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Tortures...Peut-on croire M. Bush ? La réponse est non

Publie le vendredi 9 décembre 2005 par Open-Publishing
6 commentaires

de Ignacio Ramonet

"Nous ne torturons pas », a affirmé M. George W. Bush. C’était le 7 novembre dernier, à Panamá, à la fin d’une tournée de cinq jours en Amérique latine, région longtemps martyrisée par des régimes dictatoriaux - soutenus par Washington - qui pratiquaient massivement les "disparitions" de suspects et la torture. Le président des Etats-Unis répondait aux incriminations formulées par le quotidien Washington Post (1) contre les services de renseignement américains, accusés d’enlever clandestinement des personnes et de les supplicier hors des Etats-Unis dans des prisons secrètes appelées "sites noirs".

Peut-on croire M. Bush ? La réponse est non.

N’avait-il pas affirmé, pour envahir l’Irak, que le régime de M. Saddam Hussein avait des liens avec le réseau Al-Qaida ? Et que Bagdad possédait des « armes de destruction massive » ? Deux mensonges au nom desquels Washington déclencha une « guerre préventive » qui a coûté la vie à des dizaines de milliers de personnes (dont plus de deux mille militaires américains).

M. Bush n’est point fiable. En particulier sur la question de la torture. Elaborés par des institutions comme la Croix-Rouge internationale, Amnesty International ou Human Rights Watch (2), des rapports confirment que, depuis les attentats du 11-Septembre, les autorités américaines ne respectent plus, dans leur lutte contre le « terrorisme international (3) », les conventions de Genève sur le traitement dû aux détenus, ni la convention des Nations unies contre la torture.

En décidant, dès le lendemain du 11-Septembre, d’instaurer des tribunaux d’exception et de créer, hors du territoire des Etats-Unis - donc hors de toute juridiction américaine -, le bagne de Guantanamo pour y écrouer des « prisonniers du champ de bataille » (qualification différente de « prisonniers de guerre », ce qui évite le recours aux conventions de Genève), l’administration Bush a changé les règles du jeu.

La thèse néoconservatrice du juriste Alberto Gonzáles, ancien conseiller du président et désormais attorney général (ministre de la justice), est en quelque sorte celle-ci : l’Amérique ne doit pas se laisser « affaiblir » par son respect des droits humains. Dans deux rapports, remis en février et août 2002, M. Gonzáles a remodelé le droit relatif à la torture. Ce terme désigne maintenant, aux Etats-Unis, les seuls actes « affectant irrémédiablement l’intégrité physique des prisonniers ». En deçà de ce seuil, tout supplice est légal.

Comment s’étonner que, dès décembre 2002, dans le bagne de Bagram, en Afghanistan, l’utilisation de la torture par l’armée américaine soit devenue systématique ? Les suspects y sont « enchaînés dans leurs cellules et battus fréquemment », « jetés contre des murs ou des tables », reçoivent « des coups de pied à l’aine et dans les jambes », et on leur déverse « de l’eau dans la bouche jusqu’à ce qu’ils étouffent ». Plusieurs en sont morts (4).

Révélée par le New York Times (5), une enquête a confirmé la « routine » des tourments infligés par des militaires américains qui, le plus souvent, martyrisent les détenus sans même les interroger... L’enquête reconnaît que les techniques utilisées par les hommes du 519e bataillon de renseignement militaire à Bagram leur ont été enseignées à Guantanamo... Et que ce même 519e bataillon a ensuite été chargé de conduire les interrogatoires musclés dans la prison irakienne d’Abou Ghraib.

D’autres enquêtes ont indiqué que la Central Intelligence Agency (CIA) enlève des suspects à travers le monde - en Allemagne, en Italie, en Suède et ailleurs - pour les livrer à des « pays amis », comme l’Arabie saoudite, la Jordanie, l’Egypte, où ils peuvent être torturés sans limites. Plus récemment, des rapports ont montré que la CIA disposait d’un véritable réseau de prisons secrètes à travers le monde - qualifié par Amnesty International de « goulag de notre époque » -, dont certaines seraient situées dans des pays de l’Union européenne (Pologne ?) et d’Europe orientale (Roumanie ?).

Répugnant aux plans juridique et éthique, tout cela s’avère de surcroît désastreux pour le prestige moral des Américains dans le monde. Comme d’autres démocraties confrontées à la menace du terrorisme, les Etats-Unis voient la question de la torture devenir un dilemme politique central. Dans son débat avec le vice-président Richard Cheney, tenant d’une ligne dure, le sénateur républicain John McCain a rappelé que, parce qu’il est des sanctions qu’un gouvernement démocratique ne doit jamais infliger à un être humain, la grandeur de la démocratie réside dans sa capacité à s’interdire le recours à certaines mesures de force. Et la première, c’est la torture.

Par Ignacio Ramonet, Le Monde Diplomatique de Décembre 2005

Notes

(1) Washington Post, 2 novembre 2005.

(2) Lire « Au nom du droit, crimes et exactions en Afghanistan », extraits du rapport de Human Rights Watch, Le Monde diplomatique, avril 2004. Lire aussi Stephen Grey, « Les Etats-Unis inventent la délocalisation de la torture », Le Monde diplomatique, avril 2005.

(3) En fait le « terrorisme islamiste », car des terroristes internationaux ayant agi en faveur de Washington, comme M. Luis Posada Carriles, demeurent protégés par les autorités américaines, qui refusent leur extradition. Lire, dans Le Monde diplomatique, décembre 2005, l’article de Leonard Weinglass.

(4) Le Monde, 16 mars 2005.

(5) Cf. International Herald Tribune, 21 mai 2005.

http://www.aloufok.net/article.php3?id_article=2692

Messages

  • victimes de la torture us :

    Des Indiens des Amériques
    Des Esclaves de l’Amérique
    Des Chiliens
    Des Brésiliens
    Des Argentins
    Des Boliviens
    Des Uruguayens
    Des Paraguayens
    Des Venezueliens
    Des Péruviens
    Des Porto Ricains
    Des Colombiens
    Des Nicaraguayens
    Des Mexicains
    Des Salvadoriens
    Des Dominicains...des Africains...des Asiatiques...des Européens...des Arabes...des Océaniens...continuez vous mêmes la liste...

  • Je me souviens il y a quelques années avoir lu un article dans le magazine " Sciences et Avenir" qui titrait "Et si l’amérique devenait fasciste" ou quelque chose comme cela.
    Suivait une description de la parfaite panoplie du GI du 21ème siècle ou du policier, itou, avec tous les gadgets existants ou en devenir, pour contrôler ou réprimer les individus et les foules. Édifiant !

    Depuis au fil des infos , je repense très souvent à cet article !

    Et quand je considère que le pouvoir actuel américain est issu des milieux pétroliers et du lobby militaro industriel ainsi que du BTP (reconstruction après destroy, y a du fric à faire ? non ! ) Je me pose sérieusement la question : Est-ce que la réalité n’est pas en train de dépasser la prospective ? et cela ne me dit rien qui vaille !

    Et je ne fais effectivement aucune confiance à Bush et encore moins à la CIA !

    Si on ajoute les informations (que d’autre appelleront rumeurs !) contestant la version officielle du 11 septembre et ses incohérences. Nos journalistes des grand titres de la presse auraient même reçu d’une organisation de citoyens Américains, un DVD analysant les attentats du 11 sept qui conteste la version officielle et après l’avoir mis à la poubelle (l’ont ils visionnéau moins ?) envisageait de porter plainte (Sic) (Pour quels motifs ? lèse journaliste peut être ? )
    si on ajoute l’étrange insistance du régime américain à diaboliser l’Islamisme et tutti quanti du "choc des civilisations" alors que l’on enverrait des prisonniers ou kidnapés, se faire torturer entre autre en Arabie Saoudite.

    L’attitude de ce pouvoir serait alors le suivant "Écoutez ce que je dis mais ne regardez surtout pas ce que je fais ! "
    Que sont RÉELLEMENT devenus les États-Unis ??? Je me le demande ?

    René Montmorency

    • que sont devenus les étasuniens ?
      ce qu’ils ont toujours été , massacreurs, exploiteurs ,pilleurs etc...

      Des Indiens des Amériques
      Des Esclaves de l’Amérique
      Des Chiliens
      Des Brésiliens
      Des Argentins
      Des Boliviens
      Des Uruguayens
      Des Paraguayens
      Des Venezueliens
      Des Péruviens
      Des Porto Ricains
      Des Colombiens
      Des Nicaraguayens
      Des Mexicains
      Des Salvadoriens
      Des Dominicains...des Africains...des Asiatiques...des Européens...des Arabes...des Océaniens...continuez vous mêmes la liste...

  • VARSOVIE (Reuters) - La Pologne a abrité jusqu’à une date récente les deux principaux centres d’interrogatoires de la CIA en Europe, confirme l’organisation Human Rights Watch (HRW).

    "La Pologne était la base principale en Europe pour les interrogatoires de la CIA tandis que la Roumanie a plutôt joué un rôle dans le transfert des prisonniers", déclare Marc Garlasco, analyste en vue de l’ONG de défense des droits de l’homme.

    Cité par le journal polonais Gazeta Wyborcza, Garlasco précise que la CIA avait établi deux centres de détention en Pologne jusqu’à leur fermeture, peu après que le Washington Post ne révèle le mois dernier l’existence en Europe d’un réseau de "sites noirs" de l’agence.

    Garlasco, qui dit tenir ses informations de sources proches de la CIA et de documents obtenus par HRW, ajoute : "Nous avons des pistes, des preuves concrètes à vérifier, mais c’est prématuré de les dévoiler."

    Selon HRW, un quart de la centaine de terroristes présumés détenus par la CIA dans le monde l’ont été en Pologne.

    Les autorités polonaises ont démenti avec constance l’existence de ces sites sur son sol mais le Premier ministre Kazimierz Marcinkiewicz a promis cette semaine de coopérer pleinement à toute enquête à ce sujet.

    Les informations sur l’existence de "sites noirs" de la CIA en Europe de l’Est ont suscité une controverse telle de part et d’autre de l’Atlantique que Condoleezza Rice a dû marteler des démentis à toutes les étapes de sa tournée cette semaine sur le Vieux Continent.

    voir aussi

    http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=20862

  • Et si l’on a bien entendu ce que Condoleeza Rice disait de façon alambiquée et sous la pression de ses alliés européens, c’était : les citoyens des états-unis ne tortureront plus que ce soit aux USA ou ailleurs (déjà, nous ne sommes pas obligés de la croire) mais surtout rien n’empêchera que derrière chaque bourreau, Afghan, Irakien, Polonais, Roumain, etc, il y ait un conseiller spécial pour la torture ... état-unien !
    Ce gouvernement est décidément passé maître dans un art de manipuler les mots que même les Jésuites pourraient citer en exemple.