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Affaire E. Leclerc : une enquête préliminaire ouverte pour escroquerie

par T7c

Publie le mardi 25 novembre 2014 par T7c - Open-Publishing

Ouarda Mansouri et deux de ses amies doivent être entendues, en qualité de victimes, mardi 25 novembre par les gendarmes. Ces chômeuses, qui avaient témoigné dans Le Monde avaient porté plainte contre X, aux côtés de huit autres demandeuses d’emploi, pour « escroquerie, offre d’emploi fausse, travail dissimulé, soumission de personnes vulnérables à des conditions incompatibles avec la dignité humaine et violences ». Elles reprochaient au supermarché Leclerc de Fleury-Mérogis (Essonne) de les avoir embauchées en stage, financé par Pole emploi en leur faisant miroiter un CDI qu’elles n’ont jamais obtenu.

En fin de semaine, après avoir pris connaissance de la plainte et des révélations du Monde, le parquet d’Evry a ouvert une enquête préliminaire confiée à la gendarmerie. Contacté, le procureur de la République, Eric Lallement, confirme : « A la lecture de la plainte, j’ai confié aux gendarmes deux axes d’enquête : le premier, une escroquerie au préjudice de Pôle Emploi, le second, une escroquerie au préjudice des salariées. Bien sûr, chacune des parties sera entendue. »

Les avocats des plaignantes, Mes Sofiane Hakiki et Eddy Arneton, se félicitent de la démarche du parquet d’Evry : « L’ouverture d’une enquête ne fait que confirmer la gravité des faits que nous dénonçons. »

L’affaire est liée à l’ouverture d’un supermarché Leclerc à Fleury-Mérogis le 15 janvier. Le franchisé accueille en stage 91 chômeurs entre le 17 décembre 2013 et le 4 février 2014. Dans le cadre de cette formation, avec promesse d’embauche à la clé, les stagiaires sont indemnisés par Pôle emploi. Seulement entre deux cours théoriques, ils sont surtout préposés au nettoyage, au rangement des rayons, à l’étiquetage des codes-barres…

Une quarantaine d’entre eux, essentiellement des femmes, ont vu leur stage interrompu dans la même semaine, fin janvier, une fois le magasin ouvert. Les motifs invoqués sont aussi variés que contradictoires. On reproche à l’une d’être trop jeune, à l’autre d’être trop expérimentée, à une troisième d’être trop souriante, à une quatrième pas assez. Lorsqu’une stagiaire ose faire un aparté sur la tenue d’une formatrice, un autre formateur reprend l’ensemble des équipes : « C’est nous les patrons ! Je n’en ai rien à branler [sic] de vous. Vous pouvez partir d’ici. Le bus est juste en face et Pôle emploi à cinq minutes ! » Ouarda Mansouri avait confié au Monde : « On nous parlait comme [à] des chiens, mais on se taisait parce qu’il y avait le CDI au bout… Alors on a fait ce qu’on nous demandait. On a nettoyé, on a dépoussiéré. »

Élément étonnant, FM Formadif, l’organisme de formation en contrat avec Pôle emploi qui a formé les chômeuses de Fleury-Mérogis, appartient aux deux centrales d’achat franciliennes du Mouvement Leclerc. FM Formadif a perçu, selon les calculs du Monde, près de 190 000 euros de la part de Pôle emploi et du Forco, le financeur paritaire des formations dans la grande distribution, même si, finalement, moins d’un chômeur sur deux a été embauché. Ce chiffre est contesté par l’organisme de formation, qui refuse de communiquer la somme perçue.

Comme l’enquête du Monde le révélait, le schéma de Fleury-Mérogis se reproduit dans plusieurs départements. Des cas similaires ont été recensés à Auxerre, Montpellier, Narbonne, à Nîmes mais aussi dans les Hauts-de-Seine et en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Dans un post de blog publié jeudi 20 novembre, Michel-Edouard Leclerc, le patron du groupe du même nom, a promis « de ne pas cautionner » les éventuels supermarchés de son enseigne qui abuseraient des formations financées par Pôle emploi. « Les entreprises sous enseigne E. Leclerc sont gérées par des patrons indépendants, responsables notamment de leur politique sociale », estime-t-il par ailleurs. L’enseigne a en effet la particularité d’être un réseau d’indépendants, M. Leclerc n’étant que le dirigeant de la centrale d’achat.

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