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Grâce à la solidarité de locataires menacés par la vente, le DAL occupe deux appartements à Paris

Publie le mardi 29 mars 2005 par Open-Publishing

Des mal-logés dans un immeuble à la découpe

de Tonino SERAFINI

Le DAL (Droit au logement) a mené hier une action d’un nouveau type, en occupant deux appartements dans un immeuble vendu à la découpe par une société espagnole. Ces opérations immobilières font tache d’huile en région parisienne, mais aussi à Lyon, Marseille ou dans la banlieue de Lille. Les investisseurs institutionnels (sociétés d’assurances, banques, mutuelles ou sociétés foncières) profitent de la flambée de la pierre pour se défaire de leurs immeubles locatifs, en réalisant de très confortables plus-values. Les locataires en place sont priés d’acheter au prix fort le logement qu’ils occupent ou de libérer les lieux à l’issue de leur bail.

Selon un recensement non exhaustif réalisé par les « collectifs de locataires découpés » (comme ils se sont baptisés), pas moins de 190 bâtiments ou groupes de bâtiments sont pris dans cette spirale en Ile-de-France. Parfois des rues entières sont happées dans la tourmente des ventes à la découpe, comme l’avenue de la République à Marseille, ou la rue Gounod à Paris (Libération du 12 janvier).

Amicale. C’est ce qui arrive aux habitants d’un immeuble situé au 42, rue de Chaligny, dans le XIIe arrondissement à Paris. « On s’est constitué en amicale pour se défendre, racontaient hier des habitants. On a senti les choses venir, parce que depuis un an les locataires qui s’en allaient n’étaient pas remplacés. » Les logements étaient laissés libres, en vue de la vente de tout l’immeuble, appartement par appartement. Quatre logements étaient donc vides jusqu’à une date récente. Deux ont été occupés par des familles parisiennes sans toit.

L’une d’elle figure même sur la liste des 350 demandeurs ultraprioritaires, que Jean-Louis Borloo, actuel ministre de la Cohésion sociale et à l’époque chargé de la Ville, s’était engagé à reloger « avant Noël »... 2003 (1). Ce foyer est composé d’un couple franco-centrafricain et de leurs six enfants. Ils ont vécu pendant huit ans dans un hôtel insalubre géré par un marchand de sommeil bien connu par la préfecture de police de Paris. L’établissement a finalement été fermé par les pouvoirs publics en juin 2004. Du coup la famille s’est retrouvée... dans un autre hôtel de tourisme dans le Xe arrondissement.

Dans un autre appartement vide s’est installée une femme avec deux enfants âgés de 10 ans et 2 ans. Elle aussi fait partie de ces familles en errance urbaine qui vont d’hôtel insalubre en hôtel insalubre. Le plus petit des enfants a contracté une pathologie respiratoire qui a nécessité un séjour d’une semaine à l’hôpital Robert-Debré.

Loyers. L’occupation de ces deux logements aurait été impensable sans la complicité des habitants de l’immeuble. Cette « alliance entre mal-logés et locataires bien logés » a été mise en exergue par Jean-Baptiste Eyraud, le président du DAL. Sans doute parce les ventes à la découpe et l’explosion des loyers favorisent ce nouveau type de solidarité.

(1) Suite à l’occupation de la cour de son ministère par des familles du DAL en ctobre 2003, Jean-Louis Borloo avait promis de reloger 350 ménages « avant Noël ».

http://www.liberation.fr/page.php?Article=285724