont promis un soutien ; les travailleurs des transports ont déjà mené des actions aux côtés des mineurs et une grève générale de 24 heures est prévue (le 18 juin dans le bassin minier asturien, NdT).

Des barrages routiers et ferroviaires sont mis en place tous les jours dans la région. Un certain nombre de mineurs ont organisé des occupations des puits. Le 31 mai, les mineurs ont manifesté dans les rues de Madrid, où ils ont été attaqués par la police anti-émeute qui a utilisé des gaz lacrymogènes. Dans d’autres affrontements, la police a utilisé des balles en caoutchouc. Malgré le black-out médiatique, des informations suggèrent que dans certaines régions des Asturies, il y a presque un climat de guerre civile. Il s’agit clairement d’un conflit qui a le potentiel de durer pendant une longue période.

Les Asturies, la principale région minière, a une longue histoire de militantisme ouvrier. « Asturias la Rouge » a été l’un des principaux centres d’opposition au général Franco. Pendant la grève des mineurs britanniques de 1984-1985, les mineurs espagnols ont été particulièrement actifs et généreux dans leur soutien à leurs camarades d’outre-mer.

De la même manière que les mineurs britanniques étaient autrefois considérés comme l’avant-garde du mouvement ouvrier, les mineurs espagnols sont considérés par beaucoup comme l’avant-garde du reste du mouvement syndical espagnol. Cette grève pourrait être l’étincelle qui enflammera toute la péninsule ibérique.

John Cuningham
Ancien mineur, secrétaire du Spanish Miners’ Solidarity Committee

Source : http://www.workersliberty.org/story/2012/06/13/solidarity-spanish-miners


Lettre de soutien d’anciens mineurs britanniques des grèves de 1984-1985 aux mineurs espagnols en grève

Des anciens mineurs et des militants syndicaux du Royaume-Uni ont mis sur pied, hier soir (11 juin, NdT) à Sheffield (Yorkshire) un Comité de Solidarité avec les Mineurs Espagnols.

Le Comité s’est engagé à mener une campagne nationale au Royaume-Uni, dans le mouvement syndical et dans la communauté des mineurs, en solidarité avec les mineurs en grève et leurs familles dans les bassins charbonniers des Asturies, d’Aragon et du Léon en Espagne.

Au Royaume-Uni, les sympathisants des mineurs espagnols connaissent bien les conséquences – économiques, sociales et politiques – de la destruction de l’industrie charbonnière. Aujourd’hui, il n’existe plus qu’une poignée de mines profondes au Royaume-Uni. C’est tout ce qui reste d’une industrie qui, il y a 30 ans, offrait de l’emploi à plus de 200.000 personnes. A sa place, aujourd’hui, il n’y a plus que le chômage massif, la pauvreté, l’exclusion sociale et la décadence. Ce sont ces conséquences que risquent de connaître les mineurs espagnols s’ils sont vaincus.

Le Comité s’est également engagé à récolter des fonds pour les familles des mineurs en grève, une tâche qui a déjà commencé, ainsi qu’à soutenir par tous les moyens leur juste combat. Une lettre de solidarité, signée par des ex-mineurs, des dirigeants des travailleurs des principales mines de charbon du Royaume-Uni et par des syndicalistes est en préparation et sera envoyée aux organisations syndicales espagnoles dans quelques jours.

Les efforts du Comité ont déjà gagné le soutien du cinéaste internationalement reconnu Ken Loach, qui nous a demandé d’envoyer ce message à ceux qui luttent en défense des puits, de leur travail et de leur communauté en Espagne. Son message est :

« Ce n’est pas la première fois que les mineurs luttent au nom de tous les travailleurs. Cette crise est en train de provoquer une énorme misère, au travers du chômage de masse et des attaques contre les salaires et les conditions de travail. La responsabilité de tout cela incombe à la classe dominante et à ceux qui défendent un système intolérable et injuste. Je vous adresse tous mes vœux de succès et toute ma solidarité. Ken Loach ».

Deux représentants du Comité - lancé par le Réseau d’Information des Mineurs – voyageront cette semaine en Espagne afin de rencontrer les mineurs espagnols et leurs familles.

Plus d’informations : Spanishminerssolidarity F2F hotmail.co.uk


Lettre d’un mineur asturien

J’ai travaillé pendant 25 années dans la mine. Je suis descendu dans un puit quand j’avais 18 ans et j’aimerai vous dire que je suis étonné des commentaires que je lis ici ou là sur la mine et les préretraites. Je vous donne ici mon point de vue pour tenter de dissiper plusieurs doutes ou préjugés existant sur ce secteur.

1. La lutte qui est menée en ce moment par les camarades n’est pas pour demander de l’argent, mais bien pour qu’on respecte l’accord signé l’année dernière entre le Ministre de l’Industrie et les syndicats des mineurs. Selon les termes de cet accord, les aides publiques octroyées au secteur minier devaient durer jusqu’en 2018.

Cet argent provient de la Communauté européenne, et non du gouvernement espagnol. Autrement dit, aucun Espagnol n’a payé quoi que ce soit pour « nous aider » comme le pensent beaucoup de gens qui nous critiquent tellement.

Quant à cet argent, ce que je me demande, comme presque toutes les familles des mineurs, c’est où se trouve la partie provenant du Fonds des Mineurs qui devait, supposément, être destiné à la création d’industries alternatives au charbon dans les bassins miniers. Il se fait que, comme dans beaucoup d’autres secteurs, l’argent a été géré par les politiciens et les syndicats. Avec une partie de ces sommes, je pourrais vous dire que, par exemple, Monsieur Gabino de Lorenzo (ex-maire d’Oviedo) a payé les lampadaires de sa ville, le nouveau Palais des Expositions et de Congrès et de nombreux autres ouvrages. L’ex-maire de Gijon (Madame Felgeroso) l’a investi dans l’Université du Travail et, comme le premier, dans d’autres ouvrages.

Dans la seule Vallée de Turón, dans la Cuenca del Caudal où je vis : de 1889 à 2006, année de fermeture du dernier puit, plus de 600 mineurs sont morts. Et qu’as-t-on fait ? On a construit un centre sportif sans même une toilette. Il fut inauguré ainsi et reste toujours en l’état. On a aussi construit un sentier, pour qu’on puisse se promener, et c’est à peu près tout. Tout notre environnement est rempli de déchets et de terrains vagues que l’on tente peu à peu de réaménager. Mais de ré-industrialisation, qui crée des postes de travail stables, il n’y en a pratiquement pas.

2. Je constate avec stupéfaction que pour beaucoup de gens les subventions publiques au secteur minier sont une mauvaise chose. Mais on oublie qu’il existe les mêmes aides pour d’autres secteurs, comme l’élevage, l’agriculture, la pêche et bien d’autres encore et personnellement je m’en réjouis. Je préfère que ces aides servent à maintenir des emplois plutôt qu’à engraisser les politiciens corrompus qui nous volent quotidiennement.

3. Il semble que beaucoup d’entre vous ne savent pas qu’après la fin de la Guerre civile dans ce pays, les mineurs espagnols ont été forcé de travailler gratuitement tous les jours pendant une heure, et pendant de longues années, afin de reconstruire ce que le franquisme avait détruit, et cela alors que nous n’avions rien à manger dans nos foyers.

4. En 1962, les mineurs ont commencé une grève qui s’est ensuite étendue dans toute l’Espagne. Cette lutte a permis d’arracher de nombreux droits sociaux dont jouissent tous les Espagnols… ces mêmes droits qu’on tente maintenant de nous enlever. Au cours de cette grève, il y a eu une très forte répression, des affrontements, de nombreux prisonniers, de la faim et de l’exil. De nombreux mineurs ont été séparés de leurs familles et envoyés dans d’autres provinces, certains n’ont commencé à revenir qu’à partir de 1980.

5. Sur les préretraites, c’est un mensonge de dire que les mineurs prennent leur préretraite à 40 ans et certains parlent de nos pensions comme si nous avions gagné le jackpot. Il se fait, en vérité, que dans les mensualités que touchent les mineurs retraités sont incluses leurs primes de travail extraordinaires et elles varient en fonction des différentes catégories et spécialités. (…)

6. Le charbon qu’on importe de l’extérieur serait, selon certains, meilleur marché que le nôtre. J’en doute fort, mais admettons que cela soit exact : la solution serait-elle de nous transformer en esclaves comme dans ces pays ? Moi, je souhaite qu’aucun travailleur au monde ne le soit. (…)

7. Concernant les actions de blocages des routes, je veux répondre à tous ceux qui protestent en déclarant que les mineurs les empêchent d’aller travailler, ou d’aller étudier, et qui disent que quand ils auront un problème dans leur propre entreprise, ils iront eux aussi « emmerder » les mineurs. Je leur dit simplement ceci : à chaque fois que des travailleurs d’autres secteurs nous ont demandé de l’aide pour défendre leur emploi, nous avons organisé des arrêts de travail de 24 heures pour les soutenir.

Quand il y a eu la longue grève des mineurs britanniques, nous avons arrêté le travail par solidarité et organisé des collectes de fonds pour qu’ils puissent nourrir leurs familles. Es-ce que quiconque aurait le moindre doute que nous n’allons pas nous unir et nous solidariser avec n’importe quel autre secteur qui serait touché ? Il semble bien aujourd’hui que c’est quelque chose d’impossible, ne serait-ce que de demander l’aide des autres. Il est pourtant fondamental de nous soutenir les uns et les autres. Mais nous faisons le contraire et c’est comme cela que ceux d’en haut pourront toujours avoir l’avantage.

Si tous les travailleurs espagnols étaient aussi unis que les mineurs, ceux qui gouvernent dans ce pays le penseraient à deux fois avant de nous imposer de telles mesures d’austérité, je peux vous le garantir. Réfléchissez bien sur qui vous empêche réellement d’aller travailler ou étudier : avec les vagues de licenciements actuelles et l’austérité dans l’enseignement, c’est bel et bien nos politiciens. (…)

Je vous invite tous et toutes à sortir de chez vous et à défendre également vos droits. En restant passifs, vous permettez que, peu à peu, la faim se réinstalle dans nos vies. Ils veulent que nos enfants et les vôtres deviennent, comme nous, « analphabètes », puisque nous avons plus vu les murs de l’école de l’extérieur que de l’intérieur. Il est plus facile de dominer un peuple analphabète.

Restez informés, vérifiez tout ce que vous voyez à la télévision, maintenant vous avez Internet, les téléphones portables, pour pouvoir rester en contact permanent, pour vous organiser, que ce soit de manière pacifique ou directement sur les barricades, c’est comme vous voulez, mais organisez vous ! Définissez les objectifs que vous voulez atteindre à court terme, car le gouvernement lui, va très vite quand les conditions lui sont favorables, vous le savez bien.

Effacez le mot « peur » et la phrase « cela ne servira à rien » de vos esprits et prenez le contrôle de votre avenir.

Je remercie beaucoup tous ceux et toutes celles qui nous soutiennent dans les autres provinces et dans d’autres pays.

Salutations
Juan José Fernández. Asturies, 15.06.12

Source :
http://ecorepublicano.blogspot.com.es/2012/06/carta-de-un-minero-asturiano.html

Traductions : Ataulfo Riera

Messages

  • [Etat espagnol] Grève illimitée des mineurs - Actualisation vendredi 15 juin

    samedi 16 juin 2012, par ocl2446

    Le mouvement de grève illimité des mineurs de charbon des Asturies, León et Aragón se poursuit sans discontinuer. Les mineurs semblent avoir choisi la combinaison de diverses formes de lutte.

    Aux blocages de routes, autoroutes et voies ferrés quotidiens, s’ajoutent d’autres actions spectaculaires et/ou de protestation collective. Des appels à la solidarité commencent à surgir.

    « Si esto no se arregla, guerra, guerra, guerra ! »

    Locaux du PP visés

    Dans la nuit de lundi à mardi, 5 locaux du Parti Populaire au pouvoir (dont celui d’Oviedo, capitale de la Principauté des Asturies) ont été visés par diverses actions : jets de peinture et d’œufs sur les vitrines, plusieurs fenêtres des étages brisées à coups de pierres et dans la localité minière de Aller, une vitrine a été cassée et un sac de charbon placé à l’intérieur du local.

    Manif nocturne

    Mardi 12 juin, dans la soirée, s’est déroulé une manifestation nocturne dans ville de León. Près de 10 000 manifestants, dont 1500 mineurs en bleus de travail et le casque éclairé sur la tête, ainsi que les familles, les proches et soutiens, ont parcouru le centre de la capitale provinciale. La marche s’est conclue par l’inévitable ‟Santa Barbara Bendita”, hymne des mineurs et la lecture par un enfant de 11 ans, d’un manifeste appelant à la solidarité « plus que jamais ». Parmi les slogans les plus scandés au milieu des explosions de pétards, le classique « Si esto no se arregla, guerra, guerra, guerra ! » (faut-il traduire ?) et « Ils sont ici, ce sont eux, ceux qui sortent le charbon ! ».

    La suite ici :

    http://oclibertaire.free.fr/spip.php?article1193

  • on pourrait peut etre faire quelque chose en solidarité !

  • "les mineurs espagnols", non ! les mineurs de l’état espagnol ! Asturias es Asturias, Aragon es Aragon, León es León ! España es el estado monárquico que nos coloniza !
    Viva la solidaridad internacional de los trabajadores y de los pueblos libres