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Ernesto Rafael Guevara né le 14 juin 1928 à Rosario, Argentine, il aurait 90 ans...

par Roberto Ferrario

Publie le jeudi 14 juin 2018 par Roberto Ferrario - Open-Publishing

Il aurait 90 ans aujourd’hui... je publie une brève biographie et un article de mon ami Nicolas Villodre écrit sur le site ladanse.com a propos de l’exposition de cet hiver à Paris ou on peut découvrir à l’occasion d’un spectacle de danse donné au Théâtre Sarah Bernhardt une photo prise en 1964 du Che entouré d’artistes cubains...

Ernesto Rafael Guevara de la Serna est né dans une famille bourgeoise à Rosario en Argentine. Etudiant sensible au dénuement des plus pauvres, il effectue avec son ami Alberto Granado un voyage à travers l’Amérique latine qui suscite son désir d’aider le peuple en luttant contre l’injustice sociale et le convainc que seule la révolution armée peut venir à bout des inégalités socioéconomiques.

Après avoir achevé ses études de médecine en 1952, il s’initie au marxisme et se rend au Guatemala, puis rejoint les troupes de Fidel Castro en 1955. Surnommé Che Guevara, il participe au débarquement de Cuba et au renversement du dictateur Batista. Devenu citoyen cubain, il occupe par dérogation plusieurs postes dont celui de ministre de l’Industrie à Cuba et écrit plusieurs livres sur la pratique de la révolution et de la guérilla.

En 1964, dans son discours d’Alger, Che Guevara accuse le régime soviétique de ne pas être socialiste, puis en 1965 il part en Amérique latine pour organiser la guérilla. Il veut exporter la révolution et créer ainsi plusieurs fronts pour s’attaquer à l’impérialisme américain. Ne parvenant pas à étendre la révolution au Congo-Léopoldville, il se rend en Bolivie où il est capturé dans la région de Valle Grande lors d’un affrontement avec l’armée bolivienne. Celle-ci, sous les ordres de la CIA, l’exécute sommairement le 9 octobre 1967.

Le Che à Paris : Ernesto aime la rumba

par Nicolas Villodre

L’exposition de cet hiver, Le Che à Paris nous a, entre autres, fait découvrir une photo prise en 1964 par le jeune Depardon avec le Révolutionnaire Ernesto Guevara entouré d’artistes cubains et de personnalités (Lázaro Ros, Nieves Fresneda, Rogelio Martínez Furé, Rogelio París, Marta Blanco), à l’occasion d’un spectacle de danse donné au Théâtre Sarah Bernhardt (salle rebaptisée par la suite « Théâtre de la Ville ») dans le cadre diplomatique du Théâtre des Nations.

Jérôme Savary, aux origines argentines, comme celles du Che, avait un jour évoqué devant nous cet événement – nous pensions alors qu’il attigeait mais sa fille Nina nous a confirmé que tous deux avaient pris un verre au café Sarah Bernhardt après la représentation, cette anecdote étant reprise dans la pièce du metteur en scène, La Vie d’artiste racontée à ma fille (2004). Régine Deforges, dans La Bicyclette bleue (1981), mêle la venue du Che aux amourettes de son héroïne, plaidant ainsi le vrai pour accréditer le faux. Elle, aidée de la presse de l’époque, détaillait ainsi les choses : le repos du guérillero à la pizza Carli, la rencontre avec Maspero à l’ambassade cubaine, le projet du barbudo francophile et francophone de traduire en espagnol Les Damnés de la terre de Frantz Fanon, son excursion rue des Ecoles en direction de la librairie Présence africaine et sa présence en chair et en os au spectacle des Ballets cubains dans l’un des théâtres de la place du Châtelet.

Il s’agissait du show du CFN (le Conjunto folklorico nacional), troupe invitée dans le cadre de la 11e édition du festival du Théâtre des Nations. D’après les articles de l’époque consultés par Salomé Roth pour sa thèse de littérature à Paris III soutenue en 2016, le CFN visait à reconstituer « une vraie santeria, culte africain d’origine yoruba (...) religion populaire du pays ». La cérémonie « revue et corrigée par un jeune metteur en scène mexicain non dénué de talent » (le chorégraphe Rodolfo Reyes, pour être précis) était par définition « hybride » et, il est des chances, édulcorée. Cette suite de musiques et de danses avait été créée l’année précédente à Cuba et les costumes aux couleurs flamboyantes étaient de María Elena Molinet. La production réunissait à l’origine sept dizaines de danseurs, tous « issus de la rue » : des manœuvres, des coiffeuses, des étudiants, des comédiens, des ouvriers, des lavandières, des ménagères, des employés... tous adorateurs des dieux ancestraux. Le peuple monté sur scène. Huit représentations furent données salle Sarah Bernhardt. Fidel Castro s’était rendu à l’aéroport de La Havane pour saluer la troupe avant son décollage. Pas question pour le Che de manquer un tel spectacle à Paris !

Le cinéaste Rogelio París, qui réalisa cette même année le formidable documentaire Nosotros, la música avec des artistes de premier plan comme Ignacio Jacinto Villa Fernández, surnommé « Bola de Nieve », le Septeto Ignacio Piñeiro, le groupe de rumba de Celeste Mendoza, Elena Bourke, l’orchestre de Miguel Chapotin et l’ensemble dit CFN qui côtoient les amateurs anonymes de musique et de danse, faisait partie des invités. Le synopsis du programme dactylographié et déposé à la BnF par l’excellent photographe de presse Roger Pic, précise les dates de l’événement (du 14 au 20 avril 1964) et montre la variété des numéros exécutés, l’alternance entre chants et danses et découpage en trois parties : danses « Congos », chants des Polineros, danses Palo, chants des Puyas, danse Mani, danse Yujka, Makuta, Muana Muana Muana Kene ; danses Yorubas, Eleggua, Obatala, Yamaya, Shango, chœurs Yorubas, Babalu Aye, chants de clôture de la cérémonie à Eleggua ; ancienne Conga, Pregones cubains, seconde Conga, Rumbas, Comparsas. Les conseillers pour le cycle Conco étaient José Oriol Bustamante et Emilio O’Farrill, ceux pour le cycle Yoruba : Trinidad Torregrosa, Nieves Fresneda, Jesus Perez, Manuela Alonso et Lazaro Rosa. Les autres crédits sont : Maria Blanco (directrice du CFN, Rogelio A. Martinez-Fure (livret), Rodolfo Reyes Cortes (chorégraphie), Salvador Fernandez (décors), Maria Elena Molinet (costumes).

Roger Pic avait déjà réalisé un reportage au Théâtre des Nations en 1961 sur les danses rituelles données par le TNC (le Théâtre national de Cuba), issues de « mythes afro-catholiques cubains » (Suite Yoruba : Yemaya, Chango, Ochun, Oggun ; Rumba, Columbia, Guacanco ; tambours Batas ; Rebambaramba). La danseuse et anthropologue Katherine Dunham fut l’une des premières à faire un travail de restitution des expressions afro-américaines et caribéennes pour y débusquer les « survivances des danses de ses ancêtres ». Son programme de 1952 au Théâtre des Champs-Elysées juxtaposait tableaux africains, brésiliens, colombiens, argentins, mexicains, nord-américains (Buck, Wing, danses des plantations, spirituals, Shimmy, Cakewalk) et danses rituelles comme le Shango Yoruba. Claude Lévi-Strauss et André Breton furent séduits par ses danses, autant que par sa recherche ethnographique. Son art, comme les efforts de reconstitution de l’ensemble traditionnel cubain, est dans le meilleur des cas ce que le poète Roger Caillois définit comme une « surprenante alchimie qui compose à merveille le savoir et l’instinct ».

Nicolas Villodre villodre TcZ noos.fr

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