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Israël : Benyamin Nétanyahou fragilisé par un nouveau scandale

par Cyrille Louis

Publie le mercredi 21 février 2018 par Cyrille Louis - Open-Publishing

Plusieurs ex-collaborateurs du premier ministre ont été placés en garde à vue dimanche dans l’enquête sur les avantages qui auraient été concédés à l’opérateur de télécommunication Bezeq en contrepartie d’une couverture médiatique favorable.

C’est un coup dur de plus pour Benyamin Nétanyahou. Une semaine tout juste après que la police a recommandé son inculpation pour « corruption » dans deux enquêtes distinctes, la presse israélienne rapporte qu’un proche collaborateur du premier ministre a accepté mardi soir d’être témoin à charge dans un troisième dossier. Shlomo Filber, qui fut le directeur général du ministère de la Communication jusqu’à sa suspension, à l’automne dernier, en lien avec une enquête de l’autorité des marchés financiers, a été placé en garde à vue dimanche dans le cadre de l’« affaire 4000 ». Les policiers le soupçonnent d’être un acteur-clé du pacte occulte en vertu duquel Nétanyahou aurait délibérément favorisé l’opérateur de télécommunication Bezeq afin d’obtenir une couverture favorable dans les médias appartenant à ce groupe.

Décrit comme un confident de longue date du premier ministre, Shlomo Filber a été nommé à la tête du ministère de la Communication au printemps 2015, dans la foulée des dernières élections législatives. Benyamin Nétanyahou, conforté par son large succès, s’était alors réservé ce portefeuille sensible. À en croire les révélations de la presse israélienne, Filber est soupçonné d’avoir abusé de sa fonction pour promouvoir les intérêts de Bezeq. Il aurait notamment bloqué un projet de réforme qui prévoyait de remettre en cause la position dominante du groupe en ouvrant le marché de la téléphonie fixe à de nouveaux acteurs. Il est aussi soupçonné d’avoir communiqué illégalement des documents confidentiels à des dirigeants de Bezeq. Ces précieux coups de pouce, selon les médias, leur auraient rapporté plusieurs centaines millions de shekels.

Le premier ministre dément

Au fil de leurs investigations, les policiers semblent avoir acquis la conviction que Shlomo Filber jouait un rôle d’intermédiaire privilégié entre Benyamin Nétanyahou et le PDG de Bezeq, Shaul Elovitch. Il aurait personnellement veillé à ce que le site d’information en hébreu Walla, qui appartient à l’opérateur, garantisse une couverture bienveillante au premier ministre ainsi qu’à son épouse. D’anciens journalistes et rédacteurs en chef du média en ligne ont affirmé ces derniers jours avoir reçu des instructions claires en ce sens. « J’ai personnellement été témoin de pressions qui ont conduit le site à se prosterner devant le premier ministre. Comme quelques autres journalistes sérieux, j’ai fait de mon mieux pour faire comprendre aux dirigeants du groupe s’il s’agissait de pratiques inacceptables », a par exemple témoigné Dov Gil-har, ancien de Walla, qui travaille désormais pour l’opérateur de télévision publique.

Shaul Elovitch, son épouse Iris et son fils Or, ainsi que deux hauts dirigeants de Bezeq ont également été placés en garde à vue dimanche dernier. Boaz Stembler, un ancien porte-parole, aurait confirmé devant les policiers avoir régulièrement relayé les demandes des époux Nétanyahou à la rédaction en chef de Walla. Le premier ministre, de son côté, dément toute infraction et évoque des relations normales entre un dirigeant politique et un groupe de tout premier plan. « Il s’agit de nouvelles allégations mensongères, a balayé son bureau dans un communiqué. M. Nétanyahou n’a pris aucune mesure pour favoriser Elovitch ou Bezeq, que ce soit en contrepartie d’une couverture favorable ou de quoi que ce soit d’autre. »

Mardi, l’affaire a pris une dimension plus sidérante encore lorsque le journaliste Ben Caspit, du quotidien Maariv, a dévoilé les indices accumulés à l’encontre d’un autre suspect. Nir Hefetz, l’ancien conseiller en communication des époux Nétanyahou, qui a aussi été arrêté dimanche. Les policiers le soupçonnent d’avoir fait proposer à une magistrate de haut rang, fin 2015, le poste de procureur général si elle acceptait d’enterrer une enquête portant sur les frais de bouche de la résidence du premier ministre. La juge Hila Gerstel, qui a livré ce récit aux enquêteurs, affirme avoir repoussé l’offre. « Personnellement, je ne pense pas que Benyamin Nétanyahou lui-même aurait confié une telle mission à Hefetz », écrit toutefois Ben Caspit, qui soupçonne plutôt une initiative personnelle de ce collaborateur.

Le premier ministre, qui a exclu la semaine dernière de démissionner face aux accusations formulées dans le cadre des affaires « 1000 » et « 2000 », semble accuser le coup face aux dernières révélations. Le quotidien gratuit Israel Hayom, très proche de M. Nétanyahou, évoque dans son édition de mercredi « un parfum d’élection anticipée ». Mais ses partisans n’ont pas pour autant dit leur dernier mot. Selon un sondage publié dans le même journal, le Likoud empocherait 34 sièges sur 120 et demeurerait le principal parti à la Knesset si des élections étaient organisées aujourd’hui. « Plus on nous torture, prévient le premier ministre, et plus on gagne. »

http://www.lefigaro.fr/international/2018/02/21/01003-20180221ARTFIG00140-israel-benyamin-netanyahou-fragilise-par-un-nouveau-scandale.php

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