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Londres, plaque tournante de l’islamisme

Publie le dimanche 10 juillet 2005 par Open-Publishing

Le 17 janvier 2005, l’islamiste Omar Bakri, citoyen britannique, lançait un appel à faire de la Grande-Bretagne une "terre de combat". Il n’avait pourtant pas été inquiété par les autorités britanniques.

de Hassane Zerrouky

Moins de deux semaines après les attentats du World Trade Center, le Times du 28 septembre 2001 affirmait que des dizaines de terroristes islamistes couraient en Grande-Bretagne, tandis que le Sunday Times titrait sur l’existence de « cellules dormantes ». À Londres, les islamistes avaient pignon sur rue. Certains de leurs chefs étaient connus : Omar Bakri, à la tête du parti Muhadjiroun, qui avait qualifié les attentats du 11 septembre de « très excitants » ; Abou Hamza, de son vrai nom Mustapha Kamel, l’imam au crochet de la mosquée de Finsbury Park, responsable des « partisans de la chariâa » ; Abou Qutada, imam de la mosquée de Rosmore Road... ceux-là étaient connus comme les chefs de file de ce qu’on appelle « le Londonistan ». Ils activaient librement et soutenaient impunément, dans les années 1990, le GIA algérien - Abou Hamza et Abou Qutada étaient rédacteurs à Al-Ansar, organe du GIA - et ils n’ont jamais fait mystère de leurs idées.

Durant les années 1970 à 2000, la capitale britannique a été en permanence la plaque tournante de l’islamisme en Europe. Le 8 août 1994, à Wemblay, plus de 8 000 islamistes se sont rassemblés à l’appel du Parti de la libération islamique (PLI). Le 28 du même mois, à Sheffield, 2 000 islamistes rassemblés par la très officielle Mission islamique de Grande-Bretagne ont appelé au djihad et ont fait le procès de la France, accusée de soutenir le régime algérien. Pis : selon le Financial Times du 13 janvier 1999, les « partisans de la chariâa » d’Abou Hamza disposaient le plus librement d’un camp d’entraînement encadré par d’anciens officiers britanniques. Les réseaux islamistes, après s’être fait discrets, et malgré la surveillance policière et quelques arrestations, sont revenus aujourd’hui au-devant de la scène. Leurs prêches incendiaires contre le grand Satan et ses alliés arabes ont repris, et leurs publications sont distribuées discrètement mais au su de tous. Avant le 11 septembre 2001, il suffisait d’aller à Finsbury Park, à Blackstoad Road ou à Queensway pour trouver toutes sortes de publications, cassettes audio et vidéo de la mouvance islamiste transnationale. Témoin encore de cette agitation islamiste, cette vidéocassette du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien diffusée, selon l’Observer du 27 janvier 2002, dans trois mosquées de Londres dont celles de Finsbury Park et d’Osmore Road, à fin de « recrutement des islamistes radicaux britanniques », selon l’hebdomadaire britannique. Elle montrait une série d’opérations du GSPC en Algérie, dont le massacre d’un groupe des conscrits algériens, certains égorgés sous l’oeil de la caméra, accompagné de ce commentaire : « Dieu aime les gens qui tuent en son nom. Les ennemis de l’islam sont effrayés. Les juifs et les chrétiens savent qu’ils ont perdu la guerre et ont voulu nous arrêter de répandre la vérité de Dieu » ! À Londres encore, devenu un siège de l’inquisition, l’islamiste « modéré » tunisien Rashed Ghannouchi, qui bénéficie de l’asile politique, écrivait le 6 mai dernier sur son site à propos de l’écrivain Lakhdar Lafif, auteur de Repères pour la modernisation de l’enseignement religieux et accusé de « modernisme hostile à l’islam », que ce dernier a été atteint de paralysie juste après avoir terminé la rédaction de ce livre « impie ». S’il ne le condamne pas et s’il se définit comme un islamiste opposé à la violence, il n’en reste pas moins qu’il le désigne comme « ennemi » de Dieu ! En fait, Ghannouchi reprochait à l’intellectuel tunisien d’avoir lancé, avec le Jordanien Chaker Naboulsi et l’Irakien Djawad Hachem, un appel à juger les auteurs de fatwas incitant à la violence.

Certes, Londres a adopté en décembre 2001 une législation antiterroriste. Des mouvements comme al-Muhadjirun, d’Omar Bakri, ont été interdits. Abou Qutada a été arrêté en octobre 2002, Abou Hamza en mai 2004 après avoir été déchu de la citoyenneté britannique. Mais cela n’a nullement empêché Omar Bakri d’appeler sur son site les musulmans britanniques à rejoindre les rangs d’al Qaeda, comme l’a révélé le Times du 17 janvier dernier, estimant que l’ensemble du territoire britannique est devenu « dar el-harb » (terre de combat). Tant qu’ils s’en prenaient aux régimes arabes, qui sont loin d’être des modèles de démocratie, ces trois hommes, qui ont bénéficié d’une indulgence coupable des autorités britanniques durant près de vingt ans, ont eu tout le temps de tisser leur toile d’araignée islamiste et de faire des petits ! Encore plus radicaux, sans aucun doute !

http://www.humanite.presse.fr/journal/2005-07-08/2005-07-08-810141