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Le viol et le meurtre

par jean yves peillard

Publie le jeudi 30 octobre 2014 par jean yves peillard - Open-Publishing
1 commentaire

le viol du Tescou

Témoignage avant qu’il fasse nuit.

« L’homme est la nature prenant conscience d’elle-même »
(JP.Clark « La pensée sociale d’Élisée Reclus »)

Cet homme s’appelait Rémi

Ces 25 et 26 Octobre 2014 près de Gaillac, Il y avait des forums et débats d’organisés sur les deux jours autour de cette action contre le projet inutile et imposé du Barrage de Sivens (autre projet de barrage en Gascogne, les anciens de Loire vivante ont passé un film etc, stand habituels etc).

Le samedi après midi, comme des bergers contre le puçage étaient venu aussi avec leurs moutons, il a été décidé de faire un cortège partant du fond de vallée (ruisseau Tescou) zone où les campements sont situés, sur les pâturages et les broyats de la forêt dévastés, avec les moutons devant, symboliquement, jusqu’au bout (1à2km) là où la terre a été arasé laissant un paysage lunaire. Ce sont toujours des moments fort où les gens se retrouvent malgré l’atomisation et l’abrutissement actuel par les médias aux ordres.

Et au bout il y avait des CRS derrière un portique depuis le matin soit disant pour sécuriser du matériel de chantier, alors qu’il n’y avait rien de spécial à part du matériel dérisoire ; et c’est là toute l’incompétence du préfet et des forces de police ; car ils n’avaient absolument rien à faire ici, cela ne pouvait que provoquer les jeunes qui avaient déjà été rudoyé depuis quelques semaines (ici et ailleurs depuis longtemps...). Surtout que les organisateurs avaient eu ou croyaient avoir la garantie par les autorités de l’absence de force de l’ordre sur la zone ce week-end. Il n’y avait rien à protéger, tout avait été déjà dévasté "grâce à leur soins" d’ailleurs.

Une fois le rassemblement solennel fait autour des moutons sur le terrassement, les bergers sont repartis comme prévu après quelques minutes sans un bruit à part celui des clochettes, suivi du cortège (3000 ou plus) qui s’étayait aussi. Alors des jeunes en noir certain à visage cagoulé se sont rapprochés du portique par la pente du vallon en lisière, avec banderoles et ont commencé à balancer des cailloux sur les flics qui bien sûr n’en attendaient pas moins pour répliquer avec leur suréquipement habituel (grenades lacrymogène et grenades dites "assourdissantes" mais néanmoins tueuses. Car faut il le rappeler, même des armes dites de seconde catégorie ou prétendument sont des armes pour tuer et c’est bien ce qu’ils ont fait.

Je suis resté avec beaucoup d’autres devant le portique, beaucoup interpellaient les policiers pour les raisonner ; ils devaient partir, c’était de la provocation mais eux avaient des ordres on connaît le refrain depuis plus de 70ans... D’autres essayaient de raisonner les jeunes en noir mais on ne peut pas raisonner le feu. Ils n’ont rien à perdre car ils n’ont rien, que des coups de matraque sur la tête partout dans les squats. Personne d’autre qu’eux même ne feront bouger les choses pour qu’ils aient un avenir. J’ai même entendu un homme âgé s’écrier : « si ils n’étaient pas là, on serait déjà sous l’eau ! ».
J’ai vu qu’une seule fois un cocktail Molotov lancé par les jeunes en noir, sur le rang de CRS, ce n’était sans doute qu’un mauvais bricolage, car cela a fait feu de paille sur leur carapaces et les a fait sursauter en reculant. Les armes utilisées par les flics sont démesurées par rapport à des jets de pierres et autres.

Toute la partie non violente habituelle aussi était là avec les clowns, des chaînes humaines, des jeunes "habillé en arbre" et des banderoles et un chanteur accordéoniste qui complétaient cette vision complètement surréaliste sur ce paysage lunaire ; on voyait que chacun à sa façon se vidait les tripes pour casser ce phénomène de guerre qui mène à l’abîme, ce que j’avais vu aussi à Weterren, Lyon etc. Mais là en vain. En discutant avec deux faucheurs devant le portique ; on pensait à la même chose, et je crois bien que tout le monde pensaient et redoutaient la même chose ; ces grenades , cela ne pouvait qu’arriver. Je regrette de ne m’être pas interposé physiquement. Et il est trop tard. on s’en souviendra longtemps, c’était là la limite tant redoutée, tant ressassée. Car tout ce je pense de ces imbéciles d’Etat et de ces crapules en haut lieu n’est pas non violent.

Toutes ces exactions commises "Au nom du peuple français" comme dit René Vautier dans Afrique50. La meilleure preuve de toute cette prévarication est le fait que cet imbécile d’ancien président et toute sa clique n’est toujours pas sous les verrous, mieux on nous le repasse régulièrement dans les médias aux ordres, avec Lepen en jupon qui sert de rabatteuse comme d’habitude. Ils ont besoin du fascisme, ils se le gardent sous le coude en dernier recours, comme il y a 70 ans. Ils ne sont rien que du vent, pire, insignifiants. La population doit comprendre qu’il n’y a personne absolument personne d’autres au monde pour les représenter qu’eux mêmes.

Le soleil commençait à descendre, il me semblait que cela se calmait un peu, mais de toute façon j’étais obligé de rentrer car je ne vois rien dans le sombre. Dans la nuit j’ai entendu encore des grenades. Et le matin on a tous appris la nouvelle.

Les autorités feignent de croire que ce n’est que ce projet qui est mis en cause et utilisent largement l’argument du molotov alors que c’est la totalité du système. Tout le monde doit comprendre que chaque centimètre cube de béton ou bitume qui avance sur la campagne, c’est la barbarie qui avance d’un pas. La terre est la seule nourricière de l’homme. Ici c’est d’abord un viol de la terre, de la source du Tescou, un véritable paysan ne fait pas de monoculture surtout de plantes non adaptées à son terroir, il ne répand pas du poison qui contamine les nappes, etc .

l’État trahit aussi en remontant les seuils admissible de contamination, c’est comme au Japon, du techno fascisme. L’agriculture est l’exacte contraire de l’industrie. Ils le savent et maintenant il savent que c’est surtout un meurtre, le meurtre de Rémi est un meurtre d’Etat. Il voulait vivre à vingt et un an et c’est la forêt qui revivra avec son sang bien malgré lui, et malgré nous qui n’avons pas assez anticipé ou imaginé, nous n’avons pas assez "travaillé dur de nos cerveaux" comme disait Marc Bloch (1) .

A chaque début d’action il est courant de dire à la cantonade « nous sommes tous responsables » et là aussi cela a été dit : « Nous sommes tous responsables » et on y retourne à Sivens, à No Tav NDDL Chambarans, Décines etc contrairement à l’Etat Français qui fuit sa responsabilité en refusant la véritable rencontre avec la jeunesse, celle qui veut un avenir, pas le feu nucléaire ou feu du climat, le feu de l’argent roi etc. L’Etat finira par le feu. Il a beau jeu de dire qu’il n’y a pas d’alternative alors que de tous les temps les alternatives ont été étouffées, massacrées, génocidées, holaucaustisées.

La situation est Taftaïenne mais pas désespérée.
Ziegler a refait une réédition de son bouquin « retournez le fusils » "choisir son camps" mais ici près d’Albi et jusqu’à Béziers on dit « Crosses en l’air ! » « Gloire au 17èmes ! Gloire au 17èmes ! Ceci n’est pas un ordre !Ceci n’est pas un ordre !.

Et maintenant ce week end, avec de la nourriture ,et des arbres de +1m à planter. Car des jeunes ont commencé des barricades et d’autres à planter des arbres, là aussi tous on pense la même chose ; car il est tout à fait possible que la forêt soit replantée avant le printemps prochain et au printemps il restera à semer les pâturages, des trèfles blancs... La partie arasée devra être recouverte de terre végétale.

Et "La vie renaîtra de la nuit" (Martin Gray)

(1) « Nous seront perdus, si nous nous replions sur nous même ; sauvés, seulement, à condition de travailler durement de nos cerveaux, pour mieux savoir et imaginer plus vite. »[...] p183
[...] p185 « Il lui faudra enfin à ce peuple se remettre à l’école de la vraie liberté d’esprit. »... « Condorcet parlait mieux, qui, imprégné du ferme rationalisme du 18ème siècle , disait, dans son fameux rapport sur l’instruction publique, « Ni la Constitution française, ni même la Déclaration des droits de l’homme ne seront présentées à aucune classe de citoyen comme des tables descendues du ciel, qu’il faut adorer et croire ». »

[...] p191 « ...Mais le recrutement de base restait presque exclusivement corporatif. Asile préféré des fils de notables, l’École des Sciences Politiques peuplait de ses élèves les ambassades, la Cour des Comptes, le Conseil d’État, l’Inspection des Finances. L’École Polytechnique , dont les bancs voient se nouer, pour la vie, les liens d’une si merveilleuse solidarité, ne fournissait pas seulement les états-majors de l’industrie ; elle ouvrait l’accès de ces carrières d’ingénieurs de l’État, où l’avancement obéit aux lois d’un automatisme quasi mécanique. Les Universités, par le moyen de tout un jeu de Conseils et de comités, se cooptaient à peu près complètement elles-mêmes, non sans quelques dangers pour le renouvellement de la pensée. »

[...] p193« Une démocratie tombe en faiblesse pour le plus grand mal des intérêts communs, si ses hauts-fonctionnaires formés à la mépriser et, par nécessité de fortune, issus des classes mêmes dont elle a prétendu abolir l’empire, ne la servent qu’à contrecœur »

[...] p205« Or, de quoi est faite cette conscience collective, sinon d’une multitude de consciences individuelles, qui, incessamment, influent les unes sur les autres ? se former une idée claire des besoins sociaux et s’efforcer de la répandre, c’est introduire un grain de levain nouveau, dans la mentalité commune ; c’est se donner une chance de la modifier un peu et, par suite, d’incliner, en quelque mesure, le cours des événements, qui sont réglés, en dernière analyse, par la psychologie des hommes. »

[...] p244« Quoi de plus utopique que l’idée d’organiser, dans un pays asservi et jeté au plus bas, un vain sursaut de révolte en un vaste réseau de volontés ? C’est pourtant ainsi que la Résistance a fini par voir le jour. Quoi de plus utopique que le Maquis, folie héroïque mais folie de jeunesse ? Et voilà que le Maquis se fait réel à force de foi. »

[...] p253« Un jour viendra où il sera possible de faire la lumière sur les intrigues menées chez nous de 1933 à 1939 en faveur de l’axe Rome-Berlin pour lui livrer la domination de l’Europe... »

[...] p262« Nous formons des chefs d’entreprise qui, bon techniciens, je veux le croire, sont sans connaissance réelle des problèmes humains ; des politiques qui ignorent le monde ; des administrateurs qui ont horreur du neuf. A aucun nous n’apprenons le sens critique, auquel seul le spectacle et l’usage de la libre recherche pourraient dresser les cerveaux. Enfin, nous créons, volontairement, de petites sociétés fermées où se développe l’esprit de corps, qui ne favorise ni la largeur d’esprit ni l’esprit du citoyen. »
Marc Bloch « l’étrange défaite »

infos sur

http://tantquilyauradesbouilles.wordpress.com/

http://www.collectif-testet.org/

http://rhonenddl.wordpress.com/

L’enfant Venceremos

Messages

  • Comment se fait-il que le parquet ne porte pas plainte contre les décideurs de ce barrage pour dilapidation d’argent public dans la mesure où le rapport d’experts rendu tardivement montre que cette opération n’est pas bonne ?
    Comment se fait-il que ces mêmes décideurs ne soient pas condamnés à payer le reboisement de cette zone humide avec remise en l’état initial ?
    Qu’est devenu le bois coupé sur 30 hectares ? à 50 euros par stère cela fait de l’argent pour replanter.
    Quant à l’assassin de Rémi il faut qu’il soit jugé pour meurtre.