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Marche à Caracas contre la guerre et l’impérialisme

Publie le vendredi 27 janvier 2006 par Open-Publishing
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Forum social mondial. Le sommet altermondialiste s’est ouvert de façon très déterminée et combative dans les rues de la capitale vénézuélienne.

de Bernard Duraud, Caracas (Venezuela)

Le Forum social mondial de Caracas a commencé pour ses milliers de participants venus de l’étranger, par une longue épreuve, le transfert de l’aéroport à la capitale par la vieille route serpentant dans la montagne, et traversant une multitude de « barrios » improbables s’étalant à perte de vue. Trois heures, pas moins, pour effectuer un trajet d’une cinquantaine de kilomètres ! L’exercice est imposé en raison des défaillances du viaduc numéro un qui permet d’ordinaire de relier la métropole en une trentaine de minutes.

Le Venezuela, c’est aussi çà, un ouvrage d’art traduisant des décennies de laxisme en matière d’urbanisme. Et surtout les visiteurs qui en taxi, qui en bus poussifs, ont découvert les yeux écarquillés une prolifération de bidonvilles accrochés aux flancs des petites montagnes. « Un pays si riche avec tant de pauvreté, je ne me rendais pas compte », s’exclame étonné un jeune Chilien Marcelo Perez croisé peu après sa descente du bus.

Tout le pays a été appelé à se mobiliser, médecins, ambulanciers, taxis principalement, et des slogans publicitaires apparaissent régulièrement sur les radios et télévisions, celles, en tout cas peu nombreuses, qui ne font pas une campagne ouvertement contre Chávez, pour inciter les gens à collaborer à l’organisation de l’événement qui a démarré hier par une grande marche colorée contre la guerre et l’impérialisme. Créé par les mouvements sociaux, le FSM avait titillé l’imagination de la planète en proclamant qu’« un autre monde est possible ». La formule a fait florès, mais c’est sans doute la télévision nationale VTV qui, dans un bel élan d’humour, exprime le mieux sur sa chaîne les intentions du moment : « Un autre monde est nécessaire, continuer est possible ! »

Le choix de Caracas dans ce contexte offre bien des opportunités. Le gouvernement vénézuélien a mis le paquet, mettant à la disposition des milliers d’organisations présentes des infrastructures importantes, universités, écoles, musées, théâtres, parcs etc. Ce qui n’est pas négligeable pour recevoir plus de 120 000 personnes venues de tous les continents. Pendant ce temps, l’opposition à Chávez ne désarme pas. Laminée par les scrutins successifs qui ont conforté le président vénézuélien, elle a bien tenté dimanche, à l’avant-veille de l’ouverture officieuse du FSM, de faire son come-back en manifestant dans les rues de Caracas. Elle continue à présenter le Venezuela comme une dictature avec à sa tête un fou dangereux s’appuyant sur une fraude massive, bien que démentie par les faits, indiscutables, et les rapports des observateurs internationaux. On a ainsi pu entendre Henry Ramos Allup, secrétaire général de AD (Action démocratique, social-démocrate) « nier ce gouvernement » et s’engager avec des trémolos dans la voix qu’une fois l’opposition revenue au pouvoir, il n’y aurait ni prisonniers politiques ni entraves à la liberté d’expression. L’antienne relève de la paranoïa : malgré le coup d’État fomenté en 2002 par l’opposition, il n’y a aucun prisonnier politique au Venezuela, quant aux médias, ils sont pratiquement tous contrôlés... par elle.

Edgardo Lander, l’un des organisateurs du Forum de Caracas nous a dit que « tout était prêt pour que cet espace géant soit pluriel, divers, non gouvernemental, non partisan et démocratique ». La précision n’est pas anodine. La révolution bolivarienne chère à Hugo Chávez poursuit son cours tumultueux, et Chávez lui-même, à peine de retour de Bolivie, où il assisté à la prise de fonction de Evo Morales, surfe sur une vague de gauche déferlant en Amérique latine. Le défi est réel pour le FSM, jaloux de son indépendance, tant la voix du « presidente » paraît aujourd’hui prépondérante. Mais prompt à dénoncer ou à court-circuiter une bureaucratie inefficace, il inquiète ceux des militants qui, même à gauche comme cette jeune canadienne Geneva Guerin, observent d’un mauvais oeil l’arrivée massive de militaires au sommet des institutions de l’État. Mais, ajoute cette étudiante en histoire à la faculté de Montréal, qui en est à son cinquième voyage au Venezuela, « il faut bien reconnaître que des réalisations importantes sont visibles dans les "barrios", et même la démocratie participative fonctionne, les gens sont appelés à se prononcer sur les priorités de leur quotidien ».

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