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Ce que l’élection de Bolsonaro au Brésil nous apprend ici en France

par Foolad

Publie le mercredi 31 octobre 2018 par Foolad - Open-Publishing

L’arrivé de l’ancien militaire d’extrême droite à la tête du gouvernement brésilien a fait la Une de la presse internationale. Mais en quoi elle nous apporte des enseignements utiles ici en France ?

L’élection de Bolsonaro à la présidence du Brésil est une très mauvaise nouvelle pour les travailleurs, les femmes, et les personnes LGBT dans ce pays. Son programme anti-social prévoit la suppression du 13ème mois de salaire et des indemnités de licenciement, une réforme brutale du système de retraites, ainsi que la privatisation des principales entreprises d’Etat, dont le géant Petrobras. Mais cela ne s’arrête malheureusement pas là.
Avec Bolsonaro, les militaires et les forces les plus réactionnaires font leur retour dans la politique, et propagent la haine contre les militants de gauche, les personnes LGBT, les noirs et les indiens, comme on le voit dans la série d’agressions et d’assassinats commis par les soutiens de Bolsonaro ces dernières semaines.
Mais au-delà même de la solidarité indispensable que nous devons exprimer à l’égard de nos frères et sœurs brésiliens, cet évènement est riche d’enseignements qui dépassent de loin les frontières du Brésil et peuvent être particulièrement utiles pour éviter que ce même type de phénomène ne se reproduise ici :

1. Si la crise des partis institutionnels de droite et de gauche n’est pas canalisée par une alternative de classe et à gauche, c’est l’extrême droite qui finit par le faire.

A la source du phénomène Bolsonaro, se trouvent la déception de nombreux travailleurs avec le Parti des Travailleurs (PT) au gouvernement et l’effondrement des partis traditionnels de la droite ayant soutenu le gouvernement très impopulaire de Michel Temer. Alors même qu’en 2013 la contestation au gouvernement de Dilma Roussef s’exprimait en grande partie sur la gauche, autour des manifestations massives contre le prix des transports et pour de nouveaux droits, mais aussi de la vague de grèves la plus importante de la dernière décennie, c’est finalement une variante d’extrême droite fascisante qui finit par capitaliser le processus. En France, la débâcle du Parti Socialiste et le discrédit de la droite classique pourraient donner lieu au même type de phénomène une fois que « l’illusion macronienne » aura été épuisée. Il devient en ce sens urgent de travailler à la construction d’une organisation politique des travailleurs qui lutte défende leurs intérêts de façon aussi décomplexée que les organisations de droite et d’extrême droite ne le font à l’égard des intérêts des grands patrons.

2. L’électoralisme est impuissant face à l’extrême-droite.

L’échec de Fernando Haddad est l’échec d’une stratégie du PT consistant à parier exclusivement sur la voie électorale et à rester dans le cadre du strict respect à une Justice qui est pourtant devenue la principale arme contre les acquis démocratiques au Brésil. En jouant un rôle de contention des tendances à l’action directe dans les moments décisifs (mouvement Fora Temer, grève générale d’avril 2017, prison de Lula), le PT a aidé à préparer les conditions de sa propre défaite. C’est un enseignement qui permet de voir les limites des alternatives politiques telles que la France Insoumise de Mélenchon, construites autour de l’idée d’un « sauveur suprême » qui une fois arrivé au pouvoir par les élections, règlerait à lui-seul toutes les injustices sociales.

3. La défense des acquis démocratiques et des organisations liées au mouvement ouvrier est une question de principe.

Il ne faut surtout pas oublier que Bolsonaro n’est que le fils illégitime du coup d’Etat institutionnel de 2016 qui a destitué Dilma Roussef, ainsi que de la prison de Lula, favori au scrutin. La droite a soutenu l’opération Lava-jato pensant pouvoir capitaliser le rejet du PT et a ainsi ouvert la voie à la montée de l’extrême droite. Mais malheureusement il y a eu également une partie de la gauche radicale qui, sous prétexte de son opposition à la politique et aux méthodes du PT, n’a pas accordé d’importance aux attaques aux droits démocratiques que la persécution au PT impliquait et de ses conséquences pour l’ensemble du mouvement ouvrier, et a apporté son soutien à l’opération Lava-jato, à la destitution de Dilma Roussef et même à la prison de Lula. Aujourd’hui, en France, la question des perquisitions dans les locaux de la France Insoumise, avec la saisie non seulement des documents portant non seulement sur des supposées malversations financières, mais aussi l’ensemble des fichiers contenant des informations sur les membres de cette organisation, pose à une moindre échelle ce même type de question.

4. Contre la montée des forces réactionnaires il faut s’organiser, militer.

L’arrivée de Bolsonaro au gouvernement au Brésil fait écho à une tendance internationale bien plus large, incarnée dans des personnages tels que Trump ou Salvini. Il est clair aujourd’hui que les élections et les partis traditionnels sont totalement impuissants pour stopper cette dynamique. Au Brésil c’est dans le début de résistance active sur les universités et dans les rues qui repose le seul espoir de changer les choses. Si l’on veut donc réserver un autre avenir à notre jeunesse que celui qui est en train de se préparer actuellement, il n’y aura pas d’autre choix que de prendre les choses en main, s’organiser, militer pour le renversement de ce système et de ses « fruits pourris », pour construire une autre société, sans exploitation, sans racisme et sans oppression.

http://www.revolutionpermanente.fr/Ce-que-l-election-de-Bolsonaro-au-Bresil-nous-apprend-ici-en-France

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