Accueil > Dossier spécial : La dimension marxienne de l’anarchisme

Dossier spécial : La dimension marxienne de l’anarchisme

par Alternative Libertaire

Publie le samedi 13 janvier 2018 par Alternative Libertaire - Open-Publishing
3 commentaires

Il y a 200 ans naissait Karl Marx. Pourquoi continuer aujourd’hui d’expliquer les fondamentaux de sa critique de l’économie ? Tout simplement parce que, s’il y a un élément théorique commun au marxisme et à l’anarchisme, c’est bien l’analyse du capitalisme.

À tel point qu’on peut dire que la critique de l’économie correspond – de façon assumée ou refoulée – à la dimension « marxienne » de ­l’anarchisme. Se dire « marxien » et non « marxiste » revient à adhérer à la méthode d’analyse de Marx, mais pas à ses orientations politiques et à celles de ses successeurs attitrés – socialistes parlementaires ou autoritaires.

Au-delà de leurs divergences sur le socialisme, Proudhon, Marx et Bakounine eurent de nombreuses identités de vues  : sur la propriété des moyens de production et la lutte des classes, le salariat, sur l’idée que seul le travail est créateur de richesses, donc de plus-value.

Marx a emprunté beaucoup aux écrits d’autres auteurs (Ricardo, Proudhon, Victor Considérant, Saint-Simon…). Son œuvre monumentale, Le Capital, condense tous ces apports, en portant l’analyse à un degré de rigueur et de clarté sans précédent. Il a dès lors été intégré au corpus théorique des divers courants du socialisme, y compris l’anarchisme.

Évoquant, dans un manuscrit de 1870, le « magnifique ouvrage sur le Capital » de Marx, Bakounine juge qu’il « aurait dû être traduit depuis longtemps en français, car aucun, que je sache, ne renferme une analyse aussi profonde, aussi lumineuse, aussi scientifique, aussi décisive, et, si je puis m’exprimer ainsi, aussi impitoyablement démasquante, de la formation du capital bourgeois et de l’exploitation systématique et cruelle que ce capital continue d’exercer sur le travail du prolétariat ».

Mais la querelle historique entre Marx et Bakounine allait conduire la majorité des anarchistes des générations suivantes à jeter le bébé avec l’eau du bain. Désormais, dans le mouvement anarchiste, le nom de Karl Marx ne pourrait plus se prononcer qu’avec un rictus de dégoût… Pendant plusieurs décennies, rares furent ceux et celles qui assumèrent cet héritage – et parmi eux on peut citer Amédée Dunois (1878-1945), Georges Fontenis (1920-2010) ou Daniel Guérin (1904-1988) – avant que le courant communiste libertaire n’intègre ouvertement « le meilleur de Marx ».

Dans les années 1970, l’Organisation révolutionnaire anarchiste réédita ­ainsi L’Abrégé du Capital de Cafiero. Par la suite l’UTCL et enfin Alternative libertaire ont poursuivi sur cette lancée.

Un dossier coordonné par Winston Ronwen (AL Moselle)


Au sommaire :

Alain Bihr (sociologue) : « Même insuffisant, Marx reste nécessaire ! »
Économie politique : L’utilité de la critique marxienne pour les libertaires
Rudiments : La logique capitaliste en huit notions de base
la valeur
la force de travail
le salaire
le travail domestique
la plus-value
la baisse tendancielle du taux de profit
la crise
la restructuration
Marx ou Keynes ? L’aménagement du capitalisme n’est plus d’époque
Aux confins du marxisme et de l’anarchisme, le conseillisme
Proudhon, l’instigateur renié
Bakounine, le critique entendu
Daniel Guérin, revenu du « marxisme libertaire »
L’« autre communisme » reste d’actualité

Portfolio

Messages

  • Nous communistes et anarchistes partageons, entre autre, le projet de société finale à construire mais pas les moyens d’y parvenir. Ils sont inconséquents avec cet objectif.
    Les anarchistes refusent l’organisation (*) de type parti (même nouveau) alors que pour nous communistes c’est un outil indispensable à l’organisation des éléments les plus conscients de la classe ouvrière et du prolétariat (d’aucun diront "les éléments avancés"). Ils refusent également la dictature du prolétariat alors que c’est un moyen d’empêcher le retour de la bourgeoisie par tous les bouts (économique, sociale et culturel). Ce qui ne veut pas dire qu’il lui sera interdit de s’exprimer librement. Ce qui lui sera interdit c’est de fourbir les armes de la contre-révolution.
    (*). Les camarades anarchistes sont quand même un minimum conscients qu’il faut être efficace et donc ils s’organisent aussi et parfois cela ressemble au parti tant décrié ; comme quoi.

    • Salut Raymond,

      Les communistes libertaires ne s’opposent pas à la dictature du prolétariat - même si on préfèrera parler de pouvoir populaire - qui implique l’exercice du pouvoir politique par le prolétariat et d’éventuelles mesures coercitives à l’égard des forces contre révolutionnaires et si elle n’est pas reniée, elle se doit de s’accompagner de ce que Marx préconisait lui même :

       l’accomplissement de la démocratie, qui doit déboucher sur une démocratie réelle et directe.

       le dépérissement de l’Etat, qui fait cesser progressivement un appareillage situé au dessus de la société, au profit d’organisations alternatives, fondées sur la démocratie directe.

      Concernant les partis, tu le dis toi même, il y a "partis et organisations". L’essentiel est de s’organiser, et Marx ne préconisait pas les partis même s’il employait ce terme à son époque. A cette époque le mot parti n’a pas le sens exclusif qu’on lui connait aujourd’hui. Marx parle justement de la nécessité pour le prolétariat de s’organiser pour agir... Ce que font les communistes libertaires, au sein d’organisations politiques (Alternative Libertaire, par exemple), mais aussi de syndicats de lutte, d’associations, de collectifs divers et variés, de mutuelles ou de coopératives.

      Amicalement,

      W.R.