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Pourquoi l’élection d’une députée LREM a été invalidée

par Olivier Pérou

Publie le vendredi 17 novembre 2017 par Olivier Pérou - Open-Publishing

Malgré un recours, Isabelle Muller-Quoy, élue dans la 1re circonscription du Val-d’Oise, a vu son élection annulée à cause de l’inéligibilité de son suppléant.

« Ex-députée ». La bio Twitter d’Isabelle Muller-Quoy a déjà été mise à jour. Jeudi, le Conseil constitutionnel a invalidé l’élection de la députée de La République en marche de la première circonscription du Val-d’Oise. Un revers de taille pour celle qui avait été élue avec 54,23 % des voix en juin dernier, lors des législatives. Motif invoqué par les sages de la rue de Montpensier : l’inéligibilité de son suppléant, Michel Alexeef. La parlementaire pouvait-elle le savoir ?

Dans leur décision, les sages se sont appuyés sur l’article L.O. 132 du Code électoral. « Les présidents des conseils de prud’hommes sont inéligibles en France dans toute circonscription (...) dans lequel ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins d’un an à la date du scrutin », écrivent-ils dans leur délibéré. Car le suppléant d’Isabelle Muller-Quoy occupait justement le siège de président du conseil des prud’hommes de Pontoise en janvier 2017, soit six mois avant la date du premier tour.

QPC

Lors de son audition, Isabelle Muller-Quoy a assuré qu’elle n’était pas au courant de cette ligne de CV de Michel Alexeef. « J’ai vérifié les inéligibilités pour moi, je n’ai pas pensé à le faire pour lui », a martelé ce maître de conférences en droit public, constitutionnel et administratif devant les sages. Pourtant, avant le scrutin, tous les candidats peuvent prendre connaissance d’un « mémento » dans lequel le ministère de l’Intérieur détaille « les incompatibilités concernant le mandat de député ».

Pour sa défense, la députée a soulevé une « question prioritaire de constitutionnalité » (QPC) estimant – par la voix de son avocat – « que ces présidents (de prud’hommes, NDLR) ne sont pas des juges professionnels ». L’inéligibilité ne pourrait alors s’appliquer à ces magistrats, estime-t-elle en substance. Dans leur plaidoirie, les avocats des requérants se sont émus de ce recours. « Nous avons observé que la QPC, en plus d’être irrecevable, était teintée de mépris vis-à-vis des conseils des prud’hommes. Comme si les magistrats y siégeant n’étaient pas l’égal des autres. C’est une petite musique politique qui fait écho aux réformes précédentes qui porte atteinte à cette juridiction », commente au Point Xavier Sauvignet, l’avocat de la candidate de La France insoumise Leïla Saïb.

Elle s’est accrochée à son mandat

Mardi, le conseil des sages présidé par Lionel Jospin a balayé d’un revers de main la QPC : « Le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qu’il a déjà déclarée conforme à la Constitution. » En avril 2011, les locataires de la rue de Montpensier avaient déjà statué sur ce point d’inéligibilité des « présidents des tribunaux de commerce et les présidents des conseils de prud’hommes ».

Et maintenant ? Une élection partielle sera organisée d’ici 2018 dans la première circonscription du Val-d’Oise. « Nous prenons acte de la décision souveraine du Conseil constitutionnel. Et nous serons aux côtés de notre collègue devant les électeurs de sa circonscription à l’occasion de l’élection partielle », a assuré le chef de file des députés LREM Richard Ferrand. Isabelle Muller-Quoy devrait en effet être de nouveau investie, assure-t-on chez les parlementaires de la majorité. « Faute de mieux, elle va repartir. Mais notre image en prend un coup », abondent en chœur des députés macronistes franciliens.

Pour un proche du dossier, le comportement de la désormais ex-députée pose question : « Elle a dit savoir son inéligibilité depuis l’entre-deux-tours. N’aurait-elle pas pu se retirer ? Voilà cinq mois qu’elle touche sa rémunération de député de la nation, avec les avantages inhérents à cette fonction. Elle s’est en plus accrochée à son mandat en utilisant tous les recours possibles. » Contactée, Isabelle Muller-Quoy n’a pas répondu à nos sollicitations.

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