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Harmonisation sociale : Gerard Filoche refute toutes les assertions increvables d’Harlem Désir

Publie le lundi 23 mai 2005 par Open-Publishing
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Harlem Désir répond à Laurent Fabius

Gerard Filoche refute toutes les assertions increvables d’Harlem Désir

Laurent Fabius affirme que le traité constitutionnel « empêcherait désormais toute harmonisation sociale » en Europe. À l’appui de sa thèse, il cite dans l’article III-210 du traité, une formule sortie de son contexte, au sujet des mesures que peut établir la loi européenne : « à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres ».

Il a raison !

1. Cet article n’est pas nouveau et n’est que la reprise de l’article 137 des traités en vigueur.

Ce n’est pas parce qu’il est ancien qu’il est défendable ou excusable. Il porte sur l’essentiel. Oui ou non, doit-on harmoniser par la loi et par le haut, selon le principe de faveur, le droit social !

2. Si cet article empêchait toute harmonisation sociale, on ne comprend pas comment ont pu être adoptées les directives européennes existantes sur les Comités d’entreprise européens, l’information et la consultation des travailleurs, etc.

Mais chacune de ces directives pose problème justement parce qu’elle met en cause un principe fondamental du droit du travail national et international : le principe de faveur. La plupart des directives citées ci-dessus sont en retrait par rapport au droit existant dans un certain nombre de pays, et au lieu de l’harmoniser par le haut, tendent à le réduire ou à le supprimer ! Même dans ce projet de constitution, l’existence de Comités d’entreprise est renvoyé à la négociation et non à la loi. En matière de CE, les textes les plus avancés de l’Union datent... de 1983, il y a été fait barrage par les britanniques et depuis, les projets qui ont circulé ont tous été du domaine de la parodie, si bien, qu’en Europe, le droit des CE est dans les langes. Les modalités adoptées en 1993-1996 constituent une façon de nier l’existence légale, opérationnelle de Comités d’entreprise européens, remplacés, par des forums consultatifs, sans protection des élus, sans obligation consistante de l’employeur

3. Comme souvent, une citation partielle permet aux partisans du non de changer le sens d’un article. Celui-ci distingue les domaines de la politique sociale dans lesquels peuvent être adoptées des législations européennes, et ceux où l’Union ne peut intervenir. L’article définit également les cas dans lesquels les décisions peuvent être prises à la majorité, et ceux qui relèvent de l’unanimité.

Oui mais ce commentaire n’enlève pas le fond : toute harmonisation fiscale et social est « exclue », cette rédaction ne souffre pas d’interprétation contradictoire tellement elle est écrite de façon limpide.

4. L’article 210, après avoir énoncé dans son paragraphe 1 une liste de domaines (classés de a) à k), de la santé et la sécurité des travailleurs, à la modernisation des systèmes de protection sociale en passant par l’information et la consultation des travailleurs, l’égalité entre femmes et hommes...), dit effectivement dans son paragraphe 2 que « la loi ou la loi-cadre européenne peut établir des mesures... à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres. »

Je le redis : « limpide ».

5. Mais les partisans du non se gardent bien de lire l’alinéa suivant du même paragraphe. Le 2b indique en effet que « dans les domaines visés au paragraphe 1, points a) à i) la loi-cadre européenne peut établir des prescriptions minimales applicables progressivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des États membres... »

Voilà une phrase, par contre qui tourne délibérément le dos à la limpidité précédente. « prescriptions... minimales, applicables... progressivement ». C’est une confirmation que toute harmonisation sociale et fiscale par le haut est exclue. Nous voulons, par exemple, un Smic européen aligné sur le plus élevé des Smic actuels (Luxembourg) pas une prescription minimale progressive, différenciée selon les « conditions « et les « réglementations techniques existantes dans chaque état »... Le projet d’un Smic peut s’appuyer sur un exemple (très imparfait d’ailleurs et récemment mis à mal par le Rif adopté au Parlement français le 16 avril 2005) : celui du Smic mondial marin adopté entre le syndicat Itf et les fédérations patronales d’armateurs, sous l’égide du BIT en 1994. Celui-ci est révisé en « parité de pouvoir d’achat » tous les deux ans et les syndicats réclament qu’il soit élevé de 545 dollars à 1400 dollars. 48 pays l’ont signé : c’est beaucoup et insuffisant parce que cela n’empêche pas les autres patrons des autres pays de le mettre à mal. Parmi ces 48 pays il y a 18 pays européens : un Smic de branche peut être possible... Il pourrait aussi exister pour les routiers... etc.. Il faut être concret et ne pas contourner le sujet comme fait Harlem Desir : en projetant de planifier un Smic européen comme on a planifié une monnaie unique européenne, on se heurte explicitement à cette phrase de la constitution. 18 pays sur 25 ont un Smic, 9 parmi les 15, 9 parmi les 10, et l’Allemagne discute d’un Smic légal en ce moment sous la pression des salariés venus de Pologne... Le Smic portugais est de 470 euros, le luxembourgeois de 1470 euros : c’est, certes, un écart de 1 à 3, mais c’était le même du temps de l’escudo et du mark. On a réussi l’euro en dépit de cet écart, on peut réussir un Smic européen aligné sur le plus élevé. Hausser le salaire du travailleur polonais sans baisser le salaire du travailleur français voilà la projet pour l’europe sociale ! D’autant que cet écart, si on le considère en parité de pouvoir d’achat (PPA) n’est plus si élevé : le Smic polonais est de 182 euros, mais avec 182 euros, on n’achéte pas la même chose au Portugal, au Luxembourg, et en Pologne. De fait, en PPA, l’écart entre les Smic existants est plus faible et cela rend plus crédible le projet de les aligner sur le haut en quelques années. D’ailleurs, c’est un peu comme cela que le Smic est né en France : il y avait différents Smic dans les années 50, avec abattement de zone, et ils ont été alignés, unifiés, après 68, en un Smic unique ! Ce qu’on a fait alors, peut être fait progressivement en Europe ! Si on fixe un calendrier pour y parvenir d’ici 2010 ou 2012, on stoppe dés maintenant l’intérêt des délocalisations aussi bien que celui du principe dit du pays d’origine : pas de raison d’emmener les machines d’ici vers là-bas si le salaire minimum doit augmenter dans les trois ou quatre ans, pas de raison bon plus de faire venir les travailleurs de là-bas pour travailler sur les machines ici, dés qu’il y a prévision d’alignement des Smic. C’est la méthode la plus sûre pour lutter à la fois contre les délocalisations et contre les directives de type Bolkestein (Bolkestein sur mer, le Rif, Bolkestein sur fer, le projet barrot contre les TER publics, Bolkestein sur route, Willy Beltz, etc...voir D&S n°124)). Mais cela ne peut pas être mise en œuvre si la Constitution est adoptée car elle exclut explicitement de procéder ainsi

Les points 1 a) à i) peuvent donc faire l’objet de législations européennes fixant des normes de droit minimales pour protéger les travailleurs. Il s’agit des domaines suivants :

a) l’amélioration, en particulier, du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs ;

on recule en pratique en matière d’évaluation des risques, de mesures de protection, il n’y a pas d’alignement par le haut là non plus...

b) les conditions de travail ;

baratin, cf rien n’avance...

c) la sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs ;

sujet ecarté par les textes

d) la protection des travailleurs en cas de résiliation du contrat de travail ;

alors, là, même en France , Borloo et Fillon et Larcher nous ramène au droit britannique avec une disparition des protections existantes... C’est le recul partout

e) l’information et la consultation des travailleurs ;

du vent, pas de pouvoir de contrôle, pas d’obligation des employeurs, pas de protection des salariés, CE flottants aux droits indéfinis, impuisants

f) la représentation et la défense collective des intérêts des travailleurs et des employeurs, y compris la cogestion, sous réserve du paragraphe 6 ;

rêve

g) les conditions d’emploi des ressortissants des pays tiers se trouvant en séjour régulier sur le territoire de l’Union ;

un peu de progrès en la matière, voir à la loupe, pour les frontaliers, et encore

h) l’intégration des personnes exclues du marché du travail, sans préjudice de l’article III-283 ;

le droit de travailler a remplacé « le droit au travail » ? oui ou non ?

i) l’égalité entre femmes et hommes en ce qui concerne leurs chances sur le marché du travail et le traitement dans le travail ;

aucune mesure d’obligation, aucune sanction, c’est comme la derniére loi de Chirac-Raffarin... Le seul cas, c’est lorsque la CJCE a imposé la travail de nuit des femmes au nom de l’égalité professionnelle

N’en sont donc exclus que 2 points du paragraphe 1 :

j) la lutte contre l’exclusion sociale ;

hé,oui...

k) la modernisation des systèmes de protection sociale, sans préjudice du point c).

alignement par le bas, cf le rapport In’t Velt, (D&S n°124) mise en concurrence des hôpitaux publics et privés, des modalités de collecte des cotisations, etc...
la santé comme l’école seront marchandisés au nom de la concurrence libre et non faussée élevé en objectif de l’union...

Dans ces deux domaines, l’action de l’Union ne peut être d’ordre législatif.

Hé, oui...

Elle peut consister en mesures encourageant la coopération entre États, l’échange d’information, d’expériences innovantes, etc.

Causes toujours, même lorsqu’il y avait 13 etats sur 15 à direction ou participation socialiste, hélas, rien n’a été fait... C’était l’époque ou Harlem désir se faisait « blâmer » parce qu’il refusait de voter pour approuver Amsterdam..

5. En ce qui concerne les points a) à i), le paragraphe 3 de l’article distingue ceux pour lesquels la législation européenne peut être adoptée à la majorité :

a) l’amélioration, en particulier, du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs ;

b) les conditions de travail ;

e) l’information et la consultation des travailleurs ;

i) l’égalité entre femmes et hommes en ce qui concerne leurs chances sur le marché du travail et le traitement dans le travail ;

et ceux pour lesquels l’unanimité des États membres est requise :

c) la sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs ;

d) la protection des travailleurs en cas de résiliation du contrat de travail ;

f) la représentation et la défense collective des intérêts des travailleurs et des employeurs, y compris la cogestion, sous réserve du paragraphe 6 ;

g) les conditions d’emploi des ressortissants des pays tiers se trouvant en séjour régulier sur le territoire de l’Union ;

6. C’est sur la base de cet article dans sa version actuelle (art. 137 du Traité de Nice) qu’ont pu être adoptées de nombreuses directives européennes en matière sociale :

Directive sur les comités d’entreprise européens

directive creuse et en retrait par rapport aux projets européens de 1983...

directive sur la limitation de la durée maximale du travail à 48 heures,

allons, elle date de 1993 (directive 93-104) avec l’exception de l’opt out, (article 18 imposé par les britanniques) étendue depuis...
les 48 h viennent de passer d’un mode de calcul sur 4 mois à un calcul sur 12 mois... c’est 65 h possibles... en décomptant temps d’astreinte et de garde
et encore la commission s’oppose à ce qui a été voté en guise de compromis très modéré par le parlement européen ces derniers jours

directives sur l’information et la consultation des travailleurs,

vide de toute garantie serieuse

protection des travailleurs sur écrans,

oui, un peu générale, mais inappliquée, il est vrai

directive sur les licenciements collectifs...

rien, rien qui n’empeche les licenciements boursiers

Est-il possible qu’un ancien Premier ministre ignore l’existence de ces directives ? Celles-ci constituent bien, pourtant, le socle d’un droit du travail européen, et d’une harmonisation sociale contribuant déjà, même si c’est encore insuffisant, à réduire les disparités sociales au sein de l’Union.

C’est pas insuffisant, c’est totalement libéral ! rien ne fera avancer ni ne protégera les travailleurs, s’il n’y a pas le projet d’harmoniser par le haut, selon le principe de faveur, certains parlent au moins d’une clause de non régression sociale, Harlem désir nous fait du baratin, du commentaire sans réalité, et tout cela pour détourner du font : toute harmonisation sociale est exclue

7. Certains domaines restent soumis à l’unanimité. C’est le cas en particulier de la protection sociale, mais la France a toujours défendu cette position. Elle signifie que s’il existe bien un objectif de promouvoir la protection sociale dans toute l’Union, chaque État reste libre de l’organisation de celle-ci. Aucune décision européenne ne peut être imposée à la France qui remettrait en cause par exemple le système de retraite par répartition. De même les Pays-Bas restent libres de conserver leur système par fond de pension.

Ainsi, non seulement le traité constitutionnel n’empêchera pas de poursuivre l’adoption de législations sociales européennes,

Mais si il empechera ! Et Harlem, non seulement n’a rien démontré, mais a baratiné pour masquer la phrase essentielle : toute harmonisation sociale est « exclue » par la voie législative et réglementaire... vers le haut

mais l’intégration de la Charte des Droits Fondamentaux dans le traité garantit un nouveau socle de droits sociaux inaliénables dans l’ensemble de l’Union, qui constitue un élément d’harmonisation sociale vers le haut. Ainsi, du droit aux congés payés au congé maternité payé, au congé parental ou de la protection contre un licenciement lié à la maternité (art. II-93), ou encore « du droit à la limitation de la durée maximale du travail, et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu’à une période annuelle de congés payés » (art. II-91) qui seront désormais obligatoires dans tous les États de l’Union. Aucune autre Constitution au monde ne contient la garantie de tels droits sociaux.

Faux ! la Charte ne crée aucun droit nouveau, aucune compétence nouvelle, c’est précisé, et n’est pas opposable devant les juges pour imposer un de ces droits dans un pays où il n’existe pas, et ces doits sont en recul par rapport à d’autres textes européens (lire Guy Braibant principal rédacteur de la Charte)
Cf D&S n° 118 à 123)

Si celle-ci est libérale, que dire des autres !

Ca se discute en matière de comparaison, car le fait de ne pouvoir ni emprunter, ni faire de déficit, ni investir dans des entreprises, ni opérer de protection douaniére, ni avoir une banque au service des citoyens et ayant mission de peser non seulement sur la monnaie mais aussi sur l’emploi et la croissance, tout cela, fait que c’est sans doute la consitution qui est la plus libérale au monde, plus que les etats unis qui ne se privent pas, eux, de tous ces moyens d’action pour peser sur l’économie. Le projet de constitution est dogmatiquement l’un des plus libéral du monde, le plus intégriste dans la désarticulation des moyens d’action pour peser sur l’économique et le social...

N.B. : La formule « les prescriptions minimales » désigne le socle de droit minimal applicable dans l’ensemble des États membres. L’article 210 rappelle notamment (5.4) que les lois européennes « ne peuvent empêcher un État membre de maintenir ou d’établir des mesures de protection plus strictes compatibles avec la Constitution ».

Ni de libéraliser au delà de ce qui est prévu par la constitution...

Le droit européen ne peut jamais servir à rabaisser le niveau du droit social d’un pays.

Faux, faux en matière de salaires comme d’emploi, comme de durée du travail...
Même du temps de la CECA, en 1951 , il y avait des mesures contre le dumping social, une haute autorité avait pour mission de sanctionner ceux qui faisaient pression à la baisse sur les salaires... reculs reculs....

Il établit les protections minimales obligatoires dans toute l’Union. C’est en ceci qu’il ne s’agit pas d’une « harmonisation » au sens du droit communautaire. Dans le droit communautaire, le terme « harmonisation » est utilisé pour l’uniformisation des droits nationaux par des directives européennes ou des règlements.

Effectivement, dans cette constitution l’harmonisation n’est explicitement prévue que par le marché, c’est à dire par le bas...

L’harmonisation sociale au sens où on l’entend généralement en France, c’est-à-dire la définition d’une base de droits minimum qui rehausse la situation des pays retardataires vers celle des pays les plus avancés, découle soit de l’introduction de principes ou de droits garantis dans le traité (droit de grève, égalité hommes-femmes, droit aux congés payés, au congé maternité payé, tels qu’énoncés par la Charte), soit de « prescriptions minimales » fixées par des directives européennes (par exemple dans le cas des Comités d’entreprise européens).

Harlem Désir, député européen

Gérard Filoche, pas député européen, Bn du Ps, D&S, IT

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