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11 février 1957 Fernand Iveton délégué syndical CGT fut guillotiné par le gouvernement socialiste (video)

par Roberto Ferrario

Publie le samedi 11 février 2017 par Roberto Ferrario - Open-Publishing

Fernand Iveton (à gauche) devant sa machine à l’atelier de Gaz d’Algérie

Fernand Iveton est ouvrier tourneur à l’usine à gaz du Hamma de l’EGA à Alger où il est délégué syndical à la Confédération générale du travail (CGT).

En application des pouvoirs spéciaux demandés par le président du Conseil, le socialiste Guy Mollet, et votés par l’Assemblée nationale en mars 1956, il est jugé par le tribunal militaire d’Alger. Défendu par deux avocats commis d’office — le Parti communiste français ayant d’abord interdit qu’il le soit par l’avocat communiste Gaston Amblard —, il est condamné à mort pour « tentative de destruction d’édifice à l’aide d’explosifs », le 24 novembre 1956, à l’issue d’une journée d’audience.

Le pourvoi d’Iveton devant le tribunal de cassation militaire est rejeté le 3 décembre 1956.

Jacqueline Guerroudj est arrêtée le 4 janvier 1957. Elle tente en vain, par ses déclarations à la police, de sauver Iveton.

N’ayant pas tué, Iveton croit à sa grâce plaidée par l’avocat communiste Joë Nordmann qui s’est joint aux avocats commis d’office, Albert Smadja et Charles Laînné. Mais son recours est refusé le 10 février 1957 par le président de la République, René Coty, avec l’accord du garde des Sceaux de l’époque, François Mitterrand et du président du Conseil, Guy Mollet. Il est guillotiné le 11 février 1957, dans la cour de la prison de Barberousse, à Alger par le bourreau d’Alger, Fernand Meyssonnier. Avec lui, deux militants nationalistes, Mohamed Ben Ziane Lakhnèche et Ali Ben Khiar Ouennouri, dits « Ali Chaflala » et « P’tit Maroc », sont également décapités.

Il est le seul Européen parmi les 198 prisonniers politiques guillotinés de la guerre d’Algérie. Me Albert Smadja, son avocat commis d’office, témoin de l’exécution, rapporte qu’avant de mourir Fernand Iveton déclara : « La vie d’un homme, la mienne, compte peu. Ce qui compte, c’est l’Algérie, son avenir. Et l’Algérie sera libre demain. Je suis persuadé que l’amitié entre Français et Algériens se ressoudera. ».

Le soir de l’exécution à la prison de Barberousse des trois condamnés dont Fernand Iveton, le 11 février 1957, Annie Steiner, incarcérée à la même prison où elle est condamnée à cinq ans de réclusion, compose le poème Ce matin ils ont osé, ils ont osé vous assassiner.

" Puis le coq a chanté
Ce matin ils ont osé.
Ils ont osé vous assassiner
En nos corps fortifiés
Que vive notre idéal
Et vos sangs entremêlés
Pour que demain ils n’osent plus
Ils n’osent plus nous assassiner."
 
Ce matin ils ont osé
Ils ont osé vous assassiner
C’était un matin clair
Aussi doux que les autres
Où vous aviez envie de vivre et de chanter
Vivre était votre droit
Vous l’avez refusé
Pour que par votre sang d’autres soient libérés. »

En mars 1958 Jean-Paul Sartre, sous le titre Nous sommes tous des assassins, dénonce l’exécution de Fernand Iveton dans sa revue Les Temps modernes.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fernand_Iveton

De nos frères blessés

de Joseph ANDRAS

Prix Goncourt 2016 du premier roman, Joseph Andras retrace les derniers jours de Fernand Iveton,le seul Européen guillotiné pendant la guerre d’Algérie, qui fut militant communiste.

Alger, 1956. Fernand Iveton a trente ans quand il pose une bombe dans son usine. Ouvrier indépendantiste, il a choisi un local à l’écart des ateliers pour cet acte symbolique : il s’agit de marquer les esprits, pas les corps. Il est arrêté avant que l’engin n’explose, n’a tué ni blessé personne, n’est coupable que d’une intention de sabotage, le voilà pourtant condamné à la peine capitale.

Si le roman relate l’interrogatoire, la détention, le procès d’Iveton, il évoque également l’enfance de Fernand dans son pays, l’Algérie, et s’attarde sur sa rencontre avec celle qu’il épousa. Car avant d’être le héros ou le terroriste que l’opinion publique verra en lui, Fernand fut simplement un homme, un idéaliste qui aima sa terre, sa femme, ses amis, la vie – et la liberté, qu’il espéra pour tous les frères humains.

Quand la Justice s’est montrée indigne, la littérature peut demander réparation. Lyrique et habité, Joseph Andras questionne les angles morts du récit national et signe un fulgurant exercice d’admiration.

http://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature/de-nos-freres-blesses