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Comment et pourquoi (pour qui ?) ils veulent tuer Chavez

Publie le vendredi 18 mars 2005 par Open-Publishing

de Maxime Vivas

En octobre 2004, il a remporté sa neuvième victoire électorale consécutive. Dans son pays, l’essentiel des chaînes de télévision sont aux mains de l’opposition et la liberté de la presse est assez grande pour qu’elle appelle ouvertement au putsch et à l’assassinat(1).

Voici cependant un florilège de mots lus ici et là pour désigner Hugo Chavez : « caudillo, démagogue, apprenti dictateur, populiste créole, soudard en costume cravate. » Teinté d’« antisémitisme populiste », son régime évolue vers une « dictature rouge-brun ». Enfin, Hugo Chavez est un « militaire autoritaire et putschiste. »

Le rappel du « putsch » chaviste présente le double avantage d’escamoter le coup d’Etat dont il fut victime en avril 2002 et de minimiser sa propension à se soumettre régulièrement au verdict des urnes. Mais il s’agit d’un mensonge par omission. En réalité, un groupe d’officiers dont faisait partie Chavez a refusé en 1992 de tirer sur la foule. Cet acte de désobéissance leur valut d’être arrêté.

A tous ces défauts, il faut ajouter sa paranoïa. En effet, l’homme s’imagine que les USA veulent le faire assassiner. Or, l’histoire montre abondamment que les USA ont toujours été respectueux des gouvernements démocratiquement élus en Amérique latine (et ce n’est pas Allende qui nous contredira). La lecture des informations ci-dessous prouve d’ailleurs que Chavez s’alarme inutilement.

Le 10 mars 2005, sur la chaîne câblée 22 de Miami, l’agent de la CIA Félix Rodriguez qui participa à l’assassinat de Che Guevara en Bolivie et qui suggéra qu’on lui découpe les mains (ce qui fut fait) pour les envoyer aux USA, est interviewé par une journaliste que lui demande si la CIA envisage d’organiser un commando pour « en terminer avec Chavez ». Il répond qu’un plan de « mesures militaires » existe. A la journaliste qui insiste pour savoir s’il est prévu d’« éliminer physiquement » Chavez, l’agent de la CIA répond que la chose se fera au moment opportun « par une attaque militaire avec un avion ».

Le 2 mai 2004, un groupe de 91 paramilitaires colombiens, liés à la CIA est arrêté dans les environs de Caracas. Le chef du groupe, José Ernesto Ayala Amado déclare que sa mission consistait à « couper la tête de Chavez ».

Le 25 juillet 2004, l’ex-président Carlos Andrés Pérez, confie au quotidien de Caracas El Nacional : « Je travaille pour renverser Chavez. La violence nous permettra de le renverser. Chavez doit mourir comme un chien. »(2)

Le 25 octobre 2004, un autre opposant, Orlando Urdaneta, toujours sur la chaîne 22 de Miami, se montre expéditif : « L’unique solution pour le Venezuela est d’éliminer Chavez : une personne avec un fusil et une mire télescopique, et c’est bon. »(3)

Le vice-président vénézuélien, José Vicente Rangel a montré à la presse des photographies prises à Homestead, en Floride, d’un camp d’entraînement de paramilitaires dont certains sont déjà au Venezuela.

Risques d’invasion, d’attaque militaire, le gouvernement vénézuélien qui avait fait naguère le choix de réduire les dépenses de l’Armée opère un revirement et investit désormais dans les armes défensives.

En décembre 2004, G.W. Bush, peste contre ces achats d’armes qui « devraient être un motif de préoccupation pour les Vénézuéliens. »

En janvier 2005, la secrétaire d’Etat, Condoleeza Rice, accuse Hugo Chavez d’exercer « une influence déstabilisatrice en Amérique latine. »

Le 13 février 2005, Roger Noriega, sous-secrétaire d’Etat pour l’Amérique latine, déclare sur CNN que « le réarmement du Venezuela est très préoccupant. »

Préoccupants aussi, sans aucun doute, le triomphe de Chavez au Forum social de Porto Alegre, son désir d’utiliser l’argent du pétrole pour réduire la misère, son projet de télévision Latino-américaine (Telesur qui supplantera CNN), sa mise en place de l’ALBA (alternative bolivarienne pour les Amériques) au détriment de la désastreuse ZLEA (zone de libre échange avec les USA). Préoccupants son choix affiché du socialisme et ses rapports privilégiés avec une petite île des Caraïbes qui résiste depuis 45 ans à un blocus inhumain (condamné chaque année par l’ONU), à un impitoyable pilonnage médiatique, qui vit chaque jour sous la menace d’une irakisation annoncée et dont le chef d’Etat a échappé à des centaines d’attentats ourdis par l’Oncle Sam.

Ce qui qualifie sa garde rapprochée pour conseiller celle de Chavez.

Maxime Vivas, écrivain.

(1) Cela n’empêche pas l’organisation Reporters Sans Frontières d’alerter le monde entier sur de prétendues atteintes à la liberté de la presse au Venezuela. Rappelons que le putsch qui destitua Chavez en avril 2002 a été aussitôt approuvé par les USA, l’Espagne et RSF. Cette dernière annonçait à Paris la « démission » du Président et ses correspondants à Caracas s’extasiaient sur la « démocratie retrouvée » sans se préoccuper du sort de la presse loyaliste et de la persécution de journalistes.

(2) Imaginons un journal français écrivant ça sur notre président.

(3) Il est donc possible, sur le territoire des USA, pays fer de lance dans la lutte contre le terrorisme, d’appeler publiquement à l’assassinat d’un chef d’Etat étranger.