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Comment l’affaire Le Roux se retourne contre Fillon

par Marianne Enault

Publie le mercredi 22 mars 2017 par Marianne Enault - Open-Publishing

Bruno Le Roux a démissionné mardi, après les révélations sur l’emploi de ses filles à l’Assemblée nationale. Un événement qui aurait pu se retourner contre le PS et son candidat, Benoît Hamon, mais qui finalement se répercute sur François Fillon. Explications.

"Ce n’est pas bon pour moi, puisqu’il est socialiste, et que ça crée une symétrie avec l’affaire Fillon." Selon ces propos rapportés par Le Figaro, Benoît Hamon s’inquiétait des conséquences de l’affaire Le Roux, après les révélations sur l’emploi de ses filles mineures à l’Assemblée nationale et l’ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet national financier. Le candidat socialiste craignait sûrement que des amalgames soient faits, et que cette affaire nourrisse le "tous pourris", entretenus par certains candidats à l’élection présidentielle.

Après les révélations dans l’émission Quotidien, lundi soir, François Hollande et son Premier ministre, Bernard Cazeneuve, ont décidé d’agir rapidement. Selon Le Parisien, les deux hommes, qui n’étaient pas au courant de l’affaire, décident en fait dès lundi soir de se séparer de Bruno Le Roux, qui est pourtant un très proche du chef de l’Etat. "Ce n’était pas possible autrement", témoigne un conseiller dans le journal.

La démission express de Bruno Le Roux

Dès mardi matin, on apprend que l’agenda de Bruno Le Roux a été vidé de ses rendez-vous, et ce dernier ne participe pas à une visite pourtant programmée avec le Premier ministre. En début d’après-midi, celui qui est encore ministre de l’Intérieur rencontre François Hollande et Bernard Cazeneuve, rencontre au cours de laquelle les deux hommes lui annoncent leur intention de mettre fin à ses fonctions place Beauvau. "Avec un peu de tristesse côté Hollande pour son vieux camarade", commente un conseiller ministériel, cité par le journal. Seule demande formulée par Bruno Le Roux : il souhaite lui-même annoncer sa démission, ce qu’il fera peu après 18 heures, le même jour.

Cette gestion express du cas Le Roux a finalement d’autres conséquences. Car l’affaire semble se retourner contre... François Fillon. La démission du ministre de l’Intérieur vient en effet souligner que l’ancien Premier ministre est, lui, toujours là, et ce malgré sa mise en examen et malgré les réquisitoires supplétifs envoyés par le parquet national financier aux juges d’instruction pour de nouveaux faits, dont ceux "d’escroquerie aggravée", de "faux" et d’"usage de faux".

Pour le PS, l’exemplarité de Bruno Le Roux souligne "l’absurdité" du cas Fillon

Le Parti socialiste ne s’y est d’ailleurs pas trompé, en exploitant la situation dans un communiqué diffusé mercredi. "Ce train interminable d’accusations, dont le bruit assourdissant recouvre la campagne, empêche tout débat serein sur le destin de notre pays (...) Ce débat est tout simplement interdit de votre fait", écrit-t-il. Et d’ajouter : "L’exemplarité et la célérité avec lesquelles Bruno Le Roux a présenté sa démission ne font que souligner l’absurdité et la dangerosité avec laquelle vous vous entêtez, sans aucunement vous soucier des effets délétères de votre obstination sur la démocratie." "Nous vous demandons expressément de retirer votre candidature. Car il en va de la démocratie, de la République et de la France", conclut le Parti socialiste.

Lors du Conseil des ministres, François Hollande a également adressé un message assez clair au candidat de la droite. Il ne doit pas y avoir de "suspicion à l’égard des personnes qui exercent les plus hautes fonctions ou qui briguent les plus hautes responsabilités", a-t-il ainsi déclaré. "C’est l’image de la démocratie qui est en jeu, c’est la qualité et la dignité du débat électoral qui sont menacées", si ce principe n’est pas respecté, a ajouté le président de la République, selon des propos rapportés par le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll.

L’affaire Le Roux gêne la défense de Fillon

Au-delà des commentaires de ses adversaires, François Fillon voit, avec l’affaire Le Roux, une partie de ses arguments s’envoler. Depuis les premières révélations fin janvier, l’ancien Premier ministre avait en effet adopté la même ligne de défense, à savoir la dénonciation d’une justice partiale qui serait à ses trousses. Le 1er mars, il avait ainsi estimé qu’à travers lui, on chercher à "assassiner l’élection présidentielle", assurant ne pas avoir été traité "depuis le début comme un justiciable comme les autres". La rapidité avec laquelle le parquet national financier a ouvert une enquête sur les faits qui sont reprochés à Bruno Le Roux vient aujourd’hui amoindrir l’argument.

Un autre candidat, Emmanuel Macron, l’a d’ailleurs souligné mercredi : selon lui, la démission de Bruno Le Roux montre en effet "si besoin était, à qui de droit, d’abord l’impartialité de la justice et des procédures" mais aussi "que l’esprit de responsabilité existe en politique". Le message pourrait difficilement être plus clair.

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