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Bagdad sur le Mississipi

Publie le lundi 5 septembre 2005 par Open-Publishing

de Badia Benjelloun

Le modèle culturel prévalant a fait dériver vers la sphère du honteux, voire hautement condamnable moralement , le souci de l’autre.

L’ouragan Katrina qui a pris un train de sénateur , une dizaine de jours , pour venir effondrer des digues dont il était notoire qu’elles méritaient réfection , a fait émerger parmi les flots de commentaires un petit débris à haute valeur idéologique ajoutée. Il a été signalé que le Congrès étasunien risquait de réduire fortement l’aide à l’état sioniste dans le parachèvement de la construction de la geôle de Gaza , maintenant toute dévouée à l’expérimentation des prisons géantes. La fédération des états d’Amérique du Nord va-t-elle éprouver une limitation budgétaire à poursuivre la destruction de l’Irak tout en construisant le mur de l’annexion en Palestine et en relevant les effets de l’inondation en Louisiane ? Ou bien continuera-t-elle à jouer aux riches en puisant dans l’épargne mondiale ? Les colons de Gaza pressentaient que les promesses de rétribution pour leur dégagement ne serait pas tenue. Ainsi se présente pour les corrompus au pouvoir une justification inattendue pour geler les versements des compensations.... D’ailleurs, les calculs qui évaluent à un prix exorbitant les villas les plus chères en bord de Méditerrannée ne tiennent pas compte des économies futures de leur gardiennage par l’armée d’occupation.

Le retard à l’apparition de Bush le deuxième devant le bon peuple ahuri de l’impuissance de l’hyperpuissance mondiale devant une catastrophe naturelle , dont les effets auraient dû être atténués par quelques mesures prises en amont par les responsables politiques , est à attribuer selon des observateurs qualifiés aux difficultés de plus en plus grandes de mobiliser le président par son staff pour venir faire des prestations télévisées. Ce président qui a manifesté le désir de laisser son nom associé à la Guerre ( celle pour le pétrole déguisée en guerre contre un concept , le terrorisme) sera celui qui aura consacré le plus de temps en vacances , éloigné de la Maison Blanche , dans son ranch texan. De plus en plus , ses maquilleurs et l’équipe qui le pousse devant les caméras ont la tâche qu’avaient les managers d’Elvis Presley à la fin de sa vie quand ils hésitaient au type de psychotrope à injecter avant de le lancer sous les feux de la rampe ( une substance stimulante, l’autre calmante ou les deux ?). Georges Diableyou lors de son allocution avait le regard vide et des mouvements anormaux de ses mandibules peuvent être symptomatiques d’un dosage mal ajusté.

En cela , il est un véritable pair de ses GIs en Irak. La plupart ont une conduite addictive vis à vis de substances hallucinogènes, dans des proportions sans commune mesure avec la campagne du Vietnam. Les soldats de l’occupation subissent des attaques pluriquotidiennes, leurs convois sont systématiquement soumis au feu de voitures piégées. Ce matin dès l’aube, une dizaine de voitures avec trente résistants à leur bord ont mitraillé le ministère de l’Intérieur au lance-roquette, au mortier et au fusil automatique. Deux autres attaques ont eu lieu à Hit et près de Bassorah selon les agences de presse internationales, laissant supposer que leur nombre véritable excède la cinquantaine habituelle. De très nombreuses petites villes à l’Ouest de Baghdad , entre Ramadi et Faloujah comme Rawa, Hit et Parwan sont maintenues en état de siège permanent , ce qui n’a guère empêché l’opération d’il y a une semaine qui a entraîné la mort de 87 soldats à Parwan et l’explosion d’une voiture piégée contre la base militaire étrangère à Hit ce matin.

Le renfort apporté depuis l’Irak contre la population prisonnière des eaux et de l’incompétence criminelle des gouvernants étasuniens confirme que la guerre contre les démunis est devenu le mode de gestion international normalisé des détresses sociales. En dépit du déluge qui va assurément tout emporter, la protection de la propriété privée est l’unique principe qui organise encore la polarité des secours . En France, l’insalubrité des taudis qui servent de logements aux plus précaires est connue des pouvoirs publics de longue date. Pour peu que des familles entières y brûlent , c’est le prétexte pour déloger et jeter à la rue les “sans-droits”, et restituer à la spéculation quelques mètres carrés de foncier dans un marché enfiévré par la montée du baril de l’or noir. Et ce sont encore les immigrés , les nouveaux sorciers , les presque juifs sous Vichy, les victimes donc qui sont désignés comme coupables .

L’ indignation ne suffira pas à arrêter la guerre civile , par armées étrangères interposées ou non, générée par le système de la mondialisation capitaliste. Le volant des sans-papiers est un exemple d’une nécessaire contention du volume de la masse salariale dans les pays occidentaux qui gardent quelque vestige des conquêtes sociales. Il serait temps de réfléchir hors centre, depuis le monde périphérique esclavagisé et assujetti aux dettes à la Citygoup et Chase Manhattan Bank et FMI , pour une inflexion vers un mode social qui appréciera l’épanouissement humain dans la solidarité sans le culte forcené de l’indidu et la croissance sans objet.