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Le jeune Brésilien Jean-Charles de Menezes, tué par balles, a été victime d’une bavure...

Publie le dimanche 21 août 2005 par Open-Publishing

Des révélations accablantes pour la police britannique

Le jeune Brésilien Jean-Charles de Menezes, tué par balles, a été victime d’une bavure qui apparaît comme le pur produit du climat ultra-sécuritaire instillé par les autorités.

de Peter Avis, Londres

L’image du bon « bobby » de Londres, grand et doux, celui qui montre le chemin aux visiteurs et aide les enfants à traverser la rue, n’a jamais été aussi souillée. Car c’est un tout autre comportement policier qui a mené à la mort du jeune Brésilien, Jean-Charles de Menezes, abattu de sept balles dans la tête dans une rame du métro le 22 juillet et présenté selon une première version policière comme un kamikaze en fuite.

Contrairement à la thèse officielle, le jeune électricien d’origine brésilienne est arrivé tranquillement à la station de Stockwell, quartier populaire dans le sud de Londres, le lendemain des attentats ratés du 21 juillet (1). Il ne se doutait nullement qu’il était pisté après avoir quitté son appartement. En plus des extraits du rapport d’enquête de la police des polices, l’IPCC, mettant en cause la version officielle, les caméras de surveillance du métro montraient un homme vêtu en veste et jeans légers, marchant calmement, prenant un journal gratuit, payant son entrée et descendant normalement par l’escalier roulant.

Ces rapports contiennent des témoignages de policiers et de personnes ayant assisté à la scène qui contredisent les allégations initiales. On se souvient que le tableau peint par la police et par certains témoins le 22 juillet faisait état d’un suspect portant un épais manteau (qui aurait pu cacher une bombe), voire un sac à dos, qu’il fuyait la police, sautant par-dessus la barrière et se mettant à courir d’une façon suspecte. Le plus troublant est le témoignage de lde surveillance qui aurait maîtrisé le jeune homme dans un wagon. Celui-ci affirme avoir passé ses « bras autour de son torse », avant que le prisonnier soit abattu par les tireurs d’élite en civil, accréditant ainsi la thèse du terroriste en fuite. Ce jour-là, Ian Blair, le chef de la police de Londres, affirmait que la victime était directement liée aux attentats de la veille. Le même Ian Blair a tenté par la suite d’empêcher l’enquête indépendante concernant la mort du jeune homme, au motif qupourrait démoraliser le « CO19 », unité d’élite de la police britannique, seule habilitée à porter et à utiliser des armes à feu. De ce fait, les enquêteurs de l’IPCC n’ont pu se rendre sur les lieux de la bavure policière que trois jours après les faits. Du coup, la démission de Ian Blair est réclamée de partout. À commencer par l’avocate de la famille Menezes, Harriet Wistrich, qui a estimé que « sir Ian Blair aurait dû démissionner dès le début ». Selon elle, « les affirmations des policiers de haut rang et des ministres, y compris le premier ministre, selon lesquelles la mort de Jean-Charles a été un accident malheureux ayant eu lieu dans le contexte d’une politique entièrement légitime, justifiable, légale et nécessaire, s’avèrent n’être que des mensonges ».

Pour sa part, la famille du jeune Brésilien veut engager des poursuites pour meurtre. Quant à la politique de « tirer pour tuer », soutenue par le chef de la police de la capitale, elle est mise en cause publiquement. Pour Ann Cryer, députée travailliste et membre de la commission des Affaires intérieures à la Chambre des communes, « cette politique a été introduite sans débat public suffisant et il faudra bien la réviser ».

La mort de Jean-Charles de Menezes pose une série de questions sur les responsabilités policières. Les policiers ont-ils agi sur ordres émanant de leurs supérieurs, ou se trouvaient-ils dans un état de panique telle qu’ils ont abattu un homme confondu avec un terroriste sur le point de semer la mort dans le métro ? Maigre consolation cependant pour la famille de la victime, les autorités britanniques se proposent de lui - offrir 750 000 euros comme compensation pour la mort de leur fils, qui rêvait de - gagner assez d’argent en - Angleterre pour s’acheter une ferme au Brésil.

Dans son pays natal, la presse brésilienne tempête. « Les autorités britanniques doivent au Brésil mais aussi à l’opinion publique internationale une enquête profonde sur le meurtre d’un homme pacifique et innocent », résume jeudi le quotidien à grand tirage O Globo.

(1) Contrairement aux attentats du 7 juillet qui avaient fait 56 morts, le 21 juillet, seuls les détonateurs des minibombes déposées dans quatre stations de métro par quatre terroristes ont explosé sans faire de victimes. Les quatre terroristes avaient alors tous été arrêtés.

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