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Grèves à Brest, en 1950 : “Un homme est mort” sur Arte mercredi 13 juin à 22h35

par nazairien

Publie le dimanche 10 juin 2018 par nazairien - Open-Publishing
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La bande dessinée de Kris et Étienne Davodeau, Un homme est mort, adapté en fiction d’animation, réalisée par Olivier Cossu, sera diffusée sur Arte mercredi 13 juin à 22h35, dans le cadre d’une programmation spéciale Festival d’Annecy. La fiction raconte le combat des ouvriers brestois lors des grèves de 1950 et raconte l’arrivée de René Vautier, un cinéaste engagé qui vient filmer les événements.

https://www.actualitte.com/article/culture-arts-lettres/greves-a-brest-en-1950-un-homme-est-mort-adapte-par-arte/88932

"Un homme est mort" Edouard Mazé, mort le 17 avril 1950

Le film d’animation, qui a obtenu le Prix du public au Festival international du cinéma d’animation de Meknès 2018, se concentrera sur l’histoire d’amitié, mais aussi d’amour entre P’tit Zef, un ouvrier, et Paulette, une fille de commerçant qui prend part à la lutte syndicale. Il opérera également une reconstitution de Brest en 3D, au rythme de la musique de Yan Volsy et Pablo Pico.

On y verra des événements réels comme la mort d’Édouard Mazé et le film de René Vautier rythmé par le poème de Paul Eluard, Gabriel Péri. Grâce à un cinéma ambulant, Vautier a parcouru la Bretagne pour montrer ce témoignage du combat et de la solidarité des ouvriers. La seule pellicule de ce film a malencontreusement été détruite. Les mots du poète, « Un homme est mort qui n’avait pour défense que ses bras ouverts à la vie », prennent dans ce contexte une dimension bouleversante.

« Je trouvais qu’il y avait quelque chose de judicieux dans le fait de ramener cette histoire vers une forme animée. Kris, qui a initié le projet de la bande dessinée et l’a écrite avec moi, partageait cette idée. Après avoir remis à la lumière le film de René Vautier en bande dessinée, l’idée de le voir revenir à l’écran qui est son support originel, par le dessin, c’est magnifique, comme une évidence qui assume et valide les formes successives de ce récit » explique Étienne Davodeau qui a réalisé l’univers graphique du film tandis que Kris participait au scénario et à l’adaptation.

« Gabriel Péri, le poème de Paul Eluard, lu et réinterprété par René Vautier lors des projections de son film sur ces événements de 1950, nous permet de ne jamais oublier le combat de ces hommes luttant contre l’injustice, parfois au péril de leur vie. On aime les villes qui n’ont pas à dire qui elles sont ni d’où elles viennent. Brest n’a pas ce luxe mais a su se relever alors qu’elle avait été mise plus bas que terre, tout comme ses habitants et ses travailleurs » complète Olivier Cossu.

C’est en meme temps, un hommage à René Vautier 15 01 1928 - 04 01 2015
Une Grande Figure du cinéma militant, un engagement qui n’a jamais failli .

http://kebekmac.forumprod.com/un-homme-est-mort-2017-olivier-cossu-film-d-animation-t6652.html

Un homme est mort est d’abord un film de René Vautier sur la mort de l’ouvrier Edouard Mazé, tué à Brest par les gardes mobiles, lors des manifestations et des grèves de 1950. Un commentaire reprenant un poème de Paul Eluard intitulé "Un Homme est mort" accompagne les images. Le film est projeté de nuit sur les lieux pendant près d’un mois. Il est définitivement détruit au cours de la dernière projection dans un ciné-club parisien. Quelques plans tournés à Brest sont utilisés par Robert Ménégoz dans Vivent les dockers (1951, 14 mn) et repris dans Le Chant des fleuves (1954) de Joris Ivens. Condamné pour le tournage du film Afrique 50 en violation du décret Pierre Laval (Ministre des colonies) de 1934, René Vautier est mis en prison militaire à Saint-Maixent, puis à Niederlahstein en zone française d’occupation allemande. Il sort en juin 1952. Film détruit L’histoire de "Un homme est mort" retranscrit par Étienne Davodeau et Kris sous forme de bande-dessinée les faits réels qui se sont produits lors des manifestations ouvrières à Brest en 1950. Les personnages sont eux aussi calqués sur des personnes réelles ; notamment René Vautier, réalisateur engagé du film perdu autour duquel tournent les évènements de la BD

Messages

  • Article du 18 Avril 2000 (Témoignage de Pierre Mazé, son frère, lors de la commémoration de cette meme année)

    https://www.letelegramme.fr/ar/viewarticle1024.php?aaaammjj=20000418&article=1004455&type=ar

    Beaucoup de monde hier soir, aux abords de la maison du peuple. Les anciens Brestois, les militants ouvriers rendaient hommage à un martyr, Edouard Mazé, mort le 17 avril 1950. Son frère Pierre se souvient de cette tragique manifestation qui compte parmi les grandes pages de l’histoire syndicale dans le bâtiment.

    « Devant le corps d’Edouard Mazé, la population de Brest, du Finistère, fait le serment de rester fidèle à sa mémoire, à son combat pour le pain, la paix, la liberté. », lançaient les Brestois le 19 avril 1950. Hier, aux abords de la maison du peuple, près de la place qui porte son nom, les militants se sont regroupés. Ils ont tenu parole, au nom du « devoir de mémoire ». Aujourd’hui âgé de 79 ans, Pierre Mazé, sait mieux que personne la valeur des enseignements du passé.

    La mort brutale de son frère, a été en quelque sorte le terreau de son destin, faisant de ce secrétaire général du syndicat du bâtiment de Brest et de ses environs, un responsable national à la fédération CGT du bâtiment. 15 F d’augmentation horaire, 3.000 F de l’époque par mois. Cette revendication fut le déclencheur d’un gigantesque mouvement de grève qui toucha toutes les professions, et mobilisa les 5.000 ouvriers du bâtiment que comptait la cité du Ponant. On imagine l’impact de la grève totale qu’ils menèrent dans le Brest de la reconstruction.

    « Il y avait des actions dans toute la France, mais c’est ici que le mouvement s’est développé, prenant plus d’ampleur que nulle part ailleurs. La population brestoise et les communes des environs, ont apporté leur aide matérielle, offrant de nombreuses denrées par solidarité », explique Pierre Mazé. Et puis faute de résultat, le mouvement se durcit. Le 17 avril 1950, un cortège se forme devant la bourse du travail et prend la direction de la sous-préfecture. La tension ne va cesser de monter.

    Contrairement à ce qui a pu être dit, il n’y avait pas d’intentions belliqueuses de notre part. Il n’y a eu ni boulons, ni jets de pierre. Un camion des forces de l’ordre a été brûlé, quelques mousquetons de gendarmes ont été brisés sur le sol, mais c’est tout ». La mémoire de Pierre Mazé, alors au premier rang du cortège, est ferme. Il se souvient du premier contact, pacifique, avec les gendarmes, puis de la charge policière à coups de crosse et de sa fuite dans un café. Il se souvient du nouveau regroupement et des instants qui précédèrent la fusillade.

    « Il y a ce que j’ai vu et ce que j’ai entendu. Quelqu’un qui, derrière le cordon de policiers, donne un ordre. Il y a des gendarmes qui effectuent trois pas en avant, mettent un genou à terre, et tirent deux ou trois salves, blessant plusieurs personnes ». La voix du septuagénaire s’étrangle, l’émotion brouille son regard : « un gendarme m’a crié : « ça me fait chier d’être obligé de tirer sur un camarade ». J’étais connu, il m’a appelé pour me faire renifler le canon de son arme, et bien me montrer qu’il n’avait pas fait parler la poudre ».

    Il ne sait pas encore que l’un de ses deux frères présents dans la manifestation ne s’est pas relevé. Digne, le militantisme intact, Pierre Mazé se refuse à faire d’Edouard un symbole de la lutte syndicale : « bien d’autres avant lui, d’autres plus tard ont sacrifié leur vie. Il fait partie de ceux qui ont payé cher pour faire avancer les revendications des salariés ».