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Albion, la perfide, parangon de la modernité...

Publie le samedi 25 juin 2005 par Open-Publishing

de Jepe

Tf1 vous le dit, la 2, la 3, C+, la 5 comme Arte et la 6 itou...si vous etre cablés tous les bouquets de chaines l’affirment aussi.

Pour les radios...d’Europe 1 en passant par RTL, France Inter, RMC j’en passe et des meilleures...tout ce qui peut emettre sur les ondes vous le rabachent à longueur de journée.

Le Figaro, Le Monde, Libé, Le Parisien...toute la presse régionale...presque tous ceux qui écrivent sur papier journal le proclament de façon péremptoire.

Tous les libéraux d’hier d’aujourd’hui et de demain en font une profession de foi absolue et permanente.

L’Angleterre Blairiste est moderne...c’est la jeune et dynamique europe que l’on oppose à la veille europe dont la France serait le leader.

Une France archaïque, dépassée, désuette, périmée, surannée, vieillote, obsolète, antédiluvienne...pour résumer vieille...très vieille.

Alors que l’Angleterre paradis de la modernité...c’est autre chose m’ptit’dam...

La mauvaise foi n’est pas le moindre des artifices déployés pour infléchir les opinions publiques... et peser sur les pouvoirs publics.

Les "think tank" anglo-saxons, sponsorisés par les plus grandes multinationales, ont des relais puissants dans la presse et auprès de la plupart des grands "networks" pour faire passer "leur" message.

Lorsque l’on s’adresse aux peuples, il faut véhiculer des concepts limpides, des mots d’ordres mobilisateurs : ainsi Tony Blair s’en prend-il à la "poignée" d’agriculteurs français (2 millions de personnes toute même, et le double en comptant les foyers fiscaux) qui seraient les grands profiteurs de la PAC (acronyme de la Politique Agricole Commune).

A vrai dire, j’y connais pas grand chose en la matière et n’ai pas la moindre idée de l’aspect équitable ou inéquitable des réglementations actuelles, héritées d’une période de marchandage initial survenu au milieu des années 70...de plus je n’aime pas beaucoup le parti pris "promotion de l’agriculture productiviste" contenu dans la PAC...en revanche il est facile de démentir l’argument "quantitatif" du Premier Ministre britannique car si les paysans armés d’une fourche et coiffés d’un béret (comme dans les caricatures américaines anti-françaises) sont de plus en plus rares en rase campagne (ils sont plus de 2 millions tout de même), une kyrielle de métiers connexes ou transversaux dépendent fortement du fragile équilibre des exploitations agricoles : industrie agroalimentaire, grande distribution, fabricants d’engrais et de pesticides , matériel agricole, maintenance des engins (souvent bourrés d’électronique), génie génétique, secteur du crédit... sans compter le commerce de détail local qui disparaîtrait en quelques mois si les quotas céréaliers étaient brutalement remis à plat, au détriment des exploitants tricolores dont beaucoup feraient presque instantanément faillite.

En résumé, comptez en tout une dizaine de millions de personnes dont le niveau de vie serait directement affecté par la refonte de la PAC... nous sommes loin des chiffres de Tony Blair.

On pourrait aussi lui reprocher avec force arguments de présenter des chiffres du chômage archi faux qui sous estiment de moitié le montant réel des "sans travail" : des dizaines de milliers de personnes se sont désinscrites des listings des agences pour l’emploi, elles n’ont donc plus aucune "existence statistique", des centaines de milliers sont déclarées comme "inaptes" (pour raisons familiales, handicap, refus de faire preuve de "mobilité"...), et enfin, cerise sur ce gâteau indigeste que Tony Blair nous présente comme une mousse aux fruits de la passion : toute personne aiguillé vers une formation pour une période déterminée cesse ipso facto d’être considéré comme "demandeur d’emploi" (alors même qu’elle n’aspirerait qu’à effectuer un travail véritablement rémunéré pour échapper à ses créanciers).

En réalité, le système britannique ne crée pas davantage de "vrais emplois" que la France ou l’Allemagne une fois déduit les "petits boulots" de type tondeur de pelouse, empaqueteur de fruits et légumes (malgré un BAC+5), garde malade à mi-temps, technicien de surface chargé de l’entretien des bâtiments durant les périodes nocturnes, serveur dans des fast-food (en cours d’automatisation pour les prises de commande)...

Chacun tente donc de faire prendre des vessies pour des lanternes et il faut effectivement y regarder à deux fois pour démêler les slogans triomphalistes de réalités moins reluisantes.

Et que dire des archaïsmes à l’origine de la flambée des prix de l’immobilier en Angleterre, la famille royale, et le Duc de Westminster en particulier, possédant près de la moitié du patrimoine foncier de la métropole londonienne... en vertu de privilèges féodaux hérités du 18ème siècle, lorsque la noblesse possédait les terrains sur lesquels furent bâtis les quartiers périphériques de Londres, tels que Camden, Hampstead Heath, Wimbledon... pour ne citer que les plus huppés de la grande couronne.

Visitez les "clubs" chics et très fermés de Londres en compagnie d’un (ou une) aristocrate (forcément "cousin (e) de la famille royale") et vous dresserez rapidement le diagnostic d’une vraie société "à deux vitesses"... avec une large majorité de la population qui se paupérise, et dont les conditions d’existence (et de dépendance aux allocations) ne sont guère plus dignes aujourd’hui que celles qui prévalaient du temps des serfs (qu’aucune pression médiatique et publicitaire ne frustraient... puisqu’il n’y avait rien à consommer et à envier chez son voisin).

Le libéralisme a de surcroît tué la solidarité qui existait entre personne de médiocre condition et soumis à des situations précaires (en fonction de la rudesse des hivers et des récoltes).

Ya pas à dire ma p’tite dame...ça donne envie l’Angleterre blairiste "moderne".

On comprend mieux pourquoi il a perdu le tiers de ses élus aux dernières élections.

En fait, il n’a du sa réelection, qu’au fait que ses adversaires conservateurs, étaient encore plus libéraux que lui...mais si...mais si ma p’tite dame...c’est possible.