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La barricade aurait-elle trois côtés ?

par Pauline Mériot

Publie le mardi 1er décembre 2015 par Pauline Mériot - Open-Publishing
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Source : http://tendanceclaire.npa.free.fr/article.php?id=855

Un homme dit à sa femme
“Chérie, si tu sors ce soir et que tu rentres après 22h, je vais t’en coller une.”
La femme sort. Rentre après 22h. S’en fait coller une.
Qui est en tort ? L’homme ou la femme ?
La femme est-elle irresponsable ?

N’en déplaise à Clémentine Autain ou à Jean-Luc Mélenchon, quand on se réclame même vaguement du camp des contestataires, on n’hésite pas une seconde : on est contre la répression du mouvement social. Les torts ne sont pas partagés. Ce sont ceux qui interdisent la contestation que l’on dénonce, pas ceux et celles qui bravent l’interdiction.

"Comme tout cela était plus que prévisible, je n’étais pas du tout favorable à ce rassemblement dont je pressentais qu’il serait mis à contribution pour produire de telles images. J’estimais que la chaîne humaine était une action convaincante et digne, suffisante et adaptée dans l’état du rapport de forces et de mentalités actuel. Mais telle est notre gauche : chacun fait ce qui lui semble bon sans tenir aucun compte de rien ni de personne, ni de l’expérience, ni de la capacité à convaincre le grand nombre. Puis tout le monde paye ensuite le prix des images pourries et des interpellations de militants. Après quoi des personnes de bonne foi, simples partisans écologistes, n’ayant rien fait d’autre que de se faire enfermer dans la souricière de la place de la République, se sont retrouvées prises dans un record de gardes à vue en temps de paix : 317 personnes. Elles ont donc dorénavant un signalement à l’anti-terrorisme. Merci qui ?"

Voilà la réaction de Mélenchon à l’annonce de centaines de militant-e-s (dont certain-e-s du Front de Gauche) en garde à vue. Au lieu de mettre tout son poids médiatique, toute son énergie à dénoncer la répression, il sème la confusion et partage les torts. Les réprimé-e-s n’auraient à s’en prendre qu’à eux et elles-mêmes. Le rôle de toutes les organisations du mouvement ouvrier est de mettre la plus grosse pression possible sur les préfets et les pouvoirs politiques pour qu’ils n’aillent pas au bout de leur répression. Mais telle est notre gauche : elle vote l’état d’urgence et la guerre, fuit devant ses responsabilités, cautionnant à mi-mot la répression du gouvernement.

Clémentine Autain fait elle plus en finesse : elle dénonce très bien la répression policière, l’état d’urgence, la manipulation des médias, mais dit quand même :

“Malheureusement, les images de violence sur la Place de la République entachent celles de plus de milliers de citoyens et militants se donnant la main ou déposant leurs chaussures pour dire leur volonté que les Etats s’engagent concrètement et fortement pour le Climat.”[1]

Ou encore :

“Les images de violence telles que celles de la Place de la République ne servent aucunement la cause du Climat et de la justice sociale. La fachosphère, très en forme par les temps qui courent, se charge de les utiliser contre nous. BFM n’hésite pas à sur-saturer ses télespectateurs d’images sélectives qui ne sont pas favorables aux visées d’une gauche sociale et écologiste : vous verrez et reverrez les bougies jetées par des hommes cagoulés, vous ne verrez pas les fleurs écrasées par les crampons de policiers ou les militants se tenant la main pour protéger le monument aux victimes.

Nous devons prendre nos responsabilités en intégrant ce contexte. Valorisons la logique des chaines humaines et interpellons le grand nombre sur les conditions de la liberté véritable.”

De deux choses l’une : que Clémentine Autain pense qu’il fallait s’en tenir à une chaîne humaine, c’est une chose. Mais une fois que des militant-e-s ont décidé d’y aller, on ne peut pas les renvoyer dos à dos avec la presse qui ment et la police qui réprime.

Les travailleurs/euses d’Air France continuent de perdre leurs emplois, les attaques contre le droit du travail se poursuivent, le “Roundup” vient discrètement d’être décrété sans danger[2], bref la lutte de classes, celle que la bourgeoisie mène contre nous continue son train-train quotidien. Et la nation “unie”, des député-e-s du Front de Gauche au FN, s’accorde à faire taire toute contestation... Sauf si elle reste sur les trottoirs, ou qu’il n’en reste que les chaussures sur une place...

Soutien inconditionnel aux réprimé-e-s !

[1] https://blogs.mediapart.fr/clementine-autain/blog/301115/du-cote-de-la-chaine-humaine

[2] http://www.lemonde.fr/sante/article/2015/11/12/roundup-le-risque-cancerogene-du-glyphosate-juge-improbable-par-une-autorite-europeenne_4808413_1651302.html

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